Petite Etincelle
Avertissement ! Il y a du contenu sensible dans ce chapitre qui peut heurter la sensibilité de certains.
CHAPITRE 37
{==Hall des archives==}
POV Normal
Moonlight et Smokescreen rejoignirent rapidement le hall des archives. Presque à bout de leurs batteries tant leur course jusqu’à ce bâtiment avait été effrénée, les deux bots ne prirent même pas la peine de se présenter à l’accueil et disparurent directement dans l’allée F, où plusieurs robots récupéraient des datapads. Émerveillé par cet endroit, tout comme Moonlight l’avait été la première fois qu’elle y avait mis les pedes, Smokescreen faillit perdre de vue la fembot qui s’engouffrait entre les étagères pour disparaître derrière une alcôve. Cette partie des archives n’était pas aussi bien éclairée que le reste de la salle. Une immense table basse rectangulaire trônait au centre, entourée de quelques petites étagères fixées aux murs, tandis qu’un distributeur d’energon occupait le coin droit. Quatre chaises et une autre petite table formaient la zone de détente… Rien qui sortait de l’ordinaire.
Alors qu’il prenait connaissance des lieux, le mecha fut surpris de voir Moonlight revenir avec un long rouleau qu’elle avait sorti de l’un des compartiments de la gigantesque structure. Sans dire un mot, elle le déroula soigneusement sur la grande table centrale sous les optiques intriguées de Smokescreen. Où avait-elle bien pu trouver un objet pareil ?! Et surtout, à quel moment ? Il ne se souvenait pas l’avoir perdue de vue, et pourtant… L’espace d’un instant, elle avait échappé à son attention en se faufilant entre les rangées d’étagères comme une ombre légère. Sa petite taille et sa démarche souple lui avaient permis de disparaître avec une facilité déconcertante dans ce dédale de données et de métal. Le mecha blanc et bleu fronça les crêtes optiques, légèrement agacé par son manque de vigilance. Comment avait-il pu se laisser distraire à ce point ? Il se réprimanda mentalement en croisant les bras, son regard suivant les gestes précis de la fembot. Cette carte-là… Semblait dater d’une autre époque. Peut-être même d’avant la guerre.
«Et tu peux me dire à quoi ça va nous servir ?» Demanda-t-il d’un faible haussement d’épaules lorsque la fembot tourna la tête dans sa direction pour lui répondre.
«À découvrir certaines choses qui nous sont cachées.» Moonlight ne perdit pas un instant. Dès qu’elle fut certaine que la carte était bien en place et parfaitement centrée, elle activa un petit interrupteur situé sur le côté de la table. Immédiatement, une lumière diffuse s’alluma sous la surface, projetant un éclat opaque à travers le métal fin vieilli. En réalité la table faisait office de liseuse de plans, révélant ainsi des détails invisibles à l’optique et rendant les tracés anciens bien plus lisibles.
«Wow… Qu’est-ce que c’est que ça ? On dirait un plan de la ville tout entière, mais datant de plusieurs vorns en arrière. C’est dingue !» S’ébahit Smokescreen en reconnaissant certains quartiers de Iacon représentés par des traits encore faits à la main, ce qui prouvait l’ancienneté de la carte.
«Je savais qu’il y avait une section cartes dans ce bâtiment. Je me suis dit qu’avoir une autre perspective de la ville pourrait m’aider à mieux comprendre certaines zones. Regarde, nous sommes ici.» Indiqua Moonlight en posant son doigt sur une forme représentant le Hall des archives, pratiquement au centre de Iacon. Elle déplaça ensuite son doigt ailleurs sur la carte ; «Et là, c’est la Tour des Cieux. Ici, l’observatoire.»
«Là, c’est le quartier détruit. Je le reconnais.» Poursuivit doucement Smokescreen tout en se penchant sur le plan lumineux pour montrer la zone en question, les crêtes optiques froncées. C’était son refuge, la fameuse tour qu’il utilisait pour s’éloigner du monde quand il se sentait oppressé par la société. Sauf qu’à l’époque de cette carte, cette zone n’avait pas encore été sévèrement touchée par l’attaque Decepticon, lui permettant ainsi de découvrir des tours et des bâtiments qui existaient autrefois.
«Je cherche à savoir s’il y a des souterrains quelque part. Une partie cachée sous la ville, un endroit qui permettrait de rejoindre l’extérieur des remparts sans se faire remarquer…» Dévoila ensuite Moonlight qui gardait pour le moment le mystère sur ses véritables intentions. Ses optiques scrutaient chaque coin et recoin représenté en noir sur ce plan détaillé de la ville. Ses crêtes optiques se creusèrent, révélant sa concentration.
«Mis à part le temple souterrain, je ne vois rien qui ressemble à un réseau sous le métal. Des bunkers, peut-être ? Ça pourrait être possible, étant donné qu’on redoute toujours les attaques des Decepticons.» Proposa le mecha en tournant autour de la table, scrutant du regard ce qui pourrait évoquer des souterrains pendant que la fembot à ses côtés secouait rapidement la tête.
