La Couronne de la Terre des Illusions (CTI)

Chapitre 18 : La Plaine de Sang

2363 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour 06/10/2025 21:43

Chapitre 18

La Plaine de Sang

 

Cela faisait des heures qu’il alternait entre le vol et la marche à pied. Il avait vu les paysages se transformer lentement, passant progressivement d’une terre forestière à une étendue recouverte de quelques arbres et d’une mer d’herbes plus ou moins haute où quelques minces filets d’eau circulaient, errant au gré du relief. Par endroits, de petits lacs se formaient. Plus il s’aventurait loin dans la Plaine de Sang, moins le relief était marqué. Ainsi, les montagnes avaient depuis longtemps disparu et les collines étaient devenues extrêmement rares. La végétation était pauvre et n’invitait guère à continuer davantage. Le ciel devenait toujours plus sombre, toujours moins naturel. Olivier avait l’impression que le soleil n’était jamais à la verticale dans cette terre désolée. Il n’y avait aucun bruit, même le vent ne sifflait plus ses notes aériennes. Les animaux étaient rares et terriblement silencieux.

L’air semblait également différent. Les senteurs douces qu’il trouvait en Gensokyo n’existaient pas ici. C’était une odeur particulière, semblable à celle à de la végétation en décomposition. Il se sentait également étrangement mal ici. L’atmosphère lui semblait oppressante, ce qui le rendait de plus en plus mal à l’aise alors qu’il progressait.

Il essaya de se rassurer et de se détendre alors qu’il avançait. Il se remémora alors à ce que Rika lui avait demandé avant son départ…

 

– J’espère vraiment que tu vas faire attention à toi quand tu seras là-bas, lui demanda la jeune femme à son chéri.

– Ne t’inquiète pas, cela va bien se passer. J’ai déjà passé beaucoup de temps à survivre à la belle étoile, en plein milieu de Yokais. Cela devrait bien se passer.

– La Plaine de Sang n’a rien à voir avec ce qu’il existe en Gensokyo. C’est une terre hostile où les limites des gens sont vite atteintes. Et tu me dis que tu vas t’enfoncer très profondément dans celle-ci. C’est ce qui m’inquiète.

– Je fais cela pour la Terre des Illusions. Là-bas, il existe cette personne. Elle est notre seul espoir.

– Je le sais bien. Fait juste attention à toi et reviens moi vite.

– Je reviendrais vite, ne t’inquiète pas.

– Fait attention à tes réserves, autant en eau qu’en nourriture. Même si je sais que tu sais te débrouiller, les ressources sont rares là où tu vas.

– Je connais la survie, je vais m’en sortir.

– N’oublie pas de t’entraîner aussi. Je te connais bien. Tu vas désespérer si ton niveau stagne. Et je n’imagine même pas s’il baisse…

– La survie là-bas sera un entraînement à lui seul. Merci de t’inquiéter pour moi, dit-il en l’embrassant tendrement.

– Et surtout, revient pour me faire un enfant, mon amour, dit-elle sur un ton mêlant amour et malice.

– Quoi ?! répondit Olivier, surprit et interloqué par la demande de Rika.

– Je te taquine. Je voudrais par contre qu’on se marie, quand tout cela sera terminé.

– Ma chérie… on se mariera une fois cela régler. Ensuite, on fondera une famille.

– Au moins, je pourrais espérer t’avoir un peu plus souvent auprès de moi.

– C’est certain, je le pense, dit-il d’un air amusé avant de se recevoir un léger coup de clé à molette de Rika, suite à laquelle il l’attrape avec force dans ses bras, l’embrassant fougueusement avant de la prendre dans ses bras et de monter ensemble vers la chambre de Rika.

 

Soudain, Olivier revint au temps présent. Le décor ne changeait guère et finissait par le déprimer. Le même ciel sombre, légèrement orangé par la lumière d’un astre solaire bien lointain. La même étendue qui semblait infinie jusqu’à l’horizon. Par endroits, quelques arbres dépassaient de ce sol qui semblait toujours devenir plus plat.

Il s’arrêta soudainement, hésitant à continuer d’avancer. Il s’assit sur une pierre dépassant du sol et respira avec force. Il sortit une gourde de son sac et en bu une gorgée avant de regarder le ciel. Là, il vit un léger panache blanc s’élever à la verticale. Il reconnut qu’il s’agissait de fumée. Il se releva, reprit ses affaires et marcha d’un pas rapide vers l’origine de ce feu, espérant tomber sur ce fameux ermite qu’il cherchait.

