Rathlands

Chapitre 36 : Chapitre 33 (Knivlann POV)

4388 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 17/08/2022 14:45

Knivlann aurait dû se sentir comme un lion en cage. Il aurait dû être débordant d’excitation et d’adrénaline à cet instant précis, prêt à bondir dans l’action, comme il l’avait toujours fait. Mais lorsqu’il vit les Rathiens et leurs alliés forcer l’entrée de la cité d’Etopsed depuis le sommet de l’Eridan, ce fut la crainte qui envahit son esprit.

« Astalian … ! »

Car ce n’était pas pour sa vie qu’il éprouvait une telle peur.

Il pria pour que Gnatos ne décèle rien. Il s’était efforcé, depuis le fiasco du sabotage d’Ignis, à rester de marbre lorsque son père adoptif lui demandait les raisons d’un échec aussi cuisant. Mais l’angoisse le tiraillait. Gnatos le connaissait comme son véritable enfant, et il lui semblait ne rien pouvoir lui cacher.

La marée de monstres alliés déferla dans la ville, plus impitoyable qu’une coulée de lave du Mont Ardent, ravageant tout sur son passage sans aucun discernement. L’assaut était terriblement efficace. L’ennemi serait aux portes de l’Eridan en un rien de temps.

Knivlann se força à jouer son « lui » habituel.

-        Dois-je intervenir, Père ? prononça-t-il, mimant une détermination farouche d’en découdre avec l’envahisseur.

Le Deviljho émit un grondement guttural.

-        Pas encore, Knivlann.

Le Seregios s’inquiéta de cette réponse inusuelle.

-        Pourquoi donc, Père ? Avez-vous un plan ? demanda-t-il, confrontant les pupilles rouge sang de celui qu’il appelait son père depuis trop longtemps déjà.

Un bref silence plana comme un vautour autour d’eux.

-        S’ils sont ici, c’est que Dhorn y est passé, marmonna-t-il, grave.

Knivlann ressentit une authentique colère froide le traverser.

-        Dhorn … Putain, c’était sûr, j’aurais dû m’en douter ! pesta-t-il, les paumes crispées, ses écailles hérissées.

« Dhorn … »

Dhorn était véritablement fort. Plus que lui-même ? Peut-être. Le Brachydios Critique n’usait pratiquement jamais de ses réels pouvoirs. C’était l’une des figures inébranlables du pays. Une brute déchaînée, mais servant le peuple avec férocité.

L’aimait-il ? Le respectait-il ? Sans doute les deux. Peut-être était-il le seul Burutien envers lequel il n’avait aucun ressentiment. N’étant lui-même pas au courant de la véritable origine du Seregios, il l’avait innocemment pris son aile comme l’authentique fils de Gnatos, un espoir à ses yeux, lorsque Svaerd n’avait cessé de le décevoir auparavant. Il l’avait élevé à ce rang de guerrier, à travers la sueur et le sang, sans la moindre pitié, pour tirer le meilleur de lui-même. Knivlann adorait les défis qu’il lui proposait. Plus ils semblaient impossibles, plus il éprouvait de satisfaction à prouver le contraire. Le Brachydios semblait apprécier cela tout autant que lui.

Le Seregios réalisa qu’il avait sans doute passé plus de temps à s’entraîner et à apprendre avec Dhorn qu’avec son « père ».

 Le perdre maintenant … Son cœur se serra à l’idée que cette terre qui l’avait vu grandir devenait de plus en plus hostile envers lui, maintenant qu’il savait la vérité. Une terre bâtie de mensonges …

« Que dois-je faire si je me retrouve face à Astalian ? »

L’attaque progressait rapidement vers eux.

-        Nous rentrons à l’intérieur, ordonna le Deviljho en tournant les talons.

Jamais il n’avait eu autant l’envie de disparaître.

« Que dois-je faire ?! »

A ce stade, il priait de toutes ses forces qu’un Rathien suffisamment fort parvienne à le tuer avant que l’occasion de confronter sa sœur ne se produise.

Mais en existait-il seulement un ?

