Orbes Opalines

Chapitre 5 : Nuits d'Aharas

3633 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 24/12/2020 08:37

Nuits d’Aharas

 

Le lendemain matin, je me réveille tôt, l’œuf toujours dans mes bras. Arcko fait le guet au bord de notre refuge. Nous prenons un rapide petit-déjeuner, puis reprenons notre route. J’ai l’impression d’Arcko et moi sommes sur la même longueur d’ondes. Nous souhaitons quitter au plus vite cet antre. Je ressens un sentiment d’empressement que je ne saurai m’expliquer. C’est comme si j’avais accompli ce que j’étais censée faire ici… Je cale précieusement l’œuf dans mon sac, enroulé dans un de mes pulls.

-         « Tu seras bien au chaud comme ça et il ne t’arrivera rien. »


Je longe la paroi, Arcko sur mon épaule. Au bout de deux bonnes heures de marche, nous trouvons l’entrée d’un souterrain. Mais comment savoir que cette issue nous mènera à Zamgoure ? Alors que je suis indécise, un petit Pokémon ressemblant à une chauve-souris vole dans notre direction. Il vient se poser devant Arcko et adopte une attitude faussement agressive. Il n’a pas les yeux sombres mais défit clairement mon Pokémon. Je sors mon Pokédex et le pointe vers le Pokémon volant. C’est un Sonistrelle, un Pokémon chauve-souris de type Vol et Dragon. Un message d’alerte s’affiche sur le Pokédex : « adopte une attitude de défi, en demande d’un combat. »

-         « Bon, Arcko, qu’en penses-tu ? »

-         « Ko. »

-         « Sonistrelle, nous relevons ton défi. Nous allons combattre. »


Nous disposons d’un espace assez dégagé devant l’entrée du souterrain. Arcko descend de mon épaule. Selon le Pokédex, il connait au moins Ecras’face et Groz ‘yeux. Nous ne nous sommes jamais entrainés ensemble alors je vais être obligé de le laisser agir quasiment en autonomie.

 

Sonistrelle s’élance vers Arcko qui esquive l’attaque Charge. En se relevant mon Pokémon plante son regard dans celui de son adversaire. Son expression devient sévère et Sonistrelle trésaille dans son vol. Le Pokémon volant enchaine les attaques Charge, Arcko parvient à les esquiver. Mais il n’arrive pas à utiliser Ecras’face lorsque son adversaire est à portée. Sonistrelle change de stratégie et lance Tornade. Arcko est soufflé par les vents et butte contre le tronc d’un arbre.

-         « J’ai une idée, grimpe dans l’arbre, Arcko ! » je m’exclame.

Arcko se sert de ses pattes pour se hisser rapidement en hauteur. Sonistrelle fait charge mais Arcko avance plus vite qu’il ne l’a évalué.

-         « Maintenant, Ecras’face ! »

Arcko se jette sur Sonistrelle juste en contre-bas. Sonistrelle est projeté au sol, Arcko au-dessus de lui. Les dégâts de l’attaque sont décuplés par le choc à terre. Arcko se relève, indemne. Sonistrelle s’ébroue et fait un signe de l’aile, s’avouant vaincu.

 

Le Pokémon chauve-souris s’approche de moi et vole autour de ma tête.

-         « Tu as bien combattu. Merci. Bravo à toi aussi, Arcko. » je lui dis.

Sonistrelle va ensuite se poser tête en bas au plafond du tunnel que nous avons trouvé. Elle nous regarde intensément et semble ne pas avoir l’intention de partir. Arcko me fait signe de m’avancer. Quand j’approche Sonistrelle s’envole et va se poser un peu plus loin. Ce manège se répète plusieurs fois. Je comprends que le Pokémon volant a décidé de nous guider. Nous la suivons tout le reste de la journée. Le soir, je partage nos maigres réserves en trois. Je mange des baies en gardant l’œuf reposant sur mes jambes croisées en tailleur. Au moment de se coucher, Arcko vient se rouler en boule sur l’œuf calé contre mon flan et Sonistrelle s’endort, accrochée aux parois au-dessus de nous. Trois jours passent ainsi.


