Une annonce de paternité
Chapitre XV
Ils roulaient déjà depuis un certain temps, suivant la côte en direction du sud, lorsque Sakura cessa enfin de trembler. Elle jeta un coup d'oeil à la dérobée à son compagnon. Sasuke se taisait, toute son attention concentrée sur la route qui serpentait au-dessus de l'océan. Son mari... Certes, le fait de signer un registre n'avait aucun rapport avec ce qu'était réellement un mariage. Et pourtant... perplexe, elle considéra l'alliance glissée à son doigt.
Sasuke s'en aperçut avec mauvaise conscience. Elle paraissait malheureuse, effrayée même. Il avait commis une bévue en achetant cet anneau. Une erreur parmi tant d'autres...
- Je suis désolé d'avoir acheté cette bague sans te prévenir, Sakura. Je passais près d'une bijouterie hier, et je suis entré sur un coup de tête. Ne te sens surtout pas obligée de la porter.
La jeune femme ne répondit pas tout de suite. D'un côté, elle répugnait à arborer ce symbole, mais paradoxalement, elle n'avait pas non plus la moindre envie de l'enlever !
- Je le garderai pendant la durée de notre séjour, déclara-t-elle. Cela nous rappellera que nous sommes en voyage de noces.
Sasuke alluma la radio, cherchant une station qui diffusait de la musique classique.
- Crois-tu vraiment que nous aurons besoin d'un pense-bête, Sakura ?
- C'est-à-dire que... Nous nous connaissons si peu, que cela paraît presque inimaginable !
- Tu regrettes, n'est-ce pas ?
Sakura se tourna vers la vitre, le regard rivé sur les falaises rocheuses qui semblaient défier l'océan de toute leur hauteur tourmentée.
- Je ne sais pas... C'est la cérémonie de tout à l'heure qui m'a un peu déroutée. Je ne m'attendais pas à ce que ce soit si... si sérieux ! Pourquoi ce bouquet, par exemple, Sasuke ?
Mal à l'aise, il s'agita sur son siège.
- C'était une idée de Shika. Et d'ailleurs pourquoi pas ? Tu portais bien une voile comme une véritable mariée !
- Ce n'était pas du tout mon intention ! s'exclama Sakura, sur la défensive. Miki m'a apporté la mantille de ma grand-mère. Comment aurais-je pu refuser de la mettre ?
- Oh, je ne te reproche rien, tu sais. Tu étais...
Sasuke laissa un instant sa phrase en suspens. Pouvait-il lui avouer que lorsqu'il s'était engouffré dans le grand hall de la mairie, sa grâce presque irréelle l'avait abasourdi, comme si une insaisissable figure onirique longtemps poursuivie en songe avait soudain pris corps devant lui ?
- ... tu étais très jolie, conclut-il d'une voix incertaine.
- Merci, murmura Sakura.
De toute évidence, la cérémonie ne l'avait pas laissé tout à fait indifférent, lui non plus !
- Te sentais-tu nerveux, Sasuke ?
- Nerveux ? Euh... pas vraiment, mentit-il avec aplomb. Et toi ?
- Eh bien... à dire vrai, j'étais un peu perturbée par la présence de ma mère, rien de plus.
- Enfin, n'en parlons plus. L'épreuve a pris fin.
Sasuke soupira, se gardant bien d'ajouter que l'obligation la plus agréable de leur contrat restait encore à remplir... Depuis la soirée passée chez lui, son désir d'elle était resté vivace, comme une flamme en veilleuse qu'un rien pouvait embraser. Sakura avait envahi le champ secret de ses pensées. Sur l'écran de sa mémoire, il projetait à l'infini ces quelques visions obsédantes : elle, abandonnée contre lui, ondulante comme une vague, emportée au gré d'une passion déferlante qui les avait unis... puis séparés.
Sakura se taisait, le front appuyé contre la vitre, abîmée dans la contemplation du paysage. Ils avaient atteint la péninsule d'une véritable oeuvre d'art de la nature, faite de sable, de rochers, et de ces cyprès si particuliers que l'on ne trouvait nulle part ailleurs. L'épreuve avait-elle réellement "" pris fin "", comme le prétendait Sasuke ? Le mariage proprement dit n'allait pas sans entraîner à sa suite son lot de traditions... dont la nuit de noces faisant partie... La jeune femme frissonna envahie par une inexplicable appréhension. En tout cas, il était hors de question de chercher à s'y soustraire ! N'était-ce pas la raison même qui l'avait poussée à accepter ce pacte ? Sakura avait beau se raisonner, cependant, sa gorge se nouait et une nausée insidieuse lui soulevait le coeur.