Il arriva rapidement à ce qui ressemblait à un campement. Il vit deux caisses de petites tailles, quelques autres affaires ainsi qu’une tente et un feu de camp. Cependant, il n’y avait personne. Olivier se dit que la personne ayant campé ici s’était éloignée et qu’elle allait revenir.

Soudain, à peine avait-il posé son sac au sol qu’il sentit le froid d’une lame sur le côté gauche de sa gorge. Lentement, il tourna la tête mais une forte voix l’interdisait de se retourner. Il réfléchit aussi vite que possible pour trouver une solution à sa situation mais avant d’avoir pu trouver un moyen, la voix lui demanda qui il était. Sans hésiter et d’un ton neutre, il répondit : Olivier Marc.

 

À cette réponse, la lame qui était collée à sa gorge s’éloigna très légèrement. La personne, dont la voix lui permit de comprendre qu’il s’agissait d’une femme, lui demanda alors de fermer les yeux et de se retourner. Méfiant, Olivier lui demanda s’il ne s’agissait pas d’un moyen commode pour le tuer. Elle ne répondit pas et se contenta de lui demander la raison de sa présence en ce lieu sur un ton dénotant une forme de mécontentement. Il répondit qu’il cherchait un célèbre ermite, spécialisé dans le combat et qui vivait dans le coin. Il questionna la personne le menaçant pour savoir si elle était belle et bien cette ermite. La personne le questionna sur les motifs qu’il avait pour être venu le chercher. Il répondit d’un ton franc que la Terre des Illusions était menacée, que Reimu et les autres qui devaient les protéger de cette menace ne pouvaient plus le faire.

À cette réponse, la lame se dégagea et il entendit quelques bruits de pas à reculons. Il se retourna, sur ses gardes et put découvrir la personne le menaçant. Il s’agissait d’une jeune femme aux longs cheveux violet et attachée en queue-de-cheval et portant des vêtements masculins blanc et rouge. Elle semblait être bouleversée par l’annonce d’Olivier.

 

– Que s’est-il passé ? Comment Reimu a-t-elle pu être… comment va-t-elle ?! demanda la jeune femme avec insistance.

– Vous semblez être très préoccupée par Reimu, répondit le jeune homme, surpris de la réaction de la personne en face d’elle.

– Je comptais un jour prendre ma revanche sur elle pour obtenir le pouvoir d’Hakurei… mais, comment va-t-elle ?! Est-elle…

– Elle est vivante. Mais pas dans son état normal.

– Cela me rassure, l’équilibre de Gensokyo aurait été gravement en danger sinon. Mais, que se passe-t-il alors ?

– Elle, et les autres, sont possédées par un esprit maléfique. Je suis venu ici chercher l’aide de l’ermite vivant dans le coin et qui serait suffisamment puissant pour sauver la situation.

– Je vois. Je ne suis malheureusement pas cette personne. Je m’appelle Meira. Je suis une onna-bugeisha, comme tu as pu t’en douter en me voyant.

– Je m’en suis douté. Je crois d’ailleurs vous avoir vu lors de la bataille finale contre Tom.

– Effectivement, j’y étais. C’est à ce moment-là que j’ai appris votre nom et vos réalisations durant la résistance.

– Cela remonte à loin maintenant.

– Je suis désolée de ne pas être la personne que vous cherchez. Vous voudrez bien dîner avec moi ? Cela pourra me faire pardonner pour mon accueil un peu glacial et on pourra ainsi discuter.

– Je me doute que vous ne devez pas discuter souvent.

– C’est bien le cas.

 

Olivier s’assit sur une caisse, faisant face à l’endroit où Meira s’assit, en position seiza. Elle dégagea alors une paire de brochettes de lézards qui était plantée dans le sol, à proximité du feu. Elle en tendit un à Olivier qui la prit, l’observa quelques instants avant de le manger. En voyant le peu de réticence d’Olivier à manger ce repas peu commun, elle lui demanda s’il avait l’habitude de la survie en pleine nature. Il répondit par l’affirmatif. Elle ne semblait guère étonnée par sa réponse. Il comprit que la personne en face de lui reconnaissait les personnes qui comme elle, se poussaient à vivre des conditions difficiles. Il mangea un morceau du lézard grillé. Le goût était infect. Il avait déjà mangé ce type de nourriture mais cette fois-ci, le goût lui retournait le cœur. Meira le vit bien. Elle lui tendit alors une petite sacoche et demanda à son invité de plonger sa main dedans. Étonné par sa demande, il s’exécuta. Il sentit alors très bien qu’il s’agissait d’une sacoche remplie d’une poudre. Il en prit une pleine poignée et la sortit. Il se dégagea alors une légère odeur agréable. Elle lui conseilla alors de verser sa poignée sur son lézard, ce qu’il fit. La poudre, légèrement orangée, tomba aussi lentement que des flocons de neige, surprenant le jeune homme. Quand son repas fut bien recouvert de cette poudre à l’odeur si douce, il la porta à la bouche et en croqua un nouveau morceau.

