Les Boîtes de Pandore

Chapitre 5 :

Unboxing

La bille de jade se mua rapidement en un voile émeraude, a mesure qu'ils approchaient.

Solo, soucieux de terminer cette mission afin de se débarrasser de sa cargaison d'armes volées, avait mis la gomme pour rejoindre Takodana, sur les conseils de son ami, Chewbacca.

Le Faucon Millenium avait à peine décélérer pour entrer dans l'atmosphère de la planète verdoyante, atterrissant désormais en bordure d'un lac sur les remous duquel scintillaient les mille reflets d'un soleil levant.

Les arbres foisonnants terminaient leurs danses sous le souffle faiblissant du vaisseau dont les patins d'atterrissages s'enfonçaient dans l'herbe tendre.

Le Faucon venait tout juste d'atterrir que le trio s'en éloignait déjà, mené par le wookie qui, a la grande surprise de Solo, connaissait le chemin.

La généreuse végétation formait un parapet naturel tel qu'il cachait a la vue des voyageurs l'imposante bâtisse qui se dévoilait dorénavant eux.

S'élevait derrière les arbres, faisant face au lac, une ancienne structure massive qui avait l'apparence d'une forteresse, d'une petite citadelle, ornée de dizaines de bannières aux blasons et aux couleurs variés. Chewbacca l'appelait, avec une décontraction feinte, le "Château de Maz Tanaka".

Au-delà de la lourde porte de chêne, l'ambiance était enfumée, bruyante, vibrante.

Une étrange clientèle était éparpillée jusque dans les recoins les plus brumeux de lieux.

Mille peuples semblaient s'être réfugiés derrière les murs de la forteresse. De la plus imposante a la plus petite silhouette, à plumes, couvertes de pelage, de toutes les couleurs, dissimulé ou non sous des masques ou des casques, la clientèle avaient indéniablement quitté les différentes zones de guerres de la galaxie pour venir partager ici gîte, couvert, musique et anonymat.

Deux mille yeux suspicieux suivaient l'entrée du trio dans les ombres de la grande salle : un contrebandier prudent, un wookie fouillant les lieux du regard, tous deux suivit par le Docteur, extatique.

-J'adore les lieux de rassemblement comme celui-ci !

Solo leva un sourcil.

-T'es soit aveugle, soir stupide l'ami. Ces gaillards te trancherait la gorge juste pour voir le contenu de tes poches...

Une voix contrariée, éraillée par les années, s'élèva au milieu du brouhaha :

-J'interdis à quiconque de dénigrer ma clientèle !

Écartant les verres et les bouteilles d'une table voisine déserte, une créature orange escaladait le mobilier. Vêtue d'une tunique aux teintes terreuse par dessus un juste au corps olive. L'antique tenancière ajusta ses imposantes lunettes rondes à la vue du Wookie :

-Chewie!

Bien que d'apparence chétive, elle n'eut aucun mal à se jeter au cou de celui-ci, qui accueilli l'étreinte avec émotion.

Solo tapota l'épaule de son ami que la tenancière embrassait à pleine bouche. Il eut un léger mouvement de recul lorsqu'il crut déceler des mouvements de langues dans le baiser langoureux.

-Hey, Casanova, tu fais les présentations ?

Les visages se séparèrent puis Chewbacca emit un doux grognement. La petite femme orange acquiesça.

-C'est exact, je suis sa petite amie.

Le Seigneur du Temps, un indéboulonnable sourire accroché sous la moustache, la salua d'une franche poignée de main, secouant la pauvre femme debout au milieu des verres.

-Je suis toujours heureux de voir une telle démonstration d'amour ! Bonjour, je suis le Docteur !

Dévisageant les protagonistes de cette invraisemblable scenette avec des yeux comme des soucoupes, Solo intervint finalement, se laissant tomber sur une des chaises.

-Et bien, moi, je ne serai pas contre un peu de retenue.

Les bras en croix, la tenancière siffla :

-On peut connaître votre nom, où je dois vous appeler M'sieur Grognon ?

-Qui j'suis moi ? Mais, d'abord, qui vous êtes vous ?

Le Docteur s'installa tranquillement, essayant de calmer les humeurs, en vain.

Chewbacca, toujours debout, était parti dans un borborygme conciliant.

-Ho, ça va-toi! Trente ans sans nouvelles, tu parles d'une relation ! Tu as de la chance que je sois patiente.

Le Seigneur du Temps lança un "non!" indigné à l'encontre de Chewbacca qui, penaud, fini, a son tour, par se laisser tomber sur une chaise avant de faire les présentations.

-Vous êtes Maz Tanaka ? S'enquit le Docteur. Ravi de faire votre connaissance. C'est un bel établissement que vous avez là !

Maz etira un sourire sur sa vieille face ridée.

-Vous, je vous aime bien. Et je suis heureuse de te revoir mon Chewie.

Elle pointa Solo de l'index, précisant.

-Je veux bien supporter sa mauvaise humeur si c'est pour trinquer avec deux charmants gentlemen.

Elle interpella l'un des serveurs dans un dialecte guttural, puis s'excusa avant de sauter de la table afin de s'éclipser quelques instants.

