Les contes de l'Eiesia - De sang froid

Chapitre 6

1125 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 06/02/2022 09:15

“Maman, lâche-le!”

Elisabeth ne bougeait pas, ne quittant pas Achille des yeux. Derrière, Elen cherchait toujours à faire reculer sa mère.

“Je ne tolérerais pas la présence d’un Piuma dans ma propre maison.” murmura Elisabeth avec une voix glaçante.

Achille déglutit, se souvenant d’un coup d’une information qu’Ezera lui avait donnée. Tout devenait cohérent.

“Je comprends votre colère… mais de Piuma, je n’ai que le nom…”

Elisabeth n’avait pas l’air de le croire.

“Et je sais qu’ils vous ont arraché votre fils…”

“Qui te l’as dit?”

“Ma tante, Ezera…”

La colère disparut peu à peu du visage de la femme.

“Votre ex-compagnon était mon père, c’est ça? Il s’appelle Rodrigo. La seule chose que je sais, c’est que ma mère portait votre nom et a disparu après ma naissance...”

Une expression radicalement différente est apparue, comme si elle comprenait où Achille voulait en venir. Ses jambes ont commencé à trembler, puis elle s’est effondrée sur l’homme.


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“Si j’ai bien compris,” commença Elen, “nous sommes frères?”

“Demi-frères,” corrigea Elisabeth. “Et ça doit être pour ça que tu n’es pas vraiment une harpie.”

“Mais… je suis quoi?”

“Un eiesien, coloforme, de surcroît."

“Un… quoi?”

Elen regarda sa mère.

“Il faudrait commencer par le début.” dit-elle. “Tout d’abord, je ne m’appelle pas vraiment Elen… et ma - notre mère ne se nomme pas vraiment Elisabeth.”

“Elen” a commencé à raconter l’histoire d’une dimension parallèle nommée l’Eiesia, d’où elles venaient toutes les deux. Un monde où les règles de la vie n’étaient pas les mêmes, où les êtres vivants, une fois qu’ils atteignent l’âge minimal pour la reproduction, vieillissent tellement lentement, sont résistants à tellement de choses qu’ils sont quasiment immortels. Athecryos était l’une des premières créatures créée pour peupler ce monde, et elle avait eu Blizna avec un eiesien ressemblant à un dragon.

Elles étaient respectivement devenues Elisabeth et Elen en prenant des formes humaines, des noms beaucoup plus classiques pour mieux se fondre dans la masse.

Puis on lui expliqua quelles étaient les propriétés des eiesien dit “coloforme”, des monstres assez impressionnant pouvant approcher une dizaine de mètres de haut et se montrant comme les créatures les plus dangereuses. Ils avaient aussi une forme plus petite - généralement moins de trois mètres de haut - et donc la forme humaine quand ils étaient sur Terre.

“Donc… j’ai aussi deux noms?”

“Atrozhen”, dit Elisabeth. “Ca veut dire “givre matinal” en eiesien.”

Ça sonnait bien.

“Mais…” commença Elen, “il te faut aussi un alias…"

“Un quoi?”

“Un alias! Par exemple, moi, je suis le Blizzaurus et ma maman est la Belle de glace.”

“Tu as une caractéristique particulière?”

Achille commença à réfléchir.

“Je ne sais pas…”

“A part voler, tu peux faire quoi?”

“Eh bien… la première fois que j’ai eu un black out comme avant de me retrouver ici, il parait que j’avais provoqué une avalanche…”

“Donc… l’appeleur d'avalanche?"

“Le cri de l’avalanche me semble mieux” dit Elisabeth avec son ton habituel.

A la réaction enjouée de Elen, c’était une bonne idée. Donc Achille ne s’y est pas opposé.

Puis Blizna a changé de sujet, prenant le téléphone qu’elle avait vraisemblablement pris à Achille quand il était inconscient.

“Tu pourrais me parler de la demoiselle sur ton fond d’écran?” Elle parut soudainement plus gênée. “J’ai essayé de déverrouiller ton téléphone pour savoir à qui j’avais à faire, mais je ne connais pas le mot de passe…”

Sur ces mots, elle tendit l’appareil à son propriétaire.

“C’est ma chauve-souris,” répondit l’homme en prenant son téléphone. “On sort ensemble depuis trois ans, mais on s’est fiancé il y a trois mois…” Sa voix se perdit dans le souvenir des yeux pleins de surprise et de joie pendant cette réception organisée par la famille Bogue, alors qu’il avait mit le genou à terre devant elle. Il sentit un doux sourire se dessiner sur son visage.

Il n’avait pas remarqué que l’expression de sa mère s’était un peu attendrie, mais ça ne l’a pas empêché de le tirer de sa rêverie.

“Et tu as d’autres proches dans ta vie?”

Il fallut un instant à Achille de déverrouiller son téléphone et trouver une photo où il était avec les trois autres.

Il commença à présenter Cursio, Belina et Pauline, parlant de leur place dans sa vie, puis comment ils étaient devenus ses frères et sœurs. Le regard probablement critique d’Athecryos a peu à peu cessé, comme si le fait de savoir qu’il n’était pas comme son père la rassurait. De toute façon, Achille s’était juré de ne jamais devenir le monstre qu’était son père, jamais il ne ferait honte à des femmes comme ce dernier le faisait. Et comme il compte bientôt perdre le nom de Piuma au profit de celui de sa fiancée, plus jamais l’ombre de Rodrigo planera au-dessus de lui.


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Le trio a parlé une grande partie de la nuit, Achille découvrant que sa mère n’avait jamais appris à utiliser un ordinateur et autre téléphone, étant restée en ermite dans le massif de Chai pour son climat, mais du côté wafflelime du massif un peu par hasard, cherchant juste un endroit assez perdu pour se cacher.

Blizna, quant à elle, a vécu pendant plusieurs années sur l’Île des émotions, au large du Royaume Champignon. Elle s’y était installée avec son copain, avant de finalement entendre l’histoire de la Belle de glace, une femme qui avertissait l’arrivée du blizzard dans le massif. Il savait d’ailleurs qu’elle avait décidé de rester quelque temps avec sa mère, puis que les deux femmes iraient ensemble sur l’Île des émotions car il y avait une base eiesienne là-bas. Achille a pu voir le garçon qui partageait la vie de sa sœur, charmant avec ses cheveux bisques et sa mèche menthe. Mais ses traits étaient un peu étranges, trop doux pour être ceux d’un homme. Achille pourrait bientôt le rencontrer, même s'il était clair sur le fait qu’il ne pourrait pas les suivre là-bas.


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