Eight Travelers - EN PAUSE

Chapitre 27 : Le Boudoir d'Obsidienne

5573 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 21/09/2019 18:58

Dès le premier coup d’œil, le groupe frémit. Le boudoir se tient, ferme, puissant, imposant.

Au premier coup d’œil, cela ressemble à un immense manoir banal, entouré de statues de femmes, sombre, et dont le toit est masqué par la tempête de neige.

Mais en regardant mieux, on remarque des vitraux épais et sombres, pour mieux cacher l’intérieur. Des rideaux rouges sang, des lumières pâles, le souffle du vent entre les briques... Des milliers de détails qui rendent ce lieu terrifiant.

Le bâtiment est oppressant. Beaucoup trop oppressant. Tressa et Alfyn tremblent légèrement, et même le fort Olberic n’est pas vraiment rassuré. Ils ont l’impression que le bâtiment pourrait les écraser, presque comme... S’il était en vie.

Arianna, elle, habituée à cet endroit, avance d’un pas et affirme :

-Malgré les sinistres rumeurs qui circulent constamment à son sujet, il reste voilé d’ombre et de mystère. On dit que des hommes influents venus des quatre coins du royaume sont impliqués dans la traite des femmes qui passent par ici...

Elle soupire profondément, et se tourne vers les autres.

-J’y vends mon corps depuis plusieurs années maintenant. Au fil des ans, j’ai vu de nombreuses filles disparaitre aussi soudainement qu’elles étaient arrivées...

Arianna commence à trembler légèrement. Primrose avance d’un pas, comme pour tenter de soutenir son amie. Elle ne trouve cependant rien à dire, Arianna continue alors :

-Oui, je suis une fille de petite vertu. Une prostituée de bas étage, vendu à cet établissement pour une somme qui n’achèterait pas un bon cheval. Qui sait quand je serai revendue, à nouveau pour une misère, et où je me retrouverai alors ? Quand j’y pense...

Elle commence même à pleurer légèrement.

-Ca... ça me fait peur...

Primrose reste silencieuse, et se jette dans les bras de son amie. Arianna pleure, et resserre ses bras autour de la danseuse.

-Pardonnez-moi, Mademoiselle Primrose. Je ne mérite pas votre pitié. Elle murmure

Arianna se sépare de Primrose, et montre d’un coup de tête une direction. Le groupe se tourne.

Une cavité s’ouvre devant eux. S’enfonçant dans la neige. Cependant, cette cavité semble remonter... Presque en suivant la montagne.

-Passez par cette grotte. Elle vous conduira à la chambre du maître. Si vous êtes discrète, personne ne remarquera votre venue. Mais je vous en supplie, Mademoiselle Primrose... Soyez prudente.

Primrose hoche la tête et sourit, déterminée.

-Sur ce, je dois vous laisser. Il est temps de me mettre au travail. Murmure Arianna

Primrose prend la main de son amie, et souffle :

-Bien sûr, Arianna. Merci pour tout ce que tu as fait. Fais attention à toi et... garde la foi.

Arianna part alors vers le Boudoir d’Obsidienne. Primrose se tourne vers les autres.

-« La foi sera ton bouclier ». Une bonne devise. Affirme Olberic

-... Tu le pense ? Souffle Primrose

-C’est une devise franche et honnête. Je lutterai pour défendre ses vertus. Si tu as besoin d’un épéiste pour défendre cette devise, n’hésite pas à demander. Nous sommes des compagnons de voyage maintenant, alors je suis à ton service.

-Je t’en suis très reconnaissante. T’avoir proche de moi me donne assez de courage. Mais lorsque tu brandi ton épée, pourquoi, j’ai l’impression que rien ne pourra m’arrêter.

Olberic hoche la tête.

-J’espère que je pourrais aussi compter sur ton aide, si un jour j’en ai besoin.

-Bien sûr. A la seconde ou tu as besoin de moi. Reprend Primrose

Primrose se tourne vers les autres. Ils sourient.

-Nous sommes tous près à t’aider, Primrose.

Primrose sourit, et souffle :

-Je vous remercie de tout cœur. Mais à présent... Allons-y.

Primrose part en avant, déterminée. Les autres se regardent une seconde.

