Jardin de cendres

Chapitre 13 : Kitsune

1747 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour 20/05/2022 10:48

Bonjour ! Désolée, j'ai oublié de poster mon chapitre hier soir comme prévu ! N'hésitez pas à commenter.


Bonne lecture !



— Alors, comment allez-vous cette semaine ? Un peu mieux ?

Shoto sourit.

— Oui un peu mieux. J’ai fait quelques progrès.

— Des progrès ?


Shoto avait vécu une expérience assez étrange en sortant du bureau de sa thérapeute la semaine précédente. Il avait été complètement enseveli sous la tristesse mais dès la porte fermée, tout cela avait disparut comme si ça n’avait jamais eu lieu. Il avait pris une grande inspiration et c’était tout ce qu’il avait fallut pour qu’il retrouve son calme. Il ne savait dire si c’était une bonne ou une mauvaise chose. Après tout, il venait de comprendre qu’il lui faudrait faire la paix avec ce qu’il ressentait d’une manière ou d’une autre et pas l’éviter éternellement. En même temps, l’éviter s’avérait quand-même fort pratique. Alors le soir, une fois seul dans sa chambre, Shoto fit ce qu’il avait l’habitude de faire quand il s’interrogeait sur quelque chose : quelques recherches sur internet. Évidement, il existait des tas de discours contradictoires à ce sujet. Mais il cherchait quelque chose de simple, quelque chose qu’il pourrait juste essayer de faire. Beaucoup d’articles suggéraient diverses méthodes de méditation. Il renonça d’abord pour se remettre à ses cours. Mais tous les soirs, il décidait de suivre les conseils de Mr Aizawa et de dormir assez. Tous les soirs, il échouait.

Il y avait tellement de choses qu’il savait faire, se battre, détruire des bâtiments, sauver des victimes de catastrophes, maîtriser de complexes notions de mathématiques, de droits, de communication. Mais dormir avant deux heures du matin semblait relever de l’impossible. Comme tous les soirs, il finit par se lever, pour aller silencieusement se mettre sur les marches devant le pavillon de l’internat.

Une détestable tension intérieure lui donnait envie d’aller courir ou de s’entraîner mais il résolu de ne pas le faire, pas cette nuit. Au lieu de cela, il ferma les yeux. En l’espace de quelques secondes, son père fonça sur lui des centaines de fois dans l’obscurité. Il rouvrit les paupières, le coeur battant. Il entendait sa voix « Allez Shoto, motive-toi ! » « Tu peux faire mieux que ça ! » « Arrête de pleurnicher ! » Il perdit la maîtrise de son souffle, comme s’il était en plein effort, alors qu’il était juste assis sur les marches. Il se força à se demander. Qu’est-ce qu’il ressentait ?

De la peur.

Shoto avait eu très peur de son père, beaucoup de fois, très souvent. Surtout ces derniers temps. Il avait beaucoup plus peur de son père que des vilains qu’il devait affronter parce que contre eux, il pouvait se défendre.

Le jeune héros cru qu’il allait se laisser submerger par la panique mais la voix d’All Might résonna à son tour dans sa tête. « C’est terminé Shoto, d’accord ? C’est terminé ». Cela l’apaisa quelque peu, il regarda les arbres bruisser autour de lui, écouta les animaux dans la nuit. Aucune voix tonitruante ne vint lui hurler de se remettre au travail. Alors il su qu’il pouvait le faire.

Il ferma les yeux à nouveau. Les images, les sons, les odeurs, les sensations défilèrent comme une nausée soudaine, des centaines de cris, des milliers, de coups, tellement de fatigue. Et sa mère, leurs rares étreintes. Ce jour où elle avait fait sa valise et où elle était partie, lui adressant un dernier regard apeuré. Natsu et Fuyumi qui jouaient au loin, sans lui. L’autel dressé en l’honneur de Toya, dépourvu de réponses. En toile de fond, le jardin se couvrait peu à peu de cendres. La voix d’All Might qui répétait « C’est terminé Shoto, d’accord ? » lui permis de traverser tout cela.


— Oui, c’est un très grand progrès Shoto. Mais vous n’êtes pas obligé de faire ça tout seul, je peux vous accompagner.

— Justement.


L’esprit de Shoto l’avait ramené une énième fois juste une seconde avant que sa mère ne le recouvre d’eau bouillante quand soudain un léger craquement se fit entendre. Shoto se releva immédiatement pour se retourner, son poing glacé près à l’assaut. Aika se tenait sur le perron, un brin effrayée. Il baissa sa garde, immédiatement.

— Excuse-moi, je t’ai réveillée ?

La jeune femme secoua la tête et ses cheveux s’agitèrent en tout sens.

— Toi non plus, tu ne dors pas beaucoup. On dirait qu’on à tous les trois des problèmes de sommeil.

Shoto voulu s’avancer vers elle, mais elle recula d’un pas.

