Elf Lost in the North

Chapitre 1 : Libération

7906 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 30/09/2019 10:57

Je dormais, dans une position assez inconfortable. J’étais légèrement secoué, et j’entendais des murmures autour de moi. Je décidai donc d’ouvrir les yeux, et ce ne fut qu’à ce moment là que je sentis un léger mal de crâne. Qui était justifié, car je n’étais pas très à l’aise dans les transports. En fin de compte, j’aurais dû rester endormi…

-Ça y est ? Vous êtes réveillé ?

Je redressai la tête vers quelqu’un qui, de toute évidence s’adressait à moi. Depuis le temps que je vivais en Bordeciel, j’avais appris à différencier les ethnies et les races qui y vivaient. J’avais affaire à un Nordique - race qui, selon mon frère, était la plus reconnaissable parmi les espèces humaines, car ils avaient tous le mêmes traits - avec des cheveux blonds mi-longs et des yeux bleu clair.

-Vous essayiez de franchir la frontière, pas vrai ?

Je ne lui répondis pas, me contentant d’acquiescer.

-C’est comme ça que nous sommes tombés dans une embuscade des soldats Impériaux. Tout comme ce voleur, là.

Il tourna la tête vers sa gauche, pour regarder le dit voleur. Il ressemblait à un Nordique – j’hésitais entre Impérial et Bréton pour la race précise ; oui, j’ai appris mes cours – mais ses cheveux auburn étaient plus courts, et il avait un air fatigué. J’en profitai pour remarquer qu’il y avait quelqu’un d’autre à côté de moi, et, détail étonnant, il avait un bâillon.

-Soyez maudits, vous les Sombrages, déclara le voleur, attirant mon attention. Bordeciel était tranquille jusqu’à ce que vous apparaissiez. S’ils n’avaient pas été à votre recherche, j’aurais pu voler ce cheval et je serais déjà à Lenclume.

J’avais vaguement entendu parler de l’affaire, à Bordeciel, entre les Sombrage et les soldats Impériaux, mais je n’y avais pas vraiment fait attention. Alors je n’en savais pas grand-chose.

-Vous là, ajouta le voleur en me regardant. Vous et moi ne devrions pas être ici. Ce sont ces Sombrages que l’Empire veut.

-Nous sommes maintenant des frères et sœurs liés par ces attaches, voleur, répliqua le Nordique en montrant ce qui retenait ses poignets.

-La ferme, derrière ! s’exclama la personne qui conduisait.

Je me remis à contempler le sol de la charrette, toujours en me demandant comment cette histoire allait finir, lorsque le voleur reprit la parole, quelques minutes plus tard.

-Et qui est ce type, au fait ?

Je redressai de nouveau le regard vers mes codétenus. Le voleur semblait s’intéresser à mon voisin, et j’étais moi aussi assez curieux. L’homme bâillonné nous regarda tour à tour avec détachement.

-Modérez vos propos, dit le Nordique un ton plus haut. C’est Ulfric Sombrage, le véritable Haut-Roi.

-Ulfric ? Le jarl de Vendeaume et le leader de la rébellion ?

Ulfric ne réagit pas, se contentant de regarder le voleur dans les yeux, alors qu’il s’adressait à lui.

-Mais ils vous ont capturé, reprit le voleur. Où nous emmènent-ils ?

-Je ne sais pas où nous allons, répondit le Nordique. Mais Sovengarde nous attend au bout du chemin.

-Sovengarde ? répétai-je pour moi-même à voix basse.

-Non, ce n’est pas possible, souffla le voleur d’un ton abattu.

Ah, maintenant je me souviens. Sovengarde est le nom que les Nordiques donnent au royaume des morts. Donc, nous allions être exécutés ? Voilà qui contredisait un peu mes plans. Il fallait à tout prix que je trouve un moyen de m’en sortir. Et de sauver les autres, si possible.

-De quel village venez-vous ? demanda le Nordique.

Je le regardai, c’était au voleur qu’il s’adressait.

-En quoi ça vous intéresse ? demanda le voleur, sur la défensive.

-Les pensées d’un Nordique doivent aller vers son foyer.

-Rorikbourg. Je… Je viens de Rorikbourg.

-Et vous ? me demanda-t-il soudain.

Au moment où j’allais répondre, le cheval se mit à ralentir, alors je tournai la tête vers la gauche pour voir où nous arrivions. C’était une sorte de ville fortifiée, mais je ne les connaissais pas assez pour savoir de laquelle il s’agissait. Nous passâmes entre deux rangées de soldats, de part et d’autre de la charrette, et j’entendis plus ou moins ce que les soldats se disaient, grâce à mes sens d’Elfe.

-Général Tullius, dit un soldat. Le bourreau est prêt.

-Bien, répondit le général. Finissons-en.

Donc, il y avait bien une histoire d’exécutions ? Je me mis donc à réfléchir à un plan de fuite, alors que le voleur priait tous les dieux qu’il connaissait, et que le Nordique continuait de me parler. Même si je n’écoutais qu’à moitié.

-C’est le général Tullius, commença-t-il. Il est avec une ambassadrice du Thalmor, je me demande ce qu’ils ont à voir avec ça.

J’arrêtai complètement de l’écouter après qu’il ait évoqué les Thalmor. Théoriquement, j’en étais un, du côté de ma mère, mais j’en avais assez qu’on rabache les même clichés que les gens avaient sur eux. Non qu’ils étaient faux, car il était avéré qu’ils avaient un un rôle capital pendant la Grande Guerre, qui s’est terminée il y a trente ans par l’abolition du culte de Talos, le dieu des Nordiques. J’entendais vaguement, malgré tout, mon codétenu parler de l’histoire qu’il aurait eue avec une fille qui vivait à Helgen, la ville où nous arrivions. En arrière-fond, j’entendais aussi les différentes remarques par rapport à l’invité de marque assis près de moi dans la charrette. Les derniers ordres furent donné par un autre soldat haut-gradé, et la charrette s’arrêta.

