A la fin, c'est l'eau qui gagne

Chapitre 2 : It's a trap !

6858 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 20/10/2025 19:38

Juste une petite précision avant de commencer ce chapitre : tous les passages longs en italiques sont des citations de l’épisode 3 de la saison 4, qui arrivent à Sherlock sous forme de flashbacks. Le temps passe, on arrive au dernier épisode de la saison 4. Eurus a réussi à manipuler le directeur de Sherrinford et à gagner ainsi sa liberté. Elle s’est fait passer pour une cliente auprès de Sherlock, a séduit John et a élaboré un stratagème pour les attirer tous les deux, ainsi que Mycroft, à Sherrinford, où elle met en place une sorte d’immense jeu de piste moyennement sympa destiné à son petit frère adoré / détesté.

Dans son plan dément pour « tester » Sherlock, Eurus a apparemment miné l’appartement de Molly. Elle demande à Sherlock de l’appeler et de lui faire dire « je t’aime » en moins de quelques minutes (sans lui dire qu’il agit sous la contrainte et sans la faire paniquer), sinon elle fera exploser son appartement. C’est cet extrait que j’ai utilisé ici en italiques. Nous sommes donc quelques jours après l’épisode 4, Sherlock a réussi à déjouer les plans de sa sœur et les souvenirs lui sont revenus. Je n’ose pas imaginer l’état mental dans lequel il se trouve (ou plutôt, si, puisque c’est le sujet de ce chapitre et du suivant). Le personnage vous semblera probablement très OOC, mais j’espère expliquer de manière suffisamment crédible ce changement psychologique. Comme je l’ai indiqué dans le chapitre précédent, cette histoire aborde des thèmes de plus en plus sombres au fur et à mesure de la narration.




Chapitre 2 : It’s a trap ! [1]


Sherlock jeta un coup d’œil à son portable pour la centième fois de la journée. Toujours aucune réponse. Cela n’avait rien d’étonnant, mais son esprit avait déjà conçu, pour expliquer le silence de Molly, huit hypothèses différentes, toutes moins encourageantes les unes que les autres. Eurus pouvait avoir des complices. Les démineurs pouvaient avoir laissé passer quelque chose dans l’appartement. Ou bien…

– A quoi tu penses ?

La voix de John le tira de ses considérations morbides.

– A Molly, répondit-il sans hésiter.

Son ami leva un sourcil inquisiteur. Il ne s’attendait visiblement pas à cette réponse, et ne savait pas comment réagir. Ou peut-être était-il tout simplement trop fatigué pour réagir. Puis son regard se fit vague, il porta une main à sa bouche et éternua violemment à deux reprises. Le détective se leva en silence, alla jusqu’à la cuisine, mit de l’eau à chauffer, sortit une tasse.

Depuis qu’ils étaient revenus de Sherrinford, trois jours auparavant, Sherlock fonctionnait en pilote automatique. Il s’interdisait de penser, s’abrutissait de somnifères, mais les images arrivaient malgré tout, se superposaient à la réalité, en surimpression sur ses paupières closes, et menaçaient de l’étouffer.

Il versa de l’eau dans la théière, les yeux toujours rivés sur son téléphone, qui continuait à n’émettre aucun son. Il aurait largement préféré une bordée d’insultes de la part de Molly, une gifle ou deux, ou même un coup de pied bien placé. Tout plutôt que ce silence effrayant.

Il ajouta le sucrier, une petite cuiller, puis souleva le plateau et retourna dans le salon. Avachi dans son fauteuil, la main sur la tempe, John entrouvrit un œil. Sherlock déposa le thé sur la petite table à côté de lui.

– Merci, murmura le médecin. Qu’est-ce que tu fais ? ajouta-t-il en voyant le détective se diriger vers la porte.

– Je vais voir Molly, répondit Sherlock.

Il se retourna à temps pour voir son ami lever les yeux au ciel et aussitôt grimacer, parce qu’il n’est pas très intelligent de lever les yeux au ciel quand on a mal à la tête. Et John avait toujours mal à la tête lorsqu’il était enrhumé.

– Sherlock, fit-il remarquer avec un reniflement, il pleut, il fait froid, et je ne suis pas sûr que ce soit une très bonne idée.

Le détective jeta un regard fatigué vers la fenêtre. Il pleuvait, en effet. De l’eau, encore et toujours de l’eau. Comme s’il n’y en avait pas assez dans sa tête. Comme si sa vie n’était pas devenue entièrement liquide depuis quelques jours.

– Je sais, mais il faut absolument que je lui parle et elle ne répond pas au téléphone.

– Et… ça te surprend ? demanda John prudemment, sans la moindre trace de sarcasme dans la voix.