-Elle n’a vraiment pas l’air d’aller bien... Souffle H’aanit

-Je vais aller la voir. Affirme Thérion

Il suit la danseuse. Le groupe aussi, mais reste en retrait. La danseuse reste silencieuse. Le voleur soupire, et lance :

-Pourquoi cet air aussi sérieux ?

-Sérieux ? Demande la danseuse

Elle se tourne vers Thérion plutôt brusquement.

-Tu me fais penser à un tigre qui s'apprête à bondir sur sa proie.

Primrose baisse légèrement la tête.

-Tu n'as peut être pas tort... Je suis en chasse depuis bien longtemps.

-Fais simplement attention à ce que la chasseuse ne devienne pas la proie.

La danseuse sourit.

-Ne t'inquiète pas pour moi. Je sais ce que je fais. Quand je me donne un but, je l'atteins toujours. Je ne suis pas du genre à oublier mes répliques lors de la scène finale.

-Ça, je te crois sur parole. Reprend Thérion

-Mais ta sollicitude me touche. Je ne pensais pas que tu te souciais de moi à ce point...

-Je sais, je suis tellement attentionné.

Thérion ricane et sourit, alors que le groupe avance dans la grotte. Primrose, toujours aussi déterminée, sourit. Impatiente déjà de trouver l’aile du corbeau.

 

Pendant ce temps, à l’intérieur du Boudoir d’Obsidienne...

 

-Entrez. Lance un homme depuis son trône, au fond d’une salle

La salle est grande. Très grande. Cependant, bien qu’elle semble spacieuse, elle est en réalité très oppressante. Il faut sombre. Seules quelques bougies éclairent la salle.

La salle est divisée en deux parties. La première, l’entrée, est rapidement remplacée par une deuxième, plus haute, accessible par un escalier au centre de la salle.

Juste en face de l’escalier, un immense siège, d’or et de velours bleu. Derrière, un portrait représentant un homme vêtu de noir. Au-dessus, un balcon rouge et doré. Dans les coins de la salle, des statues de marbres représentant des femmes.

Sur le fauteuil, ressemblant à un trône, se repose un homme. Il est fort, très fort, ou en tous cas son nombre ridicule de muscles semble le montrer. Il est vêtu de noir, et n’a qu’une manche sur le bras droit. Son autre bras est laissé à l’air libre, montrant un tatouage singulier. Il est blond, barbu, avec des yeux bruns, et un air sévère. Il est entouré de trois danseuses vêtues de vert et de bleu, qui minaudent à ses côtés.

Quelqu’un entre. Un Evêque de l’église de la Flamme, dans sa tunique blanche. Il semble complètement désespéré. 

-Maître Rufus... Je vous implore d’avoir pitié et de bien vouloir entendre ma requête... Il commence.

Il ferme les yeux, comme pour se replonger dans ses pensées.

-C’était ma fille unique. Depuis sa naissance, je me suis évertué à faire d’elle une femme distinguée. Chaque jour, j’ai brossé ses beaux cheveux, et je l’ai vêtue des étoffes les plus raffinées.

Il se met presque à pleurer.

-Elle... elle était tout pour moi. Mais un jour... un jour, elle a été souillée par le fils d’un petit seigneur de campagne. Elle n’a pas supportée de subir un tel déshonneur. Alors, accablée par la honte, elle s’est donné la mort la veille de son mariage.

Il pousse un immense soupir.

-Jamais plus je ne pourrai toucher la longue chevelure de ma fille...

Il serre les poings.

-Et quand je pense à ce maudit hobereau qui continue à vivre impunément dans le luxe après un crime aussi abject... j’en perds le sommeil.

Il lève la tête, regardant l’aile gauche droit dans les yeux.

-Maître Rufus... Je vous en supplie, prêtez moi main-forte. Permettez-moi de profiter de votre puissance, afin que je puisse me venger de cette odieuse maison.

Ledit Rufus se lève alors. Prenant un air incroyablement imposant.

-Eschard... On est amis, pas vrai ? Il demande

Eschard, l’évêque, recule.

-O-oui, bien sûr... Il répond

-Et les amis sont toujours prêts à se tendre la main en cas de besoin.

Rufus sourit.

-J’espère pouvoir compter sur vous pour me prêter main forte quand moi je serai dans le besoin. Vous êtes un évêque de l’Ordre de la Flamme sacrée. Vous avez beaucoup à m’offrir.