-Pourquoi nous arrêtons-nous ? demanda le voleur.

-A votre avis ? répondit le Nordique d’un ton ironique. C’est la fin du voyage. Allons-y, ne laissons pas les dieux nous attendre trop longtemps.

Tout le monde bougea dans la charrette, et nous fûmes invités à descendre. Une autre charrette chargée de prisonniers arriva peu après, mais je n’y faisais pas attention. Ulfric descendit le premier, suivi par les autres prisonniers.

-Attendez ! Nous ne sommes pas des rebelles ! déclara le voleur d’un ton paniqué en descendant.

-Faites face à la mort avec courage, voleur, répliqua le Nordique en le suivant.

-Vous devez leur dire ! Nous ne sommes pas avec vous !

Les deux autres Sombrages l’ignorèrent, et je descendis à mon tour. En face de nous, il y avait deux soldats, un homme et une femme. L’homme tenait une liste à la main, j’en déduis qu’ils avaient déjà les noms de ceux qu’ils allaient exécuter.

-L’Empire et leurs foutues listes… grommela le Nordique à côté de moi, comme s’il avait entendu mes pensées.

-Ulfric Sombrage, jarl de Vendeaume, déclara le soldat avec la liste.

-Ce fut un honneur, jarl Ulfric, dit le Nordique d’un ton respectueux.

En entendant son nom, Ulfric s’avança et alla rejoindre les autres prisonniers, qui, de toute évidence, avaient déjà été appelés.

-Ralof de Rivebois, reprit le soldat à la liste.

Mon nouvel ami Nordique bougea, sans rien dire et en me jetant un petit regard, et alla rejoindre les autres à son tour. Il ne restait que moi et le voleur.

-Lokir de Rorikbourg.

-Attendez ! Je ne suis pas un rebelle ! Vous n’avez pas le droit ! déclara ce dernier en courrant

J’allais lui dire que c’était une mauvaise idée, mais on me coupa l’herbe sous le pied.

-Halte ! fit le soldat féminin.

Alors que le voleur décida que les Impériaux n’arriveraient pas à le tuer, il prit deux flèches dans le dos de la part d’archers qui étaient juste un peu plus loin. Je fis la grimace, alors que les deux autres soldats se retournaient vers le dernier des prisonniers, c'est-à-dire moi.

-Attendez… Vous là ! Avancez ! dit le soldat à la liste en me fixant.

Je m’exécutai, et arrivai donc juste devant eux. Ils me regardèrent plus attentivement.

-Qui êtes-vous ? me demanda le soldat.

Je me doutais bien de ce qu’ils voyaient. Un Haut-Elfe, donc un Thalmor, avec un œil blanc et un œil orange, des cheveux noirs inhabituels cachant presque mes oreilles pointues et, surtout, qui traversait la frontière. Je décidai néanmoins de répondre à leur question.

-Je m’appelle Cole, dis-je simplement et d’une voix courtoise.

-Vous ne devriez pas être en Thalmor ?

-J’habitais à Lenclume, près de la frontière. Je suis venu pour explorer un peu.

-Je vois. Capitaine, que fait-on ? demanda le soldat en se tournant vers sa collègue, qui était en fait sa supérieure. Il n’est pas sur la liste.

-Oubliez la liste. Il va au billot, déclara le capitaine d’un ton autoritaire.

-A vos ordres, capitaine. Désolé, ajouta-t-il en me regardant. Nous nous assurerons que votre corps soit renvoyé chez vous.

-Ouais, marmonnai-je.

-Suivez le capitaine.

Je ne pus m’empêcher de pousser un soupir en allant près des autres prisonniers, le capitaine juste devant moi. Je m’arrêtai près de Ralof, qui était juste derrière Ulfric, alors que ce dernier était face à face avec un autre soldat. Je reconnus le général Tullius, qui était à l’entrée de la ville un peu plus tôt. Je regardai autour de moi d’un œil distrait, en espérant trouver une idée pour nous sortir de ce mauvais pas.

-Ulfric Sombrage, commença le général. Certains ici vous prennent pour un héros. Mais un héros n’utilise pas un pouvoir comme celui de la Voix pour tuer son roi et tenter d’usurper son trône.

C’est donc ça, l’histoire avec les détails ? J’avoue que j’aurais bien voulu entendre la réponse d’Ulfric, qui était étouffée par son bâillon. Je devinai en même temps pourquoi il en avait un : c’était une mesure de sécurité. Quand on y pense, tuer quelqu’un avec un cri sonne assez impressionnant…

-Vous avez commencé cette guerre, reprit Tullius, plongé Bordeciel dans le chaos. Mais aujourd’hui, l’Empire va vous abattre et rétablir la paix.

Soudain, un hurlement retentit. Il était si puissant, bien que lointain, que mes oreilles se replièrent sur elles-mêmes. Je n’avais jamais rien entendu de tel. Tout le monde leva la tête, mais le regard d’Ulfric était tourné vers moi.

-Qu’est-ce que c’était ? demanda le soldat à la liste.

-Ce n’était rien, déclara Tullius. Continuez.

-Bien général Tullius, acquiesça le capitaine. Accordez-leur leurs derniers rites, ajouta-t-elle en tournant la tête.

