Sans retour

Chapitre 12 : Soulage-moi de ma douleur

3641 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 09/11/2016 03:25

Salut à tous ! Pardon pour le léger retard. Et voici le chapitre douze ! Petit effort pour lire la fin… Mais j'espère qu'elle est écrite de manière à ce que vous restiez toujours concentrés. Un gros big merci à Illeana et Aoi-sama ! (Commentaires de fanfictiion.net, car fanfiction.fr n'est en effet pas réputé pour les siens, qui sont... carrément inexistants ! XD Je vais peut-être ne plus publier sur ce site.) Aucun commentaire n'est inutile Illeana, quand j'en reçois un – c'est-à-dire trois pour cette fic – je suis au top de ma vie ! Bonne lecture à toutes et à tous !

 

« Tu devrais manger.

- Je sais mais-

-Tu vis encore ici, sous le toit de tes parents, et je te demande d'avaler quelque chose s'il te plaît.

Ma mère s'escrimait à me faire manger notre repas du soir, mais ce n'était pas ce dont j'avais envie. Du riz au curry, non merci. Par contre je ne refuserai pas un petit steak bien saignant d'épaule d'un jeune humain, avec la chair tendre à souhait. Je serrai mes mains sur ma jupe, sous la nappe de table. Ma faim était revenue peu après que je sois rentrée, et elle n'avait pas quitté mes pensées un seul instant depuis. Il me restait encore une journée d'école, celle du vendredi, mais je n'étais pas certaine de pouvoir tenir jusque-là. Deux choix s'offraient à moi : soit je retournais dans l'organisation Polly pour quémander de quoi me nourrir, soit je subvenais à mes besoins par moi-même. Que ça soit la première ou la deuxième proposition, aucune ne me paraissait alléchante. D'un côté l'organisation devait m'en vouloir, et me recherchait sans doute, et d'un autre côté c'était carrément flippant de devoir tuer un humain, et d'autant plus en étant seule. De toute façon je savais bien que j'en serai incapable.

- Non merci, répétai-je une nouvelle fois à l'adresse de ma mère.

- To-

Je me levai de ma chaise.

- Ca suffit maman, j'ai plus cinq ans ! Je peux me gérer toute seule, surtout mon alimentation.

Ce qui actuellement était on ne peut plus faux.

- Ce n'est pas l'impression que j'ai eu quand tu as fugué !

J'ouvris la bouche pour répliquer mais la refermai. C'était inutile de commencer une dispute qui dans tous les cas finirait mal des deux côtés, de plus je vis bien que ma mère regrettait ses paroles. Je pliai calmement ma serviette et rangeai ma chaise.

- Je sors de table. Je vais aller faire un petit jogging dans pas trop longtemps.

Je courais quelques fois par semaine sur une voie piétonne très fréquentée, donc pas de problème côté danger, que ça soit des goules, des psychopathes ou ne sais-je qui d'autre encore.

- Ne t'inquiète pas je ne compte pas m'enfuir. » ajoutai-je à l'attention de maman.

Je montai dans ma chambre sans plus de cérémonie. Une fois parvenue dans mon antre je m'étalai sur mon lit et posai un bras sur mes yeux clos. Ah quelle poisse ! Je me redressai et fis mes devoirs pour le lendemain j'avais pris pas mal de retard. Chose faite, j'enfilai un tee-shirt à manches longues noir pour courir – ceux assez élastiques qui collent à la peau – puis un jogging léger de la même couleur, et enfin pour finir je mis mes baskets rouges. Je me postai devant mon petit miroir et attachai mes cheveux en un chignon serré. Enfin prête, j'éteignis la lumière et dévalai les marches.

« J'y vais ! lançai-je à la ronde.

- Attends ! s'exclama ma mère.

Impatiente de partir, je tapai du pied. Je l'entendis se lever de son canapé – les petits étaient déjà couchés et mon père était dans la douche.

- Maman, je dois y aller, lui dis-je les lèvres pincées.

Elle s'arrêta devant moi et croisa les bras.

- Je ne sais pas si je suis d'accord pour que tu partes. Tu pourrais me demander mon avis pour commencer il me semble, non ?

- Maman ! Je suis toujours allée courir quelques soirs par semaine ! soupirai-je avec exaspération.

- Et bien peut-être que je n'ai pas envie que tu le fasses pour un petit moment.

- Que- quoi ?! Tu veux aussi me priver de courir ? De faire du sport ? Autant m'attacher dans la cave directement ! m'écriai-je, exacerbée.

- Surveille ton langage ! me renvoya-t-elle.

