Nous voulions simplement être des héros...

Chapitre 8 : Incarcérés

2488 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 10/11/2016 07:49

Duncan commençait lentement à revenir à lui. Il n'avait pas perdu connaissance, mais c'était tout comme. Il avait l'impression que son esprit avait été transporté loin de son corps. Tel un fantôme, il avait assisté à tous les événements qui s'étaient déroulés, sans pour autant interagir avec la réalité.

Il avait vu Vanille être vaincue sous ses yeux. Il avait été témoin de l'entrée d'une horde d'étrangers dans la salle d'entraînement. Il avait senti un homme le dépouiller de ses pokéball pour rappeler ses partenaires à l'intérieur, eux qui n'y étaient d'ordinaire jamais enfermés. Enfin, il avait assisté à l'enlèvement de Dexylo, avant qu'on le conduise jusqu'ici.

Il se trouvait désormais dans une geôle sinistre, cerné par des barreaux. Il était emprisonné au commissariat de Voilaroc, où l'agent Jenny devait venir lui parler sous peu, alors qu'il n'était même pas sûr d'être en état de communiquer. Tous ces gens, toute cette effervescence... Cela avait eu raison de ses nerfs.

Il s'était cru revenu trois ans dans le passé, paralysé par la peur, en proie à la panique. Il s'était de nouveau laisser dépouiller, non pas de ses rubans, cette fois-ci, mais de son équipe, ses fidèles et seuls amis. Où étaient-ils en cet instant ? Que leur infligeait-on ? Et Dexylo ? Était-il la victime des expériences barbares des scientifiques, comme il le redoutait ?

Duncan balaya les alentours du regard. Sa cellule donnait sur un couloir tout aussi repoussant où un policier était en faction, une matraque à la ceinture. De temps en temps, l'individu lui jetait un regard dédaigneux. Sa seule présence mettait le jeune homme mal à l'aise, raison pour laquelle il avait choisi de se tapir dans l'angle le plus éloigné de sa cage.

Des bruits de pas se firent soudain entendre, se répercutant en écho dans le silence environnant. Une seconde plus tard, l'agent Jenny pénétrait dans le champ de vision du prisonnier. À sa vue, il sentit sa mâchoire se crisper. Elle ressemblait en tout point à sa cousine d'Unionpolis, qui avait refusé de lui venir en aide en dépit de ses sollicitations.

- Duncan Lazlo ? demanda-t-elle sèchement. Je suis l'agent Agathe Jenny. J'imagine que vous savez pourquoi vous êtes ici ?

L'intéressé ouvrit la bouche, les lèvres tremblantes, pour lui répondre, mais aucun son n'en sortit. Le stress empêchait ses cordes vocales de fonctionner convenablement. Il voulait rentrer chez lui, dans son repaire, où il se sentait à l'abri du reste du monde. Hélas, c'était impossible. Non seulement il était retenu captif ici, mais surtout sa demeure souterraine avait été en grande partie détruite.

- Permettez-moi de vous rafraîchir la mémoire, puisque vous semblez en avoir besoin, lâcha la policière. Entrave à la justice à trois reprises, agression de représentants des forces de l'ordre et enlèvement d'un spécimen extraterrestre jugé dangereux pour la population, le tout avec l'entière complicité de vos pokémon.

- Où s-sont-ils ? parvint laborieusement à bredouiller Duncan.

- Nous prévoyons de les garder enfermés dans leur pokéball jusqu'à votre jugement, après quoi le tribunal décidera de ce qu'il adviendra d'eux. Vous savez, M. Lazlo, j'ai toujours réfuté le fait que vous puissiez être un criminel. Je vous considérais comme un jeune idéaliste, rêvant de justice et de gloire, mais je me trompais. Avec ce qui s'est produit aujourd'hui, il apparaît clairement que votre objectif est de nous faire obstacle coûte que coûte. Hélas pour vous, nous sommes parvenus cette fois-ci à remonter jusqu'à vous, et vous allez devoir répondre de vos agissements. J'imagine que, pour un homme qui vivait sous terre, s'accommoder d'une cellule sera chose aisée, n'est-ce pas ? Si tel n'est pas le cas, habituez-vous vite, car je gage que vous allez rester incarcéré un temps considérable.

