Sans retour

Chapitre 13 : Rouge

5030 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 12/12/2015 15:50

Salut à tous, me revoici avec un chapitre 13 ! On va dire que ce chiffre porte malheur et que c'est pour ça que j'ai mis plus de temps que prévu à poster ce chapitre… Enfin il est là maintenant ! Et pour m'excuser je vous ai ajouté un petit bonus, même si je comptais déjà mettre ce passage quelque part… Il devrait y en avoir un autre, une sorte de suite, dans le prochain chapitre. Voilà j'ai terminé ce que j'avais à dire ! Comme d'habitude un p'tit bloc vers le début ! Bonne lecture !

 

Mon réveil sonna, je tâtonnai de la main ma table de chevet à la recherche de mon portable, cela sans ouvrir les yeux. Je l'éteignis et me rendormis quelques minutes, jusqu'à ce que je t'entende des bruits dans la cuisine. Sans doute ma mère qui préparait le petit déjeuner pour mon père, Michio et Saki. Quelque chose tomba et il y eut un bruit de verre brisé, sûrement une tasse. Je grognai et enfouis la tête en plein dans mon oreiller. Etrangement, je sentis sur ma joue une chose collante et un peu gluante, mais pas inconfortable, bien au contraire ! L'odeur était envoûtante et la chaleur douce. Mon second réveil retentit, et avec un soupir je l'éteignis de nouveau. Je devais me lever maintenant, prendre une petite douche, et manger un morceau. Attendez… Je me souvins brusquement que c'était fini pour moi les petits déjeuners, et une drôle de sensation remonta le long de ma colonne vertébrale. J'ouvris lentement un œil, puis l'autre, et me redressai sur mon lit en m'étirant longuement, la sensation de bien-être du lieu ne m'ayant toujours pas quittée. Je regardai autour de moi, un peu perdue et encore dans les vapes, et poussai un cri de terreur lorsque je me rendis compte de ce qui m'entourait.

Les draps blancs de mon lit étaient maculés d'un rouge sombre marronné, et je remarquai que j'avais dormi entièrement nue. Mon corps lui aussi était couvert de ce liquide corporel j'avais de longues craquelures le long de mes bras, au-dessus de ma poitrine et jusque dans mon cou, ainsi que du sang coagulé dans les cheveux. J'entendis des pas monter les escaliers à toute allure. Rapidement je m'expulsai hors de mon lit et me précipitai contre la porte, bloquant l'accès à quiconque voulant entrer.

« Toto ?! s'exclama ma mère en toquant avec énergie. Tout va bien ?

- O-oui, répondis-je la voix tremblotante.

La poignée de la porte s'abaissa.

- Je peux entrer ? Dis-moi ce qu'il se passe !

- N-non ! Ne rentre pas !

Je sentis la main de ma mère s'immobiliser sur la poignée.

- Laisse-moi entrer, je suis inquiète.

Je posai mon front et mes poings contre la porte.

- Tout va bien maman, j'ai fait un cauchemar c'est tout. Ne rentre pas s'il te plaît, je suis toute nue.

Il y eu un court instant de silence, puis sa main se retira de la poignée. Je poussai un soupir de soulagement.

- Bon…, chuchota-t-elle. Dépêche-toi de prendre ta douche ou tu vas être en retard.

- Oui oui. »

Elle repartit dans la cuisine, une aura d'inquiétude la suivant. Je me mis dos contre la porte, fermant les yeux et me cognant deux fois la tête. J'avais eu chaud. Je ramenai mon regard sur mon lit, sentant déjà des sueurs froides couler le long de mon dos. Vu de loin il y avait moins de sang, mais mes draps étaient tout de même bons à jeter. J'entrepris de les retirer maintenant avant qu'on ne les découvre, on ne sait jamais si quelqu'un entrait dans ma chambre pour une raison ou pour une autre. Mes mains ne cessèrent de trembler durant ma tâche, tandis que des questions de plus en plus habituelles tournoyaient en boucle dans ma tête. Cependant je connaissais la réponse cette fois-ci, mes souvenirs remontaient à une vitesse folle et s'entrechoquaient sans arrêt les uns contre les autres, me rappelant à quel point ce que j'avais fait était terrible. Une image particulièrement atroce refit surface et je me précipitai hors de ma chambre pour aller vomir dans les toilettes. Un peu plus et je le faisais directement dans le couloir. Quand je vis le contenu de mes rejets dans l'eau des wc je vomis une deuxième fois, et les souvenirs remontèrent…