Solo, lui, bougonnait

-Elle me pointe du doigt, moi. Personne me pointe du doigt. C'est mon truc de pointer du doigt.

La table fut rapidement débarrassée de ses cadavres puis, après un coup de chiffon, une collation leur fut servie, offerte par la patronne qui les avait finalement rejoints.

Maz Tanaka n'avait effectivement entendu aucune rumeur concernant un quelconque droïde psychopathe et meurtrier, mais elle savait où chercher les informations. Aussi invita-t-elle le trio à patienter quelques jours, aux frais de la maison.

Ravi d'avoir un début de piste, le Docteur, complice, glissa à l'antique débrouillarde, sur le ton de la plaisanterie :

-Je ne doute pas que vous soyez ravi d'avoir Chewie avec vous quelques jours, et je suis sincèrement enchanté pour vous deux, mais pensez-vous que ce sera long ?

Maz plaça ses petites mains autour de celle du Seigneur du Temps.

-Un jour ou deux, tout au plus.

...

-Nooon! Noooon! Bipède stupiiide!

La journée était encore jeune et le Dalek entamait sa troisième crise de colère pour le plus grand déplaisir du contingent scientifique à son service.

Lorsque l'Empire avait entamé son ascension, il eut pour premier objectif de trancher net les liens du passé. Les nombreux mondes qui avaient été dans la confidence des conspirations de Dark Sidious furent trahis en prévention d'éventuelles trahisons.

Combattre feu par le feu avant même l'incendie, tel était la politique de l'ancien Chancelier Palpatine.

Kamino, ses usines ainsi que ses Maîtres Cloneurs, qui avait fournies à l'Empire ses premiers bataillons, furent anéanties. Seuls subsistaient quelques usines et une poignée de Kaminoen en fuites ou prisonniers.

L'Étendard s'était placé en orbite autour de la planète bleue deux jours auparavant afin que l'Empire puisse investir l'une des usines abandonnées dans l'hémisphère sud du monde aquatique.

Le bâtiment plongeait ses racines profondément sous l'océan déchaîné. Le calme au milieu de ses couloirs aseptisés contrastait singulièrement avec la météo au-dehors. Les chaînes de montage et de création, visible derrière les interminables baies vitrées des corridors, étaient encore au repos. Quelques Stormtroopers patrouillaient de-ci de-là, vérifiant le bon état général de l'usine de clonage.

Dukas, emporté malgré lui par le devoir, venait d'entrer dans le laboratoire principal occupé par ses équipes. Contournant un plan de travail couvert d'alambics et de tubes à essais, une scientifique au regard paniqué se jeta dans les bras de son supérieur.

-Monsieur, il a vaporisé Danilz et Roza!

Dukas arborait désormais une fine barbe, ainsi qu'une tignasse en bataille. Ses cernes s'apparentait désormais de plus en plus à des rides.

Toujours droit, il écarta la scientifique d'un revers de la main.

Au centre de la pièce, le Dalek semblait menacer les trois autres officiers en blouse blanche de son canon.

L'amiral venait de recevoir la confirmation que les scanners de l'armure de la créature s'était effectués avec succès.

Les chaines de montage s'apprêtaient a en lancer la production.

L'étape suivante s'annonçait plus compliquée.

-Il nous un échantillon tissulaire, un prélèvement ADN quelconque, annonça-t-il sur le ton de la négociation. Et vous le savez parfaitement.

-Nooon, rétorqua le fils de Davros.

Un sourcil circonspect levé, Dukas demanda :

-Non ? "Non" vous ne le savez pas ? "Non" vous refusez ?

À mesure que leur supérieur s'adressait à la créature, l'équipe reculait, se plaçant derrière les postes de travail et leurs verreries.

Le Dalek répéta :

-Nooon. Je ne peux paaaas me dévoiler face à des sous-creatuuuures.

Un rictus amusé se dessina sur le visage fatigué de Dukas. Le monstre avait une faiblesse : il était pudique. Il refusait de se déshabiller devant son médecin, ironisa l'amiral interieurement.

-Il en va de mon honneeeeur!

-Il en va de la survie de votre espèce, corrigea Dukas.

La créature enfermée dans le cuirassé de cuivre en forme de cloche pris un instant de réflexion avant de statuer :

-Je ne vous aime paaaas.

A la suite de quoi, de mauvaise grâce, il concéda :

-Vous avez raisoooon.

Le Dalek tourna sur lui-même, afin de délimiter le périmètre de son espace personnel en vue de l'ouverture de son armure en Dalekanium, donnant a l'amiral l'impression d'un canidé sur le point de se coucher dans son panier.

Il revint finalement dans sa position d'origine, puis des volutes de fumées blanches montèrent de la base. Enfin, la façade du petit blindé s'écarta, s'ouvrant en deux, en même temps que la partie supérieure en cloche qui se levait.

La créature brunâtre au centre de la machinerie était visqueuse, luisante, flasque. Pourvue d'un œil unique au cœur duquel siégeait une malveillance manifeste. Ses tentacules frémissaient en tous sens d'impatience.

Sa voix n'était plus trainante ni mécanique, lorsqu'elle annonça, folle et nasillarde :

-Soyez prévenu, je n'aime pas les piqûres !