La Couronne de la Terre des Illusions (CTI)

Chapitre 17 : Conseil de l’au-delà

2229 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour 04/10/2025 23:38

Chapitre 17

Conseil de l’au-delà

 

C’était une ambiance particulièrement festive. Olivier déambulait entre les différents stands. Même si souvent, ceux les gérants ne semblaient guères sympathiques, il savait qu’il ne risquait rien. Cette route, habituellement très empruntée, ne l’était pas ce jour-là, et cela, depuis un certain temps déjà. Les effets de la corruption s’étaient vite fait ressentir ici. Les boutiquiers redoublèrent alors d’efforts pour vendre à jeune homme leurs produits, tous plus étranges les uns que les autres. Les stands s’étirèrent de part et d’autre de la route. Des dizaines de boutiques, vendant absolument tout de disponible en Gensokyo, mais aussi, des mondes souterrains et des Enfers.

Là, Olivier sentit qu’on lui tirait la manche. Il se retourna et vit une étrange créature. C’était un petit fantôme. Son apparence l’indiquait, d’autant que sur la route où il se trouvait, c’était une créature des plus ordinaires. Ce qui l’était moins, c’était l’insistance de la créature à vouloir qu’Olivier le suive. Après une trentaine seconde d’insistance, le jeune homme soupira et suivit la créature.

 

Ils marchèrent sur la Route de la Liminalité jusqu’à arriver à son extrémité. Il voyait une rivière sinistre, aux eaux sombres et insondable. Un léger banc de brume empêchait de voir ce qu’il y avait au-delà. Il reconnaissait le fleuve Sanzu. Ce qu’il ne comprenait pas, c’était la raison qui avait poussé le fantôme à l’entraîner jusqu’ici. Cependant, il vit que celui-ci voulait qu’il avance encore. Le jeune vivant hésitait à s’aventurer sur le vieux ponton en bois qui semblait être en ruine. Mais au loin, il vit alors une ombre apparaître dans le banc de brouillard. Celle-ci se rapprocha lentement de lui et la forme devint de plus en plus distincte. Il s’agissait d’une barque. Sur celle-ci, il y avait deux personnes, une assise à l’avant, une debout à l’arrière. Peu de temps avant que la barque n’atteigne le ponton, il put reconnaître les deux personnes présentes. Il s’agissait de Komachi Onozuka et de Eiki Shiki, une Yama. Surpris par l’arrivée de cette personne prestigieuse, il recula de quelques pas et dès que la barque accosta sur le ponton et qu’elle descendit, il s’inclina respectueusement.

Elle invita le jeune homme à se relever tandis que sa shinigami posait à son tour pied à terre. Elle lui demanda s’il voulait un peu se promener avec elle. Hésitant, il accepta d’un simple hochement de la tête. À cette réponse, la juge des Enfers marcha jusqu’à lui avant de lui dire de la suivre. Il s’exécuta sans rien dire, alors que Komachi remerciait le petit fantôme avant de le prendre sur sa barque et de repartir vers le brouillard.

 

Les pas se succèdent, dans le silence entre Olivier et Shiki. À leur passage, les boutiquiers s’inclinèrent respectueusement, mais certains aussi, avec crainte. Les fantômes parcourant les allées s’écartèrent à leur passage. Tout cela gêna le jeune humain qui ignorait encore pour quelle raison il se retrouvait avec la Yama. D’un ton hésitant, il lui demanda.

 

– Je suis très surpris que… vous vous soyez déplacée juste pour marcher avec moi…

– Je ne suis pas là pour cette raison, répondit-elle sur un ton terriblement sérieux, presque distant.

– Heu… pour quelle raison vous êtes présente avec moi aujourd’hui ?

– Je sais très bien que Gensokyo est en ce moment extrêmement perturbée. Une grande menace s’est abattue sur cette terre, dit-elle d’un ton plus solennel.

– C’est bien le cas…

– C’est à cause de cet objet maudit qui se trouve dans les ruines de l’ancien palais impérial de l’autoproclamer empereur Tom.

– Oui, c’est le cas…

– C’est un acte de guerre de la part de Corruption.

– Vous le saviez ?

– Je le pense. Je vois mal qui d’autre aurait pu faire cela.

– Il y aurait peut-être aussi… Tom.