Il devait servir Gnatos. Il lui avait menti, mais il l’avait élevé. Rien ne pouvait contredire l’affection, bien que particulière, qu’il éprouvait pour lui. Ironiquement, il lui devait la vie.

Pendant un instant, il pensa qu’Astalian, si elle avait autant d’estime pour lui, l’aurait cherché pendant tout ce temps. Il chassa cette idée malgré la véracité qu’elle représenta brièvement dans sa pensée. Sa mâchoire se crispa.

« Pourquoi … Pourquoi tout ça est-il arrivé … ! »

Il se figea droit, devant le trône de son père, prêt à le défendre de sa vie.

« C’est ce que je suis. Je ne peux pas le renier. »

… Alors pourquoi tout sonnait faux à présent dans sa tête ?

Les clameurs s’approchaient. Le Seregios rapprocha ses serres de sa lame. L’adrénaline issue d’un mélange de colère et de terreur grandissante hérissa ses écailles à leur maximum.

-        Sois prêt, mon fils, résonna la voix du chef Burutien.

Il était rare qu’il l’appelle ainsi.

Etait-ce de la confiance qu’il exprimait là ?

Knivlann comprit que ce qu’il était sur le point de se dérouler relevait d’une importance de très grande ampleur.

Il avait senti la peur dans les mots de Gnatos.

« Il compte sur moi ! Tous ses espoirs reposent sur moi … ! » réalisa-t-il, affolé.

Ça coulait de source, finalement. Les Rathiens ne voudront sans doute pas négocier avec lui. Ils venaient pour sa peau. Aussi fort fut-ce le Deviljho, il ne pouvait rien faire face à cette alliance.

« Si je meurs, ç’en est fini de lui. Mais que puis-je faire face à une armée ? »

L’injustice le cernait de toutes parts.

Personne ne sortirait indemne de cette bataille.

Gnatos gronda.

-        SVAERD ! Ramène-toi, poltron de malheur ! tonna-t-il soudainement.

Le misérable et chétif Glavenus se détacha de l’ombre d’un pilier derrière lequel il s’était dissimulé, tremblant comme une feuille.

-        Oui, Père ? gémit-il, les yeux humides.

Le regard du Deviljho pesa durement sur son fils biologique.

-        Rejoins Knivlann, pauvre lâche !

Recroquevillée, la wyverne brute se plaça aux côtés de Knivlann.

« Ce maudit couard ne me sera d’aucune aide. Espérons seulement qu’il divertira suffisamment longtemps l’ennemi … » soupira le Seregios, posant un regard similaire sur celui qui était censé être son frère.

-        Ne te dégonfle pas maintenant, mauviette, lui siffla-t-il.

Le Glavenus resta silencieux.

Les clameurs se rapprochèrent encore. Ce n’était qu’une question de seconde avant que la dernière porte ne soit forcée.

« Quel genre de monstre enfoncera la porte en premier ? La fera-t-il exploser, ou bien voler en éclats ? Créer un trou béant au travers ? » songea Knivlann, son cerveau tournant au maximum de ses capacités.

« Je dois glaner un maximum d’informations ! »

Il ferma les yeux, et ressentit les vibrations qui faisaient frémir le sol.

Beaucoup d’espèces différentes constituaient cette alliance. Parmi la cohue qu’il ne parvenait pas à isoler, il captait de brefs rythmes dansés de Mizutsune, des saccades de pas de Carapaceons, ainsi que les enjambées lentes de certains poids lourds, qu’il attribua à des Gravios. Naturellement, il ne pouvait déceler les pas trop légers des Skypiercers, d’autant plus que certains parvenaient à voler dans cet étroit couloir. Des pas lourds et espacés semblaient mener l’assaut. Ils étaient semblables à des pas Burutiens, mais ils se dirigeaient vers lui. Trois étaient sur le point de charger la porte.

Un éclair de génie le traversa.

« Bingo ! »

Knivlann enduisit trois de ses couteaux de somnifère, qu’il maintint entre les serres de son aile gauche.

Le Seregios réprima les tremblements qui commençaient à animer son corps.

