Noriko

Chapitre 58 : Retrouvailles (2)

6105 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour 26/09/2025 20:21

Le jeune homme marchait vite, trop vite pour Noriko qui peinait à le rattraper.

-       Ace ! chuchota-t-elle aussi fort qu'elle le pouvait, ne voulant pas réveiller les Chapeaux de Paille qui dormaient dans les tentes voisines. Attends !

Son amant ne se retourna pas, ne prenant même pas le temps de ralentir sa course. La jeune fille réussit finalement à le rattraper en courant avant de lui agripper le bras.

-       Mais qu'est-ce qu'il te prend ?

Il se dégagea ce qui la fit pousser un petit cri de stupeur et continua sa route. Noriko ne se laissa pas abattre et le poursuivit jusqu'au sommet d'une colline de sable. Il se retourna soudainement, ancra ses yeux dans les siens et la fusilla du regard, un doigt menaçant pointé vers elle.

-       Je vais le tuer.

Noriko ouvrit la bouche, puis la referma. Elle secoua la tête et tenta un nouveau contact physique en lui attrapant la main.

-       Ace. Il est mort. Luffy a fait couler son navire et lui avec.

Le jeune pirate serra fort ses doigts dans ceux de Noriko.

-       Tu as été blessée !

Il se passa sa main libre sur ses yeux et prit une grande inspiration. Des larmes apparurent et coulèrent sur ses joues.

-       C'est moi qu'ils voulaient, pas toi. Ça n'aurait jamais dû arriver. Je n'aurais pas dû partir, je n'aurais pas dû t'abandonner.

Noriko renifla, sa gorge se serra et elle eut du mal à déglutir. Elle mit ses mains sur ses joues.

-       Tu ne m'as pas abandonnée...

-       Tu ne comprends pas !? s'emporta-t-il en se dégageant avant de pointer son pouce sur son torse plusieurs fois. C'était à moi d'être poursuivi, à moi de recevoir leur vengeance !

La jeune fille resta silencieuse, se contentant de l'observer, au bord des larmes.

-       Mais bon sang ! s'écria-t-il en lui attrapant le visage, pourquoi n'as-tu pas dit mon nom ? Pourquoi !?

-       Ils t'auraient poursuivi, ils t'auraient chassé... se lamenta-t-elle la voix brisée.

-       Et alors !? la secoua-t-il légèrement en luttant contre ses larmes. Tu ne me crois pas capable de venir à bout d'une vingtaine d'hommes ? Je fais partie de l'équipage de l'homme le plus puissant du monde, je contrôle une flotte entière, tu crois que je n'aurais pas été capable de me défendre ?

-       Si, bien sûr que si, mais je ne voulais pas que tu souffres... jamais..., hoqueta-t-elle en baissant les yeux avant de renifler, puis d'essuyer son nez à l'aide de son avant-bras. Jamais je ne t'aurais trahi.

Ace laissa passer un silence puis hocha la tête de gauche à droite, avant d'éclater en sanglots.

-       Ils t'ont torturée...

-       Je sais...

-       Noriko, ils t'ont fait du mal, ils t'ont torturée pendant des heures et tout ça à cause de moi, je... bégaya-t-il en s'accroupissant avant de s'agripper les cheveux, je ne me le pardonnerai jamais.

-       Ne te blâme pas. Ce n'est pas de ta faute, implora-t-elle en pleurant à son tour après s'être mis à son niveau.

Il l'attrapa derrière la nuque et l'attira vers lui, collant son front contre le sien.

-       Si je ne les avais pas tués.

-       C'était pour me sauver !

-       Mais si j'étais resté, alors...

-       Tu ne pouvais pas rester ! coupa-t-elle en le prenant dans ses bras. Tu le sais aussi bien que moi. On n'avait pas le choix...

Ace resta silencieux et se mordit la lèvre inférieure, sachant pertinemment qu'elle avait raison. Il la serra encore plus fort contre lui et ils restèrent quelques instants à pleurer l'un contre l'autre. Ce fut Noriko qui se détacha la première et qui l'incita à se relever.

-       Tu aurais dû me le dire, bon sang Noriko, tu aurais dû me le dire, asséna-t-il une fois debout en expirant bruyamment.