«Non, pas des bunkers. Le temple des Treize Primes a été découvert par la suite, il ne peut pas figurer sur cette carte. C’est une découverte récente…» La voix de Moonlight s’affaiblit légèrement lorsque ses optiques analytiques tombèrent sur le coin gauche du plan. Le pont qui y était représenté lui rappelait vaguement quelque chose… Son Spark se serra dans son châssis à ce fort sentiment de familiarité.
«Qu’est-ce que tu as trouvé ?» Interrogea Smokescreen, témoin de son soudain malaise.
«C’est ici que je me suis fait enlever. Je reconnais le pont… Je reconnais l’endroit. Mais maintenant une partie est détruite, celle qui mène en dehors des remparts. C’était le cycle de la course organisée par les habitants de Iacon. Je m’en souviens comme si c’était hier !» Avec émotion, la fembot se dépêcha de rejoindre le bord gauche de la carte pour inspecter plus en détail cette partie de la ville elle aussi victime des représailles Decepticons.
«Qu’est-ce que tu fichais là ? Je veux dire, c’est une zone désaffectée, facile d’accès par l’extérieur. N’importe qui pourrait tendre un piège.» S’étonna le mecha alors qu’il se positionnait juste à côté d’elle pour examiner l’endroit qui captivait autant son attention, surpris par ce qu’il venait d’apprendre. Les portes ailes redressées dans son dos, il posa ses mains au bord de la carte au moment où la fembot reprit avec une pointe d’agacement.
«Erreur de débutante. Je n’ai pas eu la chance de suivre des cours de stratégie… C’est ça le problème quand tu es surprotégée. Cela dit, j’avais été extrêmement naïve de penser que rien ne pouvait m’atteindre à l’époque. Je ne voyais ni le mal, ni le danger.» Admit Moonlight avec regret et un peu d’embarras, tandis qu’elle se penchait pour suivre plusieurs lignes du bout de son doigt menant directement à la sortie ouest de la ville. Cela ressemblait fortement à une construction souterraine...
«Ouais, une erreur qui t’a coûté cher. Si ça peut te rassurer, je ne suis pas mieux. Je pensais aussi être indestructible. Que personne ne pouvait m’arrêter, jusqu’au cycle où un groupe de Decepticons m’a fait redescendre sur Cybertron pour me rappeler que nous n’étions pas invincibles, contrairement à ce que je croyais. Les illusions, c’est confortable. Jusqu’à ce qu’elles explosent. Dur de revenir à cette réalité quand tu vis dans un rêve éveillé depuis si longtemps !» Partagea Smokescreen en levant les bras à ses côtés d’un sourire forcé, gêné par cet aveu mais soulagé de pouvoir enfin partager ce qui lui pesait sur les épaules.
«La prise de conscience peut parfois être un véritable fardeau.» Évasive, Moonlight se contorsionna pour examiner ces fameux traits sous le pont ouest. Les crêtes optiques froncées, elle se rendit vite compte que le lieu de l’accident correspondait à ses suppositions. Il y avait bel et bien un réseau souterrain à cet endroit précis, ce qui pourrait expliquer sa plus grande interrogation…
Celui ou celle qui avait donné sa position exacte aux Seekers avait pu se trouver sur place le cycle de sa capture.
«Smokescreen, ce n’était pas un accident. Regarde !» S’écria-t-elle de stupeur en désignant la zone pour montrer au mecha ce qu’elle avait découvert. Elle reprit avec le même ton sidéré ; «Il y a un passage dissimulé juste en dessous du pont. Ce n’est pas une coïncidence. Quelqu’un était là-dessous pour donner ma position à l’ennemi. Il fallait que mon extraction se fasse vite et sans bavure, ils ne pouvaient pas se permettre de se tromper de zone. Leur temps était compté. Il y avait forcément quelqu’un de mèche avec eux avec une balise, un signal, ou n’importe quoi d’autre !»
«Tu penses à qui je crois ?» Appuyé sur la table, Smokescreen baissa les optiques pour rencontrer les siennes, le visage grave. La fembot à ses côtés hocha calmement la tête.
«Sentinel. C’est l’espion.» Affirma-t-elle sans hésitation.
«Scrap… Cette histoire est complètement dingue !» Abasourdi, Smokescreen plaça ses deux mains sur son casque avant de s’éloigner de la table, complètement sous le choc face à toutes ces révélations toutes plus folles les unes que les autres. C’était invraisemblable. Il répéta à voix basse des mots tels que folie, trahison, à peine croyable et injustice, tandis que Moonlight se mettait à réfléchir.
