Jardin de cendres

Chapitre 16 : Pokemon

2109 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour 29/05/2022 11:10

Bonjour ! J'espère que vous avez bien profité de ce long week-end pour ceux qui ont fait le pont...


Voilà le chapitre du Dimanche.


Bonne lecture !



Shoto était rentré de l’hôpital le coeur très lourd. Encore et encore, il essayait d’imaginer Toya, figé près de l’étang et il ne comprenait pas pourquoi son esprit s’obstinait à lui faire mal avec cette image. Elle lui inspirait un mélange de peur et de tristesse. Il aurait aimé mieux connaître son frère. Il aurait aussi aimé être sûr de ne pas finir comme lui.

La lumière familière de l’internat dans le soir l’aida un peu. Il ne s’attendait pas non plus à ce que Eri se jette littéralement sur lui dès son arrivée. Il posa maladroitement ses mains sur ses épaules, mais ne la regarda pas.

— Pourquoi tu as l’air tout triste Shoto ? demanda la gamine. J’aime pas quand t’es triste ! Mirio dit qu’il faut toujours sourire !

— J’ai des problèmes de famille, lui répond-t-il très évasif. Étonnamment, elle sembla comprendre et se tut respectueusement pendant un petit moment.

Aika apparut dans le couloir et lui adressa un petit signe de la main. Shoto voulu lui sourire sans succès. Alors il regagna sa chambre pour y déposer ses affaires. Il ne s’attendait pas à ce que la jeune femme l’y suive. Elle s’assit sur le lit, en tailleur, elle le regarda faire. Lorsque son petit sac fut défait, Shoto se tourna vers elle. Elle semblait hésiter.

— Euh… tu veux… quelque chose ? demanda-t-il mal à l’aise.

Aika hocha la tête.

Shoto se prépara à un long jeu de devinettes. Avec ses doigts fins, elle dessina la forme d’un rectangle et elle le pointa du doigt. Il fallut qu’elle recommence plusieurs fois avant que Shoto ne comprenne qu’elle parlait du dessin qu’elle lui avait offert. Lentement, il le sortit de sa poche, un peu déçu qu’elle veuille le reprendre.

— Tiens, dit-il.

Mais Aika secoua la tête et lui tendit l’image à nouveau, puis elle détacha un de ses cheveux. Shoto s’étonna et se demanda ce qu’elle pouvait bien vouloir mettre en oeuvre. Eri apparut dans l’encadrement de la porte.

— Elle veut faire quelque chose de gentil pour toi, expliqua-t-elle très sérieusement, mais elle ne peut pas parler alors c’est difficile.

Aika fourra soudain son cheveux dans sa bouche et l’avala. Shoto la regarda, interloqué.

— Qu’est-ce que tu fais ? s’impatienta-t-il. Mais Aika arracha un autre de ses épais cheveux et le lui tendit. Shoto le prit, incertain sur la marche à suivre.

— Tu veux que je mange ton cheveux, c’est ça ?

Aika hocha la tête et il hésita. Mais Eri l’encouragea du regard. Il estima que quoique peu ragoutante, l’opération était sans risque. Il s’attendait à être répugné mais le cheveux avait en fait un goût sucré et fruité. De toute évidence cela avait un rapport avec l’alter d’Aika. La jeune femme applaudit silencieusement pour l’encourager. Puis elle souffla, très doucement.

Shoto le fit à son tour et rien ne se passa. Aika lui tendit la feuille et recommença. Alors, il souffla sur le papier. Celui-ci s’alluma d’une lumière bleutée, l’image dessinée se mit à bouger et le petit renard sembla lui faire signe comme pour dire « Bonjour ». Puis il s’élança droit vers lui. La seconde d’après, l’animal se tenait sur son épaule, sa petite tête contre sa joue. Shoto le prit dans ses mains très doucement et la créature ne se débattit pas. Elle le regardait avec des grands yeux pleins d’affection et de gentillesse, agitant doucement ses petites pâtes duveteuses.