Je regardai dans la même direction que le capitaine, et je distinguai une prêtresse près du billot, juste à côté du bourreau. Je devinai, à sa tenue, qu’il s’agissait d’une prêtresse d’Arkay, le dieu des morts. Elle leva les bras en l’air, pour commencer son office.

-Nous recommendons vos âmes à Aethérius, déclara-t-elle. Que les huit Divins vous bénissent, car vous êtes le sel et la Terre…

-Pour l’amour de Talos, taisez-vous et finissons-en, râla un autre prisonnier qui alla vers le billot.

-Comme vous voudrez, dit la prêtresse d’un ton dépité.

Le prisonnier s’arrêta devant le billot, et, déclara avec une certaine impatience, qu’il n’avait pas toute la journée. Je me demandais sérieusement comment on pouvait être aussi nonchalant. Moi en tous cas, je n’étais vraiment pas prêt à mourir aujourd’hui…

Le capitaine, tout aussi impatiente que lui, apparemment, appuya sur son dos pour le forcer à s’agenouiller, puis le plaqua sur le billot avec son pied.

-Mes ancêtres me sourient, Impériaux, dit le prisonnier d’un ton presque souriant. Pouvez-vous en dire autant ?

Le bourreau leva son énorme hache vers le ciel, et je fermai instinctivement les yeux. Sans les images, le son de la hache qui a tranché net la tête du Nordique était encore plus déchirant. J’osai rouvrir les yeux, pour voir le cadavre sans tête, alors que le capitaine poussait négligemment le corps sans vie qui encombrait le billot. Les quelques citoyens qui étaient autour de la scène de crime pestaient, certains en faveur de l’Empire et d’autres en faveur des Sombrages.

-Aussi courageaux face à la mort que pendant toute sa vie, murmura Ralof.

-Au suivant ! s’exclama le capitaine.

Je regardai à droite et à gauche, et un autre hurlement retentit.

-Encore ce bruit, fit remarquer le soldat à la liste. Vous avez entendu ?

-J’ai dit au suivant ! répéta le capitaine d’un ton plus sec.

Je vis qu’elle me regardait, mais elle n’était pas la seule. Ulfric aussi me dévisageait encore. Je lui rendis rapidement son regard, en me dirigeant vers le billot. J’eus un étrange pressentiment, comme si, en fin de compte, la situation allait évoluer d’elle-même.

Le capitaine me poussa sur le billot, comme elle l’avait fait pour le précédent prisonnier, et je fermai les yeux lorsque le bourreau leva de nouveau sa hache. Je me sentis obligé de les rouvrir quand le hurlement se fit plus proche. Très proche même. Un énorme lézard ailé était au sommet de la tour juste derrière le bourreau, qui tomba en avant suite au choc de la bête.

-Un dragon ? dit une voix féminine. Comment est-ce possible ?

Je réussis à me remettre à genoux, alors que le dragon poussait un autre cri. Le bourreau était allongé près de mes pieds, comme raide mort, et je réussis à me relever, les mains encore liées.

-Hé vous ! dit une voix que je ne reconnus pas tout de suite. Vite ! Dans la tour !

Quelqu’un me prit par le bras, et je reconnus Ralof, qui avait été miraculeusement libéré de ses liens. Il m’attira dans une tour, donc, juste un peu plus loin, alors que les soldats Impériaux luttaient contre le dragon, dont les objectifs étaient assez clairs. Ralof referma la porte derrière lui, et je me retrouvai face à Ulfric, qui avait aussi été détaché. Des questions fusaient dans mon esprit, mais je jugeai que ce n’était pas le moment, et l’expression sérieuse d’Ulfric me disait que c’est sans doute ce qu’il m’aurait répondu.

-C’est bien un dragon, affirma Ralof. Les légendes seraient-elles vraies ?

-Les légendes ne n’incendient pas des villages entiers ! s’exclama Ulfric d’une voix autoritaire. Il faut partir maintenant !

-Vite. Dans la tour,répéta Ralof.

Ralof partit dans l’escalier, et je le suivis du mieux que je pouvais. Une fois sur le premier pallier, nous nous arrêtâmes juste à temps pour esquiver la tête du dragon, qui était passée au travers du mur pour brûler le soldat qui était sur le pallier. Nous regardâmes par le trou fait par le dragon, voyant celui-ci dévaster la ville, malgré les efforts des légions Impériales.

-Vous voyez cette auberge en face ? me dit Ralof en me la montrant. Sautez sur le toit et avancez. On vous rejoint dès qu’on le peut.

-D’accord, dis-je en acquiesçant.

Je reculai pour prendre un peu d’élan, alors que Ralof redescendait l’escalier, et je courrai pour sauter sur la dite auberge, quelques mètres plus loin. Toutefois, elle était un peu plus basse que je l’avais prévu, et je manquai de me casser la figure en entrant par le toit troué. Je réussis à descendre au rez-de-chaussée, en passant entre les soldats, et, un peu plus loin, je reconnus le soldat qui tenait la liste avant l’exécution. Il était en train de combattre le dragon, et fuit juste à temps pour sauver un gamin qui passait par là. Il me vit arriver, alors que le dragon recommençait à bombarder la ville et les soldats de feu.

-Encore en vie ? dit le soldat d’un ton ironique alors que je m’approchai de lui. Restez près de moi si vous voulez que ça continue.

Je ne savais pas trop quoi répondre, mais lui dut prendre mon silence pour un ‘oui’. Il se tourna alors vers un vieil homme, qui était près du gamin qu’il avait sauvé juste avant.

-Gunnar, occupez-vous du garçon, déclara le soldat. Je dois retrouver le général Tullius et rejoindre les défenses.

-Bien sûr, répondit le vieil homme. Que les Dieux vous guident, Hadvar.