Sentinel était loin d’être stupide. Il savait exactement ce qu’il faisait, et ce qu’il espérait obtenir en retour de sa coopération. Il était non seulement rusé et méthodique, mais aussi suffisamment intelligent pour tromper les autres avec autant d’aisance. Alors, l’offrir aux Decepticons, qu’est-ce que ça lui aurait rapporté ? Plus de crédibilité ? Un gage de qualité et de fidélité ? Pour prouver qu’il était prêt à tout, quitte à trahir, afin de décrocher un nouveau titre au sein d’une cause qui n’était pas la sienne ? Tant de questions sans réponses mais Moonlight commençait à dessiner un schéma bien particulier : celui d’un mecha narcissique, avide de gloire, qui cherchait à regagner un pouvoir perdu et par défaut, son titre de Prime. Sentinel était un maître de la persuasion, mais aussi un habile manipulateur collectif. Il ne faisait aucun doute qu’il mentait aux deux camps, jouant sur plusieurs tableaux pour assurer ses arrières. Malgré tout, quelque chose semblait ne pas coller… Quelque chose dans son raisonnement clochait, mais elle ignorait encore quoi. Plongée dans ses pensées, elle fut surprise quand le mecha à côté d’elle reprit la parole.
«Et maintenant, on fait quoi ? Comment on va prouver que c’était lui ? Tu le connais mieux que moi, il a forcément une excuse à tout… Ce gars-là est vraiment dangereux, en plus d’être super flippant. J’ai l’impression qu’il peut rentrer dans ma tête, beurk. Il contrôle tout ! Même Optimus. Oh non… Même Optimus !» S’affola le robot blanc et bleu, posant cette fois ses mains sur ses joues et écarquillant les optiques en réalisant l’ampleur de la situation.
Qu’allaient-ils devenir si Optimus se faisait lui aussi piéger par le petit jeu de son ancien mentor, expert en manipulation ?
«Je l’ignore…» Chuchota la fembot aux ailettes tombantes, le regard troublé se perdant dans le dédale de lignes noires.
«Je l’ignore.» Répéta-t-elle doucement avant de fermer ses optiques puis de dissimuler la profonde tristesse qui menaçait de transparaître dans le lien créateur, toujours ouvert et accueillant.
Qu’adviendra-t-elle d’elle, s’il arrivait effectivement à lui retourner le CPU ?
oOoOoOoOoOoOoOoOoOo
«Optimus, je crois que nous avons un problème.»
Le grand Prime leva les optiques de son datapad pour regarder le médecin apparemment nerveux, ou plutôt inquiet au sujet de quelque chose qui le tourmentait. Il faisait les cent pas devant son large bureau en verre au centre des recherches, un doigt recourbé sous le menton tandis qu’il plissait les optiques dans la réflexion. Il était complètement obnubilé par ses pensées... il sentait la tension s’alourdir dans chacun de ses circuits au rythme de ses pas. Désormais à l’écoute de cette requête inhabituelle, le commandant rouge et bleu mit de côté toute distraction, croisa les mains sur le bureau et offrit un regard interloqué au mecha. D’un coup d’optique vers l’horloge holographique, il constata qu’il n’était pas loin du milieu du cycle de nuit. L’obscurité enveloppait la ville de Iacon, et la plupart des robots rechargeaient paisiblement dans leurs quartiers, ce que Ratchet était censé faire aussi. Au lieu de cela, il l’avait rejoint dans son bureau des recherches quelques groons après avoir conduit Moonlight à l’infirmerie, ce qui rendait Optimus particulièrement confus quant à la nature de cette visite imprévue.
«Qu’y a-t-il, mon ami ?» Pressa Optimus, impatient que Ratchet cesse enfin de marcher de long en large devant lui. De toute sa carrière, il ne l’avait vu agir ainsi qu’une seule fois, lors de la chute de Trypican presque vingt vorns en arrière. Au manque de réponse, il insista.
«Ratchet, tu as l’air perdu. Que s’est-il passé pour te mettre dans cet état ? Je n’ai pas l’habitude de te voir aussi nerveux, et honnêtement, c’en est presque effrayant.» Ironisa le Prime d’un petit sourire, qui disparut aussi vite qu’il était apparu lorsque le médecin se tourna vers lui, pas du tout amusé par cette piètre tentative d’alléger l’atmosphère.
«C’est Moonlight. Parfois, j’ai l’impression de ne plus du tout la reconnaître… C’est comme si, à certains moments, elle n’était plus vraiment là. Elle a des absences, des instants où son CPU ne semble plus être connecté à son protoforme.» S’inquiéta ce dernier en gesticulant nerveusement.
«Elle a subi un lourd traumatisme…» Commença Optimus, mais le mecha rouge et blanc reprit rapidement la parole sans laisser le temps à son chef d’argumenter.
«Ça n’a rien à voir avec ça ! Optimus, je crois que nous avons été piégés.» Dévoila-t-il ensuite avec précipitation et une note d’appréhension, ses optiques bleues soucieuses s’abaissant au sol au moment où son interlocuteur reprit.
«Piégés ? Qu’es-tu en train d’insinuer ?» Le Prime fronça les crêtes optiques de confusion.