- Est-ce encore loin ? s'enquit-elle d'une voix atone.
Surpris, Sasuke détourna un instant les yeux de la route pour observer sa compagne. Elle se tenait contre la portière, toute recroquevillée dans son siège.
- Est-ce que tout va bien, Sakura ?
- O-oui. J'ai juste une sensation étrange...
C'était donc cela ! Sasuke réprima un sourire.
- Phénomène classique ! C'est juste un peu de nervosité combinée à ce long trajet en voiture. L'air frais te ferait du bien. Veux-tu que je m'arrête ici ? Nous arrivons.
Elle lui décocha un sourire chargé de gratitude, trop heureuse de se voir accorder ce répit inespéré.
- Oh oui, volontiers ! J'ai tellement envie de me promener au bord de l'océan !
Dès qu'ils furent desendus de voiture, elle renversa la nuque, humant avec délices les senteurs marines. Au-dessus d'eux, le ciel était pur de tout nuage et le vent de la baie l'enveloppa de son souffle rafraîchissant.
- Pendant que nous sommes ici, nous pourrions manger des calmars ! suggéra-t-elle en désignant un des stands, sur le quai.
- Eh bien... voilà la transformation la plus rapide que j'aie jamais vue !
Sasuke repoussa une longue mèche rose tombée sur le front de la jeune femme. De nouveau, ses yeux d'un émeraude profond étincelaient de joie de vivre.
- Es-tu bien certaine que ton estomac le supportera ?
- Mmm... bien sûr ! Je meurs de faim.
- C'est un mal auquel il ne sera pas difficile de trouver remède. Du moins, si cela ne te dérange pas que ton dîner de mariage soit servi dans un sachet en papier ! Pourquoi pas d'ailleurs ! Vivons les choses à notre façon !
La sensation de malaise qui avait accablé Sakura toute la journée s'évanouit comme par miracle. Ils mangèrent des encornets sur un banc en bois et partagèrent un café dans un gobelet. Au loin, on entendait les phoques et le son grave et obsédant de la corne de brume, annonçant l'arrivée imminente du brouillard. Une fois terminé leur modeste repas, Sasuke jeta les cartons vides dans une poubelle et se leva en lui offrant la main.
- Prête ?
- Oh non ! Enfin, je veux dire... j'aimerais d'abord aller au bout de la jetée pour me détendre les jambes.
- Mmm... il ne s'agirait pas chez toi du fameux "" trac "" qui précède la nuit de noces, par hasard !
La lueur amusée qui dansait dans ses yeux sombres n'échappa pas à Sakura.
- Quelle idée ! rétorqua-t-elle vivement. Je ne comprends même pas à quoi tu fais allusion.
Il glissa suggestivement la main autour de sa taille.
- Tu m'en vois ravi. Car rien ne vaut le plaisir de l'attente... sauf peut-être l'attente du plaisir !
Les joues embrasées, Sakura s'abstint de répondre. Etroitement enlacés, ils flanèrent à pas lents le long du quai. La jeune femme fronça le nez.
- Mmm... les authentiques effluves.
- Ou plus précisément celles des phoques que l'on aperçoit là-bas, ma chère !
Elle s'immobilisa pour s'accouder à la rambarde et scruta l'horizon. C'est à peine si elle réussit à discerner le groupe de chiens de mer installé sur un rocher. Elle leva la tête, suivant des yeux le vol d'une mouette et soudain, la jeune femme sentit derrière elle la pression du corps de Sasuke contre le sien. Sakura frémit. Le plaisir de l'attente, avait-il dit...
- Regarde ! Juste en dessous, n'est-ce pas une loutre de mer ? s'exclama-t-elle, saisissant le premier prétexte venu pour se dégager de son étreinte.
Sasuke se pencha à son tour.
- En effet, tu as raison, et elle a un bébé !
- Elle a un air de profonde béatitude, tu ne trouves pas ? Comme si rien d'autre ne comptait pour elle que de se laisser bercer par les vagues avec son enfant sur le ventre.