-Restez près de moi, répéta le dit Hadvar en me regardant.

Il partit ensuite à toute vitesse vers les autres soldats, et je le suivis, finalement, n’ayant rien d’autre à faire. Je n’avais pas eu de nouvelles de Ralof, j’espérais qu’on se rejoindrait plus loin. Je n’avais pas envie de rester avec un homme qui avait failli me faire couper la tête. Hadvar et moi slalomâmes entre les maisons, et, au bout d’un moment, Hadvar me poussa contre le mur, en gardant sa main sur mon épaule. Il avait bien fait, car, juste au-dessus de nos têtes, je vis une aile du dragon, ainsi que sa tête qui crachait du feu. S’il ne m’avait pas poussé, l’aile m’aurait touché, et il nous aurait vus. Une fois que le dragon fut parti, Hadvar me libéra, et repartit vers les autres soldats. Je continuai à le suivre, des fois que, et, derrière une grande porte en bois, il se retrouva face à Ralof.

-Ralof, espèce de traître ! Hors de mon chemin ! menaça Hadvar.

-On s’enfuit Hadvar, répondit Ralof. Et vous ne nous en empêcherez pas cette fois.

-Bien. J’espère que ce dragon vous enverra tous en Sovengarde !

Les deux adversaires se regardèrent une dernière fois avant de reprendre leur route. Hadvar fonça vers une tour un peu plus loin, alors que Ralof se dirigea vers une autre qui était juste à côté de là où je me trouvais. Lorsqu’il arriva devant la porte, il me demanda de le rejoindre, alors que, de l’autre côté, Hadvar me demanda la même chose. J’hésitai un peu, sur le moment. Je n’avais pas vraiment la rancune tenace, mais je serais plus enclin à suivre un ancien codétenu qu’une personne qui avait participé à ma tentative d’exécution. Il s’était plus ou moins amendé en me protégeant du dragon, mais…

En parlant du dragon, je choisis finalement d’entrer dans la tour la plus proche, avec Ralof, car le monstre s’était posé juste devant moi pendant que je réfléchissais. Alors que je courrai vers la porte, je crus entendre qu’il disait quelque chose, mais je n’ai pas compris. Ce que j’ai compris, en revanche, c’est qu’il a commencé à cracher du feu tout de suite après, j’avais eu juste le temps de rentrer dans le donjon. Ralof commença par aller voir un cadavre, au pied de la table au fond de la pièce, et s’agenouilla près de lui alors que je le rejoignais.

-Nous nous retrouverons à Sovengarde, frère, dit-il d’un ton affectueux en posant la main sur l’épaule du cadavre.

Il se releva et se tourna vers moi.

-Vous l’avez vu comme moi, c’était bien un dragon. Comme ceux qu’on évoque dans les légendes et les contes pour enfant. Les hérauts de la fin des temps.

-Je n’en ai jamais entendu parler avant aujourd’hui, personnellement, affirmai-je en haussant les épaules.

-Bref, on ne doit pas rester là. Venez par ici, je vais voir si je peux défaire vos liens.

-Ce serait chic, oui, dis-je en m’approchant de lui.

Ralof attrapa une dague, qui était à sa taille, et coupa mes liens d’un seul geste. Je passai mes mains sur mes poignets par réflexe, me rendant compte à quel point la corde était serrée, et j’en profitai pour déverrouiller mes épaules.

-Prenez l’équipement de Brunjalf tant que vous y êtes, ajouta Ralof. Il n’en aura plus besoin.

Je devinai bien sûr qu’il parlait de son ancien collègue. Il avait la même cuirasse et les mêmes bottes que Ralof, ainsi qu’une hache. J’étais plutôt du style magicien, comme ma mère, mais ça pourrait être utile. Je me changeai rapidement, et mis la hache à ma ceinture, alors que Ralof inspectait la grille qui nous permettrait de sortir du donjon de l’autre côté.

-C’est fermé, confirma-t-il alors que je venais vers lui. Il faudrait trouver la clé.

Au moment où il disait ça, je sentis mes oreilles remuer. Quelqu’un venait. Ralof dut l’entendre aussi, car il se mit à couvert près de la grille, sa hache dans la main. Je me plaçai de l’autre côté, alors que les voix, ainsi que les pas qui allaient avec, se rapprochaient de plus en plus. La grille s’ouvrit, et le capitaine Impérial débarqua avec un soldat. Dès qu’ils nous virent Ralof et moi, ils prirent leurs armes et nous attaquèrent.

Alors que Ralof faisait un massacre avec sa hache, moi je brûlais vif l’autre soldat avec ma magie. Nous nous mîmes à fouiller les cadavres, et Ralof trouva la clé de la porte de l’autre côté de la salle sur le cadavre du capitaine, nous pûmes donc nous remettre en route. Il ouvrit la grille et m’invita à le suivre. Nous arrivâmes rapidement à une autre salle, mais, alors que je m’approchai de la porte, je m’arrêtai juste à temps pour voir le plafond s’effondrer devant moi. Ralof arriva derrière moi pour faire le même constat.

-Bon sang, ce dragon n’abandonne jamais, râla-t-il. Nous ferions mieux d’y aller, avant que le bâtiment ne nous tombe sur le crâne, ajouta-t-il en me regardant.

Je me contentai d’acquiescer, et j’entendis d’autres personnes dans la salle. C’était un soldat Impérial qui disait à un autre de prendre des potions. En les entendant, Ralof entra avant moi et attaqua sans crier gare. Il se contenta plutôt de crier ce qui semblait être le slogan des Sombrages.

-La liberté ou Sovengarde !

