A la fin, c'est l'eau qui gagne
Chapitre 3 : A pirate's life for me
7045 mots, Catégorie: T
Dernière mise à jour 26/10/2025 14:55
Ce chapitre est un peu chaotique, tant dans l’esprit de Sherlock que dans sa chronologie. Pour vous guider un peu, les passages en italiques correspondent au présent du récit (le moment où Sherlock est chez Molly et lui raconte ce qui s’est passé), et les passages “normaux” sont les flashbacks du soir de son anniversaire, lorsque Eurus est en effet allée au 221B pour voir son frère et finaliser son plan.
Pour le tire du chapitre, il provient de la série elle-même : Mycroft dit que, plus jeune, Sherlock voulait être un pirate...
Chapitre 3 : A pirate’s life for me
Il se souvenait. Au moment de se noyer, il se souvenait.
.
Loin, très loin au-dessus de lui, il pouvait encore vaguement percevoir la lumière du jour, oblitérée par l’eau noirâtre qui l’avait englouti, submergé, annihilé. Comme s’il s’enfonçait lentement au fond d’un puits glacial dont l’ouverture sur le ciel bleu se faisait de plus en plus petite, jusqu’à disparaître. Il avait retenu sa respiration, mais il savait que ce n’était qu’une question de temps avant qu’elle n’emplisse totalement sa bouche, n’envahisse sa trachée, n’obstrue ses poumons…
Il se réveilla en sursaut, allongé dans son lit, trempé de sueur et, peut-être, de larmes incontrôlables. Ni eau, ni puits, ni tache de soleil, il faisait noir dans sa chambre, à l’exception de la lumière luminescente de la rue, qui filtrait par la fenêtre – mais il suffoquait, il se noyait toujours, la poitrine oppressée, incapable de respirer. Après ce qui lui sembla une éternité, mais qui n’avait probablement pas pris plus de quelques secondes, il parvint enfin à reprendre son souffle et à se rappeler ce qui lui était arrivé durant ces dernières semaines. La mort de Mary, la colère de John, l’overdose, Culverton Smith, Sally Donovan poignardée.
Bon anniversaire, Sherlock. Il n’avait de toute façon jamais vu l’intérêt de fêter la date de sa naissance.
En fin de compte, il ne se noyait pas vraiment. Ce n’était que ce bon (façon de parler) vieux cauchemar qui revenait en force, probablement réveillé par le manque de cocaïne. Son cerveau devait envoyer tous les signaux de détresse possibles, et quoi de mieux que ce rêve dérangeant, venu du tréfonds de son palais mental, l’un de ses plus anciens souvenirs ?
.
Non seulement il se souvenait, mais il comprenait. Il comprenait que son cerveau, plus intelligent que sa conscience, lui avait envoyé ce signal d’alarme précisément après avoir, d’une manière ou d’une autre, reconnu Eurus derrière les traits de Faith.[1] Mais Sherlock, toujours logique, toujours rationnel, n’avait pas compris l’avertissement, ou l’avait négligé, balayé d’un revers de main. Un cauchemar de plus dû au manque, rien d’autre.
Il ne voyait plus rien, n’entendait plus rien. Il savait qu’il était chez Molly, probablement allongé à terre, mais l’eau l’emportait dans un tourbillon de souvenirs. Il ne servait à rien de se débattre.
A la fin, c’est l’eau qui gagne.
.
Sherlock soupira et se recroquevilla sur le côté droit, essayant de se rendormir avant que les hallucinations ne commencent. La noyade n’était qu’un cauchemar, auquel il était habitué. Il n’avait certes rien de plaisant, mais les illusions dues au manque n’avaient rien de plaisant non plus, et elles duraient beaucoup plus longtemps. Un problème subsistait cependant : comment dormir lorsque la moindre fibre de votre corps a décidé de vous faire payer l’affront que vous lui faites subir en lui refusant sa dose quotidienne ? Entre son envie quasi permanente de vomir, sa température qui jouait au yo-yo et les frissons irrépressibles qui le secouaient périodiquement, la désintoxication n’était vraiment pas une partie de plaisir.
Mais enfin, il l’avait bien cherché. Il avait choisi cette voie. Volontairement, en toute connaissance de cause. Il ne pouvait pas se plaindre.
– Ça n’a pas l’air d’être la grande forme, constata soudain une voix féminine, très proche, trop proche de son lit.
Sherlock sursauta avant de pousser un soupir de résignation.
– Mary ? chuchota-t-il.
Généralement, Mary venait en tête, première d’un long cortège qui ne s’achevait que lorsqu’il avait passé en revue la longue et fastidieuse liste de tous ceux qu’il avait trahis, volontairement ou non.
– Non, ce n’est pas Mary.
Oh. Ça, c’était plutôt inattendu. Sherlock se retourna dans son lit.
– Qui es-tu alors ?
Il essaya, en plissant les yeux, de distinguer les traits de l’intruse dans le vague halo luminescent qui provenait de la rue, mais ne parvint qu’à discerner une forme sombre debout entre le lit et la fenêtre.