- Et pourquoi s'activerait-elle ? questionna Sasuke. Elle a à manger et probablement un abri pour la nuit. Que lui faudrait-il de plus ?
Sakura hocha la tête en silence. Tout paraissait soudain si simple... Elle tressaillit lorsque Sasuke se redressa, ses doigts refermés sur son épaule.
- Nous aussi nous avons un abri pour la nuit, Sakura. Es-tu prête, à présent ?
Elle se tourna vers lui et ses yeux assombris par le désir retinrent un instant les siens. Le sens de sa question était clair, sans ambiguïté possible... Sakura détourna la tête, buvant du regard l'immensité de cette plaine liquide, le moutonnement inlassable des vagues. Loin, à l'infini, la boule ardente du soleil couchant éclaboussait l'horizon de glorieuses traînées pourpres. Sasuke attendait sa réponse, la seule et unique réponse possible. Un imperceptible sourire étira ses lèvres.
- Oui, Sasuke, je suis prête...
Leur chambre d'hôtel avait été aménagée dans un style rustique rehaussé par quelques pièces d'une facture plus élégante quoique également d'une grande sobriété. Mais Sakura ne prêta aucune attention à la subtilité de ce décor. Elle ne voyait qu'une chose : le lit ! Un lit immense dont les quatre colonnes sculptées soutenaient un vaste dais en dentelle. A côté de ce véritable monument, le reste du mobilier se perdait dans une totale insignifiance. Et plus Sakura le contemplait, médusée, plus il semblait prendre des proportions démesurées !
- Eh bien ! Je ne suis pas mécontent d'être arrivé, commenta Sasuke en inspectant les lieux.
Et il n'y avait certainement rien à y redire. L'hôtel luxueux, construit dans le style d'une auberge ancienne, correspondait en tout point à la description qu'on lui en avait faite au téléphone. Il se frotta les mains.
- Est-ce qu'il te plaît, Sakura ?
Elle sursauta.
- Euh... c'est immense.
Immense ? Sasuke la considéra d'un oeil perplexe.
- Pour autant que je puisse en juger, marmonna-t-il, il n'est pas spécialement gigantesque...
- Ah, tu voulais dire l'hôtel ! le coupa-t-elle, rouge de confusion. La chambre est très jolie, en effet.
Sasuke renonça à lui demander quelle avait été sa première interprétation de sa question. De toute évidence, les pensées de la jeune femme étaient ailleurs. Mais il sentait d'instinct qu'il ne devait pas la pousser dans ses retranchements. Sasuke lui entoura les épaules et caressa son bras.
Sakura retint son souffle, submergée par un flot de panique. Pourquoi réagissait-elle de façon aussi excessive ? Elle n'était pourtant pas prude ! Et le soir ou ils avaient dîné chez Sasuke, elle se serait donné à lui sans hésiter. Alors pour quelle raison obscure ne parvenait-elle à surmonter la peur irraisonnée qui la tenaillait à cet instant ?
Du temps ! Il lui fallait gagner du temps, par n'importe quel moyen. Son regard affolé erra dans la pièce.
- Oh, Sasuke ! C'est extraordinaire, s'écria-t-elle en se dégageant. Nous avons même une cheminée ! Et si nous faisions un feu ?
Elle s'approcha de l'âtre, effleurant les carreaux bleus et blancs qui ornaient le contour. Sasuke fronça les sourcils.
- Un feu ? A cette heure-ci ? Pourquoi ne pas attendre demain ? Tu dois être fatiguée après cette longue journée.
- Moi ? Oh non, pas du tout !
Perplexe, il scruta son visage avec attention.
- Sakura, commença-t-il. Est-ce que tu es... ?
Il s'interrompit, averti par un sixième sens que le moment n'était pas encore venu de lui poser des questions trop intimes.
- Est-ce qu'un peu de champagne te ferait plaisir ? demanda-t-il en désignant la bouteille préparée dans un seau.
- Du champagne ! Tu en avais commandé ?
- Moi ? Oh non, je pense qu'il est prévu d'office dans une suite nuptiale.
- Une suite nuptiale, répéta-t-elle d'un air égaré. Euh... oui, j'en boirais volontiers un verre.