« Les voilà ! »

La porte fut soudainement broyée dans une pluie d’échardes et de cendres, révélant une rangée de trois Uragaans qui fit irruption dans la pièce.

« Parfait ! »

Les trois couteaux fusèrent jusqu’à la gorge de leur victime, les plongeant quasi instantanément dans un profond sommeil. Les trois corps affaissés créèrent ainsi une barrière fort désavantageuse d’entrée de jeu pour l’alliance, car les trois soldats ne se réveilleraient pas avant trois bonnes heures.

Knivlann arrosa copieusement les soldats tentant d’escalader le mur de wyvernes de ses écailles tranchantes. Une poignée de cadavres rejoignit le mont en formation.

« Si je parviens à bloquer l’entrée avec ces corps, on gagnera beaucoup de temps ! »

Un laser d’Agnaktor créa une brèche à travers les cadavres supérieurs, laissant suffisamment de place pour que le léviathan s’y faufile.

Le Seregios siffla, évitant le second laser qui le visait, enduisant vivement un nouveau couteau, cette fois-ci de poisse, qu’il ficha dans l’œil de l’Agnaktor. La substance ne tarda pas à détonner, tordant le reptile de douleur, son œil devenu inutilisable. Profitant d’un nouvel angle mort, Knivlann fondit sur sa cible, tranchant sa gorge avec sa lame.

Aussitôt, il reprit de la distance, projetant une nouvelle dizaine d’écailles pour empêcher une riposte immédiate.

Les Rathiens tentaient de brûler le mont de cadavres, mais c’était peine perdue : rien ne pourrait réduire en cendres les Uragaans qui constituaient la majorité de l’obstacle.

-        Bien joué, Knivlann, grogna Gnatos qui s’était levé, crachant son énergie draconique à travers la brèche.

Knivlann ne répondit pas, mais remarqua que Svaerd avait disparu.

-        Cette foutue merde de Svaerd s’est barrée ! ragea-t-il.

-        En effet. Puisse-t-il crever dans un éboulement …

Il semblait que le Deviljho n’avait même plus le temps d’être furieux à propos de l’avorton. Il avait raison. Svaerd ne méritait plus la pitié de personne.

Une nouvelle rangée de l’alliance tenta de percer la retenue, mais elle fut repoussée par des silhouettes imposantes dotées de longues cornes.

« Des Monoblos ! »

Ce qu’il restait de l’armée avait fini par les rattraper.

« On peut les repousser ! » pensa Knivlann, bien qu’il sût que tout dépendait de l’effectif restant, chose qu’il ne pouvait qu’estimer très approximativement étant donnée la vue qu’il avait sur le couloir.

Un Nargacuga parvint à se glisser dans un nouvel interstice, sifflant de rage. Sa queue hérissée ne tarda pas à lancer ses propres dards, que Knivlann bloqua en étendant largement ses ailes. Aucun ne toucha Gnatos.

« Hmph ! »

La douleur irradia la palmure sensible de ses ailes, sans qu’il ne s’arrête de se battre pour autant. Il riposta prestement par une nuée d’écailles tranchantes, l’une d’elle se fichant dans la queue de la wyverne aux allures de panthère, qui rugit de douleur à son tour.

S’élançant d’un bond, il se rapprocha pour en finir au corps-à-corps. Evitant les lames alaires du Rathien, sa seconde dangereuse arme, il parvint à immobiliser la wyverne volante d’une serre sur le crâne, et l’autre sur sa queue. Saisissant sa lame dans sa gueule, il l’abattit de toute sa force sur la nuque du Nargacuga, la brisant sur le coup.

Bondissant à nouveau en arrière, il en profita pour déloger les dards de sa membrane alaire. Gnatos le couvrit pendant ce temps de quelques crachats draconiques, bien que l’armée fisse un bon travail pour retenir l’alliance, très peu de nouveaux soldats parvenant à se faufiler à travers le mont de corps.

Soudain, la carrure d’un Gravios apparut derrière le mont. Usant de sa force, il commença à déplacer l’obstacle. Un Gravios Onyx le rejoignit aussitôt.