Maintenant que je me souvenais de ce qu’était Sovengarde, je saisis toute l’ampleur de ses mots, même s’ils me paraissaient déplacés. Perdu dans mes pensées, je laissai presque un soldat Impérial m’attaquer, j’esquivai au dernier moment pour lui trancher la gorge d’un revers de hache. Dans ce genre de situation, je remerciai mon sang Orc pour m’avoir donné d’excellents réflexes. L’autre Impérial gisait par terre, aux pieds de Ralof. Après un léger débat intérieur, je laissai tomber ma nouvelle hache et empruntai l’épée du cadavre, parce que, comme Ralof l’avait si bien dit plus tôt, il n’en aurait plus besoin. Et je préférais ça de loin à une hache, surtout.

-Cette pièce semble regorger de potions, dit-il. Prenez ce qu’il vous faut et continuons.

-Ça me paraît une bonne idée.

Ralof partit donc m’attendre à la sortie de la pièce, alors que je fouillai un peu. Dans la pièce, il y avait un petit coin avec une table, une chaise et une commode. Je pris la potion de soin qu’il y avait dans la commode, la table ne me proposait pas grand-chose d’intéressant. Plus loin, un gros tonneau contenait deux potions de soin et deux potions de magie, je les embarquai toutes. Puis, juste avant la sortie, je ramassai une potion de soin sur une autre table, et une potion de vigueur sur une autre commode. Je rejoignis Ralof, qui me regarda arriver avec attention.

-C’est bon ? me demanda-t-il.

-Oui. Je pense que oui.

-Alors allons-y.

Nous reprîmes donc la route, et je me mis à espérer que la sortie n’était pas trop loin. Malgré les quelques potions que j’avais récoltées, j’avais toujours peur de tomber de fatigue, quelque part. Ralof et moi passâmes par une sorte de tunnel, qui menait à une pièce.

-Sang de troll, c’est une salle de torture, déclara Ralof alors que je me demandais où on arrivait.

Même d’où nous étions, j’entendais le conflit qui y faisait rage. Deux bourreaux s’acharnaient sur une Sombrage, et Ralof se fit un plaisir d’aller l’aider. Quant à moi, au lieu d’attaquer de face, je profitai que l’un des bourreaux était concentré sur son combat contre la Sombrage pour lui planter mon épée dans la nuque. La Sombrage me regarda d’un air surpris, en me remerciant quand même du regard, avant d’aviser son collègue, qui donnait son dernier coup d’épée.

-Comment ça s’est passé dehors ? demanda Ralof. Est-ce qu’Ulfric et les autres ont réussi à s’enfuir ?

-Je ne sais pas, déplora l’autre. Nous avons été séparés à cause du dragon. Que faisons-nous ?

-Continuons d’avancer. Je suis sûr que les autres nous rejoindrons.

Nous étions sur le point de reprendre, quand Ralof s’arrêta devant une cage. Il sembla y voir quelque chose d’intéressant, alors je regardai aussi. Il y avait un cadavre, un livre et de l’or.

-Vous devriez essayer d’ouvrir la cage avec des crochets, me dit Ralof en me les tendant. Quelque chose me dit que certaines choses pourraient vous intéresser. Qui plus est, cet or nous sera utile.

Intrigué par ses sous-entendus, je regardai mieux, et je constatai que le cadavre était habillé d’une tenue de mage, et que le livre à côté de lui était un livre de sort. Ralof avait donc compris que j’étais plutôt disposé pour la magie, comme la plupart des Hauts-Elfes d’ailleurs. Je réussis à ouvrir la grille sans trop de problèmes, et je ramassai donc les affaires de la pauvre victime.

J’enfilai vite la tunique de mage et la capuche, qui étaient juste à ma taille, et je lis tout de suite le livre de sort, qui donnait le savoir du sort Etincelles. Dès que j’eus lu la dernière page du livre, je voyais déjà de petits éclairs circuler entre mes doigts, et j’en éprouvai une certaine satisfaction. Je ramassai finalement les pièces d’or, et allai rejoindre Ralof et sa collègue, qui entamèrent le pas dès que je les eus rejoints. Nous traversâmes d’autres tunnels, qui menaient à une sort de grotte, elle aussi remplie d’Impériaux. Il y en avait deux près de nous, et deux de l’autre côté de la salle, près de la sortie.

Alors que je me dirigeai vers les deux plus proches de nous avec mes compagnons, je pris un projectile dans l’épaule. Je titubai légèrement, et regardai dans la direction d’où il venait, juste en voir passer un deuxième, qui siffla près de mon oreille. Un arc, voilà une arme qui me plaisait plus que n’importe quelle arme blanche. Je me mis à foncer d’un seul coup, ignorant complètement les Impériaux qui, de toute façon, étaient occupés avec mes amis Sombrages, et atteignis les deux Impériaux avec l’arc. Je leur envoyai des flammes et des éclairs, sans voir le liquide qui luisait à leur pied. Ce dernier s’enflamma rapidement pour brûler mes adversaires en quelques secondes, et j’aurais fini comme eux si je n’étais pas resté à une distance raisonnable.

J’attendis que les flammes s’apaisent, et fouillai rapidement les deux cadavres pour prendre ce qui m’intéressait, c’est-à-dire un arc long et le carquois de flèches. Ralof et sa collègue arrivèrent au moment où je vidai le carquois du second soldat dans celui qui se trouvait désormais dans mon dos.

-Vous avez… une flèche dans l’épaule, fit remarquer la Sombrage d’un ton timide.

-Ah. Oui, répondis-je simplement.