Sherlock savait pertinemment que son ami craignait de déclencher chez lui une explosion de colère, ou de désespoir, ou de panique, et que c’était la raison pour laquelle il parlait si doucement. Il ne pouvait pas le lui reprocher. Ces trois derniers jours avaient été pour le moins… difficiles. Lorsque John l’avait raccompagné à Baker Street, Sherlock avait affirmé qu’il s’en tirerait très bien seul, qu’il n’avait pas besoin d’aide. La seconde d’après, il s’était effondré au sol, le visage inondé de larmes, incapable de respirer. Cette première crise d’angoisse avait été suivie de plusieurs autres, totalement incontrôlables, alors que le niveau de l’eau ne cessait de monter dans son palais mental, envahissait lentement la grande salle de l’Albert Hall, recouvrait les visages qui le regardaient, atteignait le premier étage, engloutissait tout ce qu’il y avait entreposé. Les fondations étaient inondées depuis longtemps, et les « eaux profondes » dont Eurus avait parlé à Musgrave, après avoir défoncé toutes les portes du sous-sol, continuaient à monter, monter inexorablement… [2]

Si John n’était pas resté avec lui à Baker Street, nul doute qu’il se serait noyé. Noyé dans ses propres larmes, qui coulaient sans crier gare aux moments où il s’y attendait le moins, noyé dans les flots de sueur qui le baignaient chaque nuit alors qu’il se réveillait en sursaut avec le sentiment d’une perte irréparable, noyé dans le sang qui descendait depuis ses narines jusqu’à sa gorge, l’étouffant, l’emplissant de son fade parfum, souvenir de celui qu’Eurus avait fait couler dans le seul but d’attirer son attention.

Son palais mental était presque englouti, mais le niveau des eaux sales, puantes, putrides qui l’avaient envahi avaient fini par se stabiliser sur le palier du deuxième étage, où étaient stockés ses souvenirs personnels. Il espérait vraiment qu’elles ne monteraient pas davantage.

Cependant, la question de John était pertinente. Non, Sherlock n’était absolument pas surpris. Pourquoi Molly chercherait-elle à lui parler de nouveau, après ce qu’il lui avait involontairement fait endurer ?

.

– Molly, s’il-te-plaît, ne cherche pas à savoir pourquoi, contente-toi de répéter ces mots.

– Quels mots ?

– Je t’aime.

– Fiche-moi la paix !

– Molly, non, je t’en prie, ne raccroche pas ! NE RACCROCHE PAS !

« Calme-toi, Sherlock, ou je la tue tout de suite. »

.

La voix d’Eurus – dans son esprit, uniquement dans son esprit ! – fit courir un violent frisson le long de la colonne vertébrale du détective. L’instant d’après, John était debout, à côté de lui, une main posée sur son bras. Étrangement, le contact physique l’apaisait, lui qui n’avait jamais aimé toucher personne.

– Flashback ? demanda calmement le médecin, et Sherlock acquiesça.

– C’est bon, c’est passé maintenant. J’y vais.

John se détourna pour éternuer, avant de regarder son ami dans les yeux.

– Alors, je viens avec toi.

– Pas question. Tu es malade.

Apparemment, le système immunitaire de John n’avait pas aimé le bain forcé de plusieurs heures dans les eaux glacées du puits de Musgrave. C’était compréhensible, après tout. On ne pouvait pas dire qu’il ait été au mieux de sa forme ces derniers temps. [3]

– Sherlock…

Le détective ferma les yeux. John avait raison, évidemment. Il était à peine capable de fonctionner alors qu’il n’était pas sorti de l’appartement depuis trois jours. Quitter le 221B n’était pas une bonne idée, il le savait, rationnellement, logiquement, mais apparemment, la raison et la logique l’avaient déserté depuis que l’inondation avait infiltré les murs de son palais mental. Ses sentiments prenaient le dessus de façon soudaine et totalement incontrôlable.

– J’y vais en taxi, je reviens tout de suite. Je dois… Je dois lui dire… que je ne voulais pas… Je veux dire, je lui ai promis…

Les mots venaient avec difficulté, ne suffisaient pas pour exprimer ce qui lui importait tant. Il savait juste qu’il avait promis à Molly, le soir de son anniversaire, de ne plus jamais lui faire de mal. [4] Et Eurus l’avait forcé à la faire souffrir, en l’obligeant à prononcer ces trois petits mots qui avaient toujours, il s’en rendait compte à présent, dansé entre eux, jamais prononcés, pas même murmurés…

– Sherlock, reprit John avec douceur, en lui secouant le bras pour le ramener à la réalité. Je comprends que tu aies besoin de lui expliquer ce qui s’est passé, et que tu aies besoin d’y aller seul, mais je crois que tu devrais attendre d’aller un peu mieux.

Sherlock traduisit immédiatement la pensée de son ami : « Étant donné l’état émotionnel dans lequel tu te trouves à présent, tu risques d’aggraver les choses au lieu de les arranger ». C’était probablement vrai, mais il ne pouvait pas rester ici à ne rien faire. Si quelque chose était arrivé à Molly...