– Je suis le vent d’Est, répondit la voix, et le détective réalisa qu’elle ressemblait beaucoup à la voix de Faith, la fausse Faith, celle que son esprit en proie à la drogue avait imaginée plusieurs jours auparavant, pour le mettre sur la piste qui l’avait finalement mené à Culverton Smith. [2]
.
Mais bien sûr, espèce de crétin décérébré ! Bien sûr, Faith faisait partie du piège. Un appât. Une sorte de test avant le grand jeu, la dernière épreuve, le problème final. La chute.
Il se demandait pour quelle raison obscure et tordue son esprit le forçait à revivre malgré lui cette nuit fatidique, la nuit de son anniversaire, la nuit où le vent d’Est était venu le voir, la nuit où Eurus avait fait son grand come-back dans sa vie, sans que lui, pauvre idiot, ne comprenne rien.
– Sherlock, respire.
Il était sur le sol, et la voix de Molly, calme, douce, apaisante, lui semblait venir de très loin, superposée à celle d’Eurus qui hurlait dans son esprit.
– Je me noie, parvint-il à articuler. Il y a de l’eau partout. Je ne peux pas fermer la trappe.
Et si Molly lui répondit quelque chose, il ne l’entendit pas.
.
Sur le moment, il n’avait pas trouvé cela illogique. Souvent, le vent d’Est, sous une forme ou une autre, venait lui rendre visite. Il faisait après tout partie de lui depuis très longtemps. Après que Mycroft l’eut effrayé avec cette légende idiote, le garçon qu’il était alors avait imaginé passer un pacte avec cette force aussi puissante que mystérieuse. D’abord pour éviter qu’elle ne finisse par l’emporter, lui, comme son stupide grand frère le lui avait prédit. Ensuite, le vent avait fini par se confondre avec son intuition, dans les moments où son cerveau parvenait à faire toutes les bonnes inférences en une fraction de seconde, à relier les faits entre eux plus rapidement que n’importe qui, à raisonner à la vitesse de l’éclair, précisément parce que le vent d’Est lui murmurait des indices au passage. Jusqu’ici, leur collaboration dans la tête de Sherlock avait été fructueuse.
L’hallucination ne semblait donc pas aussi terrible que les autres. Toutes, Mary en premier, lui reprochaient bien trop de choses parfaitement vraies avant de l’attaquer avec une violence qui le laissait souvent haletant, comme s’il s’était réellement battu. Le vent d’Est se contentait de lui souffler des pistes, et même si Sherlock n’était pas en état de faire des déductions intelligentes, il se sentit soulagé de n’avoir pas à recommencer ce soir la même bataille que la veille, que l’avant-veille, et que l’avant-avant-veille.
– Et pourquoi es-tu là ? demanda-t-il poliment en se redressant dans son lit en position assise.
Un rire inattendu frappa ses oreilles, et le son de ce rire fit brutalement trembler quelque chose au plus profond de son palais mental. Une chose qu’il avait enfouie très profondément, une chose qu’il avait si bien essayé de dissimuler, une éternité auparavant, qu’il ne se souvenait même pas de sa présence dans son esprit.
– Oh, je voulais simplement te voir, Sherlock. Figure-toi que je peux voir dans le noir aussi bien qu’en plein jour. C’est bien pratique lorsque l’on passe sa vie dans l’ombre. Tu ne peux pas me voir, mais moi, je peux. Si on y réfléchit un tant soit peu, il s’agit d’une parfaite image pour décrire notre relation, tu ne trouves pas ? Moi, je t’ai toujours regardé, et toi tu n’as jamais daigné poser les yeux sur moi. Pourtant, je n’ai jamais arrêté de te fixer, depuis les ténèbres où j’ai été enfermée.
Sherlock fonça les sourcils. Il ne comprenait rien à ce discours étrange. De quelles ténèbres parlait-elle ? Généralement, ses hallucinations étaient moins sibyllines.
– J’ai eu du mal à arriver jusqu’ici, reprit la voix. Ton frère a été particulièrement prudent cette fois-ci. Il ne t’a pas laissé seul un seul instant. Bien sûr, tu as toujours été son préféré…
– Le préféré de qui ? De Mycroft ? demanda le détective.
Il sourit à cette idée ridicule. La conversation prenait un tour inattendu, mais pas déplaisant. Tout était mieux que de voir Mary lui reprocher sa mort pour la millième fois.
– Bien sûr, de Mycroft. Tu as un autre frère ?
Sherlock haussa les épaules. Non, il n’avait pas d’autre frère, bien sûr que non, et d’ailleurs, un seul lui suffisait, merci bien.
.
Non, il n’avait pas d’autre frère. Quelle ironie, vraiment. Eurus avait dû éclater de rire intérieurement à ce moment de leur discussion. Et il aurait suffi de si peu pour qu’il comprenne…
– Sherlock, tu n’es pas en train de te noyer, c’est juste une crise d’angoisse, d’accord ? Et je suis certaine que tu es capable de la combattre.