Je n'avais pas pris le temps de mâcher la goule, car plus je la mangeais plus la douleur qui me terrassait disparaissait. J'avalais ainsi goulument chaque bouchée, les enchainant à une vitesse folle et les arrachant à divers endroits, les plus accessibles en général. Je ne me rappelais pas avoir touché au cadavre de la femme, je savais juste qu'il me paraissait moins attrayant. Trop refroidit, légèrement salé, mais principalement fade. En comparaison avec la goule mâle, délicieuse, d'une épice sucrée pleine de saveurs. Je frémis, mais ne sus pas si c'était de dégoût au souvenir du corps déchiqueté ou de plaisir.

Vous n'imaginez pas ce que c'est que de souffrir le martyr puis de sentir cette souffrance se transformer en extase, en sensation de bien-être à l'état pur. J'en gardais à la fois un mauvais souvenir, terrible, et horriblement gore, mais également une pointe de bonheur. Comment dire…La comparaison était flagrante entre le moment d'avant, lorsque je n'avais pas encore mangé la goule, et le moment d'après. Je me rappelais d'une manière floue mais également très nette de la transition entre ces deux parties. Quand le mal qui me brûlait s'était transformé en un soulagement des plus agréables pour devenir un plaisir intense, quand de doux picotis avaient couru le long de mes bras jusqu'au bout de mes doigts, et principalement quand le monde avait enfin cessé de tourner autour de moi et était retourné bien sagement à sa place, avec la lune à son point d'origine fixe. Par mesure de sécurité j'avais continué de manger, afin d'être certaine de pouvoir être tranquille pendant quelques temps de cette douleur.

Toujours nue dans les toilettes, je m'assis contre le mur froid, le corps grelottant et transpirant à la fois. Je fermai la cuvette, tirai la chasse d'eau et mis un peu – beaucoup – de désodorisant pour cacher l'odeur nauséabonde. J'ouvris ensuite doucement la porte et passai la tête à l'extérieur pour vérifier qu'il n'y avait personne, puis sortis en vitesse pour me rendre dans la pièce d'à côté, la salle de bain. Je tournai le jet de douche à fond, pour me décrasser un maximum, et me mis dessous avant que ce ne soit chaud. La force de l'eau me picota la peau, mais je n'y fis pas attention, le principal étant de faire partir tout ce sang. Le fond de la baignoire se teinta petit à petit de rouge. J'étirai mon bras hors de la baignoir pour saisir ma brosse à cheveux puis tirai le rideau de douche, voulant éviter de faire gicler des gouttes écarlates sur les carreaux gris. Je démêlai tant bien que mal mes cheveux sous l'eau brûlante, mais ils étaient si bien imprégnés que le bout de mes mèches resta obstinément collé. Je détournai bien vite les yeux en remarquant l'état des extrémités de ma chevelure des nœuds rougeâtres tirant sur le marron, tout cela englobé dans une matière gluante et visqueuse. Les cours n'allaient pas tarder à commencer cependant, et je ne pouvais pas me permettre de traîner. N'y réfléchissant pas à deux fois, j'attrapai une petite paire de ciseaux.

Je sortis de la salle de bain vingt minutes plus tard complètement à la bourre, les cheveux pas tout à fait secs – donc bouclant dans tous les sens – et un maquillage plus prononcé que je ne l'aurai souhaité. Dans ma précipitation je n'avais pas pris le soin de me dessiner un trait noir suffisamment fin. Je m'habillai à la hâte et partis en direction du lycée à l'allure d'un sprint normal – par normal je veux dire humain. Je ne ressentis aucune fatigue, mais étrangement j'eus un peu chaud, et une couleur rosée me monta aux joues.

Parvenue devant le portail, la cours était entièrement vide. La sonnerie avait à coup sûr déjà retentit, et en dépit de ma course j'étais de nouveau en retard. Je n'aurai pas la satisfaction d'arriver pile à l'heure cette fois-ci.