Retirant ses escarpins, la jeune femme s'installa dans un fauteuil, les jambes repliées sous elle afin d'occuper tout l'espace. Elle allait devoir résoudre son problème, et vite, songea-t-elle fébrilement. D'ou provenait cet étrange malaise ? Pas du mariage, en tout cas. La cérémonie avait été plus impressionnante que prévu, mais c'était terminé, à présent et Sakura n'avait pas l'impression d'avoir changé. Alors pourquoi n'éprouvait-elle pas le soulagement escompté à présent que le pire était derrière eux ?
Sasuke, pendant ce temps, avait réussi à déboucher le champagne. Il lui tendit une flûte remplie du pétillant liquide.
- A nous !
La jeune femme but une gorgée.
- Euh... à propos, Sasuke, de quel côté du lit dors-tu d'habitude ?
Il réprima à grand-peine un sourire en se perchant sur son accoudoir.
- Généralement au beau milieu ! Et toi ?
- Moi, c'est toujours à droite. Mais peut-être tout simplement parce que c'est là que se trouve la table de nuit. J'aime bien être près du téléphone, tu comprends et...
Sakura laissa sa phrase en suspens, consciente de la parfaite inanité de son propos.
- Je te laisse le choix, Sakura. De toute façon, cela fera une grande différence. Surtout après une nuit ou deux.
- Ah...
Sasuke finit son verre d'un trait et le reposa sur la table basse d'un geste déterminé.
- Cette journée n'a pas été de tout repos. Allons-nous coucher, maintenant.
Les yeux de la jeune femme s'écarquillèrent.
- Déjà ! Mais j'aimerais tellement boire encore un peu de champagne ! protesta-t-elle d'une voix étranglée.
Sasuke remplit son verre sans émettre de commentaires mais Sakura nota qu'il ne se resservait pas.
- A qui le tour dans la salle de bains ? s'enquit-il.
- Eh bien, puisque tu es très fatigué...
Le regard de Sasuke se voila.
- Je ne suis pas réellement "" fatigué "" et tu ne l'es pas non plus. Là n'est pas la question et nous le savons l'un et l'autre. Et maintenant, désires-tu faire ta toilette en premier ?
- Non, non. Je te laisse la place. Prends ton temps, j'ai encore mon champagne à finir.
- J'étais loin de me douter que tu aimais à ce point cette boisson, observa Sasuke, pince-sans-rire.
Sakura ne prit même pas la peine de répondre. Du coin de l'oeil, elle vit Sasuke ouvrir sa valise et revenir peu après avec une sortie de bain et un rasoir qu'il posa près d'elle sur la table. Pas de pyjama...
- La journée a été éprouvante, Sakura. Beaucoup plus que toi ou moi ne l'avons prévu.
Debout devant elle, Sasuke déboutonnait sa chemise avec nonchalance, sans cesser de lui parler d'un ton apaisant :
- Note bien que nous n'avons pas disposé de beaucoup de temps pour apprendre à nous connaître. Même s'il ne s'agit que d'un arrangement temporaire, il n'y a rien d'étonnant à ce que nous ressentions un certain trouble... pour ne pas dire appréhension.
Touchée par son attitude compréhensive, la jeune femme écoutait en silence, sans perdre un seul de ses gestes. Elle retint son souffle lorsqu'il retira son tee-shirt et le lança en boule en direction de sa valise. Sa poitrine était large, virile... Nu jusqu'à la taille, Sasuke se pencha vers elle sans même l'effleurer, une question informulée au fond de son regard noir. Sakura attendit, le coeur battant. A sa grande surprise, il se contenta de lui caresser doucement les cheveux. Puis il se retira dans la salle de bains.
Une fois seule, Sakura demeura immobile, les yeux rivés sur les bulles légères dans son verre qui montaient à vive allure avant d'éclater à la surface. Sasuke avait délibérément mis fin à leurs étreintes, l'autre soir, dans sa maison de la plage. Pour la première fois, un homme avait pris conscience de ce qui se passait en elle. Mieux même, il en avait tenu compte, alors que ses précédents partenaires ne s'étaient pas posé tant de questions. Qu'une femme soit consentante leur suffisait amplement...
