My Lost Hero
Le bruit du chronomètre résonna dans la salle de classe. Les élèves se figèrent. Quelques-uns d'entre eux s'étaient endormis sur leur table, d'autres terminaient d'écrire à toute vitesse, d'autres encore attendaient que l'heure sonne. Le contrôle surprise de Aizawa les avait mis dans une panique totale, heureusement certains pensaient à réviser, mais pas tous. Comme souvent, le professeur mettra de mauvaises notes, et il soupira intérieurement en y songeant. Il émergea de son sac de couchage, encore mal réveillé, et récupéra les copies. Il pouvait voir, rien qu'à leur tête, qui avait échoué. Ce fut ensuite d'une voix blasée qu'il leur annonça une bonne journée, et il quitta la salle de classe. Il erra quelques minutes dans les couloirs, en se demandant s'il allait rester ou aller capturer des vilains. Ayant passé une bonne partie de la nuit à le faire, il se dit qu'il avait bien mérité une petit pause, même si la dite pause en question consistait à corriger des copies désastreuses. Il entra dans la salle des professeurs, s'attendant à ne pas voir grand monde, mais Yamada parlait avec sa voix suraiguë à la nouvelle prof des Secondes C. À peine l'eut-il aperçu qu'il fit demi-tour.
Il aurait pu rentrer chez lui et corriger les copies directement là-bas. Il savait pertinemment qu'il se mettra devant la télé et s'endormira avant même d'avoir lu une ligne. Il se résigna alors à se rendre dans la salle des archives, espérant ne pas avoir à supporter trop de bruit. Quand il y entra, l'odeur caractéristique des vieux documents l'envahit, mais pas celle du renfermé. Pour cause : la fenêtre était ouverte. Deuxième constatation que l'homme fit : des piles, parfois plus hautes que lui, s'étalaient partout dans la pièce. Il n'y avait aucun autre bruit, si bien qu'il ignorait même si Hitomi se trouvait ici. Il se fraya un passage jusqu'à l'une des tables de libre et commença à corriger ses copies. De temps en temps, il entendait des froissements de documents ou des bruits de pas. Alors qu'il se concentrait sur son travail, il se sentit propulsé en avant, il comprit qu'une pile était tombée sur lui. Heureusement, il ne s'agissait que de petits dossiers, mais il n'empêche qu'il se retrouva enseveli.
Quand Hitomi comprit qu'il y avait quelqu'un en dessous, elle jura et entreprit de sortir le professeur de là. Celui-ci lui apparut, plus blasé et agacé que blessé.
- Fais attention !
- Désolée. Je ne savais pas que vous étiez ici.
- Qu'est-ce que tu fiches ?
- Je ne peux pas faire de recherches, tout est mélangé. Donc je fais ce que Nezu m'a dit de faire : ranger.
- Le proviseur, corrigea Aizawa en attrapant la copie qui menaçait d'être confondu avec les archives.
- Si vous voulez.
Il la considéra d'un œil sévère, mais elle semblait distraite. Elle ramassa la pile et soupira bruyamment en voyant tous les dossiers éparpillés.
- Je les avais rangé selon la date. Je peux recommencer. Ne-, hum, le proviseur, savait très bien que ça me prendrait au moins une semaine. Or, je ne sais même pas si j'arriverai à trouver ce que je cherche à temps...
Elle ramassa un document en fronçant les sourcils et reforma la pile en silence. Le professeur la regarda faire avant de se tourner vers son travail, mais la voix de la jeune femme le tira de sa concentration.
- C'est quoi votre alter ?
- Pourquoi tu veux le savoir ?
- Vous l'avez utilisé sur moi, et j'ai senti comme un blocage, mais je n'ai pas compris ce que c'était. Je me demandais.
- Eh bien, continue de te demander.
Il eut le temps de corriger deux copies - désastreuses, comme il le pensait - quand une question lui vint. La jeune femme avait enfin fini de rassembler la pile et s'attaquait à une autre étagère.
- Tu n'as pas essayé de l'utiliser.
- Quoi ?
- Ton alter. Tu n'as pas essayé de l'utiliser, l'autre jour, alors que tu aurais pu te défendre. Pourquoi ?
Elle resta silencieuse quelques secondes, le temps de saisir un nouveau document, avant de reprendre la conversation.