«Je suis en train d’insinuer que les Decepticons utilisent Moonlight pour nous atteindre. Indirectement.» Répliqua aussitôt Ratchet en frappant le dos de sa main contre sa paume pour appuyer ses propos. Mais face au regard perplexe de son leader, il poursuivit sans attendre ; «Depuis son retour, Moonlight est différente. Elle montre des signes de confusion. Je conçois qu’avec ce qu’elle a vécu, il est normal qu’elle présente des anomalies qui, pour la plupart, se résorbent avec le temps. Mais j’ai comme l’impression que quelqu’un essaie de prendre le contrôle à distance. Et si ces rêves, pour la plupart brutaux, n’étaient en fait pas des rêves mais une sorte de prémonition ? Un peu comme un mécanisme de défense que son CPU aurait mis en place pour contrer ces intrusions. Je n’ai pas encore récupéré assez de preuves pour le certifier, mais je parierais que c’est l’œuvre de Soundwave. Il est assez malin pour pirater à distance… Il pourrait très bien se servir de Moonlight pour atteindre Teletraan.»
«Tu ne serais jamais venu m’en parler si tu n’avais rien découvert. Alors, qu’est-ce qui te fait dire ça ?»
Optimus l’encouragea à détailler son hypothèse, et surtout à expliquer pourquoi il en venait à une conclusion aussi terrible. Que s’était-il passé ?
«Durant notre séance de restauration, il s’est produit quelque chose d’assez étrange. Pour ne pas dire surprenant. Moonlight a violemment rejeté ma tentative de connexion, ce qui a provoqué un court-circuit dans tout le bâtiment. En plusieurs vorns de carrière, c’est la première fois qu’une telle situation se produit. J’ai réussi à redémarrer Teletraan, mais j’ai l’intime conviction que ce n’était pas un hasard.»
Divulgua le médecin qui, tout en exposant son expérience à son Prime et ami, continuait d’émettre des hypothèses dans son processeur. Se redressant subitement avec les optiques grandes ouvertes, il leva l’index lorsqu’une idée lui vint.
«Et si elle transportait une sorte de virus ? Invisible à l’optique, indétectable par nos machines. J’ai peut-être manqué de vigilance quelque part ! Nous savons depuis toujours que les Decepticons disposent d’une technologie plus avancée que la nôtre… Ce qui rend cette hypothèse tout à fait plausible. Si Shockwave avait implanté ce virus à son insu… Pour qu’elle le transporte directement à l’intérieur de nos remparts, sans qu’on ne la suspecte de quoi que ce soit. Ce cinglé manipulateur en serait tout à fait capable ! Il possède la technologie nécessaire pour parvenir à ce genre de résultats. En étant à l’origine de ces cauchemars, il s’assurerait que nous procédions à cette méthode de restauration et, ce faisant, qu’on leur ouvrirait un passage direct jusqu’au centre de contrôle !»
Inquiet devant cette nouvelle conclusion, Ratchet recommença à faire les cents pas dans le bureau sous les optiques hébétées du leader des Autobots.
«Que donne le rapport de sécurité de Teletraan ? Indique-t-il une brèche dans le système ?» Lui demanda-t-il ensuite en posant son menton sur ses mains jointes, les coudes sur le bureau alors qu’il commençait à réfléchir à toutes les éventualités. C’était un sujet très sérieux, mais chaque hypothèse devait être pesée avec prudence avant d’agir.
«Non, il n’y a rien. Aucune anomalie n’indique qu’une tentative d’intrusion ennemie ait été tentée. Si ce que j’avance est juste, alors ils n’ont pas réussi à percer nos défenses, fort heureusement. J’ai décortiqué le rapport pour m’en assurer.» Affirma Ratchet d’un signe de tête ferme, le regard s’assombrissant.
«Dans ce cas, ça ne reste que des suppositions pour le moment.» Optimus replaça ses bras sur son bureau puis leva le menton en rejouant l’intégralité de leur conversation dans son esprit, cherchant à se faire une idée.
«Au groon actuel, oui.» Approuva le médecin face à lui après avoir retrouvé son calme. En effet, il n’avait pas encore rassemblé assez de preuves, mais il continuait de croire qu’il ne se trompait pas dans son jugement, et que Moonlight restait la cible des Decepticons. D’une manière ou d’une autre.
S’approchant de la baie vitrée sur le côté droit du bureau, Ratchet plongea ses optiques soucieuses sur les tours de la ville avant de reprendre d’un soupir ; «Mais en partant du principe que c’est vrai, je pense que nous devrions renforcer notre sécurité. Rappelle-toi ce que Sentinel nous a dit : Unicron se cache parfois dans les détails. Nous ne sommes pas à l’abri d’une attaque, Optimus, surtout que nous savons de quoi ils sont capables pour atteindre leur but. Ils ne cesseront jamais leurs efforts, et nous savons tous les deux que le danger est loin d’être écarté.»