-       Devant tout le monde ? rétorqua-t-elle doucement. J'ai vu ta réaction. Celle de Luffy, Zoro, vous vous êtes tous contenus, vous étiez tous en colère, mais vous n'avez pas réagi parce que vous saviez que c'était inutile et que ça m'aurait fait encore plus de mal. Chopper est même parti s'isoler dans un coin. C'est une histoire qui me regarde, j'attendais qu'on soit que tous les deux pour... pour t'en parler.

Il resta de nouveau silencieux et Noriko lui posa une main sur la joue, l'incitant à le regarder dans les yeux.

-       Je suis en vie et je suis là devant toi... Je t'en supplie. Je t'en supplie Ace, ne me fais pas plus culpabiliser que je ne le fais déjà.

-       S'il t'arrivait malheur, commença-t-il en lui attrapant la main. S'il t'arrivait quoi que ce soit.

Il semblait chercher ses mots. Sa mine s'assombrit soudainement, son regard s'emplit de haine et son ton devint plus grave et menaçant.

-       Noriko, reprit-il, je brûlerais le monde pour toi. Je le détruirais, tu m'entends ? Peu importe le nombre de pertes que cela engendrerait, je ferais tout pour te protéger. Je te l'ai toujours dit.

La jeune fille chercha son regard, imprimant chacune de ses paroles, puis attira son front contre le sien.

-       Et moi je l'inonderais pour toi, lâcha-t-elle.


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    Ils étaient retournés dans leur tente sans prononcer le moindre mot. Assise en tailleur, Noriko remontait une couverture sur elle. Elle avait poursuivi son amant dans le froid et s'en rendait à peine compte. Ace s'était agenouillé à l'entrée de la tente, se contentant de la fixer.

-       Je t'en prie Ace, ne...

Elle ne put terminer sa phrase, il venait de s'effondrer sur elle, la serrant contre lui.

-       Je suis désolé, murmura-t-il, tellement désolé. Je ne voulais pas te crier dessus.

Une main derrière la tête de la jeune fille, l'autre cachant ses yeux qui pleuraient toujours, Ace respirait bruyamment, tentant de se calmer. Noriko se blottit contre son torse, ne pouvant qu'imaginer ce qu'il endurait. Si quelqu'un venait à s'en prendre à lui, elle exterminerait tout ce qui se trouverait sur son chemin, et pire encore si on lui faisait payer ses fautes à elle.


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-       Tu l'as toujours, sourit Ace.

-       Bien sûr, c'est mon cadeau d'anniversaire, je te rappelle.

Allongée nue sur lui, Noriko était parfaitement détendue. Elle avait enfin retrouvé l'homme qu'elle aimait et malgré les intenses émotions qu'ils avaient éprouvées, ils avaient décidé de goûter au plaisir charnel une bonne partie de la nuit. Leurs doigts entrelacés, ils observaient tous les deux le bracelet en perles rouges qu'Ace avait offert à Noriko quelques mois plus tôt.

-       Il est à toi, déclara-t-elle en l'enlevant.

-       C'est un cadeau.

-       C'était notre accord, tu m'avais fait promettre de te le rendre à notre prochaine rencontre.

Ace sourit en poussant un petit soupir.

-       Très bien, dit-il en lui prenant le bracelet, je le récupère.

Il le remit rapidement à son poignet droit, puis souleva son poignet gauche, montrant un second bracelet identique au premier. Il secoua ses deux mains pour faire tinter les perles et embrassa Noriko sur le sommet de son crâne.

-       Tu crois qu'on devrait y aller ? lui demanda-t-il.

-       Il est sans doute encore très tôt, les autres doivent sans doute être en train de dormir.

Une étincelle s'alluma dans le regard du jeune homme. Il fit rouler Noriko sur le côté avant de la coincer sous son corps.

-       Qu'est-ce que...

D'un baiser, il la fit taire. Accoudé sur les côtés de sa tête, il lui caressa le visage, passant ses pouces sous ses yeux gonflés par les larmes de la veille, puis se servit d'une de ses mains pour lui caresser la joue, redescendre le long de son cou, de son épaule, de son bras pour finir par lui attraper le poignet avant de s'attaquer à son deuxième. D'un geste habile, il lui mit les mains au-dessus de la tête, l'empêchant de bouger. Noriko inspira de plaisir en souriant. Ace se positionna au-dessus d'elle, la plaquant presque sous son poids et lui embrassa la clavicule avant de s'attaquer à sa poitrine, puis à son téton droit. Lorsque son amante poussa un premier gémissement, il remonta sur sa bouche et l'embrassa passionnément, avant de poser son bassin sur son entre-jambes. Elle lui rendit son baiser et remonta ses genoux autour de sa taille avant de les enrouler autour de ses hanches, profitant des premiers rayons du soleil qui tapaient sur leur tente afin de faire l'amour pour la énième fois.