– Si c’est lui, c’est qu’il a été totalement absorbé par Corruption et n’existe plus. Mais je ne le pense pas. Olivier, dit-elle en s’arrêtant net, ton ami, Tom, il a subi un châtiment pire que la mort. Son âme n’existe plus comme elle l’était, elle a servi à renforcer la Grande barrière.

– Je… préférerais savoir ça que penser qu’il a été dévoré par Corruption…

– Et c’est pour cela que je suis venue te voir aujourd’hui.

– Que voulez-vous dire ?

– Olivier, aujourd’hui, c’est à ton tour de sauver la Terre des Illusions de cette menace.

 

Cette affirmation franche et directe de la Yamaxanadu le tétanisa surplace. Incapable de bouger, sa panique se lisait dans son regard et dans ses doigts qui tremblèrent. La Juge, s’étant arrêtée, marcha vers lui, posa sa main sur son front, puis, afficha un sourire amical, presque rassurant.

 

– Cela va aller. Toi-même tu le sais que tu dois le faire, affirma-t-elle presque avec familiarité, pour se montrer encore plus sécurisant.

– Je ne sais que trop bien. Reimu et les autres sont elles aussi corrompues par ce mal… Mais je n’ai pas la force nécessaire pour pouvoir les vaincre !

– La puissance n’est pas tout dans un combat.

– Je suis désolé Shiki mais… je ne peux pas gagner.

– Avec une mentalité comme cela, c’est certain, dit-elle en reprenant la route.

 

Après cette réaction de la Yama, le silence se posa entre elle et lui. Ils marchèrent ainsi de longues minutes avant d’atteindre la fin des stands sur la route. Olivier s’arrêta net. La Yama continua de quelques pas puis se stoppa à son tour avant de se retourner vers lui. Il contracta les poings, les épaules basses et le regard dirigé vers le sol.

 

– Je voudrais tellement sauver la Terre des Illusions… mais je n’en suis pas capable ! affirma-t-il avec force et conviction.

– Olivier... Tu n’es pas comme ton ami Tom. Tu n’as pas la même volonté, la même force, le même courage. C’est cela qui vous différencie le plus.

– Qu’est-ce que cela veut dire ?!

– Olivier. Ton ami, Tom, il s’est battu par idéologie de faire le bien. Toi, tu veux te battre, autant pour honorer la mémoire de ton ami, que par volonté de sauver Gensokyo.

– Comment vous le savez ?!

– Une Yama sait beaucoup de choses, dit-elle en serrant fort son bâton des remords et son Miroir de Cristal Purifié contre elle. Olivier, tu es beaucoup plus pragmatique et terre-à-terre qu’il ne l’était. C’est ce que Gensokyo a besoin aujourd’hui. D’un héros humain encore libre de ses pensées pour vaincre.

– Je le veux mais… je ne suis pas assez forte pour les vaincre.

– Je le sais bien.

– Que dois-je faire alors ?

– Sache que je t’apporte mon soutien dans ta lutte contre Corruption.

– Je vous remercie. Mais ce n’est pas cela qui va m’aider beaucoup…

– L’ensemble de tes alliés sont peut-être faibles chacun. Mais ensemble, ces soutiens sont d’une grande puissance.

– Je vous remercie de me dire cela, mais cela ne m’aide toujours pas. J’ai un grand manque de puissance pour affronter mes adversaires sur le terrain.

– Dans ce cas, part loin vers le nord, dans la Plaine de Sang. Là-bas, vit un ermite spécialisé dans le combat, à ce qu’on dit. Si c’est vrai, un ermite se joindra pour la bonne cause qu’est de défendre Gensokyo contre le chaos de Corruption.

– Un ermite dans les Plaine de Sang ? J’en ai jamais entendu parler.

– C’est normal. Un ermite est souvent discret et plus il est puissant, plus il s’éloigne des autres. Je sais juste que sa puissance est extrêmement élevée. Cependant, il sera aussi difficile à trouver.

– Et pourquoi cela serait si difficile ?

– Il vivrait dans une partie des Plaines de Sang où les espaces et les temps se mélanges, où la réalité se retrouve brouillée.

– Cela serait un parfait coin pour Yukari ça.

– Et tu ne t’y trompes pas.

– Comment ça ?

– Elle séjourne régulièrement là-bas.

– Comment le savez-vous ? Yukari est l’une des personnes les plus difficiles à cerner.