Rester ici ? Exposé aux yeux de ses geôliers comme une vulgaire bête de foire ? Duncan n'y survivrait pas, il en était convaincu. Il fallait qu'il s'explique, qu'il raconte à l'agent Jenny tout ce qui s'était passé depuis l'écrasement de cette météorite, ainsi que la raison qui avait poussé ses pokémon à ramener Dexylo chez eux.

Non... Il devrait commencer par commencement. L'incompétence de son homologue et cousine d'Unionpolis. La femme qui avait refusé de lui tendre une main alors qu'il était à terre et qu'il avait eu besoin d'aide. C'était à cause d'elle et de ses adjoints tout aussi inutiles qu'il en était arrivé là. Sans cela, il n'aurait jamais songé à entraîner ses pokémon à faire régner l'ordre autour d'eux, quoiqu'avec beaucoup de difficulté.

- J-Je... bégaya-t-il.

Il fut incapable d'aller plus loin. Sa liberté avait beau dépendre de ce qu'il pourrait bien dire à l'agent Jenny, de même que le sort de Sinnoh et peut-être de la planète entière si Dexylo ne regagnait pas très vite l'espace, il n'arrivait toujours pas à parler. La policière lui jeta un regard méprisant, puis informa :

- Nous vous avons commis un avocat d'office. Il sera là dans peu de temps.

Sur ces mots, elle tourna les talons, abandonnant Duncan à son triste sort et à son babillage incompréhensible qu'il poursuivait inutilement.

***

Une ball roula au pied d'une table métallique et s'ouvrit en heurtant le sol. Dans un éclat de lumière rouge, Zaiyad se matérialisa. Il était le plus sauvage des pokémon de Duncan et n'appréciait pas d'être enfermé dans l'une de ces sphères de métal. Sitôt après sa capture, alors qu'il n'était qu'un Luxio, il avait rapidement fait comprendre à son nouveau maître qu'il n'accepterait pas cette forme de captivité.

Cette soif de liberté s'avérait particulièrement précieuse un jour comme celui qu'ils étaient en train de vivre. Après avoir tous perdu connaissance, les militaires les avaient certainement enfermés dans leurs ball, ce qui signifiait qu'ils avaient également attrapé Vanille, Dexylo et surtout Duncan.

Zaiyad souffrait encore de l'explosion, ainsi que du Vibrobscur qui l'avait terrassé, mais il avait recouvré suffisamment de forces pour s'échapper de sa prison rouge et blanche. Boitillant légèrement, il se dirigea vers le meuble sur lequel se trouvaient les autres sphères.

Il les prit dans sa gueule une par une, afin d'actionner leur mécanisme d'ouverture. Quelques secondes plus tard, ses amis étaient libres, eux aussi. Ils étaient tous en très mauvais état à cause de ce qu'ils avaient subi au repaire, mais au moins ils étaient vivants. C'était le principal.

- Où est-ce qu'on est ? interrogea Raphaël en étudiant les environs.

Ils se tenaient au centre d'une pièce austère, dépourvue de meubles à l'exception de la table. Un miroir s'étendait sur une bonne partie du mur, dans leur dos. Cela permit à Ashton de faire le rapprochement avec le lieu dans lequel ils étaient maintenus prisonniers.

- C'est une salle d'interrogatoire. Nous sommes au commissariat. Ces individus qui nous ont vaincus nous ont sans doute remis à l'agent Jenny.

- Tu veux dire... comme des criminels ? couina Vanille. Alors que nous sommes innocents ?

- J'ai peur qu'après ce que nous avons fait aujourd'hui, la police ne nous considère pas comme tels, commenta Zaiyad. Pauvre Duncan... Il doit sans doute être en cellule, à l'instant où nous parlons. Quelle terrible épreuve ce doit être pour lui !

- Dans ce cas, il n'y a pas une minute à perdre. Allons le libérer !

Avec détermination, Raphaël frappa sa paume avec son poing serré. Ses paroles furent aussitôt approuvées par l'ensemble du groupe, à l'exception du Luxray qui, en dépit de son envie de sauver son dresseur, s'efforça de faire preuve de modération.