Je me pinçai l'arête du nez et pris une grande goulée d'air pour me calmer.

- J'ai besoin de me défouler, d'accord ?

Je me rapprochai d'elle d'un pas et lui fis un léger sourire.

- Et puis, maman, courir est bon pour la santé non ?

Elle soupira doucement.

- Bon, vas-y avant que je ne change d'avis. »

Je partis en courant et claquai la porte derrière moi avant qu'elle ne tergiverse. Je descendis les quelques marches en pierre puis m'arrêtai. Je vis à travers les rideaux ma mère éteindre les lumières. Il devait être vingt-et-une heures, mon petit frère et ma petite sœur dormaient et mes parent allaient lire dans leur lit pendant une bonne demie heure. Un gargouillement creux résonna dans mon estomac, je décidai de l'ignorer mais j'eu rapidement du mal. Le moment de manger était venu, et je n'avais cependant pas le courage de revoir les goules de l'organisation Polly tout de suite. Une idée avait germé dans ma tête, ce genre d'idée stupide qui fait se sentir mieux, ou tout du moins plus en paix avec soi-même, moins coupable. Et si je ne tuais que ceux qui le méritaient ? Je ne dévorerai ainsi pas de pauvres innocents au hasard comme des petits enfants sans défenses, mais des criminels. En revanche, comment allai-je les trouver ? Je ne voyais qu'une seule réponse à cette question : je devais traîner dans des rues sombres, à attendre qu'on s'en prenne à moi ou à quelqu'un d'autre. C'était vraiment…inenvisageable, j'avais beaucoup trop la frousse. Un nouveau grognement de la part de mon estomac, cette fois plus retentissant. C'en aurait été presque comique si ça n'avait pas été dans ce contexte. Je sentis mon souffle devenir saccadé et le blanc de mon œil se remplir de noir. Mes iris maintenant devenues d'un beau bordeaux sombre me brûlaient. Je n'avais pas besoin de me voir pour savoir que mes yeux étaient ceux d'une goule, je le sentais. Une brusque douleur me tordit le ventre, et je me pliai en deux, la respiration coupée. Je pressai mon poing sur mon estomac en fermant les yeux et en me mordant la lèvre inférieure tant la souffrance était grande. Purée mais qu'est-ce qui se passait encore ?! Je titubai jusqu'au portillon et m'appuyai sur celui-ci.

« Fait chier, marmonnai-je. Fait chier fait chier fait chier !

Mon ventre émit un autre grondement. Je le frappai pour que la faim s'en aille, pour ne plus l'entendre grogner. Hélas, le malmener n'était pas la solution. Je levai la tête en direction du ciel. Dieu, pourquoi une telle chose m'arrive-t-elle ? Pourquoi est-ce que j'ai si mal ? Pourquoi ne me viens-tu pas en aide ? …Est-ce que tu existes au moins ? Le mal s'amplifia.

- Aah je n'en peux plus, je n'en peux plus, je n'en peux plus… »

Je répétai ces mots inlassablement comme s'ils étaient une cure, une sorte d'incantation me permettant de faire partir la souffrance.

Les goules devenaient folles lorsqu'elles ne mangeaient pas non ? Elles avaient faim, et elles étaient tentées par n'importe quel humain passant par là. Rien que le fait de fréquenter les hommes ravivait un peu l'envie de manger, même lorsqu'elles étaient repues. C'était un mensonge raconté par la télévision pour nous effrayer, assurément. J'en étais certaine. Parce que moi, ce ne fut pas exactement ce que je ressentis.

Je tombai genoux à terre. J'avais crapahuté quelques dizaines de mètres jusque dans une ruelle sombre, une impasse sans doute. Dans mon cas la douleur m'avait clouée au sol et je ne pouvais pratiquement plus esquisser le moindre geste. Une alarme rouge bipait dans mon cerveau, me signalant qu'il existait un remède contre cette souffrance inutile. Manger… Manger… De la bave coula à partir de la commissure de mes lèvres. Si je bouffai un peu je n'aurai plus mal, je n'aurai plus cette énorme boule dans le ventre m'envoyant des ondes électriques tellement douloureuses que je souhaitais tomber dans un sommeil infini en ne ressentant plus rien, je n'aurai plus la gorge qui me brûle, je n'aurai plus la bouche aussi sèche qu'un désert en feu, je n'aurai plus un étau de fer m'enserrant le crâne.

« Je-j'ai mal, pleurnichai-je.

Je m'appuyai contre le mur et refermai mes doigts sur mes cheveux, comme si je voulais m'attacher les poignets pour m'empêcher de faire quelque chose de stupide et d'inévitable.