– C’est le cas. Mais elle craint ceux et celles pouvant directement lire en elle. Autant moi que d’autres personnes, comme mademoiselle Komeiji.

– Je vois.

 

Le silence se reposa entre les deux personnes alors qu’un léger vent soufflait autour d’eux. Il était inquiet mais sachant désormais qu’il pourrait exister une personne suffisamment forte pour l’aider lui permit de retrouver un peu confiance en l’avenir. Il se rapprocha de la Juge des Enfers et la regarda droit dans les yeux. Elle faisait une bonne grosse tête de moins que lui et elle leva le regard vers le sien. Il sentait bien qu’elle était étonnée par sa réaction. D’habitude, il avait peur d’elle, ou du moins, la redoutait et la respectait. Elle savait très bien que la peur de la mort était très forte en ce jeune homme et qu’elle savait bien qu’il voyait en elle ce qu’il redoutait le plus, l’heure où son âme sera jugée pour ses actions réalisées lors de son vivant. Mais là, malgré de légers frissons, il se dressait devant elle, comme s’il était prêt à affronter la Mort elle-même. Elle esquissa un léger sourire et posa sa main sur l’épaule du jeune homme.

 

– Olivier, ce n’est pas la peine de me craindre. Du moins, pour le moment. Je te rencontre occasionnellement, mais je sais bien que tu es une bonne personne, que tu ne souhaites réaliser que le bien.

– L’Enfer est pavé de bonnes intentions… répondit Olivier à voix basse, suffisamment forte cependant pour qu’elle soit entendue par la femme en face de lui.

– Tu ne les paveras pas. Tu paveras le Paradis, sans doute.

– Shiki… j’ai peur… se confia-t-il à mi-mot.

– D’échouer. Je le sais bien.

– Je veux réussir. Je dois réussir. Je suis le seul à pouvoir le faire. Je suis seul…

– N’oublie jamais que tu n’es pas seul dans ton combat. Beaucoup de personnes comptent sur toi. Tes amis, les corrompus de Gensokyo qui dans leur for intérieur, n’attendent que ta victoire. Mais aussi, la personne à qui ton cœur est dévouée.

– Rika…

– Tu n’es pas seul. Tout le monde compte sur toi. Quand tu te battras pour la Terre des Illusions, n’oublie pas. Tous seront avec toi, dans ton cœur pour t’aider. Même ton meilleur ami disparu, Tom, sera avec toi, à tes côtés, pour t’épauler.

– Si seulement… j’avais la force nécessaire pour cela…

– Olivier. Tous les Humains sont très modestes dans le domaine de la magie, en comparaison des Yokais. Cependant, les Humains ont quelque chose de plus. Je le sais bien. Siècles après siècles, j’ai observé, vu, jugé, condamné et sermonné des âmes humaines, autant de leur vivant qu’après leur trépas. Les Hommes possèdent un potentiel incroyable. Ils sont capables du pire, comme du meilleur. Ton ami, Tom, en était un exemple de cela. Et parmi ce potentiel, il existe un potentiel magique. Il est difficile à trouver, encore plus à exploiter mais en se déroulant, il permet aux Hommes de réaliser des exploits que même les dieux ne peuvent réaliser.

– Mais… comment « dérouler » ce potentiel ?

– Je ne le sais pas. Je vois simplement les Humains le faire. Cependant, je suis certaine que tu pourras en apprendre plus avec l’ermite que je t’ai parlé.

– Oui, c’est certain. Merci, Shiki. Je ne pensais pas que ton aide m’aurait pu être aussi précieuse. Je dois y aller, au revoir et j’espère te revoir très prochainement, dit-il particulièrement familièrement, sous le coup de l’émotion, ce que Shiki ne lui reprocha pas.

 

Avant même qu’elle n’ait pu répondre, le jeune homme s’était mis à courir sur le chemin, en direction du Lac Brumeux. Elle se doutait bien qu’il se dirigeât vers le manoir de Tom afin de préparer son expédition pour les Plaines de Sang au nord de Gensokyo. Elle esquissa un sourire alors qu’elle le voyait désormais voler. Elle laissa s’échapper quelques paroles à elle-même avant de repartir vers le ponton donnait sur le fleuve Sanzu. Ces paroles semblèrent presque être portées par le vent et résonner en écho à travers le cœur de chaque habitant de Gensokyo, vibrant par quatre mots : « on compte sur toi ».


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