« Merde ! Les autres doivent commencer à saturer ! » réalisa le Seregios dans une montée d’angoisse.

« Gnmpf. Gardons la tête froide. Il me suffit d’ajouter plus de poids au mont. »

Knivlann darda un nouveau couteau vers le Gravios Onyx, qui semblait moins expérimenté que l’autre. Hélas, celui-ci bloqua la lame avec son crâne, l’empêchant de se ficher dans la seule partie sensible de son corps : son aile.

Une salve fusa droit vers Gnatos.

Le Seregios se jeta en travers de sa trajectoire, encaissant les flammes.

« Gnn ! A ce rythme, je vais finir par vite atteindre mes limites ! »

Haletant, il se releva prestement, lançant une pluie d’écailles à travers la lunette du mur de corps. Une cohue de cris retentit instantanément.

Sifflant de rage, il s’avança jusqu’à la retenue pour jauger la situation. Une mâchoire de Tigrex tenta de le happer, mais il la transperça de sa lame. La wyverne volante mugit de douleur en se retirant.

Une cinquantaine de Burutiens parvenaient à tenir en respect une bonne partie des ennemis, mais un nombre croissant d’entre eux parvenaient jusqu’aux cadavres empilés, qu’ils tentaient de déplacer.

Il lui fallait disperser l’ensemble des soldats pour que les siens puissent se replacer correctement pour faire barrage à l’avancée de l’alliance.

Dégainant une bombe de soufre, il annonça son geste.

-        JAUNE !

Immédiatement, les Burutiens se reculèrent grandement. Profitant du temps de réaction légèrement plus long de l’alliance, Knivlann jeta aussitôt son projectile, dont le verre se brisa en de nombreux éclats filant dans toutes les directions, libérant un puissant nuage malodorant et aveuglant. La totalité des monstres déserta la zone, certains blessés par les éclats de verre.

Ses éclats n’étaient autre que l’une des plus brillantes inventions militaires de Knivlann. Ce verre, réalisé par lui-même, était l’un des plus résistants qu’il soit. Cependant, lorsqu’il se brisait, il formait de très nombreux et dangereux éclats. Ainsi, le contenant était aussi dangereux que son contenu. Le Seregios ne laissait rien au hasard lorsqu’il concevait ses armes.

Après s’être brièvement mis à couvert, il jeta un œil au couloir. Les Burutiens revenaient en force, contenant plus efficacement les Rathiens et leurs alliés comme prévu.

« On peut le faire ! »

Un Toridcless évita habilement les rangées Burutiennes, filant droit sur la barricade, Knivlann l’abattit aussitôt d’un couteau enduit de poisse, qui brisa un des os de son aile droite. Le Skypiercer s’écrasa au sol dans un hurlement strident.

« Tant que je parviens à neutraliser les débordements, on peut tenir ! »

Soudain, un Midogaron sortit des rangées pour venir à sa rencontre. Un lieutenant, s’il se souvenait bien.

-        Knivlann, Akantor soit loué ! s’écria-t-il, haletant. Nous avons perdu Dhorn, et le plus gros des troupes reste encore à venir annonça le canidé entre deux respirations saccadées. Je ne sais pas combien de temps nous pourrons tenir. Il faut évacuer le Président !

-        Impossible, grinça Knivlann. On est épiés de toutes parts depuis le ciel. Si nous quittons la pièce, ils le verront depuis les fenêtres, et ils seront aussitôt à nos trousses. On ne peut pas utiliser la voie secrète, c’est trop risqué ! Il faut qu’on tienne !

Le Midogaron lui rendit un regard vide empreint de résolution.

-        Nous ferons de notre mieux, mais sachez que l’issue de cette bataille est très incertaine.

-        Je ne faillirai pas, déclara le Seregios avec force. Assurez-vous qu’il en soit de même pour nos troupes.

-        Nous ferons de notre mieux, pour Sa Grande Gloire, conclut la bête à crocs en rejoignant sa ligne.