«Assurément.» Grogna Optimus, les optiques rétrécies par la colère naissante. Il savait que Megatron n’abandonnait pas aussi facilement, et qu’il avait certainement déjà un autre plan en marche. Peut-être même que son plan initial suivait toujours son cours… Juste sous leurs optiques. Il reprit alors quand une pensée lui vint à l’esprit ; «T’a-t-elle fait part de ses impressions ?»
«Non, mais je reste persuadé qu’elle ignore tout de ce qui lui arrive, ainsi que de sa possible implication dans la cause Decepticon. Je vais surveiller de près son évolution. Elle n’est plus tout à fait la même, mais elle reste la petite Moonlight que nous avons recueillie ce cycle-là. Forte et déterminée. Je ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour l’extirper de leurs magouilles. Ils n’auront pas une seconde fois la main sur elle. Tu peux compter sur moi.» Promit Ratchet avec une conviction brûlante tout en serrant le poing devant lui, résolu à rassurer son chef lorsqu’il perçut une brèche dans son masque d’endurci.
«Je sais qu’elle est entre de bonnes mains. Mais je ne peux m’empêcher de penser que le véritable problème vient de ces étranges cauchemars à répétition. Je me souviens d’une période où elle présentait les mêmes symptômes…» Confia Optimus, sa peur s’écoulant presque dans le lien créateur s’il n’avait pas repris le contrôle de ses émotions à temps. Il ne voulait surtout pas sortir sa fille de sa recharge, car il voulait qu’elle puisse récupérer ses forces sans encombre après le calmant que le médecin lui avait injecté.
Pour qu’elle puisse rester en stase le plus longtemps possible sans être perturbée.
«Les mêmes symptômes après votre liaison. Après… Un lourd traumatisme. Oui, je sais.» Acquiesça lentement Ratchet en connaissance de cause, une légère grimace apparaissant sur son visage au souvenir des pleurs du petit étincelant qui venait de perdre ses deux supports de vie. Un souvenir qu’il pourrait facilement effacer, mais qu’il ne voulait pas oublier ni d’où venait Moonlight, ni dans quelles circonstances il l’avait trouvé. Pour continuer à se battre pour elle avec la même intensité.
«Ratchet, nous devons faire quelque chose. Je ne supporte plus de voir ma fille dans cet état. Elle est en train de dépérir ! Nous ne pouvons pas simplement attendre que tout s’arrange, en espérant un rétablissement miracle. Ces cauchemars la détruisent insidieusement. À chaque cycle qui passe, elle disparaît un peu plus… Il n’y a rien de pire que d’assister à cela avec un tel sentiment d’impuissance.» Le Prime confia de sa voix barytonne lourde de remords, remplie d’une douleur propre aux créateurs conscients du mal-être de leur création. C’était une souffrance indescriptible, ce qui poussa Ratchet à dire la chose suivante avec confiance.
«Je sais ! Je le constate aussi. Je vais renforcer le matériel sous la supervision de Huffer. Ce n’est peut-être pas le robot le plus sympathique de Cybertron, mais il excelle en mathématiques. Il saura me concevoir une installation bien plus résistante pour la prochaine session de restauration. Nous allons renforcer les défenses de Teletraan, faire en sorte que cette mauvaise expérience ne se reproduise plus, et assurer un fonctionnement optimal de la liaison. Je vais aider Moonlight à aller mieux, pour qu’elle puisse enfin se délester de toute cette culpabilité. Et t’aider toi aussi, par la même occasion.» Expliqua rapidement le mecha devant la vitre, utilisant ses doigts pour énumérer chaque tâche qui l’attendait, observant son commandant à travers le reflet lorsque celui-ci s’exprima avec contrariété.
«La priorité absolue est d’aider Moonlight !» Se révolta-t-il.
«Elle ne peut pas aller mieux si son créateur n’est lui-même pas bien ! Elle s’inquiète énormément pour toi. Tu dois lui montrer que tu as confiance en elle, et que tu crois en sa guérison. Ne lui montre pas le visage d’un Prime, mais celui d’un créateur qui se soucie d’elle. L’amour, c’est tout ce dont elle a besoin. Le reste est superficiel.» Répliqua aussitôt Ratchet après s’être brièvement tourné vers Optimus pour le fixer avec sévérité, jusqu’à ce qu’il soit certain qu’il comprenait où il voulait en venir.
Les deux robots dans le bureau cédèrent au silence, chacun réfléchissant dans son coin à tout ce débat qui menait à la même conclusion : le problème des cauchemars. C’était ça, l’élément déclencheur, l’origine du mal-être de Moonlight. Une fois ce problème résolu, ils étaient convaincus que tout irait beaucoup mieux pour elle, et que la vie reprendrait son cours normal. Permettant ainsi à Optimus de se pencher sur d’autres problèmes sans avoir l’esprit constamment occupé par sa protégée. Sa fille irait bientôt beaucoup mieux, Il s’y engagea intérieurement. Et il serait là à chaque étape prêt à la soutenir, à la protéger, et à lui redonner la lumière dont elle avait tant besoin. Perdu dans sa réflexion et sur ses futures actions, le Prime décala ses optiques vers Ratchet qui faisait toujours face à la ville derrière l’immense baie vitrée de son bureau. Cette vue était imprenable, mais pas aussi belle que celle qu’offraient ses quartiers dans la Tour des Cieux. Ce fut Ratchet qui brisa le silence en premier.