Molly était gentille, vraiment, il savait qu’elle voulait lui venir en aide, même après tout ce qu’il lui avait fait subir, mais à quoi bon ? Le deuxième étage de son palais mental était totalement noyé à présent. L’eau avait gagné le loft, commençait à s’attaquer aux couleurs des tableaux, étouffait la musique, détruisait tout ce qu’il y avait jamais eu de beau dans sa vie. Alors, à quoi bon ? A quoi bon, si rien ne lui était laissé à la fin ? Eurus avait gagné. Elle s’était immiscée dans son esprit, alors qu’ils n’étaient encore que des enfants, puis installée au cœur de son palais mental, sous la forme du vent d’Est. Il avait perdu. Il acceptait sa défaite.
.
Un tremblement soudain le parcourut des pieds à la tête, le premier d’une longue série s’il en croyait la façon dont ses mains refusaient de rester tranquille sur la couverture.
– Tu ne vas pas te remettre à trembler ?
La voix semblait osciller à présent encre colère et dégoût, et Sherlock se demanda si, dans son esprit, le vent d’Est n’incarnait pas également cette partie de sa conscience qui lui ordonnait d’être toujours sous contrôle. Sans contrôle, il n’était rien.
La silhouette qui se découpait en noir sur la fenêtre de plus en plus lumineuse (ses yeux s’habituaient progressivement à l’obscurité) s’avança vers le lit. Sherlock entendit un léger craquement, alors qu’il sentait un poids léger incurver le matelas, à quelques centimètres de sa hanche droite.
– Tu es trop faible, murmura la voix (avec pitié ? dédain ? agacement ?). Trop lent à comprendre. Tu n’es pas prêt pour ce que je t’ai préparé. Et tu es plutôt ennuyeux quand tu es lent. Je me demande bien pourquoi j’ai pris tous ces risques pour arriver jusqu’ici.
Sherlock ne répondit pas. De fait, il n’entendait pas vraiment ce que disait la voix. Accablé par le sommeil, il ne parvenait pas à saisir le sens des mots qu’elle prononçait ; sa tête se faisait plus lourde d’instant en instant ; ses paupières papillonnaient malgré lui. Il se demanda s’il allait tout bonnement s’endormir au beau milieu d’une hallucination…
– Tu ne m’écoutes pas, siffla le vent d’Est avec un venin qui le fit sursauter, comme s’il avait réellement été piqué par un serpent. Je te dis que j’ai poignardé Sally Donovan, et ça ne te fait même pas réagir ?
Ces derniers mots réveillèrent totalement Sherlock.
– Tu as… poignardé Sally Donovan ? répéta-t-il, sous le choc.
La forme noire se mit à glousser, comme une petite fille qui vient de réussir une bonne farce, et le détective sentit une vague glacée courir sur tout son corps. Quelque chose bougea – se faufila, glissa, rampa, s’insinua – dans son palais mental. Cette chose qu’il avait si bien enterrée, et qu’il ne fallait surtout pas déranger, il s’en souvenait maintenant.
– Oh oui, répondit la voix avec une sorte de joie malsaine. Deux fois. Elle s’est plutôt bien défendue, mais ça ne servait à rien. Je suis la plus forte. Je suis toujours la plus forte.
– Pourquoi as-tu fait cela ? demanda Sherlock.
Il se fichait pas mal de Sally Donovan, mais n’avait aucune envie de l’allonger à la longue liste des victimes qui venait lui rendre visite chaque nuit, et parfois même en plein jour, depuis le début de son sevrage.
– Je te l’ai dit, je voulais te voir, et pour cela je devais neutraliser tous ceux qui étaient susceptibles de passer la nuit ici pour te surveiller. Lestrade devrait être bien occupé pendant les prochaines heures, et Anderson aussi, au chevet de Donovan. Ta chère logeuse est allée voir son neveu qui a des tendances suicidaires, et qui l’a appelée cet après-midi. Il faut dire que je suis passée le voir un peu plus tôt. J’ai même réussi à éteindre le téléphone de Mycroft – un peu risqué, bien sûr, mais tellement jouissif de le prendre dans sa poche ! John, en bon père aimant et loyal (il sembla à Sherlock qu’une pointe de sarcasme se dissimulait derrière ces adjectifs), doit s’occuper de sa fille, et Molly… eh bien, Molly a probablement bu un peu trop de café.
.
Tout ce qu’Eurus avait planifié, organisé, réalisé pour le voir cette nuit-là lui donnait le vertige, ou du moins le lui aurait donné s’il n’avait pas déjà été allongé à terre, incapable de bouger. Il ne comprenait pas cette obsession de la part de sa sœur. Pourquoi cette fascination ? Pourquoi lui ? Il frissonna en pensant que si quelqu’un l’avait trouvée là, dans sa chambre, elle l’aurait tué sans plus de scrupules que lorsqu’elle avait poignardé Sally.