« On est dans la merde ! »

Les secondes se déroulaient aussi longuement que des minutes. A chaque instant, un ennemi menaçait de se dégager des forces Burutiennes, devenant une menace à éliminer de toute urgence. Knivlann parvenait à éliminer chaque échappé jusqu’ici, mais il voyait bien les rangées Burutiennes s’affaiblir, les soldats s’effondrant les uns après les autres.

-        Quelle est la situation, Knivlann ? gronda fortement le Deviljho.

-        Tendue, tendue comme jamais ! répondit le Seregios, neutralisant un Najarala qui était presque parvenu jusqu’à la barricade.

-        Peut-on créer d’autres obstacles pour les ralentir davantage ? demanda Gnatos.

Knivlann avisa rapidement le couloir : il était déjà considérablement fragilisé, et provoquer un effondrement volontaire risquait de faire s’écrouler une grande partie du bâtiment sans qu’ils ne puissent anticiper laquelle.

-        Faire s’écrouler le plafond relèverait du suicide. Je crains qu’on n’ait plus d’options à ce niveau … ! répondit-il, grinçant des dents.

Une pluie d’éclairs péridot envahit soudainement le couloir, suivie d’une féroce nuée d’argent fendant les rangées affaiblies. Une ligne entière de Monoblos s’affaissa.

« Non … ! Merde » s’affola Knivlann.

Astalian était dans la mêlée, très proche de franchir les rangs Burutiens.

« Ne fais pas ça ! »

Son sang se glaça dans ses veines.

De multiples torrents de flammes qu’il n’avait pas encore vu jaillirent des rangées éloignées, repoussant les Burutiens vers la barricade. Un jet d’eau fusa également à travers le couloir, manquant de passer à travers la lunette du mont de cadavres.

« De l’eau ! Il y a donc vraiment des Ecumiens parmi eux ! »

Un éclair vert perça la mêlée à nouveau. Beaucoup plus proche.

« Non ! Pas ça ! »

C’était inévitable, bien entendu. En tant que générale, il était sûr qu’elle mènerait l’assaut. Il était sûr qu’il soit contraint de la croiser.

Même si naïvement, tout au fond de lui, il espérait juste de toutes ses forces que cela n’arriverait pas.

-        Je crains qu’une percée soit en cours, Père ! Les lignes s’affaiblissent de secondes en secondes !

Un bref blanc marqué par le vacarme du combat s’installa.

-        Je crois en toi, Knivlann. Ne me déçois pas, dit finalement le Deviljho.

« Même dans un temps critique comme celui-là, il trouve encore bon de maintenir la pression » songea-t-il. « Est-il davantage sûr de gagner ? Ou bien masque-t-il sa peur ? »

Knivlann ne trouva pas le temps de répondre à cette question. Il devait faire fi de ses émotions pour accroître sa concentration au maximum.

Chose qui lui était impossible de faire, en sachant pertinemment que sa sœur allait le provoquer en duel d’une seconde à l’autre.

L’avant dernière rangée de Burutiens fut vaincue à son tour, permettant à l’ennemi d’avancer significativement. Soudain, les deux Gravios réapparurent, tirant leur laser conjointement sur le Seregios qui dût se mettre à couvert.

-        L’ennemi tente une percée ! annonça-t-il à son père.

Lorsqu’il put regarder à nouveau par la lunette, les wyvernes de pierre étaient déjà contre la barricade, la forçant de tout leur poids.

« Merde merde et merde ! »

Il ne pouvait rien faire face à la force brute de ces poids lourds. Leurs pattes et leur crâne invulnérable dégagèrent bientôt le passage sans que le Seregios ne puisse leur en empêcher.

Sitôt la voie dégagée, une lueur émeraude fondit sur lui depuis le fond du couloir, aveuglant tout ce qui l’entourait. Celle-ci le percuta de plein fouet, le projetant au sol quelques mètres plus loin, aux pieds de Gnatos.

Le Seregios se releva lentement, fortement impacté par l’électricité grésillant autour de lui.

Pour se retrouver face à Astalian.