J'étais en train de geindre, de me lamenter et de me cogner la tête contre le mur depuis cinq bonnes minutes lorsque j'entendis un bruit mat et un cri étouffé. Mais je m'en foutai, car le mal qui me rongeait était beaucoup plus important que tout ce qui pouvait se passer autour de moi. D'un autre côté ce bruit m'attirait, car il s'agissait sans doute de quelqu'un, et le bouffer me disais bien. Je préférai ainsi me concentrer sur ma douleur et faire abstraction du reste pour ne pas commettre de meurtre. Jusqu'à ce qu'une odeur de sang parvienne à mes narines. A partir de ce moment-là je n'eus plus toute ma tête. Je me redressai subitement et m'accroupis, puis me dirigeai à quatre pattes vers l'arôme douçâtre, les narines dilatées. Je ne pus me mettre debout car la souffrance me vrillait le ventre. Je devais rester pliée en deux.

« Ha…ha…hahaha…hahahahahaha.

De la bave coula le long de mon menton.

- Sou-soulage-moi de…ma douleur… Soulage-moi de ma douleur… Soulage-moi de ma douleur ! » fis-je la voix rauque, et mes mains agrippant mon cuir chevelu.

Le bruit s'arrêta, mais l'odeur de sang, elle, était toujours bien présente. Je me dirigeai à l'odorat, et non à l'ouïe ou à la vue. Je me laissai glisser contre le mur le long de la rue jusqu'à une seconde impasse. La peur et le sang étaient présents partout par ici, étouffant, envahissant l'air. Une vague de chaleur me submergea, me prenant à la gorge et aux tripes, m'intimant que le moment était venu de me repaitre. Dans la pénombre qui me faisait face une forme humaine se dessina, puis se démarqua complètement du noir. Il s'agissait d'un homme d'une cinquantaine d'années, il avait du sang autour de la bouche et au-dessus du sourcil, et tenait quelque chose dans sa main. Des cheveux. De longs cheveux bruns emmêlés. Il trainait un corps derrière lui, un véritable corps d'une jeune femme. Je ne saurai dire son âge, car son visage mort était défiguré par la peur et la souffrance, et ce qui restait d'elle était méconnaissable. Je penchai la tête sur le côté à la fois horrifiée mais, plus encore, attirée. Je plongeai mon regard dans ceux de la goule, et j'entraperçus un éclair fugace de peur, puis il parut rassuré.

« Tu…, commença-t-il. Toi non plus tu n'as pas mangé depuis un certain temps hein ?

Il posa sa main sur l'avant-bras de la jeune femme et tira, déboitant son épaule puis arrachant son bras entier. Il l'envoya à mes pieds avec un air compatissant.

- Tiens. Je ne suis pas une brute sans cœur, je te laisse ça. Par contre, fit-il d'une voix menaçante, si tu essayes de prendre plus ou de me suivre je n'hésiterai pas à devenir violent, c'est clair ?

J'hochai le menton, il me semblait en effet avoir compris ses mots, bien qu'ils aient sonné étrangement à mes oreilles, comme une provocation. A laquelle je décidai de répondre avec joie. Je pris le bras au niveau du poignet et le balançai au visage de la goule mâle, ce qui le surpris et le fit tomber à la renverse, puis je m'assis sur son ventre. Un nouveau fumet, plus épicé et sucré, parvint à mes narines. D'où venait-il ? Je tournai la tête de tous les côtés pour trouver sa provenance. Cela sentait foutrement bon, beaucoup plus que ce corps refroidit, qui paraissait maintenant fade en comparaison. C'est alors que je remarquai une coupure sur la joue de l'homme, qui était déjà en train de se refermer. Une goutte de sang avait cependant eu le temps de s'échapper de la blessure. Je l'attrapai du bout des doigts, et frappai la tête de la goule contre le goudron dans l'objectif de l'assommer, pour pouvoir me concentrer pleinement sur le petit joyau posé sur mon index. Ce rouge profond était magnifique, strié de long filaments bordeaux très sombres. Je contemplai les reflets sous la lumière de la lune, ou tout du moins les quelques rayons qui passaient à travers les nuages et la pollution…

La couleur de l'hémoglobine méritait qu'on se penche dessus avec attention. Elle mélangeait une infinité de tons pourpres, plus surprenant les uns que les autres, et il ne devait pas être à la portée de tout le monde de pouvoir y goûter. Une telle beauté, il fallait en payer le prix fort pour s'en emparer. Il ne suffisait pas de tuer quelqu'un, c'était trop facile, trop accessible. En réalité…pas tant que ça, puisque seules les goules semblaient posséder un tel sang. Finalement ce n'était pas de la faim mais de la pure fascination, et de la curiosité.