« Mlle Yun-Ji, merci de nous honorer de votre présence, m'apostropha M. Yamashita mon professeur d'histoire.

- Excusez-moi, je n'avais plus d'eau chaude pour ma douche, me justifiai-je, satisfaite de mon excuse.

- Dans ce cas cela aurait dû être plus rapide, non ?

Un mince sourire apparut sur son visage quand il vit ma mine déconfite. Il s'écarta pour me laisser passer.

- Je vous en prie allez vous asseoir, vous avez l'air d'avoir eu un réveil difficile.

Je me rendis à ma place, de nouveau stupéfaite par son étrange gentillesse.

- Oh, Mlle Yun-Ji, ajouta-t-il en articulant chaque mot. Je vous donnerai du travail ménager à faire pour votre prochain retard non-justifié.

Je soupirai et levai discrètement les yeux au ciel. Evidemment j'aurai dû m'en douter, ça ne lui ressemblait pas vraiment d'être clément.

- Oui monsieur. »

Je m'assis, sortis de quoi écrire et me concentrai sur le cours. Cela me permettrait sans doute d'éloigner un minimum les images sanglantes qui ne quittaient pas ma tête. Cependant il m'arrivait subitement pendant quelques secondes de me tendre, et crisper tellement maa main autour de mes stylos que je réussis à en casser deux. Quand les deux heures avec M. Yamashita se terminèrent, je soufflai de soulagement et massai mes doigts endoloris.

« Psst !

Je rangeai ma chaise et me tournai vers une Azamie rayonnante. Je l'avais complètement oubliée.

- Tient ! Comment vas-tu ? lui demandai-je.

Elle ne me répondit pas et tendit une main vers moi. Je reculai d'un demi pas, surprise, mais elle eut le temps de m'atteindre et attrapa une mèche de mes cheveux.

- Tu t'es coupée une bonne quinzaine de centimètres dis-moi ! Ils ne t'arrivent plus qu'aux épaules !

Je tentai d'aplatir ma chevelure désordonnée.

- Ah… Oui. Je l'ai fait moi-même ce matin. Une envie soudaine.

Je rougis à mon mensonge. Cela ne me dérangeait pas de raconter des bobards d'habitude, mais disons que cette fois-ci la raison n'était pas très flatteuse. Les joues d'Azamie foncèrent également un peu quand elle remarqua les miennes.

- C'est pour ça qu'il y a des parties un peu inégales, constata-t-elle.

- Mh. Sans doute. J'irai arranger ça chez un coiffeur.

Elle posa sa main sur mon épaule, et je frissonnai à son contact.

- Je peux m'en charger si tu veux ! Je coupe les cheveux de ma mère et de mes oncles.

- C'est vrai tu ferais ça pour moi ? m'exclamai-je.

- Bien sûr ! se récria-t-elle.

Elle entortilla une de ses longues mèches noires entre ses doigts.

- Tu viens toujours, samedi ?

La meilleure chose à faire : se changer les idées.

- Oui.

Elle posa un index sur son menton, semblant réfléchir.

- On aura qu'à se voir pour vingt heures. Chez toi ? J'apporterai mes ciseaux !

Je repensai au fait que j'étais punie. Je convaincrai mon père pas de problème de ce côté-là.

- Ça marche.

- Bon, et bien… à tout à l'heure.

Elle se tourna à demi.

- Azamie ! l'interpelai-je.

- Oui ? répondit-elle du tac au tac.

- M-merci, pour… Pour tout.

Le beau sourire dont elle avait le secret s'étala sur ses lèvres.

- De rien… Toto.

J'eus l'impression qu'elle n'avait pas prononcé mon prénom depuis une éternité.

Le reste de la journée se déroula tranquillement : je mangeai avec Azamie, Honami et Sae le midi, puis retournai en cours l'aprèm pour une heure seulement. Des images pourtant toujours autant atroces et sordides me hantaient, et j'eus trois fois des nausées. Finalement pas si tranquille que ça la journée.