L’après-midi du quatrième jour, j’aperçois une lumière au bout du tunnel. Une sortie ! Je me mets à courir, Arcko à mes côtés. Ça y est ! Sonitrelle nous a conduit hors des souterrains ! J’écarquille les yeux face au spectacle qui s’offre à moi. Un paysage désertique marqué uniquement par des dunes de sables fins m’accueille. En plein milieu de l’après-midi, la température est accablante… Sonistrelle est restée en arrière. Je pense qu’elle ne s’aventurera pas plus avant. Comment allons-nous retrouver Zamgoure ? Comment savoir à quelle distance nous en sommes ? Je regarde Arcko. Le Pokémon plante ne va pas être à l’aise dans cet environnement surchauffé…

-         « Arcko… Que dirais-tu si nous attendions la nuit ? Il fera peut-être plus frais ? » je demande à mon compagnon.

-         « Ko. » acquiesce-t-il, visiblement peu pressé de s’aventurer dans le sable.


Arcko et moi retournons dans les souterrains. Sonistrelle a disparu. Je dépose mon sac au sol et nous débutons l’attente. J’ai pris l’œuf sur mes genoux, comme à chaque fois que nous nous arrêtons. Je me sens rassurée en sentant la légère chaleur qui émane de lui. Je me dis que tant qu’il ne devient pas froid, c’est qu’il est en bonne santé.

-         « Arcko… Est-ce que tu veux qu’on s’entraine ? » je finis par demander au Pokémon Plante.

-         « … » Il me rend mon regard, interrogateur.

-         « Si nous devons affronter les champions d’arènes pour obtenir des badges, nous aurons à nous battre. Il parait que les champions ont un sacré niveau. Nous ne pouvons pas y aller comme ça. »

-         « Ko. »

Arcko se lève et se place face à moi. Il me montre son attaque Ecras’face, faisant le mouvement dans le vide. Puis il s’immobilise et me regarde.

-         « Euh… C’est bien. Je… Attend, je m’approche ! » dis-je.

Je suis surprise qu’Arcko accepte de travailler avec moi. Je me saisis de mon écharpe et m’en sers pour faire une sorte de nid pour l’œuf. Je m’approche ensuite d’Arcko. Nous répétons l’attaque Ecras’face à plusieurs reprises. Je sers même de cobaye quelques fois. Ça ne dure pas longtemps, mes cotes me font vite souffrir. Il me montre ensuite son attaque Groz’yeux et je dois dire qu’il est assez impressionnant malgré sa petite taille.


Fatigués, nous finissons par faire une pause. En redescendant dans les tunnels, je vais remplir nos gourdes à un ruisseau puis reviens. Arcko s’est de nouveau installer sur l’œuf, le maintenant au chaud.

-         « Arcko… j’ai pensé à un nom pour toi… J’y ai réfléchi depuis ton combat contre Sonistrelle. Que penses-tu de Hayashi ? »

-         « … » Arcko prend quelques secondes de réflexion. « Ko. » il me fait signe qu’il accepte.

-         « Hayashi… » je répète.

Je suis contente que ma proposition lui convienne. Je me sens un petit peu plus proche de lui. Je m’adosse contre la paroi rocheuse, je regarde distraitement Hayashi et l’œuf à mes côtés jusqu’à m’assoupir. Nous faisons une sieste jusqu’au soir. Cette nuit, une longue marche nous attend.

 

°°°

 

Une fois la nuit tombée et après avoir mangé, je me mets en route. L’œuf est sécurisé dans mon sac, Arcko sur mon épaule. Je sors et m’aventure dans l’immense étendue de sable. Au-dessus de nous, je découvre la voute céleste. Les étoiles brillent de mille feux, j’ai presque l’impression de pouvoir toucher le ciel, la lune ronde baigne les dunes d’une douce lumière. Au loin, j’aperçois des lueurs… Peut-être la ville ?

-         « Bon, Allons-y, Arcko. »

Je me dirige vers les lueurs au loin, mes pieds s’enfoncent dans le sable, ralentissant ma progression. Bientôt, je sens mes mollets me tirer, j’aurai de sacrés courbatures… J’essaye de maintenir un rythme régulier et je lutte toute la nuit contre le sommeil. Je frissonne plusieurs fois, les nuits sont fraiches dans le désert. Quelques Pokémons croisent notre route, des Sabelettes, des Racailloux et des Dunajas principalement. Nous passons à proximité d’un troupeau de Rhinocornes endormis. Je prends le temps de les contempler pendant quelques minutes. Ils ont l’air tellement paisibles… Pourtant, je sais que je ne ferai pas long feu s’ils me chargeaient. Je les contourne en faisant le moins de bruits possibles. Finalement, le soleil se lève à l’horizon. Cercle de lumière baignant la terre d’une nouvelle aurore. Pour l’instant, les rayons du jeune soleil apportent une agréable chaleur, mais bientôt la température va grimper de plusieurs dizaines de degrés.