Non, non, elle ne l’aurait pas tué, parce que seuls ceux auxquels il tenait étaient susceptibles d’entrer dans sa chambre. Et elle en avait besoin, à Sherrinford, pour lui donner… un contexte émotionnel. [3]
Il fit un effort surhumain pour se tourner sur le côté, pris d’une nausée irrépressible. Des mains l’aidèrent –position latérale de sécurité, lui souffla la partie encore vaguement consciente de son cerveau. Il sentit la bile lui remonter dans la gorge, dans la bouche, dans le nez, se mêler à l’eau qui l’étouffait, charriant l’odeur fade du sang et de la folie.
Il se noyait toujours, mais les mains lui soutenaient la tête et la maintenaient provisoirement hors de l’eau.
.
Le cœur de Sherlock s’arrêta de battre, broyé par une angoisse incompréhensible.
– Qu’est-ce que tu lui as fait ? murmura-t-il.
Il savait que cette conversation n’avait lieu que dans sa tête, et pourtant, il était certain que quelque chose était vraiment arrivé à Molly. Il repoussa les couvertures, essaya de se lever, sentit la tête lui tourner…
– Intéressant. Très intéressant, murmura la voix, avec un rien d’excitation. Donc tu tiens à cette femme malgré tout. James Moriarty pensait le contraire, et ç’a été son erreur. Je ne commettrai pas la même. Voyons donc comment nous pourrions l’inclure dans notre petit jeu…
Sherlock s’appuya à la table de chevet pour ne pas tomber, malade à l’idée que Molly était peut-être en train d’agoniser dans la pièce voisine, à deux pas de lui… Soudain, une main attrapa son bras, le força à se recoucher, avec douceur mais fermeté, remonta la couverture sur sa poitrine avant de se poser sur son front, légère comme une caresse.
– Molly ? chuchota-t-il, essayant de ne pas instiller trop d’espoir dans sa voix.
– Encore ? s’énerva la voix. Ne t’attache pas trop, Sherlock. A la fin, il n’y aura plus que toi et moi, tu sais. Comme au début. Lorsque Mycroft ne s’intéressait pas vraiment à toi. Et avant que Victor n’arrive.
Un courant d’air glacial parcourut le palais mental du détective, comme si une porte mal refermée avait soudain été ouverte. Mais son palais mental était un endroit parfaitement hermétique. Parfaitement ordonné, sans courants d’air. Chaque porte était toujours prudemment refermée après chaque usage, parce que Sherlock savait à quel point il pouvait être dangereux de laisser de vieux souvenirs errer dans surveillance dans son esprit.
Il ferma les yeux. Il devait tout vérifier.
Au rez-de-chaussée, les grandes portes de la salle de l’Albert Hall étaient fermées, ainsi que celles qui menaient aux coulisses. Sur les gradins, chacun était à sa place.
Au premier étage, rien d’anormal. Ses connaissances étaient soigneusement rangées dans les pièces prévues à cet effet. Les dernières, vides, au fond du couloir, attendaient d’être éventuellement remplies.
Au deuxième étage…
– Tu m’as l’air d’avoir bien arrangé ton palais mental depuis la dernière fois, commenta la voix avec, peut-être, une pointe d’admiration.
Au deuxième étage, il jeta un rapide coup d’œil à tous les lieux qu’il y avait amalgamés – le 221B, bien sûr, et le vieux bureau de son frère, son ancienne chambre chez ses parents, la morgue, l’église où il avait entendu de si merveilleux concerts dans son enfance. Il se heurta à Irène Adler alors qu’il ne s’y attendait absolument pas, et elle lui fit un clin d’œil entendu. Ainsi, elle se promenait toujours librement dans son palais. Complètement nue. [4]
D’accord, pourquoi pas. Il avait renoncé depuis longtemps à essayer de la contrôler.
– Qui est cette femme qui se balade nue dans ton esprit ?
– Pourquoi, répondit Sherlock sans réfléchir, tu es jalouse ?
Un sifflement étranglé, un mouvement brusque, un cri de rage, et il sentit des doigts se refermer sur sa gorge tandis qu’une autre main s’abattait sur son visage.
.
Jalouse. Le mot à ne pas prononcer. Bien sûr, Eurus était jalouse. Elle voulait son frère pour elle toute seule – elle le voulait vivant, pour qu’il joue avec elle, s’occupe d’elle, et d’elle exclusivement, et elle le voulait mort, pour le punir de ne jamais avoir, comme elle le lui avait dit quelques minutes auparavant, daigné poser les yeux sur elle.
A Sherrinford, aussi, son premier réflexe avait été de l’étrangler. Enfin, juste après lui avoir pris la main. Un message plutôt contradictoire. [5]
– Sherlock, je ne sais pas de quelle trappe tu parles, mais peut-être qu’il n’est pas nécessaire de la fermer. Peut-être qu’il y a une autre solution.
Il n’était pas certain que Molly lui parlait réellement. Peut-être que cette discussion se passait seulement dans sa tête. En face de lui, dans le loft inondé, la jeune femme avait l’air de marcher sur l’eau. Il essaya de nager vers elle.