Quand finalement je sortis du lycée j'avais très chaud et un mal de crâne horrible. Je me rendis au Redstone, les nerfs à fleur de peau. Je pouvais me permettre de me promener puisqu'il n'y avait de toute façon personne à la maison. Il faisait bon aujourd'hui, le soleil était haut très lumineux pour le moment, et el ciel était complètement dégagé. Je m'assis sur la terrasse et sortis une cigarette. J'aperçus le faux blond derrière son bar, qui nettoyait un verre. Il ne tarda pas à me remarquer en dépit du monde – c'était un bar à succès – et me fit un signe de bonjour, que je lui rendis. Il envoya un serveur prendre ma commande, un grand brun à la peau un peu pâlotte. Il s'avança vers moi avec un air avenant, et… nouveau. Il venait d'être embauché ça se voyait.

« Bonjour, qu'est-ce que je vous sers ?

Mon choix fut rapide, en souvenir du bon vieux temps.

- La spécialité du faux blondinet derrière le bar s'il vous plaît.

Il parut décontenancé. Je souris. Mes mauvaises manies ressurgissaient à cause de tous ces trucs improbables qui m'arrivaient, j'avais besoin de me laisser aller. Cela m'arrivait parfois, de laisser mes anciennes habitudes reprendre le dessus.

- Que-comment ça ? demanda-t-il un peu perdu.

- Allez lui passer ma commande et il comprendra.

Il eut un froncement de sourcils.

- T-très bien.

Il rangea son carnet dans son tablier sans avoir rien noté et partit. Je l'observai parler avec le faux blond. Ce dernier se tourna vers moi un sourire en coin et les yeux plissés, puis il prépara mon verre, que le serveur ne tarda pas à m'amener. Il le posa délicatement sur la table, et avant qu'il n'ait eu le temps de me donner le prix je lui tendais déjà la somme exacte.

- Je vois, vous êtes une habituée, constata-t-il.

- J'étais, le corrigeai-je.

Il me sourit, et son regard passa de mon uniforme à ma cigarette puis au verre, qui sentait bien évidemment l'alcool. Je me crispai. Il n'allait quand même pas me faire chier, j'avais pas besoin de ça. Ma migraine s'était encore amplifiée, alors j'étais plutôt à vif.

- Un problème ?

Devant ma brusquerie il recula d'un pas et secoua les mains.

- Non non pas du tout ! Bonne journée !

- Merci, vous aussi. » grommelai-je.

Je posai ma cigarette sur le cendrier pour m'attacher les cheveux – plusieurs ne restèrent pas dans mon chignon à cause de ma nouvelle coupe – puis la remis en bouche. Je restai un court instant à jauger mon verre d'un air impassible, puis me décidai finalement à le goûter. Je trempai mes lèvres légèrement et sortis le bout de ma langue, puis me concentrai sur la saveur dans ma bouche. Ce n'était pas bon. Après tout c'était de l'alcool fort, donc pas très étonnant, mais tout de même… plus fade, moins alcoolisé dirai-je, et plus mauvais. D'après les émissions sur le rapport des goules à la nourriture j'aurai pensé tout recracher immédiatement, mais en fin de compte je pouvais supporter le goût. Peut-être parce que j'étais une goule un peu particulière ? Ou peut-être parce qu'il s'agissait d'une boisson, qui plus est de l'alcool ? Déçue et rassurée je pris une nouvelle gorgée puis reposai mon verre, et finis ma clope tranquillement.

Une trentaine de minutes plus tard j'avais terminé mon second cocktail et fumais une nouvelle cigarette. Une ombre me cacha du soleil et je relevai la tête en direction de la personne.

« Heyyy ! Alors ma jolie tu bois toute seule ?

- On peut se joindre à toi ? renchérit une autre voix un peu plus grave.

J'ouvris des yeux ronds puis partis dans un rire irrépressible.

- Qu'est-ce que -, commença la première voix.

- Hirako ! m'exclamai-je. C'est moi !

- Heeiin ?

Il me regarda sans comprendre à travers ses longues mèches blondes, puis sa bouche s'ouvrit en « o ».

- Oh purée, Toto ?!

Il se fit bousculer par un garçon de taille moyenne et aux cheveux noirs hérissés.

- Dégage Hirako, grommela-t-il.

Il me fixa puis s'assit sur la chaise en face et se prit la tête dans les mains.

- Oh putain qu'est-ce que tu fous ici toi ? fit-il.

Je ris de nouveau.

- Salut Daisuke, ça faisait longtemps.