-Tout ce que vous voudrez, Maître Rufus. Absolument tout ! Supplie Eschard

-Dans ce cas, je me ferai un plaisir de vous aider. Vous devez vous sentir sacrément seul depuis que vous avez perdu votre fille adorée, Eschard. Je vais vous donner l’une des miennes.

Rufus semble réfléchir.

-Voyons... Qu’est-ce que vous diriez d’Arianna ? Elle est de l’âge de votre fille et d’un tempérament docile. Faites d’elle ce que vous voudrez. Je suis certain qu’elle vous plaira.

-Oh, mille mercis, Maître Rufus ! Lance Eschard. Votre générosité est véritablement sans limites...

L’évêque s’en va, étrangement souriant. Rufus s’assoit à nouveau sur son immense siège. Les trois femmes retournent à ses côtés.

-C’est toujours délicat, les affaires de dettes. Mais il faut savoir battre le fer tant qu’il est chaud.

Il se met alors à rire, s’assoit dans son trône, et souffle à une de danseuse :

-Vient donc par ici...

La danseuse s’approche, et Rufus s’amuse avec ses cheveux, attendant que le temps passe.

-La marque du corbeau sur votre bras gauche... Nous nous retrouvons enfin. Savez-vous depuis combien de temps j’attends ce jour ?

Rufus détourne le regard. Il peut alors contempler les visages de huit voyageurs et une panthère le fixer, dont une, une danseuse rouge, écumer de rage devant lui.

Il ne les a pas vus entrer. Ils les auraient renvoyés, sinon. Mais maintenant qu’ils sont là, il ne peut que leur répondre.

-Je ne crois pas qu’on se connaisse, ma belle. Il lance

Il jette un regard à la danseuse. Il sursaute soudainement.

-Non, attends... Ta tête me dit quelque chose. Je ne t’aurais pas vue danser dans une ville du désert ?

La danseuse s’avance.

-Revenez encore plus loin en arrière. Je suis Primrose Azelhart.

Primrose aborde un air déterminé. Dague à la main, et posée contre son cœur. Elle se concentre, pour ne pas sauter immédiatement sur Rufus.

-Primrose... Azelhart ? La petite demoiselle de la maison Azelhart ? Eh bien, tu en as fait, du chemin, dis-moi.

Rufus sourit, et se lève de son siège, pour s’approcher de Primrose.

-Vous vous rappelez maintenant ? Vous vous souvenez de moi ? De ma maison ? De mon père ? Insiste la danseuse

-Geoffrey Azelhart. Oui, je me souviens très bien de lui. Cet homme savait manier l’épée. Répond Rufus en souriant. Et il était loin d’être stupide. Ca n’a pas été facile de le tuer, mais on a fini par l’avoir.

Il ricane.

-Malgré toutes ses vertus, ton père s’était fait beaucoup trop d’ennemis. Et ça, ce n’est pas bon pour la santé, vois-tu.

-De quel crime l’accusiez-vous donc ? Qu’a-t-il bien pu faire pour mériter la mort ? S’écrie Primrose

Thérion et H’aanit avancent d’un pas, alors que Linde continue de gronder contre l’homme. Primrose porte dans sa voix une colère que les autres ne lui connaissaient pas.

-Il à découvert quelque chose qu’il n’était pas sensé savoir... Et mes amis et moi, on a dû le faire taire pour préserver ce secret. Reprend Rufus

Primrose prend une lourde inspiration.

-Je vois. Mais comme vous le savez certainement... Qui s’en prend à autrui s’expose à des représailles.

-Ah oui, vraiment ?

Primrose sort alors sa dague, et la tend vers Rufus.

-Je ne me suis jamais séparée de cette dague. Elle m’accompagne depuis ce jour maudit, tout comme les souvenirs de mon père. Il me disait toujours de rester fidèle à mes principes.

Elle durcit son regard.

-De croire en moi et de toujours trouver la force de faire ce qui doit être fait. Vous trois qui portez la marque du corbeau... je vous tuerai tous. C’est désormais mon seul credo.

Elle crache presque.

-C’est ma raison de vivre.

Elle avance d’un pas.

-Prépare-toi à mourir, corbeau !

-Hmph...

Rufus s’étire doucement.

-Tu n’es pas la première à plastronner comme ça devant moi. Et que ça te plaise ou non, tu ne seras pas la dernière. Je vais t’enterrer... comme tous ceux qui sont passés avant toi.

Il se redresse, bombant le torse, fier.