-         « Nous devons nous abriter, Hayashi. » je commente, savourant le prénom de mon compagnon.

-         « Arc…ko. » répond-il en regardant autour de lui, indécis.


Où se cachait dans ces dunes ? Il n’y a… que du sable. Mes yeux se posent alors sur un petit Pokémon ressemblant à une tortue, un Caratroc. Avec ses pattes, je le vois creuser le sable autour de lui et s’y enterrer.

-         « Hayashi… On pourrait faire pareil ? »

Arcko acquiesce et ensemble, nous nous mettons à creuser un trou dans le flan d’une dune. Le travail est harassant d’autant plus que la chaleur du désert se réveille de plus en plus. En profondeur, le sable est plus dur et nous réussissons à aménager une petite cavité où je me roule en boule, mon sac contre mon ventre, Arcko près de moi. Nous rebouchons partiellement l’entrée. Ma gorge me brule, je bois une longue coulée d’eau à ma gourde.

-         « Je ne sais pas si nous en aurons assez… » je dis, soucieuse.

Je cherche dans mon sac ma deuxième gourde. Une de mes poches latérales se met à bouger. Je retiens un cri de surprise et ouvre ladite poche. Un petit Pokémon coquillage s’en échappe. Il me regarde avec ses grands yeux ronds et globuleux. Une petite Amonita ! Elle a dû se glisser dans mes affaires lorsque j’étais dans la grotte. Mais comment a-t-elle fait pour passer inaperçu pendant plusieurs jours ?

-         « Qu’est-ce que tu fais là ? » je l’interroge.

-         « A… mo ? » elle-même semble surprise.

-         « Je… Je ne peux pas faire demi-tour pour te ramener chez toi, maintenant. Je n’ai déjà pas assez de provision pour aller jusqu’à Zamgoure… »

-         « Amo…nitaaaa ! »

En poussant son cri, elle jette de petits jets d’eau !

-         « De l’eau ! Tu peux produire de l’eau ! Tu nous sauves la vie, Amonita ! »

-         « Nita, nita ! » elle tourne sur elle-même, visiblement satisfaite de son effet.

-         « Tu veux que je te ramène chez toi alors… » Devoir retrouver l’entrée des tunnels ne m’enchante pas, pas plus que la longue marche dans le sable… 

-         « Mooo. » fait-elle en se secouant de droite à gauche.

-         « Bon, je crois comprendre que nous avons une nouvelle camarade, Hayashi. »

-         « Ko… » répond-il en haussant les épaules.


Je me roule en boule, et m’endors pour la journée. Grace à Amonita, nous restons au frais et hydratés. Je me réveille plusieurs fois, bien inconfortable dans mon trou de terre. Par la petite ouverture que nous avons aménagé, je surveille la luminosité extérieure. Les parois de sable nous protègent d’une bonne partie de la chaleur. Ce n’est que lorsque la nuit est tombée que nous émergeons de notre abri. Arcko propose de marcher à côté de moi, de façon que je puisse porter Amonita. Le Pokémon mollusque s’engluerait dans tout ce sable. Deux longues journées passent ainsi, entre marche nocturne et sommeil dans le sable en journée. Heureusement qu’Amonita est là, nos réserves d’eau sont épuisées dès le deuxième jour et Arcko a besoin de rester humide pour garder la forme.

 

°°°

 

Finalement, au petit matin du quatrième jour, nous arrivons à Zamgoure. Je propose à Amonita de se cacher dans mon sac. Il s’agit d’un Pokémon réputé disparu, je ne souhaite pas attirer l’attention sur elle. Amonita accepte et va se caler contre l’œuf. Mon sac commence à se faire bien lourd… Je ne vais pas pouvoir mettre tous les Pokémons que je croise dans mes affaires de cette manière !

La ville est de taille modeste, localisée sur une oasis au milieu de l’immensité du désert. De nombreux palmiers surplombent des maisons basses en terre séchée et munies de minuscules fenêtres pour éviter que la chaleur ne pénètre les demeures. De bons matins, il y a du monde dans les rues. Les hommes portent d’imposants turbans et de longues toges descendant jusqu’à leurs chaussures de toile, leur donnant des allures lointaines de champignons tandis que les femmes sont vêtues de magnifiques voiles aux multiples couleurs et de longues robes assorties. Certains sont accompagnés de Pokémons sol, roche ou feu, à l’aise dans cet environnement. Une vieille dame, toute menue et toute petite s’approche de moi.