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Ace tendit de l'eau à Noriko.

-       Bois, lui dit-il gentiment.

-       Tu sais bien que je n'en ai pas besoin, lui sourit-elle.

-       Je sais, mais j'aime bien savoir que tu prends soin de toi.

-       Et moi, j'aime te savoir en vie. On n'a pas des quantités illimitées d'eau et on ne sait pas quand on trouvera une source.

Ace sourit à cette remarque, Noriko marquait un point. Assis tous les deux à l'ombre d'un rocher en plein milieu du désert qu'ils avaient trouvé par hasard, les deux amants avaient été séparés du reste du groupe à cause d'une tempête de sable. Ils s'étaient accrochés tellement fort l'un à l'autre que même les forces de la nature n'avaient pas pu les séparer. La jeune femme regardait l'horizon sur laquelle semblait danser des figures abstraites à cause de la chaleur tandis qu'elle mouillait un mouchoir en tissu avant de le tendre à Ace pour qu'il se le mette sur la tête.

-       J'espère que les autres vont bien, s'inquiéta-t-elle. Déjà qu'ils risquent une insolation, mais en plus, je ne suis pas là pour les rafraîchir.

-       Ne t'en fais pas, ce sont des durs à cuire.

-       Espérons que tu dises vrai...

Elle fit apparaitre de l'eau entre ses mains et se nettoya le visage, enlevant les grains de sable qu'elle avait un peu partout. Ace l'observa en silence.

-       Est-ce que ça va ?

-       Oui, dit-elle en souriant.

-       Alors, qu'est-ce qui ne va pas ? insista-t-il avec un sourire en coin.

-       Mais tout va bien, je t'assure, le rassura-t-elle.

Il lui caressa le front et lui ôta une mèche de cheveux qui lui tombait sur les yeux.

-       Tu sais très bien que tu ne peux pas me mentir.

Noriko ferma les yeux et poussa un petit soupir.

-       Je ne peux rien te cacher, c'est agaçant.

Ace déposa un bref baiser sur ses lèvres.

-       Dis-moi.

-       Je crois que... je crois que j'ai peur, lui avoua-t-elle.

Il leva un sourcil.

-       Qu'est-ce qui te tracasse ?

-       Tu te souviens de notre conversation d'hier soir ?

-       Avant ou après ? demanda-t-il d'un air narquois.

-       Avant ou après qu...

Elle écarquilla les yeux, réalisant à quoi il faisait allusion.

-       Tu te fiches de moi !? se plaignit-elle en lui tapant sur l'épaule.

Ace se mit à rire, ne pouvant s'empêcher de l'embêter.

-       Ce n'est pas drôle, râla-t-elle sans pouvoir s'empêcher de sourire.

-       Excuse-moi, je n'ai pas pu résister. Je t'écoute, de quoi veux-tu parler ?

Noriko soupira en souriant, elle était soulagée de retrouver la complicité qu'ils avaient toujours eu. Ils s'étaient promis de ne pas laisser ce qu'il s'était passé avec Kenshi interféré dans leur relation. Ils en parleraient s'ils en éprouveraient le besoin, mais en attendant, rien ne pourrait pallier à leurs retrouvailles.

-       Quand nous parlions de nos ambitions personnelles, que chacun fasse ce qu'il avait à faire de son côté et de se retrouver après tout ça.

-       Dans le nouveau monde oui, tu as changé d'avis ?

-       Ne dis pas de bêtises, s'amusa-t-elle, bien sûr que non, mais... J'ai peur de l'avenir. Je veux dire, je sais qu'on sera ensemble et j'ose espérer ne pas être égoïste en disant ça mais... Que se passera-t-il si je venais réellement à trouver mon père ?

Elle se tritura les doigts, de toute évidence, cette question l'obsédait. Ace termina de s'éponger le front avec le mouchoir en tissu qui était pratiquement sec.