-Je suis Rufus, l’aile gauche du corbeau.

Les trois filles s’enfuient plus loin.

-Approche toi donc, ô héritière de la maison Azelhart. Je vais t’envoyer rejoindre ton père.

-Essayer un peu pour voir !

Rufus court vers Primrose. Primrose court vers Rufus.

Primrose tente un coup latéral. Rufus arrête son bras brusquement. Il la frappe alors violemment au visage.

Primrose recule d’un pas, prise par surprise.

-Primrose ! S’écrie H’aanit

H’aanit approche de la danseuse. Mais elle sent quelque chose derrière elle.

-Attention ! Lance Olberic

H’aanit se retourne. Une flèche arrive droit vers elle. Heureusement, Olberic se place devant elle. La protégeant de la flèche.

-Merci. Souffle H’aanit

-Regarde, d’autres arrivent... Répond Olberic

Des dizaines de gardes arrivent alors de toutes les directions, et foncent sur le groupe.

-Je crois que nous allons être occupés... Souffle la chasseuse

-GLACE !

H’aanit se tourne. Cyrus vient d’invoquer un glacier devant lui. Tressa se place derrière lui, pour l’aider à se recharger en magie.

La chasseuse prend son arc. Olberic attrape son épée.

-Je te couvre. Lance H’aanit

-Je te fais confiance. Répond Olberic

Olberic court vers les assassins. H’aanit tire plusieurs flèches, touchant quelques guerriers devant elle. Ils ne tombent cependant pas. H’aanit se fait protéger par Olberic et Linde, qui eux sont devant elle.

Primrose crache un peu de sang plus loin. Elle court à nouveau vers Rufus. Criant pour se donner de l’élan. Elle tente un coup droit.

Rufus tente de l’arrêter. Il place ses mains devant lui pour se préparer à l’arrêter. Mais Primrose esquive. Se baissant. Elle se relève brusquement pour lui infliger un coup latéral. Lui transperçant le torse de part en part.

Rufus ne crie pas. Il lui attrape brusquement les cheveux. La jette par terre. Elle se relève rapidement.

-J’ai attendu ça toute ma vie... Je ne me laisserais pas faire. Affirme Primrose

-Alors viens, Azelhart ! Montre-moi de quoi tu es capable ! Provoque Rufus

La danseuse court vers Rufus. Visant les jambes. Rufus esquive. Primrose s’apprête à prendre un coup au dos. Mais elle se retourne. Plantant sa dague dans la main de Rufus.

Il gémit. Primrose en profite. Plante sa dague dans le visage de Rufus.

L’aile gauche attrape le bras de Primrose. Il donne un coup de pied dans le dos de la danseuse. Elle gémit légèrement. Elle croit sentir ses os se briser.

Rufus attrape alors la gorge de Primrose. La soulève légèrement.

-Tu es bien faible... Il affirme

Primrose lui crache dessus. Il resserre sa prise. La dague Azelhart repose au sol.

Mais Primrose est une danseuse de l’ombre. Elle se concentre. De l’ombre apparait de ses mains.

Elle attrape le bras de Rufus. Serre. L’ombre se met à entourer le bras de Rufus. Le brulant, le pourrissant. Rufus est obligé de lâcher prise d’un pas. Primrose en profite.

Elle donne un coup de pied dans la main partie de Rufus. Surpris, Rufus se laisse prendre un coup de pied dans le visage. Le talon de Primrose le coupe. Le choc lui brise une dent.

Rufus lâche la danseuse. Elle s’empare de sa dague.

-Bien. Allons-y.

Derrière elle, la bataille fait rage. Des dizaines d’assassins arrivent les uns après les autres.

H’aanit peste. Ses flèches ne semblent pas servir. Elle range alors son arc, et s’empare de sa hache. Son épée et sa lance restent dans son dos.

Elle court vers ses adversaires. Elle remarque alors un homme arriver derrière Tressa.

-Tressa, derrière toi ! Crie H’aanit

La marchande se retourne. Un homme arrive, lance à la main. Il tente un coup vers le haut.

Tressa prépare un sort. Une lueur verte apparait entre ses doigts. Elle vise l’homme. Une lamelle de vent tranche le torse de l’homme qui tombe au sol.

-Je suis désolée...

-Tressa, reste derrière moi.

H’aanit se place devant la marchande.

