Les Boîtes de Pandore
Chapitre 4
Colis royal
Dukas arpentait nerveusement le pont de l'Étendard.
Son navire avait été réquisitionné par le Seigneur Vador afin de mettre le cap sur une ancienne planète oubliée. Pire que tout, l'étrange créature, qui avait décimé plusieurs pelotons de Stormtroopers, avait été accueillie à bord avec les honneurs dû à un haut dignitaire, sur ordre du Seigneur Sith qui lui passait tous ses caprices homicides.
Le Dalek avait donc élu domicile dans les appartements réservés aux hôtes de marque.
Et Dukas était là, faisant des allers et retours à en donner le mal de mer aux officiers de navigations alignés en contrebas de la passerelle, le long d'une suite d'écrans.
Le capitaine du navire finit par se poster devant l'une des baies vitrées donnant sur l'espace distordu par la vitesse.
-Amiral, nous recevons un appel du haut commandement, annonça la voix timide d'une jeune officier de communication, qui sembla se casser en précisant : il s'agit de l'Empereur.
Les épaules de Dukas s'affaissèrent un peu plus. Mécaniquement, avec résignation, il tendit l'index vers un bouton rouge, qu'il pressa lentement.
-Seigneur Vador, indiqua-t-il cérémonieusement, l'Empereur souhaite vous parler.
Celui-ci se contenta d'un :
-Je me rends en salle des hologrammes.
L'endroit était vaste et sombre. La porte s'ouvrit dans un soupir, laissant entrer l'ombre fantomatique de Dark Vador, se refermant après le passage de sa cape.
Le chevalier noir se plaça au centre de la pièce, posa un genou à terre, puis courba la nuque.
-Je vous écoute, mon Maître.
Une imposante figure bleutée s'éleva du néant. Le visage défiguré et encapuchonné de Dark Sidious baissait les yeux sur son disciple. Les imperfections et blessures qui émaillaient la figure fatiguée ne pouvaient empêcher la déception, teintée de colère, de transparaître. Il était le plus puissant représentant du côté obscur. Par le truchement de trahison, d'assassinat et de manipulation, il y avait veillé patiemment durant son interminable ascension le long de la chaîne alimentaire de la hiérarchie.
S'il savait faire preuve de patience, l'homme connu autrefois sous le nom de Palpatine aimait aller droit au but.
-Vous me faites des cachotteries, mon Apprenti.
Sa voix éraillée venait de tonner, comme l'éclair qui frappe la colline avec précision et force, et vibrait encore dans l'air.
Sous son masque, Vador leva un sourcil circonspect. Il ne pouvait pas nier avoir manigancé dans le dos de son Maitre pour son intérêt personnel, et ce, plus d'une fois, ces derniers temps. Auquel de ses projets faisait-il allusion ?
Le Seigneur Sith opta pour le secret le plus récent. Faute avouée, à moitié pardonnée, se dit-il.
-La créature qui gardait l'ancien temple Jedi a effectivement révélé un fort potentiel, mon Maître.
Sidious se pencha imperceptiblement, puis fit preuve de sarcasme :
-Voyez-vous cela… Un potentiel tel qu'il vous a poussé à détourner un croiseur de ses objectifs ? Un potentiel tel que vous en exigiez le redémarrage d'une usine sur Kamino ?
Convaincu du bien fondé de sa démarche, Vador ne fut nullement atteint par la morsure du sarcasme. Il redressa la tête.
-C'est exact, mon Maître.
Il ne défiait son mentor qu'en de très rares occasions. Lorsque le cas se présentait, celui-ci avait toujours le réflexe de lui accorder le bénéfice du doute.
-Je vous écoute, mon Apprenti. Qu'à donc cette créature de si spéciale ?
-Elle a, à elle seule, décimé le contingent rebelle dans son entièreté, mon Maître, commença Vador, toujours en appuie sur son genou. Puis a résisté, et éliminé, plusieurs pelotons de nos troupes de chocs, et ceux sans souffrir d'aucunes blessures ni d'aucune fatigue. Des bataillons de Dalek seraient, sans l'ombre d'un doute, un atout majeur sur les champs de bataille, mon Maître.
Résistant au besoin de se lever, Vador fut pris de ferveur.
-Cette créature est la personnification de tout ce que représente le côté obscur, mon Maître.
L'imposant visage bleu eut un rictus. Les arguments de son élève avaient un certain poids, de la pertinence...
-Soit, Seigneur Vador. Cependant, ce n'est pas au sujet de vos petits projets de clonage que je vous contacte aujourd'hui. Je viens d'apprendre le nom du rebelle responsable de l'échec du projet Étoile Noire.
La surprise sur le visage de Vador fut masquée par son casque noir, mais pas le trouble que cette révélation provoqua en son for intérieur.
-Figurez-vous que le chasseur de prime que vous aviez mandaté pour retrouver le jeune Skywalker a également fait remonter cette information jusqu'à moi.
