Jardin de cendres

Chapitre 14 : Je devrais y aller?

2164 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour 22/05/2022 16:03

Bonjour ! Comment allez-vous en ce dimanche?


Bonne lecture !


Shoto avait décidé qu’il était fatigué de rester seul au lycée. Une partie de lui s’inquiétait du fait que la proximité des autres pourrait déclencher de nouvelles crises. Depuis quelques semaines, il se réjouissait de n’avoir en tout cas rien enflammer d’autre.

Il parlait souvent à Aika le soir, souvent elle posait sa tête sur son épaule. Chaque fois, il était surpris de constater qu’aucune catastrophe se produisait. Il était donc temps d’essayer de retrouver ses amis. Plus le temps passait et plus il était reconnaissant envers tous ceux qui s’étaient inquiétés pour lui quand il était au plus mal et encore chez son père. Sans eux, il en serait toujours au même point. Ça n’avait plus de sens de rester fâché avec eux. Mais pour les retrouver, il allait falloir passer par un océan de honte.

Ce matin-là, il traversa la petite forêt qui séparait l’internat de la forêt la boule au ventre. Il était résolu, il fallait s’occuper de cela à un moment donné alors il avait pris sa décision, le premier qu’il croiserait, il demanderait à lui parler et si possible d’aller chercher les autres. Il espérait que ça serait Izuku ou Tsuyu, parce que Ochako, Momo et Ida l’impressionnaient davantage sans qu’il sut pourquoi.

La chance avait l’air de vouloir lui sourire, car il aperçu en premier les cheveux verts d’Izuku. Il était encore seul. Shoto pressa le pas pour le rattraper, puis hésita. Lui qui pensait avoir une volonté de fer, il la trouvait si fragile ces derniers temps. L’admiration qu’il avait pour son camarade de classe le poussa finalement à poser sa main sur son épaule. Izuku sursauta et le regarda avec un air surpris.

— Shoto ! Tu m’as fait peur !

Voilà qui commençait mal.

— Désolé… je… je voulais te parler à toi… et à tous les autres… qui étaient là… ce jour-là.

L’espace d’une seconde, il cru qu’Izuku allait s’en prendre à lui, lui reprocher son attitude mais ça ne lui ressemblait pas. Au lieu cela, cette même compassion se peignit sur son visage. À présent, il la supportait beaucoup mieux. Malgré tout, il garda les yeux baissés.

— Euh… D’accord, écoute je vais chercher les autres, on n’à qu’à se retrouver devant les marches.

Izuku partit devant en courant et Shoto se sentit parfaitement ridicule, à attendre tout seul dehors. Mais il lui semblait trop difficile de se répéter alors il s’en tint à ce qu’il avait décidé, résistant à l’envie de fuir. Ils arrivèrent tous ensemble un air inquiet sur le visage. Tsuyu voulu prendre la parole en premier.

— Je suis désolée Shoto, pour ce qu’on a fait… Nous n’aurions jamais dû…

— Je ne suis pas en colère contre vous tous, coupa Shoto, qui ne voulait pas les forcer à s’excuser davantage.

Ils échangèrent des regards surpris.

— J’ai eu le temps de réfléchir et de comprendre pourquoi vous l’avez fait. Grâce à vous tous, je ne suis plus chez mon père et je dois dire que je me sens beaucoup mieux depuis.

Shoto se força à relever les yeux, pour retrouver un semblant de dignité.

— Pourquoi tu nous évitais, tout ce temps alors ? demanda Ida avec bienveillance.

— Parce que j’avais honte, résuma Shoto, j’aurais mieux aimé que personne ne me voit jamais dans cette posture-là. Mais maintenant… je suis fatigué de rester seul dans mon coin… et de vous parler seulement pendant les cours.

Les yeux d’Izuku se mouillèrent de larmes et il se détourna légèrement. Ida, un peu plus courageux, posa une main sur son épaule.

— Tu n’as pas à avoir honte, Shoto. C’est ton père qui devait avoir honte.