-Contente-toi de me rendre de l’énergie.

-D’accord, je vais le faire. Affirme Tressa

Ophilia, pendant ce temps, invoque des colonnes de lumières devant elle. Alfyn est plus loin. Thérion derrière elle. Cependant, ses colonnes de lumières ne sont pas très efficaces...

-C’est pas vrai... Peste Ophilia

-Ophilia !

La prêtresse se retourne. Alfyn arrive derrière elle, et bloque un coup d’épéiste qui arrivait vers elle.

Ophilia répond immédiatement. Une colonne de lumière arrive sur l’homme. Ebloui, il laisse Alfyn le blesser de sa hache, le mettant à terre.

-Comment va Thérion ? Demande Ophilia

-Je ne l’ai pas vu. Reprend Alfyn

-Je suis là, moi ça va ! Lance Thérion

Thérion est aux prises avec deux assassins. Il esquive les coups. Les rends. Blessant légèrement, petit à petit, les deux assaillants.

Alfyn arrive vers lui. Il ne dit rien. Se contente d’abattre sa hache dans le dos d’un des assassins. Il ne le voyait pas, trop concentré sur Thérion.

Thérion termine alors le travail, plantant sa dague dans le cœur de l’assassin.

-Bien joué, Thérion ! Fait Alfyn

-Toi aussi. Reprenons le combat. Reprend Thérion

Les deux se sourient, et retournent se battre.

Rufus avance vers Primrose. Primrose l’arrête. Le recule d’un pas. D’une danse, elle lui envoie de l’ombre au visage.

L’aile gauche recule. Il tente un coup sur le visage de Primrose. Elle esquive. Un coup de dague arrive dans le torse de Rufus.

Rufus donne un coup de pied dans le ventre de Primrose. Elle ne faiblit pas. Elle recule d’un pas, et fait quelques pas de danse. Augmentant sa vitesse.

Elle fonce vers Rufus. Elle est si rapide qu’il ne la voit pas. Elle lui donne un coup dans le ventre. Le dos. Les jambes. Les bras. Sa dague est tachée de rouge. Une flaque de la même couleur apparait sur le sol.

Rufus finit par reculer. Une aura violette brille autour de lui.

-Félicitation, gamine. Tu m’as énervé. Lance Rufus

-Je me fiche de ça.

Une aura bleue brille immédiatement autour de la danseuse.

-Le combat est terminé. Elle affirme

Ils foncent chacun à la rencontre de l’autre. Dague et poing à la main. Rufus s’apprête à frapper le visage de Primrose, poing en avant.

Primrose dévie sa tête. Regarde Rufus droit dans les yeux. Rufus comprend, l’espace d’une seconde, qu’il est mort.

Primrose plante sa dague dans le cœur de Rufus. Il est solide. Ne meurt pas tout de suite. Primrose recule d’un pas. Tête baissée.

-Rufus est mort... le patron est mort ! Lance l’un des assassins

-Hein ? Fait H’aanit

Le groupe se retourne, et sourit en voyant Primrose. Les assassins s’enfuient plus loin, apeurés.

Rufus recule. Du sang coule de ses plaies. En abondance. Il tremble tellement que le fait qu’il tienne debout est un véritable miracle.

-Hé... Tu es plus coriace que je le pensais...

Il ricane un peu.

-Alors, quel gout ça a ? Après toutes ces années, la vengeance est aussi savoureuse que tu l’imaginais ?

Primrose reste sérieuse. Aucune émotion ne passe sur son visage.  

-Ce n’est que le début. Elle lance

Rufus sourit, crachant du sang.

-En effet... Tu as une longue route devant toi... Rentre chez toi, petite... Rentre à Noblecour... Tu y trouveras... la vérité que tu cherches...

Il lève le bras.

-Si tu as... la force... de l’affronter...

Il tombe au sol, baignant dans son sang, mort.

Arianna arrive en courant. Elle a sans doute entendu les cris, les combats... Et de toute manière, aucun garde n’a pu la couper dans sa route. Les voyageurs prennent une lourde inspiration.

-C’est la fin. Plus personne n’aura à souffrir dans ce lieu... Horrible. Murmure H’aanit

Les trois filles sont quant à elles horrifiées, terrées dans un coin, se serrant les uns contre les autres.

-Les pauvres... Il a dû les détruire. Affirme Olberic

Le guerrier part vers elles.