John comprit probablement, parce qu’il poussa un nouveau soupir, qui dégénéra vite en toux.

– D’accord, vas-y, alors. Si tu ne te sens pas bien, appelle-moi tout de suite, entendu ?

– Promis.

Il faisait probablement froid, s’il fallait en croire les nombreux passants emmitouflés dans leurs manteaux, mais il ne s’en rendit pas compte, parce que son thermomètre interne était de toute façon en panne, noyé comme presque tout le reste. Il ne savait pas quand c’était arrivé. Peut-être pendant sa presque overdose. Peut-être à Sherrinford. Peut-être à Musgrave. De toute façon, depuis la mort de Mary, tout lui avait échappé, glissé des mains.

Il n’était pas certain de parvenir à tout reconstruire.

Mais en comparaison de ce qui aurait pu se passer, la situation n’était pas si terrible. Ni le thermomètre cassé, ni son palais mental noyé, ni les flashbacks, ni les cauchemars, ni les crises d’angoisse n’avaient de réelle importance. Si tel était le prix pour que John soit en sécurité, et avec lui Molly, Mrs Hudson et Lestrade, Sherlock était prêt à le payer sans se plaindre.

Un taxi s’arrêta en face du 221B et le détective s’engouffra à l’intérieur, donna l’adresse, ferma les yeux. Inspiration, expiration. Contrôle. Contrôle. Contrôle. Mais les voix dans sa tête redevenaient trop fortes pour qu’il puisse s’en abstraire.

.

– Pourquoi tu me fais ça ? Pourquoi tu te moques de moi ?

– Je t’en prie, il faut que tu m’écoutes, d’accord ?

« Plus doucement, Sherlock ! »

– Molly, c’est… dans le cadre d’une enquête, une… sorte d’expérience.

– Je ne suis pas une de tes expériences, Sherlock.

– Non, bien sûr que non, je sais. Tu es mon amie. On est amis, tous les deux. Mais s’il-te-plaît… répète ces mots.

– Je t’en prie, ne fais pas ça. Ne me demande pas ça.

.

– … Monsieur ? Tout va bien ?

Sherlock ouvrit les yeux, la respiration saccadée. Une goutte de sueur, qui avait coulé le long de sa tempe gauche, venait d’atteindre la ligne de sa mâchoire. Ses mains tremblaient. Le taxi s’était arrêté en face de chez Molly, et le chauffeur, retourné sur son siège, le regardait avec une inquiétude visible.

– Oui, merci.

Il tendit un billet sans prêter attention au chiffre qui y était imprimé et sortit de la voiture. Il transpirait abondamment à présent, malgré les frissons qui le secouaient sans discontinuer. La tête lui tournait, il avait envie de vomir, il avait mal à la gorge. Peut-être avait-il attrapé le rhume de John. L’espace d’un instant, il l’espéra, mais il n’était pas dupe. Il savait quels dégâts un esprit en roue libre pouvait infliger à un corps.

Constater de ses propres yeux que l’immeuble de Molly n’avait pas explosé, comme il l’avait presque craint en voyant qu’elle ne répondait pas au téléphone, lui permit cependant de se calmer. Il monta lentement les quarante-huit marches qui séparaient la rue du troisième étage et pressa le bouton de la sonnette, puis ferma les yeux et attendit.

– Sherlock ?

Entendre sa voix était l’une des plus merveilleuses choses qui lui soient jamais arrivées. Voir son visage – sain et sauf, intact, indemne – était encore plus extraordinaire, malgré le regard de mépris avec lequel elle le toisait.

– Qu’est-ce que tu fais là ? demanda-t-elle durement.

– Je… venais voir comment tu allais, répondit-il en essayant désespérément d’empêcher ses mains de trembler.

Les prunelles de la jeune femme se durcirent encore davantage.

– Tu veux dire trois jours après qu’une équipe de fous furieux s’est introduite chez moi au milieu de la nuit, m’a mise dehors sans ménagements pour tout fouiller, puis est repartie sans une explication cohérente ? ironisa-t-elle.

Sherlock resta muet, ne sachant que répondre, mais apparemment elle n’attendait aucune réponse, car elle poursuivit de la même voix froide et dénuée de compassion :

– J’essaye de ranger depuis mercredi, mais il a bien fallu que j’aille travailler malgré tout, tu sais, comme le font les gens normaux.

– Je sais, murmura le détective. Est-ce que tu me donnerais une chance de m’expliquer ?

Molly ricana, et Sherlock décida qu’il détestait ce son.