— J’ai envie de jeter ma télé par la fenêtre, chaque fois que je le vois maintenant, ajouta Ochako.

Cette remarque blessa Shoto sans qu’il sut pourquoi.

— Mon père est un bon héros, se défendit-il à moitié, il est juste…

Il ne sut pas vraiment comment finir sa phrase alors il changea d’idée, il avait résolu de ne pas laisser tout cela prendre le dessus sur lui et l’éloigner de ceux qui lui voulaient du bien.

— Je suis désolé pour la manière dont je vous ai parlé ce jour-là, alors que vous étiez en train d’essayer de m’aider. Est-ce qu’on pourrait… ne plus reparler de toute cette histoire, si vous êtes d’accord ?

Tous hochèrent la tête. L’émotion coupait toujours visiblement la parole d’Izuku.

— D’accord, conclut Momo, mais si jamais tu veux en parler, tu sais qu’on est là pour toi, hein ? On doit se serrer les coudes, comme cette fois où tu m’as dit que tu avais voté pour moi, pour l’élection des délégués de classe, tu te souviens ?

Shoto devait bien admettre qu’il avait oublié cet échange. Mais ce jour-là, il avait trouvé le moyen de rendre à la jeune femme la confiance en elle qu’elle avait perdue. Y penser l’aida à chasser ce qui restait du sentiment de honte qui l’empoisonnait plus tôt dans la matinée.


— Vous avez tendance à vous souvenir surtout de vos échecs, peut-être.

— Oui, sans doute.

— C’est très courageux ce que vous avez fait, Shoto. C’est une bonne chose que vous soyez réconcilié avec vos amis.

— Oui, les journées sont beaucoup plus agréables depuis. Je réalise qu’ils me manquaient beaucoup. Ils m’ont demandé comment j’allais. J’ai répondu que je me sentais mieux mais que je dormais mal. Momo m’a donné une infusion spéciale pour le sommeil. Ça ne fait pas une grande différence mais ça m’a fait très plaisir. Et puis, la semaine prochaine, on doit aller au cinéma tous ensemble. C’est la première fois que je vais aller au cinéma.

— Vraiment ?

— Oui, vraiment. On va se retrouver Izuku, Momo, Ochako et moi. J’ai proposé que Aika et Eri viennent avec nous.

— Comment vous vous sentez à l’idée d’y aller ?

— Je suis content, mais j’ai un peu peur aussi.

— Peur ?

— Oui, je dois apprendre à me comporter dans ce genre de situations.

— Vous réfléchissez trop Shoto. Peut-être vous pouvez tout simplement dire à vos amis que c’est la première fois pour vous.

— Vous croyez ? Je ne sais pas si je peux faire ça.

— Oui ! Vous disiez que vous avez le sentiment de devoir vous cacher pour être apprécié. Peut-être que cette idée existe toujours en vous. Mais il y a fort à parier que quoiqu’il se passe, vos amis vous regarderont avec la bienveillance qui les caractérise, non ?

— Je sais que vous avez raison, mais c’est difficile.

— C’est une habitude à changer. Vous y arriverez avec le temps.

— Il y a autre chose dont je dois vous parler…

— Je vous écoute.

— Mon père… il m’a laissé un autre message… j’ai mis du temps à l’écouter.


Shoto avait attendu d’être dans le silence de sa chambre, d’avoir fini ses révisions, d’avoir tenté de dormir et d’avoir été réveillé à trois heures du matin par l’angoisse. Il aurait voulu juste pouvoir oublier son père, décider de ne plus jamais lui parler. Mais comme il l’avait dit, c’était son père. Indirectement, Fuyumi continuait de les pousser à la réconciliation à travers les messages de leur discussions et lorsqu’il rendait visite à sa mère. Shoto commençait à douter qu’une telle chose soit seulement possible, mais malgré tout, il n’était pas parvenu à supprimer le message sans l’écouter. Comme la dernière fois, il avait baissé le son au minimum. Il s’attendait à une nouvelle vague d’injure mais la voix de son père était si calme qu’il du malgré tout augmenter un peu le volume.