-       Tu auras accompli ton rêve, dit-il d'une voix douce.

-       Et si ce n'était pas ça mon rêve ?

Le jeune homme fronça les sourcils.

-       Bien sûr que ça l'est. Tu appréhendes seulement de te retrouver en face de lui parce que tu as peur d'être déçue.

-       Et s'il n'est pas comme je l'imagine ? Il m'a abandonnée à ma naissance. Pourquoi voudrait-il de moi, maintenant ?

-       Tu veux vivre avec lui ? demanda Ace d'un air faussement surpris, les yeux ronds.

Noriko ne put s'empêcher de sourire face à la question de son amant.

-       Bien sûr que non, lui répondit-elle en lui pinçant la joue. Je veux seulement savoir qui il est et pourquoi il m'a laissée, continua-t-elle plus sérieusement. Je ressens un vide au fond de moi qui a besoin d'être comblé, mais je ne m'imposerai pas dans sa vie.

Ace réfléchit un instant en pinçant les lèvres.

-       Je dois te poser une question, mais je ne veux pas te blesser.

Il lui remit une mèche derrière son oreille, tandis qu'elle posa sa main sur la sienne.

-       Tu ne pourras jamais me faire de mal, Ace, même si tu le voulais.

-       Ne dis pas de bêtises.

-       Pardon, s'excusa-t-elle en lui embrassant le bout des doigts. Je t'écoute.

-       Est-ce que tu es sûre qu'il est en vie ?

-       Oui. Mihawk me l'a assuré.

-       Mais... est-ce qu'il connaît ton existence ? Et s'il ne t'avait pas abandonnée, tout simplement parce qu'il ignore qui tu es.

-       Il sait que j'existe. Je t'ai raconté ce que Mihawk savait, et puis ce symbole sur mon bras, continua-t-elle en désignant le bandeau orange qui recouvrait son tatouage, il n'a pas pu apparaître tout seul.

-       Je sais, oui. Mais comment dire ? Je ne peux m'empêcher de penser qu'il t'a menti.

Noriko détourna son regard vers l'horizon.

-       J'y ai déjà pensé, moi aussi. Mais je pense qu'il été honnête avec moi. S'il ne voulait pas que je le retrouve, il m'aurait dit qu'il était mort, tu ne crois pas ?

-       Je ne comprends pas son intérêt dans tout ça.

-       Il m'a dit que je devais trouver les réponses par moi-même.

-       Il voulait te pousser à quitter la maison ? Pourquoi t'aurait-il recherchée dans ce cas ?

-       Parce qu'il me considérait trop jeune ? Je ne sais pas, soupira-t-elle en se mettant sur le dos. Je n'ai jamais réussi à le comprendre et il n'a jamais voulu répondre à mes questions. Il m'en a dit le moins possible. Mon père s'est enfuit quand il a su que ma mère était enceinte de moi. Et elle, elle est morte peu de temps après ma naissance...

-       Et tu n'as jamais su pourquoi Mihawk t'avait recueillie, continua Ace.

-       Mon père qui le lui a demandé. C'est mon parrain, il a dû se sentir obligé de m'élever.

Le jeune homme posa ses coudes sur des genoux et croisa ses doigts.

-       Possible.

Noriko resta silencieuse. Ace et elle avaient déjà parlé de leurs enfances respectives, mais elle n'avait jamais osé aller aussi loin dans ses confidences. Cela lui faisait du bien de pouvoir en parler librement et elle savait qu'il faisait ça pour elle. Elle caressa le sable brûlant du bout des doigts, les yeux fixés sur le ciel. Même s'ils étaient à l'ombre, la chaleur était tout de même très intense, rendant l'air irrespirable, ce qui fit penser à Noriko de faire réapparaître une bulle d'eau afin de mouiller un autre mouchoir en coton pour soulager Ace.

-       Tu crois que je suis horrible ?

Il tourna la tête vers elle.

-       De quoi tu parles ?

-       Je me sens honteuse de l'avouer, rougit-elle en lui tendant le morceau de tissu. Je n'ai jamais... je n'ai jamais pensé à ma mère. Je veux dire, elle ne m'a jamais manquée. C'est comme si... comme si je n'avais jamais eu besoin d'elle.