A vrai dire, je l’avais complètement oubliée. Je la retirai, et l’ajoutai à mon carquois en ayant vérifié au préalable que la point n’était pas brisée, et je me soignai rapidement avec la magie qui me restait. Elle me regarda d’un air qui me semblait admiratif, et je lui fis un clin d’œil. J’aurais juré que Ralof avait ricané.

-Je vais attendre ici, dit la Sombrage d’un ton plus sérieux. Si les autres arrivent, je les mènerai jusqu’à la sortie.

-D’accord, acquiesça Ralof. Nous nous reverrons.

Ralof partit dans la suite des tunnels, et me fit signe de le suivre. Je saluai la Sombrage de la tête, elle fit de même, et je partis rejoindre Ralof. Au bout d’un moment, Ralof râla à cause d’un cul-de-sac, ce qui me fit sourire, et nous fûmes donc “contraints“ de prendre une autre route. Nous arrivâmes à un pont, apparemment contrôlé par un levier, et j’abaissais ce dernier pour que nous puissions passer. Alors même que Ralof venait de franchir le pont, le plafond s’effondra, rendant toute traversée impossible.

-Les autres trouveront une autre sortie, tente de se rassurer Ralof. Continuons.

Avant même d’arriver dans la cavité suivante – nous étions bel et bien dans des grottes cette fois, donc le mot “pièce“ me paraît déplacé – je distinguai du mouvement au loin. Je sortis mon arc, et mit une première flèche en joue au moment où ce qui semblait être des toiles d’araignées se mirent à bouger. Je réussis à faire feu sur quatre d’entre elles, alors que Ralof abattait les deux autres à coups de hache furieux. Il s’adressa à moi dès que je l’eus rejoint.

-Je déteste ces choses. Tous ces yeux, vous comprenez ?

-Oui, je comprends. Je ne les aime pas non plus. Et je ne pense pas que quiconque les aime, en fait.

-Vous marquez un point.

Nous continuâmes à marcher, pour arriver dans une autre série de tunnels, qui se terminaient par une autre grotte, beaucoup plus grande cette fois-ci. Au fond, je distinguai une masse noire, comme une grosse ombre. Ralof comprit ce que c’était un même temps que moi.

-Chut, ne faites pas un bruit. Regardez. Il y a un ours droit devant. Nous devrions le contourner. Ou alors, si vous vous sentez chanceux, tentez de l’abattre avec votre arc.

-Non, je préfère le contourner. Tant qu’à faire, autant ne pas tuer une bête qui ne nous a rien fait.

-D’accord.

Je passai devant, pour une fois, et me mis à marcher accroupi pour faire le moins de bruit possible, suivi d’assez près par Ralof. Heureusement pour nous, l’ours ne sembla pas détecter notre présence, et nous arrivâmes à un autre tunnel. Je pouvais clairement voir que celui-ci était plus éclairé, sans doute approchions-nous de la sortie.

-Voilà la sortie ! Je savais qu’on allait s’en sortir ! s’exclama Ralof en courant vers la dite sortie.

J’accélérai aussi pour sortir en même temps que lui, et, finalement, nous fûmes sortis. Je n’avais jamais été aussi content d’être à l’air libre, et je voyais à l’expression de mon compagnon qu’il pensait la même chose. Il se mit à marcher, puis s’arrêta d’un seul coup.

-Attendez ! déclara-t-il en s’accroupissant derrière un rocher.

Je l’imitai, et je vis le dragon s’envoler au loin. Je ne compris pas pourquoi, mais je n’avais plus du tout peur de lui, désormais.

-Il semblerait qu’il se soit envolé pour de bon, cette fois, dit Ralof en se relevant. La ville la plus proche est Rivebois, juste au bout de cette route. Ma sœur Gerdur y tient la scierie, elle nous aidera sûrement, ajouta-t-il en se mettant à trottiner.

-Que comptez-vous faire exactement ? m’enquis-je en le suivant tranquillement.

-Nous devons avertir Rivebois de l’attaque du dragon. C’est dans cette direction qu’il s’est envolé. Ensuite, je pense rejoindre Ulfric à Vendeaume, je suis sûr qu’il y est déjà. Vous devriez venir avec moi, d’ailleurs.

-Pour rejoindre les Sombrages ? devinai-je.

-Absolument. J’ai vu de quoi vous étiez capable. Il n’est pas impératif d’être Nordique pour être Sombrage, et vous avez vu le vrai visage de l’Empire aujourd’hui. Votre aide serait la bienvenue.

Il aurait été logique que je dise “oui“, quelque part. Mais je me dis tout bêtement que je ne pouvais pas juger tout un groupe de gens par rapport aux seuls exemples que j’ai eus. J’étais personnellement persuadé que tous les soldats de l’Empire n’étaient pas comme ceux que j’avais vus aujourd’hui, de même que j’étais sûr que tous les Nordiques n’étaient pas aussi courtois que Ralof. Mon éducation bannissait complètement les préjugés et les jugements hâtifs, et je n’allais pas commencer aujourd’hui.

-Je dois y réfléchir, finis-je par dire.

-Je comprends, dit Ralof d’un ton compréhensif. C’est vrai que tout est allé très vite, aujourd’hui. Je suis sûr que vous prendrez la bonne décision.

Je ne répondis rien, conscient que la bonne décision ne serait peut-être pas la même pour lui que pour moi. Après un petit peu de route, il s’arrêta de nouveau.

-Vous voyez les ruines, là-bas ? dit-il en me les montrant. Ce sont les Tertres des Chutes Tourmentées. Je me demande comme les habitants de Rivebois font pour dormir sous son ombre. Une question d’habitude, j’imagine ?

-Ou peut-être sont-ils convaincus qu’ils n’ont rien à craindre ?