«C’est bientôt le grand moment. Es-tu prêt ?» Finit-il par demander, les bras croisés dans son dos avec le regard perdu vers une partie de la ville au loin. Derrière lui, Optimus laissa échapper un soupir par ses évents.
«Je ne saurais le dire. Pour être franc, je n’y ai pas encore vraiment réfléchi. Mais je redoute ce cycle qui approche à grands pas.» Avoua-t-il tout en se levant pour se mettre à gauche du mecha rouge et blanc, mettant également ses mains derrière son dos pour contempler la vue.
«Il va falloir que tu aies une conversation avec elle. Elle se pose des questions… Elle sent bien que quelque chose se trame, là dehors. Je préfère qu’elle ne le découvre pas par elle-même, sa déception pourrait être terrible. Il faut que tu le lui dises, Optimus, avant qu’il ne soit trop tard.» Ratchet tourna la tête pour regarder son vieil ami avec une certaine compassion, voyant à quel point il semblait déstabilisé.
«Je le ferai » Dit-il simplement, le regard perdu à nouveau dans le paysage nocturne de sa magnifique ville de Iacon, une pesante solitude se formant dans son Spark tiraillé par deux émotions distinctes.
La peur et l’amour.
{==Tour des Cieux, 2 joors plus tard==}
Il lui fallut rassembler un courage monumental pour refranchir ces marches après la frayeur qu’elle avait eue dans ses quartiers, deux cycles plus tôt. Après cette mauvaise expérience et ce sentiment de devenir complètement folle, Moonlight avait longuement hésité à affronter ses démons. Mais il fallait à tout prix qu’elle les combatte, qu’elle se rende compte que ce n’étaient que des illusions de son CPU dysfonctionnel et aucunement les reflets de la réalité. Que ce n’était que temporaire. Bientôt, elle n’aurait plus toutes ces anomalies, et elle ne verrait plus ces visions incohérentes, fruits de la paranoïa qu’elle nourrissait depuis son retour à Iacon. De quoi avait-elle autant peur, exactement ? Elle était pourtant loin de sa prison, loin de Megatron et de tous ses aspirants. Personne ne pouvait plus l’atteindre ici, dans la sécurité de sa cité.
Anxieuse, Moonlight sortit du monte-charge en verre puis marcha jusqu’à la porte de ses quartiers, au sommet de la grande tour iconique. Elle comptait chacun de ses pas depuis qu’elle avait franchi les portes forgées du bâtiment… Comme un compte à rebours de l’inévitable. Calme en apparence, elle s’apprêta à déverrouiller la porte coulissante mais ses doigts tremblaient sur l’écran, l’empêchant presque de composer le code. Elle pinça les lèvres, agacée par cette perte de contrôle au dernier moment. Manifestement, elle était bien plus nerveuse qu’elle ne voulait l’admettre... Cette peur irrationnelle de trouver ou de voir quelque chose de négatif pulsait méchamment dans ses câbles désormais contractés. Elle tenta de se raisonner, se répétant que ce n’étaient que des inventions malsaines de son processeur, qu’aucun danger ne surgirait une fois à l’intérieur... Se faire la morale était une chose, mais s’en convaincre en était une autre. Fermant un instant les optiques pour se concentrer sur son Spark erratique, la fembot qui avait tous ses sens en alerte tendit l’audio vers la porte pour capter les sons à l’intérieur des quartiers. Une fois certaine qu’il n’y avait rien de suspect, elle pénétra dans les lieux.
La première chose qu’elle remarqua fut l’obscurité qui régnait. D’un simple mouvement de la main sur le panneau de contrôle à sa droite, elle activa les cristaux d’energon centraux. Moonlight s’immobilisa au milieu du salon en réalisant que la table basse, normalement brisée en mille morceaux de verre, était intacte. Intacte… Hébétée par cette découverte, elle cligna des optiques avant de sonder la pièce à la recherche du moindre signe suspect. La fenêtre de la baie vitrée était bien fermée, sans aucune trace de son passage lors de sa dernière visite qui s’était soldée par une fuite. Une pression inconfortable monta aussitôt dans son vocaliser alors qu’elle avançait prudemment dans ces quartiers immaculés, à la recherche d’un éclat de verre pour se rassurer et chasser le doute qui la rongeait désormais. Et si tout ce qui était arrivé, n’avait été qu’une illusion ? Et si lentement, elle perdait la raison sans même s’en apercevoir ?
