Jardin de cendres

Chapitre 4 : Beau mec du lycée

1826 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour 17/04/2022 20:29

Bonjour à tous !


Comme promis me revoilà avec un nouveau chapitre en ce dimanche de Pâques. A votre avis que va-t-il se passe ensuite? N'hésitez pas à commenter ! Bonne lecture !



— On a tous été interviewés hier.

— C’est une bonne nouvelle, vous avez l’occasion de vous montrer sous un jour positif comme ça, non ?

— Oui enfin en théorie.

— Vous voulez me raconter ?


— Shoto, vous avez joué un rôle important dans l’attaque contre Shigaraki et son groupe, est-ce que vous pouvez nous en dire plus ?

La lumière l’éblouissait mais Shoto se souvint de ce que la professeur de communication avait dit. Essayer garder les yeux ouverts, sourire. Cette deuxième partie du conseil était plus difficile à appliquer, mais ça viendrait.

— J’ai suivi le plan que nous avions élaboré tous ensemble, donc je ne dirais pas que mon rôle était plus important que celui d’autres personnes. En général, on retient les alters les plus visibles comme les miens, mais rien n’aurait été possible sans une collaboration plus large et…

— C’était votre première attaque de cet ampleur n’est-ce pas ? Même si pour un élève de seconde vous avez déjà connu beaucoup d’interventions.

— Oui, je crois que cette année, nous sommes obligés de progresser plus vite en quelque sortes. J’espère que la suite de ma scolarité sera plus calme pour le bien de tous.

La journaliste fronça soudain les sourcils et invita d’un geste agacé son caméraman à interrompre l’enregistrement ce qu’il fit en levant les yeux au ciel.

— Bon, écoute. T’es le beau mec du lycée, tu as flambé à toi tout seul un bâtiment entier, ça t’ennuierait d’être un peu moins sérieux, je sais pas, moi ? Sourire ? Faire un trait d’humour ?

— Un trait ? Comment ça un trait ?


— C’est vraiment ce que vous avez répondu ?

— Oui… j’ai fait ma petite recherche après pour comprendre que c’est une façon de parler. Enfin bon… je me suis consolé avec l’idée qu’Izuku a fait pire que moi. Je ne sais pas pourquoi, il devient nerveux avec les journalistes, surtout qu’ils lui posent sans arrêt des questions sur All Might.

— Ils ont posé des questions sur votre père ?

— Oui, évidemment, mais j’ai juste répondu que j’étais en stage dans son agence. En fait, je vous raconte ça, parce que la journaliste a dit que j’étais « le beau mec du lycée ».

— Et ?

— Et j’ai pensé : « Moi le beau mec du lycée ? J’ai la moitié du visage couverte par une cicatrice dégoûtante. » Et puis j’ai pensé à la haine de soi et je n’arrivais pas à dormir. Je crois que je commence à comprendre ce que vous voulez dire. Il faut que je fasse attention, parce que je suis à moitié un vilain.

— Ce n’est pas ce que j’ai dit.

— Peu importe. Hier soir, je n’arrivais pas à dormir donc et je suis allé me passer un peu d’eau sur le visage.


Shoto se surprit à laisser ses doigts suivre la courbure de la marque sur son visage, ses bords irréguliers, à regarder son oeil, un peu plus petit que l’autre qui lui renvoyait son regard. Dans son cou, les marques de brûlures de son bras prenaient racine, alors il retira son haut pour mieux voir, puis défit les bandages qui couvraient sa peau depuis la dernière crise. Les blessures du côté gauche étaient encore fraîches et douloureuses et il songea que finalement il aurait mieux fait d’utiliser la glace, même hors de contrôle pour essayer de ne pas cuire. Peut-être demain, il pourrait monter la blessure à Recovry Gril mais l’idée de la laisser poser ses grosses lèvres sur sa plaie lui arracha un frisson. Le côté droit portait quelques blessures, des engelures anciennes et un peu mal soignées. Des souvenirs d’entraînements douloureux défilaient dans son esprit. Son père qui disait « Allez Shoto, ce n’est pas en pleurant que tu vas devenir le premier ! » Il aspergea son visage encore une fois, pour chasser les images qui venaient avec. La plupart du temps, il revoyait ses mains sur le parquet de leur maison, le beau bois massif sur lequel il vomissait. Au dessus de son nombril, une trace attira son attention. Elle était étrange, parce qu’elle était parfaitement au centre. Il se demanda soudain si le feu ou la glace en était responsable. Mais elle était nette, légèrement courbe. On aurait dit une blessure à l’arme blanche mais il n’en avait aucun souvenir. Sans qu’il su pourquoi, cette idée le paniqua alors il jaillit hors de sa chambre pour rejoindre les sanitaires communs plongés dans le noir à cette heure de la nuit. La lumière blanche des néons éclaira de nouveau toutes les traces de son torse et de ses bras. Elles semblaient apparaître sur lui comme des fourmis, il y en avait d’autres. Dans les communs, il y avait un grand miroir, dans lequel on peut se voir en entier. Sans réfléchir au fait que quelqu’un pourrait le surprendre, Shoto se déshabilla complètement, à la hâte, paniqué. Il y en avait sur ses jambes, il y avait dans son dos, sur ses fesses, même sur ses pieds. Petites, discrètes. De toutes les tailles, de toutes les formes, de toutes les textures. L’adolescent maîtrisa mal son souffle, par réflexe il frappa fort sa tête avec sa main. Il ne rêvait pas. Son corps était comme ça, tout marqué, tout cassé.