Ayant chargé sans savoir ce qui se trouvait exactement au fond du couloir, elle était toute aussi incrédule que lui, bien qu’elle dût savoir aussi que ce moment arriverait.

Knivlann fixa sa sœur sans bouger. Sa serre était posée sur le pommeau de sa lame, incapable de se résoudre à la dégainer.

« Astalian … Alors c’est comme ça que tout doit se finir ? »

L’Astalos semblait plus résolue que lui. Il ne discernait que de fugaces éclats de regrets dans ses prunelles rouge.

-        Vous êtes cernés. Rendez-vous, gronda la générale, sa lame toujours entre ses pinces caudales, crépitant d’étincelles. C’est fini pour vous.

C’était vrai. La seule issue pour lui était à présent la mort, s’il ne tuait pas Astalian.

« Je ne veux pas ! »

« Ma vie n’a été qu’un mensonge ! Je ne veux pas mourir en servant un mensonge ! »

-        Je crains que ce ne soit pas possible, déclara-t-il avec un sourire triste, qui ne manqua pas d’ébranler sa sœur.

Il dégaina sa lame.

-        Aussi je préfère vous demander de vous rendre, car voyez-vous, c’est moi qui aie l’avantage, prôna-t-il, espérant que son bluff les désempare suffisamment pour les piéger.

Il pointa son épée sur elle et les deux Rathalos Azur qui venaient de pénétrer dans la pièce.

-        En garde, répondit l’Astalos, la tristesse omniprésente dans ses yeux, tandis que sa posture n’exprimait rien de tel.

Les écailles du Seregios s’hérissèrent à nouveau.

-        En garde, dit-il à son tour, une tristesse toute aussi grande rongeant son cœur, malgré son devoir le forçant à se battre.

Astalian s’élança vers lui, délivrant un coup horizontal chargé d’électricité. Knivlann l’évita prestement, car il ne pouvait pas parer sa lame tant qu’elle était chargée en électricité. Sa faiblesse à la foudre jouait contre lui : au moindre contact avec ces éclairs, il serait probablement condamné.

Il projeta une dizaine d’écailles vers elle, mais l’Astalos les dévia avec son glaive. Le Seregios se rua alors vers elle, assénant un coup de queue sur ses jambes fragiles, ce qui la fit vaciller. Profitant de l’ouverture, il parvint à placer sa lame sur la gorge de la générale Rathienne.

Sans pouvoir abattre le coup de grâce sur sa propre sœur.

Ses prunelles envahies par la peur plongées dans celle de sa sœur, partageant les mêmes sentiments.

Son instant de doute fut sévèrement puni par un éclair qui le repoussa vivement.

 Elle, ne doutait pas de ce qu’elle avait à faire. Ses yeux étaient les mêmes que les siens, plein de regrets et de honte, mais son corps se mouvait avec détermination et hargne : elle n’hésiterait sans doute pas à l’achever.

-        Qu’est-ce que tu branles, Knivlann ! rugit son père, ayant vu l’incongrue action.

Il eut de terribles sueurs en entendant la colère de Gnatos.

« Je ne peux pas faire ça ! Je ne peux pas tuer ma sœur !»

Même si elle se forçait à paraitre impitoyable, Knivlann savait qu’Astalian ne voulait pas le tuer.

-        Bats-toi, par Akantor !

Ç’en était trop. Ça ne pouvait plus durer. La situation était sans issue.

Discrètement, il enduisit trois nouveaux couteaux.

-        Désolé, Gnatos, siffla-t-il sans se retourner. C’est fini.

Il lança les couteaux à une vitesse fulgurante vers le plafond, dans lequel ils se fichèrent. Leur teinte jaune vira à l’orange.

-        POISSE ! hurlèrent les Rathalos azurs en attrapant leur générale, qu’ils tirèrent de toute leur force vers l’arrière.

Gnatos comprit trop tard.

-        KNIVLANN ! SALE TRAITRE !

Le Seregios se jeta par la fenêtre à l’instant même où la poisse détonna, faisant s’effondrer l’étage supérieur de l’Eridan.


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