-N’ayez crainte, mesdemoiselles, vous êtes libres.

Elles ne répondent pas. Ophilia et Tressa vont les voir à leur tour. Primrose reste immobile devant le corps de l’aile gauche.

-Mademoiselle Primrose... Murmure Arianna

Primrose ferme les yeux.

-Encore deux. Il en reste deux...

Primrose range sa dague encore pleine de sang, et se dirige vers la sortie.

-H’aanit, allons chercher le remède chez Susanna. Ne tardons pas. Elle affirme

H’aanit la regarde en silence une seconde.

(Elle semble si froide... Elle en est presque... Terrifiante...) Pense la chasseuse

-Tu as raison Primrose. Finit par lancer H’aanit

Linde grogne vers l’homme, et part plus loin.

-Olberic, Ophilia, Tressa ? Lance Alfyn

-Venez avec nous, vous ne devriez pas rester dans un endroit pareil. Souffle la prêtresse

Les trois filles, toujours apeurées, finissent tout de même par hocher la tête.

-Nous vous suivons. Affirme Tressa

Primrose jette un ultime regard sur sa victime, et part plus loin, sans se retourner.

Elle a terminé sa mission ici.

Quelques instants plus tard

Il fait toujours aussi froid, et cette fois ci, Oren n’est pas là pour les amener en calèche.

Cependant, ils voient Sourdeneige au loin. Il ne leur suffit que de quelques minutes de marche. Ces quelques minutes sont tout de même lourdes. Primrose ne parle pas, marche droitement, et ne se retourne pas.

Linde essaie de lui « parler », en ronronnant à ses côtés, en se frottant contre ses jambes, mais la danseuse ne réagit pas.

Alfyn s’approche de Thérion.

-Primrose m’inquiète... Tu ne pourrais pas essayer de lui parler ?

-Pourquoi moi ? Je suis plus détestable ? Reprend le voleur

Alfyn soupire.

-Ce n’est pas le moment... Rester comme ça, c’est jamais très bon. Elle devrait nous parler, ou au moins répondre à Linde... Elle semble comme... En transe.

-Sans doute l’adrénaline qu’elle vient de ressentir.

Les deux hommes se retournent. Cyrus vient d’arriver dans la conversation.

-Elle a attendu toute sa vie pour vaincre cet homme. Et elle vient de le faire, après toutes les souffrances qu’elle a dû endurer... Je n’ai peut-être pas le droit de dire ça, mais si j’étais dans la même situation...

Un silence s’installe à nouveau. Et il dure jusqu’à ce que le groupe arrive à Sourdeneige. Le vent glacé s’arrête, mais étrangement, personne ne ressens de différence. L’ambiance lourde était bien omniprésente.

Primrose s’arrête une petite seconde, pour reprendre son souffle. Ophilia saisit alors l’occasion.

-Primrose... Est-ce que tout va bien ?

-... Navrée, Ophilia. Je suis juste légèrement perturbée.

-Je comprends, mais... peux-tu au moins essayer de nous parler ?

-Je te promets de faire un effort, Ophilia.

Elles sourient toutes les deux. Primrose se tourne vers Linde, et s’accroupit.

-Désolée, ma belle, je t’ai complètement ignorée.

Linde répond par un miaulement en ronronnant.

-Partons voir Susanna maintenant, d’accord ? Souffle Primrose

Linde hoche sa tête féline, et part plus loin, suivie de près par la danseuse. Le reste du groupe suit. H’aanit, contente de voir que Primrose semble aller mieux, va vers la danseuse, pour lancer une conversation.

-Primrose, je m'interrogeais au sujet de ta dague...

-C'est un cadeau de mon père. Rappelle Primrose

-Tu y tiens beaucoup. Je suis bien placée pour le savoir, étant donné...

H’aanit s’imposte un silence. Primrose se tourne vers elle, et remarque alors un pendentif autour du cou de la chasseuse. Une chaine tenant deux anneaux dorés.

-Ces deux anneaux que tu portes sur une chaîne ?

-Oui... C'est tout ce qu'il me reste de mes parents.

H’aanit soupire.

-Je n'ai aucun souvenir d'eux, car ils sont morts peu après ma naissance. Mais tente que je porte ces anneaux autour de mon cou, je sens qu'ils veillent sur moi.

La chasseuse se tourne vers Primrose.