– Expliquer quoi ? Qu’est-ce qu’il y a encore à expliquer ? La seule chose que j’aimerais comprendre, c’est pourquoi j’ai été assez stupide pour te croire une fois de plus. Parce que je me fais avoir à chaque fois. Oui, à chaque fois ! Et ensuite il me faut des semaines entières pour me remettre de tes conneries. Je t’ai cru quand tu m’as dit que tu ne me ferais plus souffrir. Tu te souviens que tu me l’as promis, ou bien tu délirais complètement à cause du manque et tu as tout oublié ? Tu avais l’air si sincère. J’ai cru que tu l’étais. Apparemment, j’avais tort. Ça m’apprendra. Bonne soirée, Sherlock. J’ai des choses à faire.

Elle voulut lui fermer la porte au nez, mais il glissa son pied sur le seuil et lui prit la main.

– Ne fais pas ça. S’il te plaît, ne me laisse pas comme ça.

Il détestait sa faiblesse, la supplication clairement audible dans sa voix, et les larmes qu’il sentait se frayer insidieusement un chemin le long de ses canaux lacrymaux. Une autre conséquence des récentes révélations familiales : parfois, les larmes affluaient, il ne savait pas pourquoi (peut-être en raison du trop-plein d’eau qui avait envahi son palais mental ?), et coulaient le long de ses joues, jusqu’à ce qu’il soit finalement trop épuisé ou déshydraté pour pleurer davantage. John avait été là à chacune de ces (nombreuses, bien trop nombreuses à son goût) crises, le serrant contre lui en silence alors qu’il sanglotait comme un gamin, assailli par le souvenir d’un petit garçon de sept ans, le seul ami de son enfance, qui était mort par sa faute, noyé, emprisonné sous les fondations de son palais mental – non, non, à Musgrave, dans le puits, il se trompait, ça ne s’était pas passé seulement dans son esprit, non, Victor était bel et bien mort, c’était la vérité, c’était réel

– Si c’est encore un de tes petits jeux, je te préviens, je ne veux plus y jouer.

Il avala avec difficulté, incapable de se débarrasser de l’image du crâne d’enfant que John avait trouvé au fond du puits.

– Ce… Ce n’est pas un jeu, finit-il par dire, espérant que la douleur soudaine qui avait assailli sa gorge et ses oreilles ne signifiait pas qu’il allait s’effondrer brutalement.

Molly soupira et se passa la main sur le visage. Puis elle fronça les sourcils et se pencha légèrement pour regarder plus attentivement les traits du nouveau venu.

– Qu’est-ce qui t’arrive ? Tu es malade ? demanda-t-elle, visiblement partagée entre l’inquiétude et la colère.

Sherlock réalisa soudainement que la peau de la jeune femme, sous ses doigts, était bien moins chaude que la sienne, et il lui lâcha le poignet en hâte.

– Non, je…

– Ne me mens pas, Sherlock. Ne me mens plus jamais. Merde, pourquoi est-ce que tu rends toujours les choses si difficiles ?

Il sentit sa tête devenir plus légère et dut s’appuyer au mur pour ne pas tomber. Sa vision s’obscurcit. Il se demanda, d’une façon presque détachée, s’il allait vraiment s’évanouir sur le palier de Molly Hooper. C’était tout à fait possible. Il était déjà tombé dans les pommes quatre fois depuis Sherrinford. John avait raison, venir ici était une très mauvaise idée.

– Qu’est-ce que…

La jeune femme lui attrapa le bras avec brusquerie, et le monde, qui s’était dilué dans un brouillard poisseux, retrouva provisoirement une consistance plus solide.

– Entre, je vais appeler John pour qu’il vienne te chercher. Qu’est-ce qui t’est arrivé ? Pourquoi tu es venu dans cet état ?

Il trébucha sur le palier, les yeux pleins de larmes, et parvint à articuler :

– Il fallait que je te parle… que je te parle d’Eurus.

Il avait passé les trois derniers jours à esquiver ce nom, à éviter le fantôme de sa sœur qui venait le visiter en rêve dès qu’il fermait les yeux. Il savait pertinemment, pourtant, qu’Eurus avait toujours été en lui, qu’elle était cette partie obscure qu’il avait toujours portée au fond de lui, les ombres qui l’avaient toujours enveloppé, son inhumanité, ce désir de savoir, d’expérimenter, peu importe le prix, la souffrance infligée, les vies en jeu. Eurus avait juste un peu d’avance sur lui, sur les échelons de la folie, mais il la talonnait. Ils se ressemblaient tellement.

.

– C’est très important. Je ne peux pas t’expliquer pourquoi, mais je te jure que c’est important.

– Je n’y arriverai pas. Je suis désolée, je ne pourrai pas… je ne pourrai pas te dire ça.

– Bien sûr que si ! Pourquoi tu ne pourrais pas ?

– Tu sais très bien pourquoi.

– Non, je ne sais pas.

.