– Qu’est-ce que tu veux dire ? croassa-t-il entre deux inspirations douloureuses.
.
C’était nouveau. Ses hallucinations le menaçaient souvent, mais elles étaient rarement aussi… saisissantes de réalisme. Sans mauvais jeu de mot. La voix reprit, froide et menaçante :
– Ne. Me. Tente. Pas. Parce que je le ferais avec grand plaisir, tu sais.
Sherlock sentait le sang couler de ses narines à sa bouche. L’hallucination l’avait giflé, et menaçait à présent de l’étrangler. Il parvint à murmurer dans un sifflement :
– Tu ne veux pas savoir ce qu’il y a au grenier ?
Les doigts frémirent, se crispèrent, relâchèrent légèrement leur pression, et pour finir se rétractèrent. Sherlock renifla, ravalant le sang qui continuait à couler sur ses lèvres, puis monta rapidement l’escalier qui menait au loft, empli de couleurs que personnes n’avait jamais vues, de sons que personne n’avait jamais entendus. Son jardin secret, celui qu’il avait parfois du mal à atteindre, composé d’une enfilade de pièces dont les portes se grippaient parfois. Il avait eu besoin de cocaïne pour les ouvrir, les unes après les autres. Mycroft lui avait dit, un jour, que derrière ces portes l’attendait la mort, et que lorsqu’il ouvrirait la dernière, il ne pourrait plus faire demi-tour parce que toutes les autres se refermeraient derrière lui.
– Arrête de parler de Mycroft, c’est ennuyeux.
– Oui, c’est vrai.
Mycroft était ennuyeux, la voix avait raison. La main se posa de nouveau sur son bras et le caressa doucement, comme pour l’encourager à continuer.
– C’est tout ? Il n’y a rien d’autre dans ton palais mental ?
Bien sûr que si. Il restait le sous-sol. Mais comment un courant d’air aurait-il pu provenir d’une cave sans porte, ni fenêtre, ni soupirail – sans aucune communication avec le monde extérieur ?
– Une trappe, peut-être ? suggéra doucement la voix.
.
Eurus avait profité de ce soir-là pour guider l’esprit de son frère vers le piège si soigneusement préparé durant leur enfance. Oui, il s’en souvenait à présent : ils avaient construit ensemble leurs palais mentaux respectifs. En secret, loin des adultes, loin de Mycroft, et même loin de Victor. C’était elle qui avait suggéré la trappe. En dernier recours, avait-elle précisé. Tout comme elle, dans sa forteresse volante, avait prévu un parachute. Sherlock avait acquiescé, et ajouté ce qu’il pensait être une issue de secours à l’architecture générale de son palais.
Il n’avait pas compris le sourire triomphant d’Eurus. Il n’avait pas compris qu’il ne lui resterait plus, trente ans plus tard, qu’à prendre son frère par la main et à l’emmener tranquillement se noyer dans la rivière souterraine qu’elle avait placée là. [6]
La main de Molly se referma sur la sienne et la serra si fort qu’il en eut presque mal.
– Tu essayes d’enterrer le problème comme s’il n’existait pas. Mais il existe, Sherlock. Essayer de le faire disparaître ne le réglera pas.
Elle avait raison, bien sûr, elle avait raison, mais le niveau de l’eau ne cessait de monter malgré tout.
Néanmoins, sa main était toujours dans la sienne, et le maintenait à flot.
.
Sherlock descendit, marche après marche, presque avec réticence, l’escalier qui menait aux fondations de son palais, à cette enfilade de cellules où il avait soigneusement emprisonné chacun des sentiments qu’il ne comprenait pas.
– Tu as enfermé tes émotions ?
La voix semblait totalement extatique à cette idée.
– Pas seulement les miennes. Celles des autres aussi.
– Et qu’est-ce qui se passerait si toutes les portes s’ouvraient au même moment ? Sous l’effet d’une forte pression, par exemple ?
Cette question, son frère la lui avait déjà posée, des années auparavant, et il connaissait la réponse. Cependant, il hésita à la donner, parce qu’il lui semblait que la créature assise sur le bord de son lit était impatiente de voir le résultat, qui ne pouvait manquer d’être catastrophique. Toutes ces émotions sous les verrous, emprisonnées à double tour dans des coffres sécurisés, il les avait gardées si longtemps cachées que, lorsque John était arrivé et l’avait poussé à les laisser respirer un peu, Sherlock avait cru mourir. Ressentir à nouveau, après toutes ces années de réclusion volontaire, était proprement terrifiant.
Mais maintenant… Maintenant, les portes s’ouvraient de temps en temps, les pièces n’étaient plus si hermétiques qu’auparavant, alors peut-être que si elles cédaient d’un seul coup, il ne deviendrait pas totalement fou. Et si tel était le prix à payer pour avoir rencontré John, ainsi soit-il.
– John, encore et toujours John ! siffla la voix. Qu’est-ce qu’il a de si spécial ? Qu’est-ce que Victor avait de si spécial ?
Pour la seconde fois, le nom de Victor fit trembler les fondations de son palais.