Le Seigneur Noir resta impassible. Le ton de Sidious se fit conciliant :
-Vous me décevez une fois de plus, mon Apprenti. Je conçois que cette découverte vous perturbe. Je sens votre trouble au travers la Force. Votre dualité. Toute fois, puisqu'il semble que vous ayez à cœur notre supériorité sur nos ennemis, méditez sur ceci : quel atout formidable ce ne serait que d'avoir votre fils à nos côtés. Qu'en dites-vous, Dark Vador, mon élève ?
Le silence de ce dernier, couvert uniquement par sa lourde respiration et les grésillements de l'hologramme, fut éloquent.
-N'oubliez jamais où doit aller votre allégeance, Seigneur Vador, conclu l'imposant visage azur. Nous reparlerons de l'avenir du jeune Skywalker lorsque votre petit projet aura abouti.
Puis Sidious s'évanouit dans les ténèbres, laissant le sombre Sith a genou aux milieux des ombres.
...
Les passerelles montaient en spirales, baignant dans l'infini clarté des lieux. Le nouveau pont du Tardis était plus imposant, plus brillant que jamais, mais presque stérile et médical.
Le poste de commande circulaire, toujours surmontée de sa colonne lumineuse, paraissait petit, perdu, au milieu de ce décorum aseptisé.
Seule excentricité dans ce décor, un antique jukebox entonnait gaiement Spacecowboy de Jamiroquai.
Le Docteur venait de son glisser à nouveau dans son long trench-coat, peaufinant quelques ultimes réglages sur le poste de commande.
Trois cliques, un zigzag et un tour de molette plus tard et la lumière se tamisa sur les dernières notes de la chanson.
L'homme posa une paume bienveillante sur le tableau de bord, leva les yeux vers la colonne de verre dans laquelle l'éclairage se faisait doux.
-Repose-toi, mon ami. Quand tu seras prêt, fais-le-moi savoir.
Le Docteur quitta l'immensité de son navire pour émerger, hors de sa petite boîte bleue, dans l'étroite soute sombre et encombrée du Faucon Millenium.
Après avoir gravi quelques échelons, traversé les corridors tortueux du vaisseau Corellian, il déboucha finalement dans une pièce circulaire bordée de banquettes défoncées, sur l'une desquels était allongé le wookie. Les pieds posés sur une table à damier noir et blanc, Han Solo relisait une fois de plus la note qui était glissée dans un étui de cuir noir.
Sans prévenir, le Docteur se lassa tomber à côté du contrebandier.
-Comment va notre Spacecowboy ?
Solo se redressa avant de secouer le petit étui sous le nez de son passager.
-La princesse ? La princesse ?
Le Docteur, amusé, chipa son papier psychique au vol pour le glisser dans une poche intérieure de son vêtement.
-C'est ce que vous avez lu, non ?
Le papier psychique avait la faculté, en manipulant les neurones du lecteur, de faire office de carte d'identité passe partout, affichant systématiquement la bonne/fausse information au bon moment.
Le mensonge était parfois trop grossier, obligeant le fabulateur à faire montre de persuasion.
-Donc c'est la princesse qui vous envoie, pour retrouver un droïde fugitif ?
Avec son plus beau sourire, le Docteur plongea son regard noisette dans les yeux de Solo.
-Elle m'a dit que vous étiez les meilleurs. Que si quelqu'un dans la galaxie pouvait le retrouver ce serait vous deux.
Une dose de charme, un soupçon de flatterie, était généralement nécessaire pour appuyer le bluff du papier psychique. Solo fut troublé, l'espace d'un instant par le regard pénétrant de son passager, puis il pouffa, goguenard, en écourtant l'emprise des yeux noisettes.
-Tu vois Chewie !? Lança-t-il au géant velu. Elle m'aime bien ! "Le meilleur", belle preuve de confiance ! Elle est sous mon charme, je le savais !
Le wookie se redressa, rectifiant les dire de son ami d'un grognement amusé.
-Oui, "les meilleurs", si tu veux.
Le Docteur n'eut besoin que d'une poignée de minutes pour résumer sommairement la raison de sa présence et le danger que représentait la créature qu'il recherchait.
Solo avait retrouvé son sérieux.
-Si une telle bestiole débarque face à l'Empire, elle sera soit détruite, soit kidnappée. L'Alliance Rebelle n'a pas fait état d'une telle rencontre...
-Croyez-moi, cette "Empire" n'a aucun moyen de détruire un Dalek.
Le visage du Docteur, jusqu'alors radieux, s'était assombri à l'évocation de son plus vieil ennemi.
-Quoi qu'il en soit, reprit Solo, il va falloir se renseigner, peut-être qu'un croiseur Impérial a fait une mauvaise rencontre, ou qu'un haut gradé se serait lancé dans une mission secrète... Ce n'est pas le genre d'informations...
Il fut interrompu par Chewbacca, qui, lui, semblait confiant.
-Comment ça "tu connais quelqu'un qui pourrait nous renseigner"?
-Bwaaarg !
-Oui, ça va, je sais que tu as eu une vie avant de me rencontrer...