Il avait prononcé ces mots en toute sincérité. Il ne savait pas pourquoi. Trois petits mots à répéter, ce n’était pas si terrible, après tout. Il ne comprenait pas ce qui la bloquait, l’empêchait de les dire, la mettait dans cet état, la faisait souffrir à ce point – parce qu’il ne pouvait pas comprendre l’amour, comme les gens normaux le comprenaient. Parce qu’il était comme Eurus. Différent. Froid. Détaché. Insensible. Sociopathe. Et peut-être pire encore. [5]

Dans son palais mental, l’eau montait encore, froide, visqueuse, collante.

La jeune femme le guida jusqu’à un fauteuil, et il réalisa alors que son salon avait été complètement mis sens-dessus-dessous par les démineurs. Le sol avait été éventré, il y avait des trous dans les murs, le canapé gisait dans un coin, cassé, des livres avaient été jetés à terre, froissés, déchirés…

– Je suis désolé, murmura-t-il.

– Tu peux, répondit-elle avec un petit rire sarcastique. Écoute, je ne sais pas ce qui s’est passé et je ne suis pas sûre de vouloir le savoir. Depuis que je te connais, ma vie est ponctuée d’événements de ce genre, et je crois que ça ne m’intéresse plus vraiment. Alors tu vas rester là quelques minutes, attendre que ça passe, puis je vais appeler John et il va venir te chercher. Je ne pense pas que ce soit une très bonne idée de continuer à nous voir.

Il la regarda avec incrédulité. Il avait sûrement mal entendu, mal compris. Elle ne venait pas de mettre fin à leur amitié ? Elle ne pouvait pas l’exclure de sa vie de cette façon, simplement en lui disant qu’elle ne voulait plus le voir. Ce n’était pas possible.

Il se rendit compte que les larmes étaient enfin sorties, et qu’il n’y avait aucun moyen de les arrêter. Elles coulaient le long de ses joues, il pouvait sentir leur goût salé sur ses lèvres. La respiration haletante, il entendait le sang battre dans ses oreilles, comme des vagues de plus en plus puissantes, qui le submergeraient bientôt.

Il se noyait. Il n’y avait pas d’échappatoire possible. Le second étage de son esprit n’était plus un endroit sûr. Même le 221 B était totalement englouti sous les flots.

– Sherlock ? Sherlock !

Lorsqu’il fut finalement capable de voir et d’entendre à nouveau, Molly était penchée sur lui, une main sur son front, l’autre serrant son téléphone portable.

– J’appelle John ou une ambulance ? demanda-t-elle.

Elle semblait totalement paniquée.

– Non, murmura-t-il en s’essuyant les yeux et en essayant de retrouver un semblant de contrôle sur son corps. Non, s’il te plaît, écoute-moi. Donne-moi cinq minutes pour m’expliquer. Est-ce que tu peux faire ça pour moi ? Regarde, ça va, je vais mieux, c’est passé. Juste cinq minutes.

Molly secoua la tête, lâcha son front, se recula avec un regard lourd de soupçons.

– Tu sais quoi ? J’en suis presque à me demander si tu n’es pas en train de jouer la comédie, de pleurer pour m’émouvoir, de faire semblant d’être malade pour me manipuler. Je sais que tu as déjà fait ça à John et je ne suis plus certaine de pouvoir te faire confiance. [6]

Parce qu’il était comme sa sœur. Il manipulait les gens sans se soucier de leurs sentiments.

Il se noyait dans la rivière souterraine sur laquelle il avait, des années auparavant, construit son palais mental, sans même le savoir.

.

– Molly, je t’en prie, dis-le.

– Je ne peux pas. Pas à toi.

– Pourquoi ?

– Parce que… parce que c’est vrai, Sherlock. Depuis le début, c’est ce que je ressens.

– Alors, si c’est ce que tu ressens, dis-le.

.

– Qu’est-ce que je peux faire pour que tu me pardonnes ? Je ferai n’importe quoi.

Molly leva les yeux au ciel avec un soupir exaspéré.

– Je n’arrive pas à croire que tu me dises ce genre de choses. La vérité, c’est que tu ne peux rien faire, Sherlock. A part peut-être ne plus être toi, et encore. Je suis juste… fatiguée de cette relation. J’étais tellement certaine, après notre conversation de l’autre fois, qu’on allait pouvoir repartir sur de nouvelles bases. Des bases plus saines. Tu avais l’air tellement… sincère.

– Je l’étais, répondit hâtivement Sherlock. Je sais que je t’ai dit que je ne te ferais plus de mal, et je sais que j’ai manqué à ma promesse, mais…

– Je t’ai dit que je n’étais pas une de tes expériences, l’interrompit-elle avec colère, les larmes au bord des yeux. Je te l’ai dit, et tu as continué. Comme d’habitude, tu ne m’as pas écoutée. Tu n’as pas tenu compte de mes sentiments. Comment j’ai pu être assez stupide pour croire que les choses allaient changer, que tu allais changer ?

– Tu veux dire, demanda Sherlock, abasourdi, que mon frère ne t’a pas expliqué pourquoi il avait envoyé une équipe de démineurs chez toi ? Qu’il ne t’a pas dit pourquoi je t’ai appelée ce jour-là ?