Des larmes d’energon commencèrent à perler au bord de ses optiques, son vocaliser se serrant atrocement tandis que l’angoisse montait d’un cran. Un frisson parcourut ses circuits alors que cette pensée s’insinuait dans son esprit tourmenté. Se laissant tomber à genoux sur le sol froid, la fembot aux ailettes affaissées passa ses doigts sur le sol à côté de la table, mais il n’y avait aucune trace de sa chute… Aucune indication ne venait confirmer qu’elle avait été là récemment. Posant ses paumes contre ses optiques d’un gémissement accablé, Moonlight se pencha en avant, son protoforme secoué par le désespoir. Elle devenait complètement folle… Ses circuits fondaient, sa personnalité se détruisait petit à petit, elle dérivait… Qu’avaient-ils fait ? Que lui avait fait ce sadique de cyclope dans son laboratoire où prenaient forme toutes sortes d’atrocités, là où sa vie avait définitivement pris un autre tournant ? Où était la frontière du réel ? Craintivement, elle retira les mains de son visage pour inspecter ses avant-bras, derrière lesquels se cachaient les lames meurtrières qu’elle avait héritées de Shockwave.
Qu’est-ce qui l’en empêchait ?
Oui, pourquoi ne pouvait-elle pas mettre fin à toute cette douleur ? Qu’est-ce qui la retenait d’agir, là, maintenant ? Elle n’osait pas imaginer jusqu’où elle irait pour arrêter cette folie, pour échapper à cette souffrance insupportable… À cette sensation de tout perdre, même son identité. Mais aussi vite que cette pensée néfaste surgit, elle la chassa d’une rapide secousse de tête. Comment pouvait-elle envisager quelque chose d’aussi horrible ? Que deviendraient ses proches ? Son Opiluk ? Elle s’interdisait de leur infliger une autre tragédie, ils ne le méritaient pas. Personne ne méritait ça, pas même elle. Se concentrant sur les pulsations lentes de son Spark douloureusement comprimé, Moonlight attendit quelques nano-kliks pour se calmer avant de retourner à ses pedes et d’essuyer les traces invisibles de larmes. Ce n’était pas le moment de s’apitoyer, il y avait bien pire dans la vie que quelques délires passagers. Elle aurait tout aussi bien pu être encore à Kaon, à des kilomètres sous la surface de la planète, privée de carburant et de lumière, seule et terrifiée dans sa petite cellule sombre et exiguë.
Calmée néanmoins grandement affectée par sa dernière pensée obscure, la fembot se racla légèrement le vocaliser avant de se tourner pour récupérer des datapads qui traînaient sur la commode à côté de sa chambre. Une fine couche de poussière recouvrait leur surface, signe qu’ils n’avaient pas été utilisés depuis longtemps. Passant ses doigts argentés dessus, elle s’interrogea soudain sur l’absence de son petit Jinx. Étonnamment, le minicon n’était pas venu l’accueillir à la porte, comme il le faisait habituellement avec joie quand quelqu’un entrait dans les quartiers. Tenant les trois datapads dans ses mains, elle se retourna pour chercher des traces du petit Predacon couleur ivoire, ce silence prolongé la mettant rapidement mal à l’aise.
«Jinx ? Où est-ce que tu es ?» Appela-t-elle, la panique s’insinuant rapidement dans ses circuits.
Machinalement, Moonlight inspecta les différentes pièces des quartiers, vastes et adaptés à la taille d’un géant avant de se diriger vers le bureau de son Opiluk, abandonné depuis plusieurs orns. Elle ignorait pourquoi elle voulait inspecter cette pièce en priorité, car elle n’était plus utilisée depuis si longtemps qu’elle avait du mal à se souvenir de la dernière fois où quelqu’un y avait été. Avec nervosité et une pointe de terreur, la fembot bleu ciel appuya sur le bouton et entra dans la pièce, qui n’était pas plongée dans les ténèbres. À sa grande surprise. Le cristal sur le bureau était allumé, un détail qu’elle n’avait pas remarqué en arrivant. Elle sursauta violemment en poussant un petit cri de stupeur et laissa tomber les datapads qui s’éparpillèrent lorsque ses optiques croisèrent celles, confuses, d’Optimus Prime assis sagement à son bureau. Le grand mecha pencha la tête vers sa fille, qui avait presque touché le plafond tant son bond avait été grand. Sur ses genoux, le petit Jinx se reposait mais au cri strident de la fembot, il leva la tête pour la regarder de haut en bas avec perplexité.
«Par les Treize ! J’ai failli faire un arrêt de Spark !» S’exténua Moonlight en posant vite sa main sur son châssis comme pour empêcher son Spark d’en sortir, la bouche grande ouverte.
«Je ne voulais pas te faire peur. Je ne t’avais pas entendu entrer.» S’excusa Optimus en tendant la main vers la fembot stressée près de la porte, l’apaisant par le biais du lien. Il la regarda avec inquiétude.