D'eux-mêmes, les yeux de la jeune femme se portèrent sur le lit. Au fond, elle savait pertinemment ce que Sasuke attendait d'elle : que, cette nuit, elle se donne à lui de tout son être, entièrement et avec passion. Mais comment pourrait-elle accomplir ce soir ce qu'elle n'avait jamais réussi à vivre avec aucun homme ? Quant à feindre... à quoi bon ? Sasuke ne serait pas dupe.
Sakura exhala un long soupir. Ne venait-elle pas de mettre le doigt sur l'origine même de son angoisse ? Cette nuit de noces qui s'annonçait n'était ni plus ni moins qu'une épreuve. Un test auquel elle était certaine d'échouer...
Les jambes flageolantes, la jeune femme se leva pour s'asseoir sur le bord du matelas. Elle prit une profonde inspiration dans le vain espoir de chasser la tension qui comprimait sa gorge. Peut-être aurait-elle dû parler à Sasuke ? Lui dire que... Mais lui dire quoi, au juste ? Qu'elle aimait faire l'amour même si elle ne parvenait pas à se laisser aller tout à fait ? Qu'il ne devait pas trop attendre d'elle ?
D'un geste machinal, Sakura suivit du bout des doigts le motif compliqué du couvre-lit de dentelle. N'accordait-elle pas trop d'importance à des détails finalement secondaires ? Son seul but était de concevoir un enfant, après tout, et le reste lui était indifférent. Du moins... Sakura se leva d'un mouvement brusque et traversa la pièce pour aller ouvrir sa valise. Pourquoi nier l'indéniable ? Même s'il n'avait été question, au début, que d'un strict échange de services, ils n'en étaient plus là aujourd'hui. Sasuke occupait désormais une place bien à lui dans sa vie et dans ses pensées. Ainsi, ce qu'elle avait voulu éviter à tout prix avait eu lieu, malgré tout...
Sakura venait juste de repérer sa chemise de nuit en batiste au milieu d'une pile de vêtements, lorsque Sasuke sortit de la salle de bains. Elle nota avec un certain soulagement qu'il était décemment vêtu d'un peignoir en velours éponge d'un bleu profond. D'agréables effluves de savon et de lotion après-rasage parvinrent à ses narines. Mais lorsqu'il se rapprocha, elle identifia avec plaisir cette odeur bien particulière, citronnée et troublante, qui n'appartenait qu'à lui.
- Je suis désolé d'avoir été si long ! Mais j'ai un peu paressé sous la douche.
- Cela... cela ne m'a pas gênée, balbutia Sakura en se tournant vers sa valise.
- A ton tour, Sakura.
- Mon tour... dans la salle de bains ?
Désemparée, elle se tenait devant lui, sa trousse de toilette coincée sous le bras. Par un louable effort sur lui-même, Sasuke réussit à dominer son impatience.
- Vois-tu une autre destination possible ? s'enquit-il avec un sourire désabusé. Je t'attends.
- Entendu. Je... je me dépêche.
Longtemps après qu'elle se fut retirée, Sasuke continuait à scruter la porte close en secouant la tête.
- Incroyable, marmonna-t-il.
Plus aucun doute n'était permis. Pour une raison qu'il ne parvenait à déterminer, Sakura Haruno était terrorisée. Sakura Haruno ? Tu veux rire ! C'est à présent de Sakura Uchiwa qu'il s'agit... Sasuke jura à voix haute. Dans quelle aventure lourde de conséquences s'était-il lancé sans réfléchir ?
Les mains enfoncées dans les poches de son peignoir, il déambula de long en large dans la chambre, en proie à un doute croissant. Car était-elle réellement Sakura Uchiwa, en définitive ? Ce nom sur un papier avait une réalité strictement administrative et pourtant, elle allait devoir le porter pendant six mois. Face à cette confusion d'identité, comment s'étonner du trouble de la jeune femme ?
Peut-être était-ce pour cette raison qu'elle avait été si différente, l'autre soir, dans sa maison. Plus abandonnée, plus confiante... Des visions très précises s'imposèrent à l'esprit de Sasuke. Le riche éclat de ses cheveux illuminés par les feux du couchant, le grain de sa peau blanche, veloutée. Une bouffée de désir monta en lui comme la sève. Méthodiquement, il éteignit une à une toutes les lumières, ne laissant allumée qu'une minuscule lampe près du chevet. Puis il s'assit près de la cheminée pour attendre.
Seigneur, qu'elle était lente...