-C'est étrange quand on y pense, que l'amour soit capable de transcender la mort... Souffle H’aanit

-En effet... Reprend Primrose

Un silence gênant s’installe. Finalement, elles sont sauvées par la demeure de Susanna, qui n’est qu’à quelques pas. H’aanit frappe à la porte.

-Susanna ? Nous avons terminé ce que nous devions faire. Affirme H’aanit

-H’aanit ! Rentrez, rentrez ! Lance une voix de l’intérieur

H’aanit ouvre immédiatement la porte, et rentre dans l’intérieur chaud de la demeure de Susanna. Ladite sorcière se tourne vers eux.

-Vous faites bien de revenir !

Elle prend une fiole plutôt grosse, et avant même que H’aanit ne puisse lui dire quelque chose, Susanna lance :

-Et voilà. Cette décoction devrait faire l’affaire.

Susanna tend le produit à H’aanit.

-Tâche de l’avaler d’une traite dès que tu apercevras Œil-rouge.

-Alors c’est le Baume des Saints... Souffle H’aanit

Susanna hoche la tête.

-Merci. Souffle la chasseuse

La sorcière secoue la tête.

-Il est encore trop tôt pour me remercier. Attends d’avoir ramené Z’aanta parmi nous.

-Très bien. Sur ce...

H’aanit se penche légèrement.

-Je vous remercie. Mais nous ferions mieux de ne pas tarder. Je dois encore traquer la bête.

H’aanit n’attend pas de réponse, et sort de la demeure de Susanna.

-Merci de votre hospitalité, Susanna. Souffle Cyrus

-Ce n’est rien, ce n’est rien, mais partez donc rattraper H’aanit ! Lance Susanna

Cyrus sourit, et souffle :

-Très bien. Je vous remercie une dernière fois, au revoir.

Le groupe sort de la demeure de Susanna. H’aanit est juste devant, patiente. Elle sourit aux autres, et commence à avancer.

-H’aanit... Commence Alfyn. Est-ce que je pourrais t’emprunter le Baume des Saints ?

-Bien sûr, je n’y vois pas de problème.

H’aanit tend la fiole à l’apothicaire, qui se dépêche de la regarder.

-Wow... Mince. Souffle Alfyn

La chasseuse se tourne vers lui.

-Qu’est-ce qu’il y a, Alfyn ?

-Oh, rien. J’admirais juste la composition de cette potion. Cette vieille femme sait comment les broyer, c’est sûr.

-Comment peux-tu juger une potion sur le fait qu’elle soit bien ou pas ?

-Oh, c’est facile. C’est juste ici.

Alfyn pose son doigt sur le torse de H’aanit, au-dessus de son cœur.

-Pourquoi est-ce que tu pointes mon torse ? Demande la chasseuse, confuse

-Parce que je te réponds. Reprend Alfyn. La réponse est juste ici. T’as compris ? Un bon médicament a un cœur et une âme. Le cœur et l’âme de celui qui l’a fait – et cette vieille femme possède les deux.

-... Je vois. Mais tu aurais pu le dire sans me toucher. Souffle H’aanit

-Vous êtes H’aanit ?

La chasseuse se retourne. Un chevalier de la Chapelle Ardente arrive derrière elle.

-Oui. Et vous, l’un des chevaliers de la Chapelle ardente. Souffle H’aanit

-Pour vous servir. Affirme le chevalier. J’apporte un message de la part de dame Eliza. C’est à propos d’Œil-rouge.

H’aanit hausse un sourcil.

-Elle l’a trouvé ?

-Oui. Près de la ville de Marsalim, dans le désert. Elle vous y attend. Affirme le chevalier

H’aanit serre les poings, déterminée.

-Je vais la rejoindre au plus vite. Merci.

-Si vous voulez bien m’excusez, Mademoiselle.

Le chevalier s’en va.

-Bien, je suppose que nous avons une nouvelle destination. Fait Thérion

-Marsalim... C’est juste au nord de Bonne-source. Souffle Olberic

-Pouvons-nous aller à Noblecour avant ça ? Que je puisse récupérer la première pierre... Tente Thérion

-Je n’y vois pas d’objection. Reprend H’aanit

-Tu nous quittes déjà ?

H’aanit se retourne. Susanna et Alaic sont derrière elle.

-Oui, il est temps. Merci pour tout. Reprend H’aanit

Susanna secoue la tête.