C'est à ce moment-là, après avoir eu toute ces pensées, que je remarquai que mon corps tremblait avec frénésie, une frénésie contenue mais violente. Un grondement plaintif résonna dans mon estomac. Mais le pire, ce fut la douleur. Elle se propagea de mon nombril jusque dans tout mon être, insoutenable, brûlante, des flammes léchant chaque partie de mon corps et les transformant en un brasier douloureux. Ma vue ne devint pas floue, non, mais elle commença petit à petit à se dédoubler, jusqu'à ce que je ne distingue plus les formes qui m'entouraient avec précision. Je levai avec panique les yeux vers la lune, mais celle-ci se mit à danser dans mes pupilles, et à s'arrondir bizarrement. Elle devint ovale, s'étirant dans un sens puis dans l'autre, et finalement elle descendit avec une nonchalance parfaite en direction du sol, pour se retrouver sous mes pieds. Une nausée indescriptible s'empara de moi. Je n'étais pourtant pas de ce genre, j'aimais beaucoup tout ce qui était à sensations sauf que là, c'était bien au-dessus de tout ce que j'avais vécu, et au-delà de ce que je pensais un jour expérimenter. Seule une chose était distincte, et c'était ce que me criait, ou plutôt me hurlait mon instinct. Il faut manger. Manger fait oublier, manger aide à se sentir mieux. Mange Toto. Mange ! Mange ! MANGE !

Je fermai les yeux, et bien que le monde continue de tourner autour de moi, je sentis le corps chaud et évanoui de la goule mâle sous mes fesses. Mon cœur battait dans ma cage thoracique comme s'il voulait en sortir, partir loin et ne laisser qu'une coque vide. Sans plus attendre j'empoignai la veste et le tee-shirt de l'homme et les arrachaient.

« Soulage-moi de ma douleur, susurrai-je alors que chaque mot dépassant mes lèvres me faisait l'effet d'un coup de poignard dans le ventre.

Je souffrais tant. Un casse-croûte serait le bienvenu. Son corps remua sous moi, il semblait s'être réveillé, et bien que tout ce qui m'entourait tournoie inlassablement, je croisai ses pupilles sombres qui me fixaient avec effarement. Je plissai les yeux et lui assenai une claque, mes ongles griffant sa joue te faisant gicler un peu de son sang. Il faut dire que j'en avais de la force maintenant.

Mais ses yeux restaient posés sur moi, me narguant, même lorsque je fermai les paupières. Je le frappai de nouveau, plus fort, et encore, de plus en plus fort. Il ne cria qu'une seule fois, et ce ne fus qu'un faible gémissement se terminant en un gargouillis répugnant. Mes mains me firent mal du fait de l'avoir trop giflé, mais elles furent bientôt guéries. Alors pourquoi la douleur qui s'était répandue à l'intérieur de tout mon corps ne disparaissait-elle pas ? Pourquoi ma peau me paraissait-elle incandescente ? Pourquoi souffrais-je le martyr ? Le ventre blanc de la goule s'offrit à moi à travers les lambeaux de vêtements déchirés. Je passai ma langue sur mes lèvres sèches. Ma petite voix bestiale me chuchota une fois de plus ces mots qui me semblèrent tout à coup aussi doux qu'un oreiller de plumes. Voici venu ta rédemption. Il te suffit de te repaître de cette nourriture et toute ta souffrance s'envolera. Sans plus attendre et la bave dégoulinant, je me jetai cette chair pâle et tendre. Je le bouffai cet enfoiré, ce délicieux petit meurtrier, cette pauvre goule qui ne demandait qu'à être mangée.

Je ne me souviens pas exactement de la suite, toujours est-il que je me réveillai le lendemain dans mon lit, me sentant au chaud comme dans un petit cocon conçu exprès pour moi. J'ouvris les paupières, un léger sourire aux lèvres, et m'étirai comme un chat. Je regardai un peu autour de moi et…poussai un cri de terreur.

 

Que de suspense hein ? (Je suis forte pour ça avouez ! Non ? Bon bah tant pis…)

J'espère que ça vous a plu :3 J'essaye de maintenir un peu la cadence de l'action pour le moment ! Et n'oubliez pas de me dire ce que vous pensez ! Ou bien si vous avez des suggestions ! Bonne nuit ! (pour moi)…

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