— Pour…. t….. toi, articula Aika dans un tout petit filet de voix.

L’émotion coupa celle de Shoto. Il voulait dire merci, mais les mots ne sortaient pas de sa gorge. Heureusement, Eri le tira de ce mauvais pas.

— Haaaaaaan ! Mais il est trop mignon ! Je peux le caresser ? Je peux le caresser ?

Shoto s’assit parce qu’il ne tenait plus sur ses jambes et posa la petite bête près de lui. Eri s’avança aussitôt mais l’animal ne semblait pas craintif. Il agitait ses nombreuses queues à chaque caresse et se frottait contre les bras de la petite fille, comme un chat affectueux. Aika posa sa tête sur l’épaule de Shoto et passa son bras autour de lui.

Il dû faire un très gros effort pour pas fondre en larmes.

— Shoto, ça va ? demanda Eri à qui rien n’échappait. C’est gentil ce qu’elle a fait non ?

Il hocha la tête parce qu’il ne pouvait pas répondre. Aika comprenait. Très doucement elle attrapa ses épaules pour le pousser à poser sa tête sur ses genoux. Lentement, elle passa ses doigts dans ses cheveux bicolore. Eri s’assit et les regarda sans rien dire. Lorsqu’il fut allongé sur le lit, recroquevillé, le petit renard s’allongea sur son flanc. Il émit comme un son doux, grave, régulier en fermant ses petits yeux. Shoto sombra brusquement dans le sommeil.


— All Might a décidé d’appeler son alter Pokemon… Je ne connaissais pas ce dessin animé. Elle dessine et crée des créatures. Elle peut le faire pour elle ou pour les donner et alors elle doit faire manger un de ses cheveux à la personne à qui elle veut confier son animal. Ces créatures ont des capacités. Le kitsune me fait dormir. Elle a donné une chouette à Mr Aizawa qui prolonge son alter lorsqu’il cligne des yeux et une licorne qui aide Eri à stabiliser son alter aussi. Après tout ce temps, elle a fini par accepter de nous montrer sa capacité.

— Et qu’est-ce que vous en pensez ?

— Je trouve que c’est un alter magnifique.

— Je voulais dire, qu’est-ce que vous pensez du fait qu’elle vous l’ait montré à vous, en premier ?

— Je ne sais pas. C’est incompréhensible pour moi.

— Comment vous sentez-vous en ce moment en général ?

— Plutôt mieux. Au moins c’est derrière moi. Je ne suis plus obligé de voir mon père ni ma mère, même si je l’appelle de temps en temps.

— Je trouve que vous avez l’air fatigué à nouveau, Shoto et un peu triste. Est-ce qu’il y a autre chose que vous voulez me raconter aujourd’hui ?

— Non, pas vraiment… je fais quelques progrès en cours, la maîtrise de ma nouvelle capacité avance mais ça me demande beaucoup de concentration.


Shoto essayait de réviser dans le calme du soir, lorsque son téléphone s’éclaira. Son frère écrivait dans leur discussion commune.

« Fuyumi vient de me dire que tu avais posé des questions après que je sois parti, la dernière fois. »

L’étudiant posa son stylo et ferma son cahier, il se doutait que cette conversation risquait de durer un peu.

« Apparemment, tu as demandé à maman ce que papa lui avait fait exactement c’est ça ? Et pourquoi elle avait peur de toi ? »

Il alla s’installer le dos contre le mur sur son petit futon et hésita sur quoi répondre.

« Oui c’est vrai. » essaya-t-il.

Il se passa un peu de temps avant la réponse de Natsu, dans l’intervalle l’application précisa.

« Fuyumi a quitté la conversation »

« Pourquoi elle est partie ? » interrogea Shoto.

« Elle dit qu’elle en a marre que toi et moi on ressasse le passé. Je lui ai dit que j’allais répondre à ta question et elle n’a pas aimé ça. »

Le coeur de Shoto rata un battement. Tout à coup il n’était plus sûr de vouloir des réponses.