-Sincèrement, je ne le pense pas. Ce genre de vestiges a toujours quelque chose à cacher.

Nous arrivâmes peu après à une bifurcation. A droite se trouvait la route qui menait à Rivebois, alors qu’à gauche était érigées les Pierres Gardiennes, une sorte de curiosité de la région. Je décidai d’aller les voir, et Ralof me suivit, se justifiant par le fait que je serais capable de ne pas retrouver la route de Rivebois tout seul. Bien entendu, ce n’était pas vrai, étant donné que c’était tout droit. Une fois arrivés aux Pierres Gardiennes, je sentis tout de suite la puissance magique qui s’en dégageait. J’en touchais une, et une lumière partit vers le ciel. Je me retournai vers Ralof, qui levait les yeux pour voir la lumière partir, et posa son regard vers moi quand je revins vers lui.

-Mage hein ? Ça ne m’étonne pas vraiment, dit-il en haussant les épaules.

-Que voulez-vous dire ?

-On dit que les Pierres Gardiennes guident les guerriers qui les touchent à travers une bénédiction. Et vous, vous avez choisi la Pierre du Mage. Vous ne le saviez pas ?

-Non, dis-je un peu étonné. Quelque part, tant mieux. J’ai toujours eu un faible pour la magie.

Nous nous remîmes à marcher vers Rivebois, et Ralof reprit la conversation pile où nous l’avions arrêtée quelques minutes plus tard.

-Mais vous avez aussi vous servir d’une épée. Je vous avoue que j’ai été assez surpris par votre aptitude aux armes blanches.

-Parce que je suis un Elfe ? demandai-je d’un ton que j’entendais moi-même comme neutre.

-Eh bien oui, dit-il d’un ton gêné. Je n’ai jamais vu d’Elfe être aussi sauvage au combat.

-Mon père est un Orc. Je tiens mon aptitude aux armes blanches et mes cheveux noirs de lui.

-C’est assez inhabituel.

-Je sais. Sommes-nous bientôt arrivés ? éludai-je.

-Oui. Regardez, on peut voir l’entrée de Rivebois d’ici.

En effet, au loin, on pouvait voir une sorte de pont de pierre, sous lequel des gens étaient en train de circuler. Cela semblait être un village bien tranquille, en espérant qu’aucun dragon ne vienne troubler cette tranquillité. Je continuai à suivre Ralof, qui devait nous mener vois sa sœur. La scierie était juste après l’entrée du village, c’était assez dur de la manquer car c’était le bâtiment le plus haut de Rivebois. Ralof me conduisit entre les maisons, et nous arrivâmes finalement devant sa sœur, qui supervisait l’activité de la scierie d’en bas.

-Gerdur ! l’appela-t-il.

-Mon frère ! Par Mara, comme je suis content de te voir ! s’exclama-t-elle.

Ralof fondit sur sa sœur pour la prendre dans ses bras, et je me contentais de rester à une distance respectable pour ne pas troubler ces retrouvailles.

-Tu as l’air exténué, dit Gerdur en se libérant de la prise de son frère. Et cette personne, qui est-ce ? ajouta-t-elle en me regardant. Est-ce l’un de vos compagnons ?

-Ce n’est pas un camarade, mais un ami, dit Ralof en me regardant aussi. Je lui dois la vie, en fait.

Son exagération me gêna un peu, bien sûr, mais je préférais ne rien répondre.

-Venez me parler de tout ça ailleurs, dit Gerdur en se mettant à marcher. Hod ! Peux-tu descendre une minute ? dit-elle en direction de la scierie.

Je tournai le regard vers la scierie, et je vis le géant blond qui venait de se tourner vers nous. Je ne vis pas la tête qu’il faisait en nous voyant, mais il parla tout de suite après.

-Ralof ! Vous êtes là ? Je descends tout de suite !

Il disparut donc, pour descendre de l’autre côté sans doute, et nous nous arrêtâmes finalement. Ralof s’assit sur une souche, et Gerdur était debout en face de lui, alors que Hod arrivait. Il me regarda un moment, je le saluai de la tête, il me répondit et se reconcentra sur Ralof.

-Il y a eu des rumeurs, comme quoi Ulfric avait été capturé par l’Empire, commença Gerdur. Est-ce vrai ?

-Eh bien oui, c’est vrai, répondit Ralof. Il y a deux jours, les soldats Impériaux nous ont tendu une embuscade au gué de Sombreflot. Une énorme embuscade, comme s’ils savaient par où on allait passer. Nous nous sommes arrêtés à Helgen ce matin, ils nous avaient alignés devant le bourreau. Ils n’ont pas osé faire un procès équitable à Ulfric, dit-il sur un ton plus dur. S’ils l’avaient condamné parce qu’il défendait sa patrie, tout le monde aurait compris le petit jeu de l’Empire.

Il n’avait pas tort, quelque part. Enfin, si c’était le seul crime d’Ulfric. Il ne fallait pas oublier l’histoire du meurtre du haut-roi, et tous les trucs potentiels qu’il pourrait cacher à ses compatriotes.

-Les lâches ! s’exclama Gerdur sur un ton similaire à celui de son frère.

-Mon ami allait être exécuté lorsque, surgi de nulle part, un dragon a attaqué, reprit Ralof.

Je ne compris que plus tard qu’il parlait de moi, quand il avait dit “mon ami“.

-Un dragon ? Un vrai ? répéta Gerdur d’un ton incrédule.

-C’est vrai, finis-je par dire. Un dragon a détruit Helgen.

-Même maintenant, j’ai du mal à y croire, reprit Ralof. Et pourtant j’y étais. C’est la confusion qui nous a permis de nous enfuir.