-Il n’y a pas de quoi, mon enfant. J’aurai toujours une place sous mon toit pour ma petite fille préférée. Une famille n’a rien d’un fardeau.

H’aanit sourit.

-Merci.

Alaic reste en silence un instant. H’aanit se tourne vers lui, et souffle :

-Veillez sur elle, Alaic.

-Inutile de me le dire. C’est ma responsabilité, et je continuerai à l’assumer. Affirme Alaic

-Bien.

H’aanit hoche la tête.

-H’aanit, mon enfant. Aussi maligne que tu sois, tu restes naïve comme un nourrisson dans les bois. Tu es une bien jolie fille... Je dirais même que ta beauté rivalise avec celle de ma jeunesse.

H’aanit croise les bras.

-Hmm ?

-Mais tu as mieux à faire que de m’écouter radoter. Va et sois prudente, mon enfant...

H’aanit cligne des yeux quelques secondes, puis secoue la tête, et sourit.

-Merci. Quand la chasse sera terminée, je reviendrai... avec maître Z’aanta.

H’aanit sourit, et hoche la tête, avant de partir.

-Linde, chers alliés, partons. Affirme H’aanit

-Nous te suivons, H’aanit. Souffle Ophilia

Les neuf personnes partirent alors en direction de la sortie de la ville. Alaic fait un pas dans la neige, en direction de la chasseuse, mais il s’arrête. Susanna laisse s’échapper un rire en le voyant ainsi.

Le groupe arrive rapidement en bordure de la ville.

-Donc, nous partons pour Noblecour. Souffle Cyrus

-En effet. Cela ne nous fait pas un trop grand détour. Reprend H’aanit

-J’espère trouver rapidement ce que je recherche. Je n’aimerais pas rester à Noblecour trop longtemps. Affirme Primrose

-Mademoiselle Primrose... C’est bien ce que je pensais. Vous vous êtes juré de venger sire Geoffrey.

Le groupe se retourne. Ils ne sont qu’à quelques pas de la sortie de la ville. Mais quelqu’un vient de les stopper.

-Arianna ? Souffle Alfyn

-C’est exact. Répond Primrose

Arianna approche.

-Maintenant que le maître est mort, je suis libre... Je vous en serai éternellement reconnaissante... Mademoiselle.

Primrose reste en silence.

-« La foi est ton bouclier ». Souffle Arianna

Arianna soupire.

-Mademoiselle Primrose, en quoi est-ce que vous croyez, vous ?

Primrose semble hésiter une seconde.

-Je n’en sais rien. Je me suis posé cette question tant de fois en serrant cette dague dans ma main.

Primrose prend ladite dague et la regarde tristement.

-En quoi devrais-je croire ? Que faut-il donc que je fasse ? Demande Primrose à elle même

Elle baisse et secoue la tête.

-Encore... et encore... je me suis interrogée...

Arianna ne trouve pas quoi dire.

-Au bout du compte, cette dague silencieuse est la seule réponse qui reste dans mes mains vides. Chercher à venger mon père... C’est la seule raison de vivre que j’aie réussi à trouver.

Elle serre sa dague plus fortement, alors que ses compagnons abordent immédiatement des airs profondément tristes.

-C’est le seul credo qu’il me reste. Termine Primrose

Primrose fait quelques pas en direction de la sortie de la ville.

-Adieu, Arianna.

Primrose part alors plus loin, laissant le reste du groupe derrière elle, et sous entendant clairement aux autres de la suivre immédiatement. Ce qu’ils s’empressent de faire.

Arianna, laissée derrière, laisse s’échapper quelques larmes. Finalement, elle tombe au sol, soudainement affaiblie, et pleurante.

-Oh, ma pauvre Primrose...

 

C’est ainsi qu’H’aanit et Primrose quittèrent Sourdeneige.

Pour l’une, la quête était devenue une chasser. Pour sauver son maître, elle devait tuer Œil-rouge.

Pour l’autre, deux hommes attendaient toujours le baiser de sa dague et elle connaissait désormais l’étape suivante de son voyage. La vérité se trouvait dans sa ville natale de Noblecour.

Alors qu’H’aanit devait se rendre à Marsalim, au cœur des sables des Terres Radieuses, elles décidèrent de faire d’abord route vers la ville natale de Primrose, dans l’espoir que son voyage y prendrait fin.

Laisser un commentaire ?