Sherlock passa prudemment la tête dans l’entrebâillure de sa chambre forte, cette petite pièce totalement sécurisée, où il se réfugiait lorsque le douleur menaçait de prendre le pas sur tout le reste. Au centre de son malais mental, le cœur même de sa personnalité. Il y était allé lorsqu’il avait été torturé en Serbie. Lorsque Mary lui avait tiré dessus chez Magnussen. Moriarty l’y attendait, dans une camisole de force, comme un double maléfique prêt à lui sauter dessus pour essayer de l’attirer…
Vers la trappe, réalisa soudain Sherlock. C’était là que sa Némésis s’efforçait de l’entraîner. [7]
Mais aujourd’hui, Moriarty était tapi dans un coin et il ne lui prêta aucune attention. En revanche, il était évident que le courant d’air provenait de cette pièce – ou, plus spécifiquement, de la trappe située au milieu de la chambre forte. Ce qui signifiait qu’il ne s’agissait pas seulement d’un ultime refuge, d’un moyen de fuir. Si elle frémissait de la sorte, c’était parce que quelque chose, ou quelqu’un, était caché sous cette trappe, et s’efforçait de sortir.
Quelqu’un qui s’appelait Victor ?
Le courant d’air s’intensifia, comme une réponse positive à cette question. Mais Sherlock ne connaissait aucun Victor. Ou plutôt, son chemin avait croisé celui de nombreux Victor, mais aucun d’eux n’avait été assez important pour posséder une place au cœur de son palais mental.
– Ouvre-la, Sherlock. Ouvre-la et tu sauras, chuchota la voix, tentatrice.
Il ne voulait pas, pas vraiment, mû par le pressentiment d’une catastrophe imminente, mais la curiosité avait toujours été sa principale qualité et son principal défaut. Il entra dans la pièce.
Le courant d’air cessa brusquement.
Au centre de la chambre forte, assis sur la trappe, dans le but évidente de la maintenir fermée, se trouvait un chien.
– Barberousse… murmura Sherlock.
.
Le dernier obstacle entre lui et l’horrible réalité. Fidèle jusqu’au bout, songea-t-il avec amertume. Victor, qu’il avait trahi sans le savoir, et qui était tout ce temps resté là, dans son esprit, pour garder la trappe fermée, pour empêcher Sherlock de se noyer. [8]
– Sherlock, écoute-moi, continuait doucement Molly. D’accord, ta sœur est folle, mais ce n’est pas en essayant de l’oublier que tu régleras le problème.
C’était ce qu’il avait toujours fait, sans le savoir. Nier la réalité, la nier avec violence, avec passion, avec désespoir. Ne plus ressentir. Ne plus s’attacher. Ne plus aimer. Parce que sa sœur finirait toujours par venir lui prendre ceux qui lui étaient chers.
.
– Tu commences à te souvenir ? Enfin ? Oh, j’ai attendu ce moment pendant tellement longtemps !
La voix, urgente, fébrile, frénétique, fit courir un frisson le long de sa colonne vertébrale. Les contours de son palais mental commencèrent à se dissoudre, et malgré toute sa volonté, il ne parvint pas à empêcher son esprit de revenir au 221B.
– Je t’ai dit d’arrêter de trembler ! hurla la voix. Tu y étais presque ! Concentre-toi ! Retournes-y !
Sherlock ferma les yeux, crispa les mâchoires, sentit une goutte de sueur couler le long de son nez, se mêler au sang qui commençait à coaguler, mais rien à faire, il était bloqué dans son lit, tremblant de tous ses membres et pourtant pétrifié.
– Si tu n’as pas arrêté de trembler dans une minute, Sherlock, je te tue. (La voix n’exprimait rien d’autre qu’une certitude absolue.) Ça ne sera pas aussi intéressant que ce que j’avais prévu, mais tu commences à m’énerver sérieusement.
Il essaya désespérément de maîtriser les frissons qui couraient sur sa peau comme des vagues, en vain.
Le vent d’Est se lève, Sherlock. Et il vient te chercher.
C’est alors que son téléphone portable, posé sur sa table de nuit, se mit à sonner. Sherlock tendit la main, s’en empara. Ses doigts tremblèrent au moment d’accepter l’appel de son frère.
La forme quitta le lit précipitamment, comme pour résister à la tentation de l’étrangler devant témoin. [9]
.
Pour finir, c’était le coup de fil de Mycroft qui avait fait fuir Eurus. Il avait dû, cette nuit-là, passer près de la vérité. Voilà pourquoi son frère avait semblé si peu lui-même au téléphone : il avait compris, avant Sherlock, qu’Eurus était libre de ses mouvements. Comme Sherlock, il s’était alors forcé à réfléchir rationnellement, à refouler la panique qui menaçait de le submerger. Et il en avait rationnellement conclu qu’il n’y avait pas de danger. Ah, ils faisaient une belle paire d’imbéciles, tous les deux.