-       Pourquoi as-tu ce ressenti ? questionna-t-il en se passant le coton imbibé dans la nuque.

Noriko se redressa, venant de se rendre compte de ce qu'elle venait de dire, elle paniqua.

-       Oh Ace, je te demande pardon. Je suis désolée, je ne voulais pas... Je n'ai pas réfléchi... Je...

Ace sursauta avant de se retourner complètement vers elle, laissant tomber le mouchoir, puis mit ses mains de chaque côté de la tête de sa bien-aimée, l'invitant à se calmer en lui écrasant les joues.

-       Eh, eh, eh, tout va bien.

-       Mais je...

-       Tout va bien. On parle de toi, pas de moi.

-       Je ne veux pas te faire sentir mal, tenta-t-elle d'articuler alors que sa tête ressemblait à celle d'un poisson.

Ace sourit et prit les mains de la jeune femme dans les siennes.

-       Ma mère a fait un sacrifice énorme pour moi, elle a donné sa vie pour sauver la mienne et je lui en serai éternellement reconnaissant. Mais là, il s'agit de toi. Dis-moi ce que tu as sur le cœur, tu ne m'avais jamais autant parlé d'elle avant ce soir.

Noriko se détourna en soufflant, prit une inspiration, se passa une main derrière la nuque, puis si tripota les doigts. Elle était nerveuse.

-       Je t'ai toujours dit qu'elle était morte quand j'étais bébé, mais en vérité, il y a autre chose... J'étais très jeune et je ne... Je ne sais plus pour quelle raison, Mihawk était en colère contre moi. Je crois que je n'arrêtais pas de lui poser des questions. Il s'est énervé et... Il a dit que ma mère n'avait jamais voulu de moi.

-       Pourquoi t'aurait-il dit une telle absurdité ? demanda le jeune homme, ébahi.

-       Parce qu'elle est sans doute vraie. Ace, je sais que je n'ai jamais ressenti d'amour maternel. Je le sens au fond de moi, je n'ai jamais eu besoin de le ressentir, je n'ai jamais eu ce manque à ma vie, mais... ce qu'il m'a dit ce jour-là m'a plus blessée que ce que je ne voulais le faire croire.

-       Donc tu penses que tu as inconsciemment détesté ta mère parce qu'elle ne voulait pas de toi ?

Noriko ramena ses genoux vers elle et posa son menton dessus.

-       Je pense oui. Mihawk ne ment jamais quand il est sous l'emprise de la colère. J'ai vu son visage, il en avait trop dit et n'avait pas voulu en reparler. C'était forcément la vérité. Ma mère ne voulait pas de moi et elle ne m'a jamais aimée, alors j'ai reporté toutes mes attentes sur mon père. Ça doit être de là que vient mon obsession.

Ace lui caressa le dos, cherchant à lui apporter du réconfort.

-       Ce n'est pas une obsession. C'est quelque chose dont tu as besoin pour pouvoir être entière et épanouie. Tu ne peux pas avoir le contrôle là-dessus.

-       Oui, tu dois avoir raison.

-       J'ai toujours raison, dit-il malicieusement.

Contrairement à ses habitudes, Noriko ne réagit pas à sa blague. Soucieux, Ace resta silencieux et attendit jusqu'à ce qu'elle se retourne face à vers lui, comme si elle venait de réaliser quelque chose.

-       C'est pas vrai, je suis tellement contradictoire...

-       Comment ça ?

-       C'est pas vrai...

Noriko se passa les mains dans les cheveux, ses pupilles balayaient le vide de gauche à droite. Elle réfléchissait. Soudain, elle se mit à parler très vite, faisant de grands gestes avec ses bras, l'angoisse montant peu à peu dans sa gorge et du brouillard apparaissant dans ses yeux.

-       Ma mère... ma mère ne me manque pas parce qu'elle ne m'a jamais aimée. Comme elle est morte et que je ne l'ai pas connue, pour moi, c'est comme si elle n'avait jamais existé et à l'heure actuelle, je me fiche de savoir qui elle était, même si c'est horrible à admettre.

-       Noriko...