- C'est l'cas d'le dire, grinça-t-il.

Je posai ma joue dans ma paume.

- Oh ça va boude pas, tu sais très bien pourquoi je n'ai pas donné de nouvelles.

Il passa sa main dans ses cheveux en soupirant.

- Ouais, marmonna-t-il. Et depuis quand tu parles comme une sainte nitouche ? Ça fait flipper.

- Je parle normalement c'est tout, très cher, ripostai-je piquée au vif.

Je me raclai la gorge et continuai :

- Alors qu'est-ce que vous devenez ?

Je m'adressais à Hirako et Daisuke, les trois autres qui les accompagnaient je ne les connaissais pas.

- On s'en fout, me répondit Hirako. Dis-nous plutôt ce que tu fais toi ?

- Je bosse, lycée, terminale scientifique, énumérai-je.

Le blond se tourna vers Daisuke.

- Je te l'avais dit qu'elle était intelligente.

- Ta gueule, je le sais bien, riposta-t-il.

L'alcool me chauffait déjà les joues et la poitrine. Je les regardai tour à tour, guillerette. Finalement je me penchai au-dessus de la table et ébouriffai les cheveux du noiraud.

- Ca c'est gentil.

Il recula brusquement, surpris. Je pouffai.

- Ben alors c'est tes hormones qui te travaillent mon petit Daisuke ?

J'avais toujours aimé l'embêter avec ça, il avait des réactions marrantes. Il devint d'ailleurs légèrement rosé et fronça les sourcils. Eh oui, j'avais bien changé par rapport à cette époque, je m'étais rangée maintenant ! Bon, il est vrai que j'avais dit vouloir booster un peu ma vie, alors revoir mes anciens amis était un bon moyen pour ça. Et puis ça ne faisait de mal à personne, si ?

- Je vous paye un verre ? proposai-je.

- Ouaiiis ! s'écria Hirako.

- Ça marche, fit Daisuke avec entrain.

Le reste de la journée se déroula dans la bonne humeur et la joie de s'être retrouvés. Ça faisait tellement du bien que je ne m'étais pas amusée comme ça ! Je leur dit au revoir chaleureusement vers dix-sept heures trente, et leur promis qu'on se verrait le lendemain soir. J'irai leur passer un coucou après avoir vu Azamie et ses amis (jolie rime !). Je n'avais par ailleurs pas demandé à cette dernière de qui il s'agissait. Je rentrai rapidement à la maison avant que maman ne soit là. Mon père me précéda d'une vingtaine de minutes, j'avais eu chaud ! Je parvins comme prévu à le convaincre de me laisser sortir demain soir, en m'apitoyant sur mon sort de pauvre asociale qui trouve enfin des personnes à qui parler. Mon papa est génial.

Je me vautrai sur le canapé et somnolai jusqu'à ce que maman m'appelle pour le dîner. C'est en grognant et en traînant les pieds que je rejoins ma famille à la table. Ils n'imaginaient pas à quel point je n'avais pas faim, j'étais rassasiée pour ainsi dire à cent pour cent. De plus la nourriture si délicieuse de ma mère ne paraissait dorénavant plus attrayante du tout, et l'odeur n'était pas des meilleures. Je prétextai des maux de ventre et allai me coucher. Il était seulement vingt heures trente quand je m'endormis, étrangement épuisée. J'eus une dernière pensée envers mon père, espérant qu'il se soit souvenu de parler à maman.

/(PSEUDO) BONUS/

Azamie avait toujours été quelqu'un de soucieux pour son entourage, et elle était rarement sûre d'elle. Elle était pourtant intelligente quant à ce dernier point, belle aussi, avec sa longue chevelure noire et sa frange coupée au millimètre près, ainsi que ses beaux et grands yeux marrons innocents. Elle vivait en périphérie de la ville, dans un quartier plutôt pauvre. Son père, un grand avocat, était parti avec femme très jeune alors qu'elle n'avait que deux ans, laissant sa mère femme au foyer avec un grand appartement à payer et un bébé dans les bras. Elle s'était battue pour subvenir aux besoins d'Azamie, travaillant dans une petite supérette et gardant des enfants. Elle avait ensuite emménagé dès que possible avec son oncle à la retraite, qui pouvait donc l'aider à s'occuper de la petite. Ils survivaient tous les trois dans un petit appartement, les deux adultes gagnant très peu et comptant sur l'autre.