-         « Bonjour Mademoiselle. Vous avez l’air d’avoir fait un long voyage… » me questionne-t-elle.

-         « Oui… Je… Je me suis perdue et j’ai eu du mal à arriver ici. » dis-je essouffler.

-         « Tu es une dresseuse ? » me demande-t-elle en désignant Arcko.

-         « Euh… Oui. Je viens de commencer le tour des arènes et je viens me mesurer au Champion. »

-         « Championne, tu veux dire ? » me reprend-elle en levant un sourcil.

-         « Oui, oui, bien sûr. »

-         « … Ton Pokémon me semble encore bien faible pour se mesurer à Alexia. »

-         « Nous avons besoin d’entrainement. » j’essaye de garder contenance, mais ces questions me prennent de court. J’ai l’impression de passer une évaluation.

-         « Je tiens une auberge avec un terrain d’entrainement si tu le souhaites. »

-         « Euh, oui. Ce serait bien. Mais je n’ai pas beaucoup de moyen. »

-         « Tu iras chercher l’eau le matin et tu m’aideras en cuisine pour les autres touristes. » me dit-elle sèchement.

-         « Ok… Pour… Pourquoi faites-vous, ça ? »

-         « Tu n’as pas à le savoir. Dis-toi seulement que tes cheveux de feu me rappellent quelqu’un et que, vu la faiblesse de ton Pokémon, tu es ici pour un moment. Je m’assure ainsi une aide pour quelques temps. » me dit-elle avec un sourire en coin, en s’éloignant sans même vérifier si je la suis ou pas.

-         « Bon… Je ne suis pas sûre qu’on trouve un meilleur prix ailleurs, Hayashi. Qu’en penses-tu ? »

-         « Ko. » me répond-il en haussant les épaules.

J’emboite alors le pas à la vieille femme et la rattrape.

-         « Je ne vous ai même pas demandé, comment vous appelez vous ? »

-         « Les gens m’appellent Maggie. » me répond-elle succinctement.

-         « Enchantée, je m’appelle Kaze. »

-         « Je n’ai pas demandé. » dit-elle en souriant.


Le reste du chemin se fait dans le silence. L’auberge de Maggie est de l’autre côté de Zamgoure. Les maisons sont proches les unes des autres et forment un dédale de ruelles bordées par de petites échoppes ou des maisons. De rares enfants jouent dans les rues tandis que leurs mères échangent entre elles. Les hommes s’affairent ou paressent. Nous gagnons une demeure basse mais assez vaste. Un écriteau en fer annonce « Chez Mag ». Nous entrons dans un long hall avec un comptoir sur la gauche et de gros canapés et fauteuils sur la droite. La maison est organisée autour d’un patio central. Au centre du patio, un bassin avec une simple fontaine à trois jets. Autour, quelques tables et chaises en ferrailles sont disposées. Sur la droite derrière le comptoir, une salle à manger accueille les clients pour les repas puis les autres ailes sont dédiés aux chambres. Maggie me conduit à une petite chambre dans l’aile Nord. Il s’agit d’une petite pièce modeste avec un lit simple, une minuscule fenêtre donnant sur le désert et un petit bureau avec une chaise. J’ai une petite salle de bain attenante pour moi.

-         « Pour aujourd’hui, tu ne travailles pas. Quelque chose me dit que tu as besoin de repos. Demain, sois prête à 6h00. »

-         « D’accord, merci Maggie. »

-         « Ne me remercie pas, tu ne vas pas chaumer ici. »

Sur ses paroles, la vieille femme prend congés. Je file prendre ma première douche depuis mon départ de Flendic. Je n’en reviens pas de toute la crasse accumulée ! Je me sens beaucoup mieux une fois savonné, shampooinée et rincée. Tandis que je sèche mes cheveux dans une serviette, je laisse l’eau fraiche couler pour Hayashi et Amonita. Le petit Pokémon plante et le Pokémon préhistorique sont ravis de pouvoir jouer avec l’eau et se réhydrater. Je les laisse jouer quelques minutes puis ferme le robinet.

-         « L’eau est une ressource précieuse, ici. Nous ne devons pas la gaspiller. » je souris.

Je baille à m’en décrocher la mâchoire. Je suis épuisée. La marche de cette nuit et des nuits précédentes a été rude. Je me couche dans mon lit, prenant l’œuf contre moi. Amonita et Arcko viennent me rejoindre. Nous avons pris l’habitude de dormir coller les uns aux autres, ces derniers jours, dans nos trous de sable. Visiblement, mes compagnons ont décidé de continuer.

 

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