Mais Eurus était partie, peut-être elle-même effrayée de ce qu’elle avait failli faire. Après tout, elle avait besoin de Sherlock vivant pour son grand jeu, qu’elle mettait au point depuis des années. Le tuer sur un coup de tête aurait été décevant.
Pour finir, c’était Mycroft qui l’avait sauvé. L’idée le frappa soudain : tout ce qu’avait fait Mycroft, depuis toujours, il l’avait fait pour protéger son petit frère. Le protéger de sa sœur démente, le protéger de Moriarty, le protéger de ses tendances autodestructrices. Il n’avait pas compris qu’il luttait toujours contre le même ennemi, puisqu’Eurus avait manipulé Moriarty, puisqu’elle avait fait son nid dans le palais mental de Sherlock, mais il ne s’était jamais avoué vaincu…
– Sherlock ? Ouvre les yeux.
La voix de Molly était calme, trop calme même, comme si elle cherchait à réprimer sa propre angoisse. Il lui en fut reconnaissant. Elle aussi avait toujours été là pour lui.
Il ouvrit les yeux.
.
Il ouvrit les yeux. Il était bien étendu sur le sol, au milieu des piles de livres froissés, et Molly était penchée sur lui, une main derrière son crâne, l’autre tenant fermement la sienne. Autour de lui, sur les couvertures des romans d’amour qu’aimait Molly, sur les pages blanches, des taches rouges, et le sang qui continuait à couler le long de sa joue jusqu’au plancher.
Il voulut se lever, s’excuser, elle l’en empêcha avec douceur mais fermeté.
– Je suis en train de tout salir, murmura-t-il.
– Ça n’a pas vraiment d’importance, répondit-elle.
Il aurait voulu lui dire que ça en avait beaucoup plus qu’elle ne le prétendait, que ces mouchetures rouges qu’il avait répandues un peu partout sans le faire exprès étaient comme l’image de leur relation qu’il avait meurtrie et salie, parce qu’il était incapable d’aimer normalement, sans faire couler le sang et les larmes, sans faire souffrir l’autre, sans souiller ce qu’il touchait.
La main qui jusqu’ici lui soutenait la tête déposa doucement cette dernière sur un dictionnaire, prit un mouchoir et lui essuya doucement le visage, larmes, sang, morve et bile confondues.
– Un bateau, ça ne marcherait pas ?
Le changement de conversation le désarçonna.
– Un bateau ? répéta-t-il sans comprendre.
– Un bateau te permettrait de te maintenir à la surface, expliqua la jeune femme comme si elle connaissait son palais mental depuis toujours, comme si elle avait constaté les dégâts causés par les flots de la rivière souterraine, et recherché pour lui la solution la plus adaptée. L’eau va bien finir par redescendre un jour ou l’autre.
– Je ne crois pas, murmura Sherlock.
– Mais si, bien sûr que si. Tu ne vas pas vomir et saigner du nez et pleurer tout le reste de ta vie. Tout ce qu’il te faut, c’est du temps. Tu es submergé par des sentiments que tu ne comprends pas, mais ça va passer. Et ce sera beaucoup plus facile avec un bateau.
– Un bateau pirate ? demanda-t-il avec espoir (tout en se traitant mentalement d’imbécile : tu as quoi, cinq ans et demi ?).
Apparemment, la réponse à cette question était oui, car elle lui sourit avec une affection qui fit naître une vague de chaleur dans sa poitrine glacée.
– J’aurais dû m’en douter. Oui, un bateau pirate. Tu le vois ?
– Oui.
Dans son palais mental, comme dans la réalité, elle lui tenait toujours la main, mais à présent elle était sur le pont du bateau, et l’invitait à monter. Il prit une inspiration tremblante, et soudain il était à bord, et tout devint un peu plus facile.
– Ça marche, murmura-t-il, ébahi.
– Bien sûr que ça marche.
Il n’arrivait pas à y croire, mais il ne se noyait plus. Il avait même l’impression que sous la coque, l’eau s’était à peu près stabilisée.
– Écoute, reprit Molly, j’ai compris que ta sœur est un monstre, qu’elle a tué des tas de gens, qu’elle a failli tuer John, et Mycroft, et peut-être moi aussi, mais je ne crois pas qu’essayer de la cacher soit une bonne idée. C’est ce que ton frère a fait dans la réalité, si j’ai bien compris ce que tu m’as raconté, et c’est ce que tu as fait dans ton palais mental. Et ça ne vous a fait du bien ni à l’un ni à l’autre.
– Qu’est-ce que je dois faire alors ?
Sa voix sonna de nouveau comme celle d’un enfant – un enfant abandonné, désespéré, anéanti, qui attend que les adultes viennent chasser ses terreurs nocturnes. Il sentit le pouce de Molly caresser doucement le dos de sa main.
– Peut-être que tu devrais essayer de la sortir des ténèbres. De l’amener vers la lumière.
Il n’était pas certain de comprendre la métaphore.
– Molly, je sais que tu penses qu’il y a du bon en chacun de nous, mais je t’assure qu’Eurus est une vraie psychopathe. Il n’y a pas moyen de lui parler, pas moyen de l’atteindre, pas moyen de « l’amener vers la lumière », comme tu dis. Elle est complètement folle, un point c’est tout.