– Mycroft ne m’a rien dit. Il n’est pas venu, il ne m’a pas appelée. J’ai essayé de lui téléphoner pour savoir ce qui s’était passé, mais il n’a pas daigné me répondre, ni me recontacter, malgré les trois messages que je lui ai laissés.

Oh. La nouvelle était inattendue, et pour le moins préoccupante, mais Mycroft avait probablement d’autres choses à gérer en ce moment même. Des choses qu’il estimait plus importantes que les peines de cœur de Molly Hooper. Sherlock se savait injuste envers son frère. La vérité était probablement qu’il ne parvenait pas mieux que lui à faire face aux récents événements. Un problème inquiétant, dont Sherlock aurait à s’occuper tôt ou tard, et plutôt tard que tôt – en tout cas, pas maintenant. Il avait déjà des difficultés à se concentrer sur la situation présente. La douleur qui lui vrillait les tempes commençait à devenir réellement gênante.

– Il aurait pu y avoir une bombe dans ton appartement, dit-il à voix basse. Parce que ma sœur est folle, et qu’elle est en train de m’entraîner dans sa folie. Je suis en train de tomber, encore une fois, et de me noyer, et je sais que je le mérite, mais…

– Ta sœur ? répéta la jeune femme.

– Oui, ma sœur. Tu veux bien me laisser t’expliquer ?

Molly s’assit avec méfiance sur une chaise en face de lui.

– Tu t’es encore drogué ? Tu es en train de délirer ?

– Non, je te jure que non. Tout ce que je vais te dire est vrai, tu peux demander à John si tu veux. Il était là. Elle a failli le tuer. Elle voulait le tuer. Elle voulait te tuer aussi. Elle veut tuer tout le monde autour de moi. Elle attendait le moment, dans l’ombre. Le moment où j’éprouverais de nouveau des sentiments. Elle attendait pour tuer ceux que j’aime.

Le mot passa ses lèvres avant qu’il ait eu le temps d’y penser, mais il le laissa peser. Oui, il aimait des gens. Peut-être pas de façon normale, mais cela restait de l’amour.

.

– Dis-le, toi. Vas-y, dis-le en premier.

– Quoi ?

– Dis-le de façon convaincante.

– Je… Je t’aime. Je t’aime. Molly ? Molly, s’il-te-plaît…

– Je t’aime.

.

La jeune femme leva une main en l’air.

– Hé, Sherlock, arrête, je ne comprends pas un mot de ce que tu dis. C’est complètement dingue. Je crois qu’il vaudrait mieux que j’appelle John, pour qu’il te ramène à Baker Street.

– Laisse-moi juste cinq minutes, répéta Sherlock.

Elle hésita. Il était évident qu’elle se demandait quel était le nouveau piège qu’il lui tendait, la façon dont il essayerait cette fois de la manipuler.

– D’accord, finit-elle par dire. Raconte-moi ton histoire, mais depuis le début. De quelle sœur parles-tu ?

Sherlock prit une profonde inspiration et commença à expliquer, sachant qu’il lui faudrait dire, cette fois, la vérité, toute la vérité, rien que la vérité, en commençant par le début, comme elle le lui avait demandé. Le jour où Eurus avait tiré sur John. Les révélations de Mycroft. Le drone au 221B. Sherrinford. Le piège soigneusement élaboré par l’esprit malade de sa sœur. Musgrave. La petite fille dans l’avion. [7] Le petit garçon dans le puits. Et lui au milieu.

Molly ne l’interrompit pas une seule fois, ne le traita pas de menteur, ne lui dit pas qu’il était fou à lier. Elle se contenta de rester assise en face de lui et de l’écouter attentivement. Lorsqu’il se tut, épuisé, après lui avoir tout raconté, elle resta les yeux fixés sur lui. Des yeux où était revenue la tendresse avec laquelle elle l’avait toujours regardé, sans qu’il ne s’en soit jamais rendu compte. Parce qu’en plus d’être un sociopathe, il était aveugle.

– Tu ne me racontes pas de salades, hein ? dit-elle doucement. Personne ne pourrait imaginer une histoire aussi délirante.

Puis elle fronça les sourcils, comme si elle se souvenait tout à coup d’une chose importante.

– Tu sais que tu as prononcé son nom la nuit qui a suivi ton anniversaire ? Quand je suis restée au 221B à la place de Lestrade parce que Sally avait été agressée ? Tu ne te souviens pas ?

Oh, si, il se souvenait très bien de cette nuit, la dernière nuit de délire avant que son cerveau ne décide finalement qu’il pouvait peut-être, en fin de compte, se passer de cocaïne, si John revenait auprès de lui, avant que son corps ne retrouve à peu près son équilibre précaire. Ce qu’il avait dit, en revanche, il ne se le rappelait absolument pas.