-Et Ulfric ? demanda Gerdur. A-t-il réussi à s’enfuir aussi ?

-J’en suis sûr. Même un dragon n’arrêterait pas Ulfric Sombrage. Il est peut-être même déjà à Vendeaume, au moment où nous parlons.

-Je vois. En tous cas, restez ici tant que vous le voudrez. Je ne laisserai aucun Impérial vous approcher. Les amis de Ralof sont mes amis, ajouta-t-elle en se tournant vers moi. Voici la clé de la maison, si vous voulez vous reposer. Et si ce sont des vivres que vous souhaitez, j’ai ce qu’il faut.

Gerdur me donna la clé de sa maison, ainsi qu’un sac rempli de plein de choses utiles : de la nourriture, des potions, un anneau d’argent et de l’hydromel.

-Merci beaucoup, dis-je d’un ton reconnaissant.

-Il n’y a pas de quoi, me répondit-elle avec un petit sourire. Vous pourriez aussi me rendre un service. A nous tous, en fait.

-De quoi s’agit-il ?

-Allez à Blancherive, avertir le jarl Balgruuf qu’un dragon est passé par ici. Rivebois est sans défense, il faut qu’il nous envoie un détachement de soldats, au cas où.

-Bien sûr. Je m’en occupe.

-Rivebois vous en est reconnaissant.

Puis elle se tourna vers son frère.

-Comptes-tu repartir tout de suite ?

-Non. Je vais me reposer encore un peu avant de repartir pour Vendeaume, dit Ralof en se relevant.

-D’accord. Moi je retourne à la scierie.

Gerdur partit, avec son mari, et Ralof se dirigea dans la direction opposée, sans doute vers la maison de sa sœur. Je le suivis, comme par réflexe, et il se retourna vers moi.

-Et vous ? Vous comptez partir maintenant ? me demanda-t-il.

-Oui. Le plus tôt sera le mieux, je pense.

-Vous avez raison. Savez-vous comment aller à Blancherive ?

-Pas vraiment, admis-je en haussant les épaules.

-Foncez vers le nord, vous ne pouvez pas la rater. C’est la capitale et la plus grande ville de la châtellerie de Blancherive. Comme le jarl Balgruuf n’a pas choisi de camp dans la guerre, vous ne devriez pas croiser de soldats Impériaux.

-Tant mieux. Je ne suis plus tellement d’humeur à me battre, là, soupirai-je.

-Pour quelqu’un qui met autant d’ardeur dans le combat, c’est amusant, s’esclaffa Ralof en me tapant amicalement l’épaule. Soyez prudent, j’espère qu’on se reverra.

-Moi aussi. A bientôt.

Ralof et moi firent un dernier bout de chemin ensemble, et nous nous séparâmes un peu plus loin, lui allant vers une maison surélevée et moi vers la sortie de la ville. Selon Ralof, la route vers Blancherive n’était pas excessivement longue, et, dès la sortie de Rivebois, un panneau annonçant Blancherive était visible. Je suivis donc bêtement la route, à travers les prairies de Bordeciel. C’était fou à quel point je me sentais libre, en ce moment précis, et je me dis que c’était, tout simplement, à cause de ma courte captivité. Et c’était pour ça que j’étais venu à Bordeciel, dans un premier lieu : explorer cette contrée dont les trésors insoupçonnés qui n’attendaient que moi. Je repensai aux Tertres des Chutes Tourmentées, dont Ralof m’avait parlé il n’y a pas si longtemps, et je me jurai d’aller y faire un tour dès que je pourrais.

Un peu plus tard, au loin, je voyais ce qui ressemblait à une cité fortifiée, ce devait être Blancherive, mais j’avais encore quelques heures de route avant d’y arriver. Je me contentai de suivre les panneaux, en restant un maximum sur la route, pour perdre un minimum de temps. Si le dragon qui a détruit Helgen était encore dans le coin, il ne fallait pas que Rivebois soit sans défense, en effet. Je continuai ma route en ruminant, ralentissant de temps en temps pour éliminer les quelques loups qui me cherchaient des noises. Elles ne doutent de rien ces bestioles…

Finalement, lorsque la nuit commença à tomber, je me rapprochai de ce qui semblait être une ferme. Je choisis d’y entrer, histoire de me reposer un peu, mais il s’avérait, qu’en fait, c’était une hydromellerie. Je n’étais pas très fan de cette boisson, mais le tenancier a accepté de m’accueillir pour me permettre de souffler quelques minutes. Il me proposa un peu d’hydromel, mais je refusais poliment, en lui répétant que ce n’était pas mon truc. Il me dit qu’il comprenait, en louchant sur mes oreilles pointues. Je ne relevai pas, et repris ma route vers Blancherive. Je passai par les écuries, où, apparemment, on pouvait louer des chevaux ou une calèche pour aller dans la capitale de chacune des neuf châtelleries. Cela me plut beaucoup, d’ailleurs, je m’en servirai sans doute plus tard. L’entrée de Blancherive se trouvait juste un peu plus loin, et, devant la grande porte en bois, un garde m’intercepta.

-Halte ! s’exclama-t-il. La ville est fermée à cause des dragons.

-Justement, je viens pour vous dire que Rivebois demande l’aide du jarl, improvisai-je.

-Rivebois est en danger, elle aussi ? Dans ce cas, allez-y. Vous trouverez le jarl à Fort Dragon, en haut de la colline.

-D’accord. Merci.

-Merci à vous.

Le garde se retourna vers la porte pour l’ouvrir, et me fit signe d’entrer une fois que ce fut fait. La double porte en bois se referma derrière moi, alors que j’entrai dans la grande ville de Blancherive.

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