– Les mots ne sont pas la seule façon de communiquer, fit remarquer la jeune femme.
Sherlock secoua la tête, incrédule, jeta un regard sur son palais mental inondé, et aperçut le violon, qui flottait sur l’eau, miraculeusement intact, à quelques centimètres de la coque du bateau. [10]
[1] Comme je l’ai indiqué dans le chapitre précédent, Eurus parvient à manipuler le directeur de Sherrinford et à sortir de l’établissement où elle est censée être enfermée. Elle joue alors plusieurs rôles pour en apprendre davantage sur Sherlock et tisser sa toile autour de lui. Entre autres, dans l’épisode 2, elle met Sherlock sur la piste du tueur en série en jouant le rôle de la fille de ce dernier, une certaine Faith, inquiète de ce que son père a dit (qu’il « aimait tuer des gens »).
[2] Voir note n°1. Culverton Smith est le tueur en série.
[3] Cette expression étrange - « contexte émotionnel » - est utilisée par Eurus pour justifier toutes ses actions. Elle place son frère dans des situations impossibles, lui fournissant des cas à résoudre avec des vies en jeu, menaçant ses proches, lui ordonnant de tuer soit Mycroft, soit John… Bref, elle teste ses émotions, ses sentiments, et l’utilise comme un rat de laboratoire.
[4] C’est tout à fait canon. Irene apparaît dans le palais mental de Sherlock dans l’épisode du mariage de John et Mary… et elle est complètement nue.
[5] Il est difficile de comprendre les véritables motivations d’Eurus dans l’épisode. Elle aime, déteste et est obsédée par Sherlock. J’ai essayé d’expliquer dans ce chapitres les raisons de son obsession (la sensation d’abandon de la part de son frère et la volonté de se venger et de le récupérer pour elle toute seule en éliminant tous ses proches, tout en souhaitant le punir de l’avoir abandonnée – d’où ses velléités de le tuer).
[6] Il est évidemment peu crédible qu’une petite fille de 6 ans ait poussé son frère de 7 ans (je crois que c’est à peu près l’âge qu’ils ont au moment où se produit le drame familial) à construire un palais mental avec une trappe en guise de piège et une rivière souterraine, mais j’aimais beaucoup cette idée, qui explique pourquoi Sherlock est menacé par son propre inconscient (les souvenirs qu’il a occultés et « rangés » sous cette trappe, et qui menacent de surgir à tout moment). La saison 4 étant un (pas très) joyeux bazar, je me suis dit qu’on n’en était plus à une improbabilité près…
[7] Moriarty est bien dans le palais mental de Sherlock après la saison 2 : il porte une camisole de force et il se trouve dans la cellule capitonnée où se réfugie Sherlock lorsqu’il souffre trop. C’est là que j’ai imaginé la trappe placée par Eurus, vers laquelle Moriarty s’ingénie à emmener Sherlock car il sait qu’il risque de s’y noyer (submergé par les souvenirs et les émotions négatives).
[8] Comme je l’ai dit précédemment, Barberousse, le chien que Sherlock semble regretter de son enfance, n’est en réalité pas un chien mais son ami Victor. Incapable de supporter la disparition de ce dernier, il a reconstitué la réalité et occulté / transformé beaucoup de souvenirs. Encore une fois, je trouve ça assez improbable, mais j’ai voulu coller au plus proche du canon de la série. J’imagine donc que, dans le palais mental de Sherlock, Barberousse/Victor cherche à protéger Sherlock en essayant de maintenir les souvenirs sous la trappe et ainsi d’éviter la noyade.
[9] Je boucle la boucle avec le premier chapitre qui se passe précisément ce soir-là : c’est le coup de fil que Mycroft passe à son frère, après s’être rendu compte que son téléphone s’est éteint, qui va le sauver. S’il y a une chose que j’ai détesté dans la saison 4, c’est la manière dont Mycroft passe pour incompétent (il a caché tout un tas de choses à sa famille, est responsable de l’alliance entre Eurus et Moriarty, a voulu utiliser Eurus tout en la maintenant à Sherrinford…). Je le regrette, et je voulais lui rendre hommage dans cette histoire, et lui permettre de sauver son frère encore une fois, quoique involontairement.
[10] A la fin du dernier épisode de la saison 4, on comprend que du temps s’est écoulé et que Sherlock rend régulièrement visite à sa sœur, enfermée pour de bon à Sherrinford ; elle est devenue mutique et il semble impossible de communiquer avec elle, mais Sherlock ne la laisse pas tomber et vient lui jouer du violon. Un jour, elle lui « répond » en jouant à son tour et on comprend que la communication entre le frère et la sœur, malgré leur passé et leur passif, va continuer de cette manière. Je voulais terminer cette fic sur une note d’espoir (mais difficile à comprendre quand on n’a pas vu ou qu’on ne se souvient pas de la fin de ce dernier épisode).