— Shoto, espèce de pervers !

Shoto se recomposa un visage et cacha ses parties intimes avant de se retourner vers Minoru qui venait de faire son entrée.

— Qu’est-ce que tu fais là ? demanda Shoto d’un ton plus sec qu’il ne l’aurait voulu.

— Je dormais pas et j’ai vu de la lumière. Et toi ? Qu’est-ce que tu fais là, tout nu ?

De manière objective il était bien en peine de répondre alors nerveusement il ramassa son bas de pyjama et l’enfila.

— Je retourne me coucher, déclara-t-il simplement.


— Je n’ai pas bien compris. Qu’est-ce que vous avez vu, dans le miroir ?

— Que je n’étais pas le beau mec du lycée du tout.

— C’est ça qui vous a poussé à vous regarder non ? Quelle impression ça vous a fait de vous voir en détail comme ça ?

— Je ne sais pas, après je suis allé courir.

— À 4h du matin ?

— Oui. Je sais que c’est interdit mais de toute façon je ne dormais pas.

— Et ça vous aidé à vous sentir mieux ?

— Non… j’ai vomi… j’ai vomi comme quand j’étais petit. Heureusement personne ne m’a vu.

— Vous vomissiez souvent enfant ?

— Oui, à cause de l’effort. C’est comme ça que je suis devenu plus fort plus vite.

— Et qu’est-ce que vous en pensez ?

Shoto détourne les yeux et ne réponds rien.

— Puisqu’on parle de votre corps et de votre visage… Je crois que je ne vous ai jamais demandé comment vous vous êtes fait cette marque sur le visage, Shoto. Est-ce que vous voulez-bien me le raconter ?

— C’est ma mère, elle a fait tomber la bouilloire sur moi par accident. Mon père l’a faite envoyer à l’hôpital ensuite.

— Pourquoi votre père l’a envoyé à l’hôpital si c’était un accident ?

— Je veux dire… elle l’a pas fait exprès, c’est la faute de mon père. Il lui faisait peur et elle était complètement déprimée.


Shoto avait sa petite main sur le chambranle de la porte, il écoutait sa mère parler à sa grand-mère au téléphone. Il entendit qu’elle pleurait et qu’elle ne voulait plus s’occuper de lui et de ses frères et soeur. Il entendit que « Surtout Shoto, il lui ressemble de plus en plus » Son regard de terreur, la bouilloire. Le petit cri qu’il n’a pas su étouffer. Les pas de son père dans le couloir. Sa mère qui s’agenouilla pour s’excuser, son père qui se mis en colère.


— À quoi vous avez pensé, juste-là ?

— Rien.

— Vous n’avez pas vu votre mère pendant combien de temps après cela ?

— Jusqu’à après le tournoi. J’ai raconté l’histoire de la bouilloire à Izuku, il s’en ai mêlé et j’ai promis à All Might que j’essayerais de régler mes problèmes de famille.

— Et comment était-ce de la revoir après tout ce temps ?

— C’était bien. Il était contente de me voir. Je lui ai demandé de me pardonner et elle a accepté.

— Vous pardonner ? Pourquoi ?

— Je ne faisais que pleurer dans ses bras quand j’étais petit, je ne l’aimais pas assez.

— Et elle, elle vous a demandé pardon ?

— Non et je ne vois pas pourquoi elle l’aurait fait. Je vous l’ai dit, c’est de la faute de mon père.

— Écoutez Shoto… je vais vous demander de considérer quelque chose, sans le rejeter immédiatement d’accord ? Tout à l’heure vous avez dit que vous vouliez vous voir entier, dans le miroir des communs non ? Mais vous ne m’avez pas dit ce que vous avez vu exactement. Est-ce qu’il est possible qu’à part cet épisode là en particulier, il y ait d’autres moments où votre mère ait pu vous faire du mal ?

Il croise les bras sur sa poitrine.

— Non. Je ne vois pas. Ma mère… ma mère me consolait quand mon père était trop dur avec moi. Elle me disait « Tu as de la chance toi, tu as un rêve, tu vas devenir un héros ».

— « Tu as de la chance toi »

— Oui et elle avait raison ! Elle, elle n’avait pas d’autre avenir avant que de croupir dans cette maison avec mon père à raser les murs. Oui par rapport à elle j’ai eu de la chance jusque-là. Je ne vois pas où vous voulez en venir.

— Ne vous inquiétez pas… nous aurons peut-être l’occasion d’en reparler la prochaine fois.

— Oui c’est l’heure pour moi de partir.

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