— C’est bon, dit-il en baissant les yeux, je te laisse tranquille. Je ne voulais pas te faire peur. J’ai des problèmes en ce moment, alors je suis sur la défensive.

Il retourna s’asseoir à sa place, s’attendant à ce qu’elle s’éloigne. Un peu blessé, il repensa que pourtant, elle avait participé de bon coeur à leur bataille de farine avec Eri la semaine précédente. Il crut qu’elle allait s’éloigner mais au lieu de cela, elle vint s’asseoir tout près de lui, si près que leurs bras se pressaient l’un contre l’autre. Il la regarda, incapable de trouver quoi dire pour meubler son éternel silence. Elle l’observait elle aussi, droit dans les yeux, sans ciller, son visage à quelques centimètres du sien. Rapidement cela fut insupportable, alors il se détourna. Il sursauta lorsqu’il sentit sa main dans ses cheveux rouges.

— Ils ont repoussé ne t’en fais pas, commenta-t-il pour remplir le vide.

Ses petits doigts tombèrent sur une de ses épaules et elle posa sa tête sur l’autre. Il pouvait sentir ses cheveux duveteux contre sa joue et c’est à peine s’il pouvait respirer, comme si le simple geste menaçait de la faire fuir à nouveau. Ils restèrent comme ça, longtemps. Assez pour qu’il trouve le courage de poser sa main gauche, sa main de feu sur son épaule à son tour. Il la sentit soupirer et fermer les yeux. Il n’osa pas bouger plus de peur de la faire fuir à nouveau.

— J’aimerais tellement que tu puisses me raconter pourquoi tu ne dors pas, après tout, All Might a dit que je pourrais aider à prendre soin de toi et de Eri.

Très doucement, elle secoua la tête, tout contre son visage.

— Je sais… je sais bien que tu ne peux pas. Mais si je peux faire quoique ce soit pour t’aider… j’espère que tu réussiras à me le faire comprendre. Tu sais ce n’est pas que je ne veux pas, mais je ne suis pas Mirio ou Izuku je ne sais pas comment faire et je…

Shoto fut interrompu par son premier sanglot, déchirant dans la nuit. Maladroitement, il passa ses bras autour d’elle alors qu’elle enfouissait son visage dans son cou. Elle le trempa de larmes et renifla avec bruit. Il effleura son dos avec ses doigts malhabiles. Sa gorge à lui aussi se noua. Cela dura longtemps, cela fut pénible mais il était touché.

— Quoiqu’il te soit arrivé, articula-t-il la voix tremblante, quoiqu’ils t’aient fait, c’est terminé d’accord ? Je sais que tu peux comprendre ce que je dis, c’est terminé. Tu es libre, tu es entourée alors tout va bien aller.

Et à mesure qu’il lui disait ces mots, il se les répétait-lui même.


— Et alors, que s’est-il passé ?

Shoto haussa les épaules.

— Rien, elle s’est calmée, alors je l’ai ramené à sa chambre, dans son lit. J’ai mis la couverture sur elle et puis je suis retourné me coucher. J’ai tellement bien dormi que j’ai presque raté mon réveil. 

— À votre avis qu’est-ce qui vous a aidé le plus ?

— De repenser à la phrase de All Might « C’est terminé » et surtout, l’idée que je ne suis pas seul.

— C’est à dire ?

— Je sais que j’ai des amis à UA même s’ils ne me parlent pas en ce moment, je sais que mon frère, ma soeur et même ma mère sa manière, m’aiment. Mais jusque là, ça m’a toujours semblé un peu faux. Ou alors, j’ai toujours eu l’impression que pour que ça reste comme ça, il fallait que je sois calme, réfléchi, que je ne me trompe pas et que je ne craque pas.

— C’est votre père qui vous a présenté cette vision des choses, n’est-ce pas ?

— Oui, mais elle, elle a compris, elle a compris que je ne sache pas quoi faire, elle m’a fait confiance quand-même.

— Une expérience inédite pour vous oui.

— Et puis le matin après…

Shoto rit un peu.

— Oui ?

— Elle a laissé quelque chose sur mon bureau, un dessin qu’elle a fait. Je l’ai trouvé juste avant de partir en cours.

Il le sort de sa poche et le déplie. On y voit un petit renard au multiples queues qui court dans une luxuriante forêt. Il est entièrement blanc et les pointes de ses queues tirent progressivement vers le rouge. Il a un oeil bleu et un oeil vert et son petit air semble vouloir dire « Viens courir avec moi »

— Un kitsune… vous avez une idée de ce que ça signifie ?

— Aucune, mais je le regarde toujours avec moi depuis. Je me suis juré que si je pouvais faire quoique ce soit pour Aika, je le ferais.

— Vous avez déjà fait quelque chose pour Aika, Shoto. Et en plus on dirait que vous avez trouvé comment rassurer et consoler quelqu’un.



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