– J’ai prononcé son nom ? demanda-t-il, perplexe. Tu es sûre de toi ?

– Oui. Mycroft venait tout juste de raccrocher. Tu m’as… pris la main et demandé de rester avec toi. Puis tu m’as dit qu’Eurus était entrée dans ta chambre et qu’elle nous avait menacés tous les deux. Je… je ne comprenais rien à ce que tu disais, tu avais une forte fièvre et tu hallucinais, je n’y ai pas vraiment prêté attention. Je suis désolée. Si je t’en avais parlé, peut-être que tu te serais souvenu avant et que rien de tout ça ne serait arrivé.

Il ouvrit la bouche pour l’assurer que rien de tout cela n’était de sa faute et qu’elle n’avait pas à s’excuser de quoi que ce soit, lorsque la vérité le frappa soudain. Le coup fut violent, si violent que son palais mental se mit à trembler.

– Elle était dans ma chambre, réalisa-t-il à voix basse. Cette nuit-là… Je m’en souviens maintenant. Ce n’était pas un rêve, ce n’était pas une hallucination, ce n’était pas le vent d’Est, elle était vraiment dans ma chambre.

Toutes les pièces du puzzle s’emboîtaient enfin, des semaines après, formaient un tout effrayant, cauchemardesque.

– Elle a poignardé Sally Donovan pour écarter Lestrade. Mycroft nous envoyait des plats cuisinés tous les jours, pour qu’on n’ait pas de cuisine à faire. Elle a dû persuader le coursier de la laisser monter la nourriture à sa place, mettre un somnifère dans ton café. C’est pour ça que tu as dormi si profondément cette nuit-là.

– Sherlock, tu penses vraiment… commença Molly.

– Ce n’est pas ton genre de t’endormir lorsque tu es de garde, surtout en ayant bu un demi-litre de café. Je suis certain que ça s’est passé comme ça. Elle est venue me voir. Elle était curieuse, elle voulait…

Un nouveau coup ébranla son palais mental. Une autre réalisation, le grain de sable dans l’engrenage, la fêlure sur la lentille. [8] Un craquement sourd se fit entendre à l’intérieur de son esprit et il pressa ses deux mains contre ses tempes. Mais malgré tout, il entendait la voix d’Eurus, assise au bord de son lit, venue disséquer une dernière fois les sentiments de son frère avant de l’attirer dans ses filets.

« Intéressant. Très intéressant. Donc tu tiens à cette femme malgré tout. James Moriarty pensait le contraire, et c’est là qu’a été son erreur. Je ne commettrai pas la même. Voyons comment nous pourrions l’inclure dans notre petit jeu… »

– C’est là qu’elle a compris… qu’elle a compris à quel point tu comptais pour moi. C’est pour ça qu’elle t’a réservé une place dans son plan tordu. Qu’elle a décidé de te faire souffrir, juste parce qu’elle a compris que je tenais à toi.

Être affecté n’est pas un avantage. [9]

Sherlock sentit soudain ses genoux heurter le sol avec violence. Les bras de Molly l’entouraient, et elle lui parlait probablement, mais il ne pouvait entendre ce qu’elle lui disait. Il ne pouvait plus la voir non plus, aveuglé qu’il était par l’eau qui ruisselait sur son visage. L’heure était enfin venue, songea-t-il, l’heure de se noyer. Il comprenait enfin, avec des années de retard. Certes, il savait que la trappe était là. Elle avait toujours été là, tout au fond de son palais mental. Il ne s’en était jamais vraiment préoccupé. Il l’avait toujours vue comme la retraite ultime que son esprit avait prévue, sous la chambre forte, au cas où, confronté à une souffrance trop intense, il ait besoin de dissocier totalement son esprit de son corps. Une petite pièce secrète. Il n’avait pas le souvenir de l’avoir placée là, mais il avait pensé que son inconscient avait fait le travail à sa place. A y bien réfléchir, il n’avait jamais eu très envie d’approfondir la question, comme s’il devinait instinctivement le danger qui se dissimulait derrière cette simple planche de bois. La trappe était là, elle avait toujours été là, point final, n’allons pas chercher plus loin.

Mais il avait tort. Ce n’était pas lui, Sherlock, qui l’avait imaginée. La trappe était un piège, le piège que sa sœur avait délibérément placé dans son esprit, au cœur de son palais mental, des années et des années auparavant.

Il suffoquait. Il se noyait. Eurus l’avait finalement entraîné là où elle avait toujours voulu, vers les eaux sombres et profondes de sa propre folie.

Il se souvenait à présent qu’elle le lui avait prédit, un jour, sur la plage, alors qu’ils ramassaient des galets. Mycroft leur avait expliqué le phénomène de l’érosion. Sherlock trouvait le processus bien trop lent pour qu’il soit réellement intéressant, mais Eurus avait été fascinée.