« Tu as le droit de savoir » poursuivit Natsu.

« Tu veux qu’on s’appelle ? » demanda l’apprenti héros.

« Je ne préfère pas, il y a des choses que j’aurais beaucoup de mal à dire à haute voix. »

« Je t’écoute » répondit Shoto.

La petite chambre lui semblait soudain surchauffée alors comme il était tard, il sortit discrètement. Une fois assis sur les marches et sûr qu’il était seul, il osa un regard vers l’écran.

« Je crois que la période où les choses étaient les plus difficiles à la maison, c’était un peu avant que tu naisses. »

 Nastu avait peut-être connu la maison quand l’ambiance était encore plus mauvaise. Cela expliquait sans doute pourquoi de tous les trois, il était celui qui était le plus en colère contre leur père.

« Papa voulait un autre enfant et maman refusait. Elle disait que Toya serait prochain numéro un des héros et que maintenant il pouvait la laisser tranquille. Ils se disputaient sans arrêt à cause de cela. »

L’idée que sa mère n’avait pas voulu d’un autre enfant ne plaisait pas à Shoto, mais il imaginait que la suite serait pire.

« Surtout le soir. »

Il n’en fallait guère plus pour comprendre.

« J’étais petit alors, à l’époque je ne savais pas exactement ce qu’il voulait faire, mais j’entendais souvent maman crier « arrête, arrête tu me brûles » et puis des bruits de chocs. Ça a duré des mois avant qu’elle ne soit enceinte de toi. »

Shoto posa son téléphone pour fixer la nuit. Malgré lui, il imaginait ce que Nastu avait pu entendre.

« Je crois que notre mère a joué le jeu pour Toya, moi et Fuyumi mais pour toi, elle a compris qu’elle n’avait le choix du tout. À mon avis, c’est pour ça qu’elle a plus de mal avec toi. »

Trois petit points apparurent, puis disparurent. Pris d’une nausée sourde et violente, Shoto s’allongea sur la terrasse pour se rafraîchir sur les grandes dalles blanches, une main sur le coeur. Se relever aurait été impossible. L’espace d’un instant, il regretta d’avoir posé toutes ces questions mais tellement de gestes et de regards faisaient sens maintenant. Se forcer à respirer l’aida un peu. Finalement, l’écran s’alluma à nouveau dans le silence de la nuit.

« Shoto dit quelque chose ! »

« Merci de m’avoir raconté » répondit-il « Mais je ne sais pas quoi te répondre. »

Il était d’ailleurs incapable de savoir quoi penser.

« Je ne veux pas que tu penses que maman ne t’aimais pas. Une fois enceinte de toi, elle était beaucoup plus heureuse, elle t’a chéri tant qu’elle a pu avant que papa ne commence à t’entraîner. Je crois que c’est surtout papa qu’elle ne… enfin tu vois. » reprit Natsu.

Il voyait très bien.

« Ne t’inquiète pas » répondit-il à son frère. « Va dormir et dit à Fuyumi qu’on a fini de ressasser le passé. »

« Tu es sûr ? Tu vas bien ? «

« Oui » mentit Shoto.

Il posa l’appareil sur son ventre et resta à fixer le ciel. Son esprit s’était soudain arrêté et le temps semblait ne plus passer.


— Vous êtes sur que vous n’avez rien d’autre à me dire aujourd’hui ?

— Oui, je suis sûr, à la semaine prochaine.


Tard dans la nuit, il se leva enfin, pour aller rejoindre son lit à pas lents. Il croisa Aika qui ne dormait pas et lui souffla juste.

— Laisse-moi s’il te plaît.

Une fois la porte de la chambre fermé, il souffla sur le dessin. Le petit animal sembla étonné de se trouver là, il pencha sa tête sur le côté ce qui fit tomber une de ses petites oreilles. Shoto s’allongea et le posa sur son ventre. Le son régulier retentit et l’apprenti héros cala son souffle dessus. Il sombra juste après.

Laisser un commentaire ?