-       Non, laisse-moi finir, s'il te plaît. Ace, tu te rends compte ? Ma mère est morte et je m'en fiche, parce que je l'ai toujours détestée. Et mon père m'a... Mon père m'a abandonnée, et moi... poursuivit-t-elle en comprimant sa poitrine. Moi je cherche à le retrouver ! Mais lui non plus ne voulait pas de moi ! Alors pourquoi je ne le déteste pas ? Qu'est-ce qui ne va pas chez moi ? Comment je peux être aussi stupide !?

Ace attrapa Noriko dans ses bras et la serra fort. Il connaissait ce comportement et devait agir vite.

-       Arrête.

-       Ace, je...

-       Arrête Noriko, s'il te plaît.

Il posa délicatement ses mains de chaque côté de la mâchoire de la jeune fille et la tint fermement.

-       Regarde-moi.

-       Je suis désolée, je...

-       Tout va bien, je suis là. Respire. Respire profondément.

Elle prit une grande inspiration et expira petit à petit par le nez afin de retrouver son calme. Il lui essuya ses larmes à l'aide de ses pouces.

-       Tu veux marcher un peu ? Te remettre en route ?

-       Non, elle secoua la tête. Je veux rester ici avec toi.

-       Je t'aurais accompagnée..., précisa-t-il comme si ce n'était pas évident pour elle.

-       Non ! S'il te plaît, je veux rester là.

-       D'accord, d'accord. Viens là.

Il posa sa main derrière le crâne de sa bien-aimée et l'attira doucement vers lui afin de l'étreindre tendrement. Puis posa ses lèvres sur le haut de son crâne.

-       Écoute-moi. Tu n'as rien de contradictoire, tu n'as rien de stupide. Tu es seulement perdue. Tu as eu une enfance bouleversante, c'est tout à fait normal de ressentir toutes ces angoisses et ces peurs. Si tu ressens le besoin d'avoir un père, c'est que tu as sans doute connu l'amour paternel et qu'inconsciemment, tu as besoin de retrouver ça. Tu as besoin de savoir d'où tu viens. Tu as besoin de réponses et c'est le seul à pouvoir t'en apporter.

Il la prit par les épaules et ancra son regard dans le sien.

-       Tu t'es enfuie et tu t'es retrouvée livrée à toi-même lorsque tu étais encore très jeune. Noriko, tu étais toute seule pendant tout ce temps. Tu as dû te battre pour survivre et tu ne pouvais compter que sur toi-même, Alors, quelque part, tu t'es raccrochée à la seule personne de ce monde qui pouvait encore selon toi, te donner de l'amour et t'aider. Et cette personne, il se trouve que c'est ton père. Tu n'en veux pas à ta mère parce que tu sais qu'elle n'est plus de ce monde. Si elle était en vie, tu la chercherais aussi. En revanche, ton père est là quelque part et ça te fait mal de ne pas savoir ce qu'il sait. Tu as toujours voulu le retrouver, et plus le temps passait, plus cette idée s'est ancrée en toi parce que tu t'es convaincue que lui seul pouvait te donner des réponses. Ce n'est pas stupide, tu m'entends ? Tu dois croire en toi et poursuivre ton rêve. Tu es humaine, tu as des sentiments et c'est ça qui te maintient en vie.

Des larmes roulèrent sur les joues de Noriko, sans que ce soit des larmes de tristesse, elle était émue. Il la dévisagea et lui replaça une nouvelle mèche de cheveux qui tombait sur son front.

-       Noriko, tu as tellement d'émotions en toi que parfois, il t'arrive qu'elles te submergent toutes en même temps, ce qui peut te rendre confuse et c'est tout à fait normal. Il te faut seulement l'accepter. Je ne vais pas te mentir, il est fort possible que ça t'arrive de nouveau, mais souviens-toi, tu dois te concentrer sur ta respiration et retrouver ton calme, à ton rythme. Comme je te l'ai appris.

-       En posant mon poing sur mon cœur, récita-t-elle en joignant le geste à sa parole.

-       Exactement, dit-il en lui caressant la joue. Et même si je suis pas près de toi à ce moment-là, ça ne voudra pas dire que tu seras seule. Parce que je t'aime et que je serai toujours avec toi, quelque soit la distance qui nous sépare.

Elle renifla et tenta un sourire entre ses larmes.

-       Ace...

-       Je suis tellement fier de toi, mon amour. Et tu peux être fière de toi également.

-       Pourquoi est-ce que tu as toujours raison sur tout ? marmonna-t-elle en s'essuyant les yeux.