- Le résultat aurait été le même, non ? Vous êtes un héros pro. Du moins, j'en ai eu l'impression, avec la vitesse à laquelle votre écharpe m'a immobilisé. C'est même étonnant que vous me posez la question, puisque vous vous doutez sans doute de la réponse. Du coup, vous pouvez sentir les alters des autres ou les connaître ?
Aizawa comprit rapidement qu'elle ne disait pas toute la vérité. Il y avait autre chose. Néanmoins, il décida de lui répondre.
- Je peux effacer l'alter des autres. Je le sens chez les personnes, je sais quand elles l'utilisent ou essaient de le faire.
- Comment ça marche, exactement ?
- Tu n'as pas un rangement à faire ?
Hitomi comprit le message et se concentra sur les étagères. Cependant, elle n'eut pas le temps de prendre une nouvelle pile que la porte s'ouvrit brusquement.
- SHOTAAAAA ! Oh, mais c'est le bazar ici !
Elle reconnut la voix du professeur blond qui l'accompagnait à chaque fois. Elle se décala doucement pour lui jeter un coup d'œil et il la vit.
- TOI ! Mais qu'est-ce que tu fiches ici ?
- M. Aizawa m'a emmené voir Nezu.
- M. Le proviseur, soupira le professeur principal.
- Wait... Pourquoi tu l'as emmené ? Elle n'était pas au commissariat ?
Il haussa les épaules pour seule réponse. Hizashi le considérait, incrédule. Depuis quand il cédait à une gamine impertinente ?
- D'ailleurs, tu as dit la dernière fois que les profs n'aimeraient pas te voir. Pourquoi, au juste ?
- Parce que je soupçonne qu'une taupe se trouve à Yuei. Les seuls en qui je peux avoir confiance, c'est vous, parce que vous n'étiez pas là avant.
- Une taupe ? Et puis quoi, encore ? On se connait tous depuis le lycée ! Tu perds ton temps.
Elle ouvrit la bouche pour protester, puis se contenta de hausser les épaules avant de retourner à son travail.
- Et pourquoi tu appelles Nezu "Nezu" ? Comment tu connais son nom ?
- Hizashi... commença Aizawa, mais la jeune femme l'interrompit.
- J'étais à Yuei, et mon père était ami avec lui. Il est même venu à la maison une fois, j'étais petite.
- C'était qui ton père, d'ailleurs ?
- Il s'appelait Gun Side. Il pouvait tirer des balles avec son bras et les entendre jusqu'à plus de 700 mètres.
- Jamais entendu parler.
- C'était un héros underground, même s'il voulait ressembler à All Might.
- Haha, rien que ça !
- Il disait toujours que tous les héros étaient passés par là avant de devenir célèbres.
- Il faisait ça pour être famous, ce n'est pas vraiment une bonne manière de faire. Regarde, avec Shota, on fait juste notre job. Je me rappelle encore quand on était élève ici, Present Mic et Eraser Head étaient inséparables, et jamais on aurait voulu devenir number 1 !
La tête de Hitomi apparut, et elle les fixa, incrédule.
- What ?
- Eraser Head ? C'est quoi ce nom ?
- C'est moi qui l'ai choisi, ne critique pas mes goûts !
- Tête de gomme ? Qui a envie de s'appeler Tête de gomme ?
- Bon, je rentre. On ne peut pas travailler en paix, ici, marmonna Aizawa en se levant.
- Quoi ? Et tu ne défends même pas ton nom ?
- Elle n'a pas tort. Ce nom est moche, mais comme je l'avais dit, je m'en fiche.
- Mais ! Et d'abord, toi qui es allée à Yuei, tu comptais t'appeler comment au juste ?
Le visage de Hitomi se ferma.
- Je voulais reprendre une partie du nom de mon père. Ça aurait donné Shadow Side.
Hizashi la fixa quelques secondes avant d'éclater de rire, pendant que Aizawa refermait la porte derrière lui.
- Shadow Side ? Tu devais être le genre de gamine déprimée et solitaire, le parfait stéréotype !
Elle le dévisagea, s'apprêta une nouvelle fois à parler, mais retourna à ses étagères. Hizashi partit retrouver Shota, toujours en riant face à ce nom qu'il trouvait terriblement émo et ridicule.