Cependant, cette fois-ci, le goût n'avait plus rien à voir avec la bouchée précédente. Une fois avalé, il questionna la femme sur cette poudre aromatique. Elle pointa du doigt une sorte de fleur qui poussait contre un rocher. Elle lui raconta que le cœur de cette fleur, réduite en poudre et fermenté, donnait cette poudre qui donnait un meilleur goût à la nourriture. Olivier exprima alors son interrogation sur la saveur du lézard, affirmant en avoir mangé de nombreux avant celui-là mais que celui qu’il avait en main avait un goût particulièrement atroce. À cela, la jeune femme sourit. Elle dit que dans la Plaine de Sang, la survie pour tout être vivant était si difficile qu’ils s’adaptaient à leur milieu, devenant tout aussi atroce à manger que la vie l’était ici. Il regarda autour de lui, ne voyant qu’une contrée hostile et fut en accord avec les dires de Meira. Cependant, celle-ci ajouta que comme la petite fleur qu’elle avait parlée, dans ces terres si hostiles, il était possible de trouver quelques petits plaisirs cachés et protégés. Alors qu’il l’écoutait, il termina son repas et finit par se lever.

 

– Je te remercie Meira, pour ton repas. J’avais bien besoin de reprendre des forces et de me reposer un peu les jambes.

– Tu repars déjà ? s’étonna la femme au sabre.

– Oui, je dois continuer de chercher cet ermite.

– Je peux au moins te dire où le trouver. Va là où la Terre des Illusions se fond avec l’immensité de l’espace infini.

– Qu’est-ce que cela veut dire ? lui demanda Olivier perplexe.

– Il faut que t’ailles toujours plus au nord. Plus tu t’enfonces loin dans les Plaines de Sang, plus l’espace et le temps sont perturbés. Au bout d’un moment, ils ne font plus qu’un. C’est un espace très étrange.

– Merci du conseil. Combien de temps il me faudra pour y arriver ?

– Si tu prends plein nord, c’est à deux jours de marche.

– Cela me prend donc moins de temps en volant.

– Tu n’iras pas en volant.

– Ah bon ? Et pourquoi ?

– J’ai déjà essayé. C’est comme si plus tu allais vite, plus il te faudra de temps pour arriver là-bas.

– C’est étrange ça.

– Je te l’ai dit, tout devient étrange là-bas. Fais bien attention, tu ne sais pas sur quoi tu pourras tomber.

– Je te remercie de ce conseil.

– Olivier. Je voulais te dire que demain matin, je partirai pour la Terre des Illusions.

– Ah ? Mais pour quelle raison ?

– Tu auras besoin de moi pour sauver notre monde. Je compte t’aider à régler cela. Et je pourrais aussi me venger de Reimu, à défaut d’acquérir son pouvoir.

– Je… te remercie pour ton aide, dit-il en hésitant à quoi répondre tant il fut surpris de l’aide proposée.

– C’est ce qu’il faut faire.

– Merci, dit-il en se tournant, prêt à partir.

– Attends, dit-elle en l’attrapant par la manche.

– Qu’il y a-t-il ?

– Cet ermite que tu recherches il s’agit d’un « ermite maudit », plus proche du mort-vivant que de l’homme, maudit pour des actions qui ont contrarié les kamis, et il pourrait être dangereux de le rencontrer. Alors, fait très attention à toi et méfie-toi de lui. Je pense qu’il pourrait essayer de te faire du mal mais en apprenant qu’il pourrait faire une action suffisante pour absoudre ses méfaits, il t’écoutera.

– Merci de l’info Meira, je ferais très attention. On se reverra alors pour le tournoi. À la prochaine.

 

Aussi, Olivier se mit à marcher vers le nord, s’enfonçant toujours plus dans la Plaine de Sang, sous le regard inquiet de Meira qui jeta parfois son regard vers le sud, vers la Terre des Illusions, inquiète quant à l’avenir de cette contrée.


Laisser un commentaire ?