- Attendez... Nous ne pouvons pas nous jeter de la sorte dans la gueule du Grahyéna, alors que nous ignorons combien de policiers sont en faction ici. Il faut procéder intelligemment. S'ils parviennent à nous capturer derechef, ils nous renverront dans nos pokéballs, et cette fois-ci probablement sous étroite surveillance.

- Tu as raison, acquiesça Willy. Que suggères-tu ?

***

Marc et André étaient les deux plus fidèles adjoints de l'agent Jenny. Ils étaient tous deux en train de siroter une tasse de café, tout en mangeant des donuts à base de baies framby, lorsqu'un fracas assourdissant retentit. Surpris, l'un se macula la joue de glaçage rose, l'autre renversa son breuvage amer.

- Qu'est-ce que c'était ?

- Aucune idée. On aurait dit du verre brisé. Une vitre, peut-être ?

Le bruit avait été bref et les avait pris de court, mais ils parvinrent à supposer qu'il provenait de la salle d'interrogatoire. Ils renoncèrent à leur pause pour s'y précipiter. Ils n'avaient qu'un couloir à longer, dans lequel l'un de leurs collègues courait déjà, alerté par l'incident.

- Tu crois que ça pourrait être...

- ... les pokémon de Lazlo ? Impossible. Comment seraient-ils sortis de leur pok...

André n'acheva pas sa phrase en contemplant les tessons du miroir sans tain qui jonchaient le sol. Il avait été fracassé à l'aide d'une attaque Bélier, orchestré par le Goinfrex qui se tenait juste au milieu. L'un des éclats avait entaillé superficiellement son pelage épais au niveau du crâne.

- Qu'est-ce que tu fais là, toi ? gronda leur collègue, qui fut le premier à arriver sur les lieux.

Il dégaina l'une des ball qu'il portait à sa ceinture, mais des Feuillemagik jaillirent de sa droite pour le blesser au poignet. Il lâcha la sphère de métal, qui rebondit sur le sol sans s'ouvrir. Le temps pour lui de se tourner vers Ashton, qui venait de l'agresser, un Pistolet à O le plaqua contre le mur, où il s'assomma.

- C'est un piège ! s'exclama Marc. Ils se sont tous libérés. Il faut donner l'alerte avant qu'ils...

Il n'en eut pas le temps, pas davantage qu'André. Un Coup d'Jus les frappa dans le dos, les paralysant. Zaiyad s'était tapi dans un renforcement, destiné à accueillir un extincteur, et ils étaient tous passés devant lui sans remarquer sa présence. Ils auraient dû se montrer plus prudents.

- Seulement trois... constata Ashton. C'est peu. Nous ignorons combien il reste encore de policiers dans le bâtiment.

- J'avais osé espérer que mon plan en attire davantage, avoua le Luxray, déçu. Tant pis, il semblerait que nous allions devoir nous lancer à l'aveuglette. Willy, prends les clés et pars libérer Duncan. Nous te couvrons.

- Tu veux vraiment que je touche ça avec les pattes ? s'agaça le singe en désignant le trousseau couvert de sucre que l'un des adjoints portait à la ceinture.

Raphaël poussa un soupir, mais consentit tout de même à cracher un long jet d'eau afin de les nettoyer, ce qui soulagea le Chimpenfeu. Il s'en saisit, et attendit que Zaiyad, Ashton et Boulard se soient élancés dans le couloir, tandis que Vanille et le Carabaffe assuraient ses arrières.

Ils débouchèrent dans ce qui paraissait être la salle de repos des représentants de l'ordre. Une flaque de café odorante s'étalait sur le sol, et une boîte de donuts était posée sur une table crasseuse.

- Boulard ! tonna le leader du groupe en voyant la trajectoire du Goinfrex se modifier légèrement. Ce n'est pas le moment !

- S'il te plaît, rien qu'un ! Je n'ai rien avalé depuis au moins une heure, peut-être plus.

- J'ai dit non ! Les enjeux sont trop grands pour que tu permettes à ton estomac de te dominer. Prends sur toi, ne serait-ce rien qu'une fois.

Alors qu'ils se dirigeaient à un rythme soutenu vers la porte qui leur faisait face, celle-ci s'ouvrit au même moment. Dans son encadrement se tenait l'agent Jenny en personne, flanquée d'un féroce Arcanin.

Laisser un commentaire ?