-       Parce que je suis le meilleur ?

Elle pouffa en guise de réponse. Il l'embrassa sur le front, puis prit doucement son menton entre ses doigts et déposa un baiser sur ses lèvres.

-       Merci, souffla-t-elle. Merci d'être là, à mes côtés.

Elle lui rendit son baiser, posa ses bras autour de son cou et le serra de toutes ses forces contre elle, sans tenir compte de la chaleur écrasante sous laquelle ils étaient.


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-       Je vous suis reconnaissant à tous d'avoir sauvé et pris soin de Noriko. Et aussi de mon imbécile de petit frère. Il peut être têtu parfois, mais je sais qu'il ira loin.

Le jeune pirate avait compris que Barbe Noire n'était pas à Alabasta et devait donc écourter son séjour. Luffy lui dit longuement au revoir, et ils se promirent de se retrouver dans le Nouveau Monde. Heureux comme tout, le Capitaine s'en alla gaiement suivit du reste des Chapeaux de Paille qui saluèrent joyeusement leur compagnon avant de tourner les talons, laissant Noriko lui dire au revoir en toute intimité.

-       Tiens, lui dit Ace en lui tendant le bracelet à perles rouges qu'il portait constamment au poignet gauche. Tu me le rendras à notre prochaine rencontre.

Noriko laissa échapper un petit rire.

-       Ce n'est pas le même, insista Ace.

-       Dans ce cas, c'est une nouvelle promesse que je te fais. La prochaine fois que je te verrai, je le te rendrai, je le jure, sourit Noriko en passant le bracelet à son poignet droit.

-       Tu as bien ma carte de vie ? demanda le jeune homme.

-       Elle sera toujours avec moi, précisa-t-elle en tapotant sa poitrine. De toute façon, Luffy en a une aussi.

-       Je doute que vous soyez séparés un jour, mais on ne sait jamais. Tu devrais t'en faire une, ce n'est pas compliqué.

-       Je n'ai jamais voulu, si elle tombait entre de mauvaises mains...

-       Je ne risque pas de la donner à qui que ce soit.

-       Ce n'est pas ce que je voulais dire, s'excusa Noriko.

Ils se regardèrent longuement, se souriant l'un à l'autre.

-       Je vais y réfléchir, ça te va comme ça ?

-       Je suis ravi.

Un silence s'installa entre eux, puis Noriko se blottit dans ses bras, le serrant contre elle, humant pour la dernière fois le parfum de pin qu'elle aimait tant... Ace lui rendit son accolade, la serrant tout aussi fort.

-       Ce n'est qu'un au revoir, n'est-ce pas ?

-       Bien sûr, répondit-il. Chacun son ambition, chacun sa quête et lorsque tout sera fini, nous partirons ensemble.

-       C'est une promesse ?

-       Ai-je besoin de répondre ?

Noriko se mit à rire.

-       Je te le promets, Noriko. Je reviendrai te chercher et plus jamais je ne te quitterai.

-       J'espère que tu es prêt à me supporter jusqu'à la fin tes jours, plaisanta-t-elle en se reculant pour mieux le voir.

-       Et même dans l'au-delà. Et puis, qui sait, tu pourrais me présenter ton père à notre prochaine rencontre ?

Elle leva les sourcils et hocha la tête, les lèvres pincées.

-       Espérons.

-       Et si jamais ta quête n'a pas abouti d'ici là, je t'y aiderai.

-       Merci, Ace.

Se tenant les mains, ils s'embrassèrent. Passionnément, puis tendrement. S'éloignant petit à petit l'un de l'autre, ce fut un dernier baiser, un bref baiser qui les sépara pour de bon, les faisant se lâcher, puis reculer chacun dans une direction.

-       Prends soin de toi mon amour, je t'aime plus que tout.

-       Sois prudent surtout, je t'aime et je t'attendrai.

Ils se firent un dernier signe de la main. Elle jeta une bulle d'eau qui éclata dans les airs, il fit de même avec une boule de feu qui se termina en semblant de feu d'artifices et les deux finirent par s'assembler là-haut dans le ciel. Puis, sans se retourner, les deux amants disparurent chacun de leur côté, les larmes aux yeux, le sourire aux lèvres et le cœur gonflé d'espoir.

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