« Shoto… écoute je suis désolé pour la manière dont je t’ai parlé. Je suis allé à l’hôpital pour retrouver ta mère en présence des médecins. Ça m’a poussé à réfléchir à la manière dont je me suis comporté toutes ces années, et aussi, ces derniers temps avec toi. J’ai honte de ce dernier message que je t’ai laissé. Si c’est ton choix de rester à UA, alors je le respecterais. Si tu ne veux plus me parler, je respecterais cela aussi. Mais j’aimerais que tu me laisses encore une chance de me rattraper. Les médecins m’ont convaincu que faire comme si de rien n’était ne fonctionnerait pas pour rassembler notre famille, alors ta mère et moi on va se retrouver chez elle avec tes frères et soeurs et on va essayer de parler tous ensemble. J’espère que tu sais que tu es le bienvenu. Si tu as des questions, j’y répondrais. Si tu as des reproches à me faire, je les entendrais. J’espère… j’espère vraiment que tu viendras, quoique tu décides de faire ensuite. »

Il se surprit à l’écouter une deuxième fois, puis une troisième. Il voulu être sur qu’il n’avait pas rêvé l’émotion dans la voix de son père, juste un peu, sur la toute fin de sa dernière phrase. Puis il s’assit contre un mur, dans un coin, tête dans les genoux pour se forcer à respirer. Les battements de son coeur mirent une dizaine de minutes à se calmer, après quoi, il sortit prendre l’air, comme souvent. Dormir à présent risquait d’être difficile.

Aika ne tarda pas à le rejoindre. Elle ne dit et lui non plus, mais comme elle en avait pris l’habitude elle passa son bras autour de lui, et posa sa tête sur son épaule. Il devait bien admettre qu’il n’avait aucune idée de ce qu’il allait faire.


— Et comment cela vous a fait vous sentir ?

— C’est toujours pareil. Je pensais que ça me ferait un peu plaisir, mais en fait non.

— Pourquoi ?

— Déjà ça m’a mis en colère. La dernière fois il a dit « Tu n’es plus mon fils ».

— Oui n’est pas rien et je comprends que vous ne puissiez pas juste oublier ça, juste parce qu’il s’excuse à nouveau.

— Aussi…

Shoto hésite.

— Oui ? 

— Je me suis dit que je n’aurais jamais dû accepter d’aller à l’internat. J’aurais dû trouver les mots, pour le convaincre, j’aurais dû…insister encore. En partant de chez lui, j’ai encore fait du mal à toute la famille… et à lui aussi. Au fond, je crois qu’il essaye juste de faire de son mieux. Moi aussi je suis mal à l’aise et il y a des choses que je n’arrive pas à dire. En quoi nous sommes différents ?

— Je crois que vous et votre père êtes très différents, Shoto. Oui d’une certaine façon vous avez tous les deux des difficultés, mais vous faites de gros efforts pour essayer de les régler par vous même. J’ai l’impression que votre père attend des autres qu’ils règlent les siennes pour lui.

— Qu’est-ce que vous voulez dire ?

— Comme quand il décide de faire de vous le numéro un des héros. C’était son problème, pas le vôtre au départ, non ? Et là, je ne dis pas qu’il vous ments, mais il est très possible qu’il vous demande simplement de le débarrasser de son sentiment de culpabilité.

— Vous ne pensez pas que je devrais y aller ?

— Je n’ai pas dit cela. Je pense qu’il est important que vous vous souveniez que vous n’êtes pas obligé. Vous ne devez plus rien à personne maintenant que c’est UA qui vous prend en charge. Peut-être qu’en y allant vous obtiendrez au moins des réponses et peut-être que cette fois votre père sera capable d’entendre les choses. Il est aussi très possible que cela soit douloureux. C’est à vous de voir si le jeu en vaut la chandelle, pour vous d’abord. Pas pour votre père, ni votre soeur, ni votre mère, pour vous.

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