Azamie avait maintenant quinze ans, elle était en seconde dans un petit lycée de la ville où elle avait plusieurs amis, dont Honami et Sae. Elles étaient toutes les trois inséparables. On ne comprenait d'ailleurs pas toujours pourquoi, c'était comme si un lien invisible et incompréhensible les liait. Tandis que l'une piaillait gaiement et sans arrêt de la belle vie et d'histoires drôles, la seconde presque autant bavarde discutait maquillage, haute couture et insultait les garces de son école, et la troisième plutôt réservée les écoutait tranquillement, lançant une phrase de temps en temps. En bref elles formaient un trio diversifié.

Aujourd'hui, un mardi, Azamie se leva à six heures. Elle prit une douche rapide – l'eau ça coûte cher – mangea un bol de céréales avec deux verres de jus d'orange, se brossa les dents, se maquilla rapidement, fit son sac et partit prendre le métro. Cinquante minutes après elle arrivait devant les grilles du lycée avec dix minutes d'avance – on ne sait jamais ce qui peut arriver sur le chemin.

« Salut Azamie, retentit une voix douce dans son dos.

Elle se retourna en sursautant et se mit à rire en reconnaissant son amie.

« Coucou Sae ! Ça va ?

- Oui très bien et toi ? s'enquit-elle.

- J'ai cru que je n'y arriverai jamais ! soupira-t-elle.

La rousse lui tapota légèrement le dos, son éternel sourire maternel aux lèvres.

- Courage ! »

Elles se rendirent en classe, et Honami ne tarda pas à les rejoindre. Elle s'affaissa sur sa chaise, faisant s'agiter ses courts cheveux bruns.

« Salut les filles !

Puis elle s'accouda sur le rebord de son dossier, se tournant vers elles.

- Vous avez entendu ? Y a une nouvelle !

- En cours d'année ? La rentrée était il y a deux mois, s'étonna Azamie en penchant la tête.

- On se tait et on s'assoit, intervint le professeur. Nous allons accueillir une nouvelle camarade.

La classe se tut rapidement, impatiente de découvrir la nouvelle venue. Azamie se redressa sur sa chaise pour mieux voir. Elle ne savait pas trop à quoi s'attendre, mais certainement pas à ça. Une fille assez mince aux cheveux châtains roux s'avança sur l'estrade. Elle avait des lèvres pleines et de magnifiques yeux verts. S'agissait-il d'une étrangère ? Elle n'entendit pas ce que dit le professeur, trop absorbée dans sa contemplation de la jeune fille.

- Ferme la bouche Azamie, lui chuchota Honami en pouffant un peu trop fort.

La noiraude secoua la tête pour reprendre ses esprits et ramena son regard sur la nouvelle. Elle frémit quand elle remarqua que celle-ci la fixait, ses lèvres remuant. Azamie crut en premier lieu qu'elle s'adressait à elle et piqua un fard.

- … de l'école Higashi, termina la belle inconnue. Merci de me faire un bon accueil.

Des chuchotements s'élevèrent. En effet l'école Higashi n'était pas très réputée pour son niveau, et encore moins ses élèves, de jeunes délinquants disait-on.

- Va t'asseoir dans la rangée deuxième rangée à la place qui est libre, la troisième table. »

Elle s'exécuta dans le silence. Azamie l'observa tout le long de son déplacement, du tableau jusqu'à sa table. Elle n'était pas la seule d'ailleurs, beaucoup la fixaient mais c'était normal après tout elle venait d'arriver et il faut dire qu'elle attirait le regard avec ses traits étrangers, principalement ses yeux émeraude. Il fallut cependant que son regard plonge dans celui d'Azamie. Elle se détourna rapidement, le visage impassible, mais la noiraude avait eu le temps de déchiffrer une certaine animosité au fond des prunelles de la fille, et également, encore plus en profondeur, de la détresse. Déchiffrer les gens, elle était douée pour ça, et elle décida de prendre la nouvelle venue sous son aile.

 

Fin du bonus ! Ça vous a plu j'espère ! A la prochaine !

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