A la fin, avait-elle murmuré, c’est l’eau qui gagne. [10]



[1] Le titre de ce chapitre est une citation très connue de Star Wars (Le retour du Jedi), prononcée par l’amiral Ackbar lors de l’attaque de la flotte impériale par les rebelles. On peut évidemment la traduire par « C’est un piège ! », mais la proximité phonétique de « trap » avec « trappe » m’a frappée et j’ai voulu l’utiliser ici, puisqu’il est à la fois question de trappe et de piège...

[2] Ainsi que je l’ai expliqué, Eurus a emprisonné au fond d’un puits l’ami d’enfance de Sherlock et l’a noyé. Lorsqu’elle fait revenir son frère à Musgrave, la maison familiale, elle lui fait remarquer que toute sa vie a été cernée par des « eaux profondes » (ce qui me semble un lien évident avec les chutes de Reichenbach dans les écrits originaux de Doyle). C’est cette remarque, couplée à l’image publicitaire de la maison (on y voit l’appartement de Baker Street totalement inondé, avec John et Sherlock chacun sur un fauteuil au milieu des eaux sombres), qui m’a poussée à écrire cette fic.

[3] Depuis le début de la saison, John a été séduit par Eurus (sans savoir qu’il s’agissait de la sœur de Sherlock), a failli tromper Mary, en a éprouvé une profonde culpabilité, d’autant plus qu’il n’a pas réussi à la sauver, il en a voulu à Sherlock et a temporairement abandonné sa fille, incapable qu’il était de s’occuper d’elle ; il a été suivi par une nouvelle psy qui s’est révélée être Eurus sous un autre déguisement ; cette dernière l’a endormi puis a fait sauter le 221B et, après lui avoir fait subir un certain nombre d’épreuves psychologiques assez dégueulasses avec Sherlock et Mycroft, l’a emprisonné dans le puits où Victor Trevor est mort des années auparavant. Sherlock l’a sauvé juste à temps, mais John a passé plusieurs heures dans l’eau et le froid, sans parler de l’angoisse qu’il a dû éprouver à ce moment. Quand Sherlock dit qu’il n’est « pas au mieux de sa forme », je pense qu’on est dans l’euphémisme jusqu’au cou…

[4] Au début, j’avais écrit dans le premier chapitre un dialogue assez sentimental entre Sherlock et Molly, au cours duquel il lui promettait de ne plus lui faire de mal. Je l’ai retiré car je trouvais qu’il alourdissait mon chapitre (il nécessitait un changement de point de vue, mais je voulais celui de Mycroft, j’ai donc retiré le dialogue mais j’indique qu’il a bel et bien eu lieu).

[5] Je vais me répéter par rapport aux fics précédentes, mais cette histoire de « sociopathe » est ancrée dans l’esprit de Sherlock même si ce diagnostic est faux. Il me semble qu’on peut dire qu’Eurus est une psychopathe, étant donné son absence totale d’empathie et la facilité avec laquelle elle « dispose » des gens dans le seul but de « donner un contexte émotionnel » à Sherlock (rien qu’à Sherrinford, elle tue ou pousse au suicide cinq personnes et son but est clairement de se débarrasser, en plus, de tous les proches de son frère). Après l’avoir rencontrée, je trouve « logique » que Sherlock s’interroge de nouveau sur ses propres troubles, sa propre différence, et s’identifie à sa sœur (c’est probablement ce qu’il redoute par-dessus tout : être semblable à elle).

[6] Auto-promo, désolée : voir ma fic « Le détective agonisant ».

[7] La petite fille dans l’avion est Eurus elle-même, qui s’imagine être dans un avion (j’en ai déduit qu’il s’agissait d’une certaine façon de son palais mental) au milieu de tout un tas de gens endormis ou peut-être morts (tous ceux qu’elle croise, qui sont trop lents pour elle, dont elle se sent différente). Incapable d’atterrir, elle est condamnée à errer éternellement dans sa forteresse volante, redoutant sans cesse de s’écraser et absolument seule. (Ouais, c’est pas très marrant la saison 4.)

[8] C’est ce que dit Sherlock lorsqu’il éprouve de la peur dans Les chiens de Baskerville (saison 2, épisode 2).

[9] « Caring is not an advantage » : C’est Mycroft qui prononce cette phrase dans l’épisode 1 de la saison 2, à propos d’Irene Adler. Je pense qu’il en a fait son mantra après tout ce qui lui est arrivé dans son enfance et son adolescence… c’est un peu triste.

[10] Cette citation, dont j’ai fait le titre de ma fic, concerne en effet l’érosion et provient d’un roman de Fred Vargas (Dans les bois éternels) : « Rendez-vous compte de l’infinie patience de l’eau qui passe sur ces galets. Et eux qui se laissent faire, alors que la rivière est en train de manger toutes leurs aspérités, l’air de rien. A la fin c’est l’eau qui gagne. »

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