«Je ne savais pas que tu étais ici ! Quelle surprise… Sérieusement, je crois que j’étais sur le point de rejoindre le Allspark.» Souffla Moonlight encore secouée par sa grande frayeur. Comment avait-elle pu ne pas se rendre compte qu’elle n’était pas seule ? Mais surtout, comment lui avait fait pour ne pas l’entendre entrer !
Toutefois, le commandant ne prit pas sa blague avec humour. Les crêtes optiques froncées par la préoccupation, il posa délicatement le petit Predacon au sol avant de pivoter complètement son fauteuil vers Moonlight cherchant toujours à apaiser son Spark. Cela faisait pratiquement un groon qu’il était assis là, à attendre le retour de la fembot pour pouvoir lui parler et lui présenter des excuses. Il avait ressenti le besoin de s’expliquer avec elle. D’être à ses côtés. Il resta plusieurs nano-kliks dans cette position, jusqu’à ce que sa fille se baisse d’un murmure inaudible pour récupérer les trois datapads éparpillés sur le sol, tandis que ses évents vrombissaient pour refroidir son protoforme. La porte étant restée grande ouverte, il lança un bref coup d’optique vers la table basse dans le salon, puis reporta son regard vers la fembot qui se tenait maladroitement sur ses pedes. Elle comprit rapidement ce à quoi son créateur pensait, et s’empressa d’aborder le sujet qui la tourmentait depuis son arrivée.
«C’est toi qui as réparé la table ? Avec le robot nettoyeur ?» Demanda-t-elle en désignant la table dans son dos avec son pouce, hésitant sur les mots à employer. Si ce n’était pas lui, elle allait devoir s’expliquer sur cette question étrange… Quel fut son soulagement quand il hocha doucement la tête.
«J’ai été surpris de voir des dégâts en entrant dans nos quartiers. Tu as une explication à me donner ?» Questionna le Prime en se tournant pour poser son stylo tactile sur le bureau derrière lui.
«Mon CPU m’a encore joué des tours. J’avais cru voir quelque chose… Mais ce n’était rien. Je suis justement venue ici pour nettoyer dans l’espoir que personne ne remarque ma bêtise.» Se sentant ridicule, Moonlight leva les optiques vers le plafond en secouant la tête avec ironie. Au moins, elle avait été honnête cette fois ! Ce qui sembla apaiser son Opiluk, perceptible par le lien après sa rapide explication. Avant même qu’il ne puisse répondre, elle reprit la parole pour évoquer un poids qui pesait lourdement sur sa conscience.
«Je suis désolée pour Sentinel. Et je suis désolée… Pour tout le reste.» Déclara-t-elle en faisant un petit cercle de la main pour englober tous les récents événements qui justifiaient ses excuses. Elle se sentait intimidée face à son Opiluk, ce puissant commandant autoritaire au charisme légendaire. Comment s’exprimer ? Comment l’aborder ? Comment se faire entendre ? Cependant, Optimus leva rapidement la main pour l’interrompre au moment où elle rouvrait la bouche.
«Je suis celui qui te dois des excuses. Je n’aurais jamais dû te parler ainsi, ni laisser mes émotions prendre le dessus et te montrer cette part de moi dont je ne suis pas fier de révéler. Je me suis rendu compte de mon erreur, tu n’es plus un étincelant. Je ne t’ai pas donné le bon exemple, je t’ai aussi caché des choses, pensant faire ton bien… Tu as appris à te refermer, tout comme moi. Et tu ne méritais pas ma colère. J’ai gravement failli à mon rôle-» Mais il n’eut pas le temps de terminer car la fembot ferma rapidement la distance pour enrouler ses petits bras autour de son cou, le stoppant net.
«Ne change surtout pas.» Lui chuchota-t-elle à l’audio d’un large sourire, les optiques fermées. Ces quelques paroles, ayant eu l’effet d’une tornade, la secouèrent profondément. Elle ne pouvait donc se résoudre à rester passive et préféra écouter son instinct qui lui criait d’être démonstrative.
Optimus fut surpris par ce geste spontané affectif, immobilisé sur sa chaise avec Moonlight serrée étroitement contre lui. Les sentiments avaient toujours été présents dans le lien, mais les démonstrations physiques étaient devenues beaucoup plus rares depuis quelques vorns. Non pas qu’il ne les appréciait pas, mais il ne savait simplement plus comment s’y prendre. En réalité, il ne l’avait jamais vraiment su. Son rôle de Prime, qui l’obligeait à toujours faire preuve d’exemplarité et de rigueur, ne l’aidait pas à s’ouvrir aux autres. Encore moins à exprimer ses émotions. Mais pour Moonlight, pour sa fille, il faisait des exceptions. De plus en plus souvent. Comme lorsqu’elle n’était encore qu’un petit étincelant en quête de réconfort, il plaça une main derrière son casque et l’autre sous ses ailettes sensibles, veillant à ne pas la gêner. Il se concentra alors sur les pulsations de son Spark en harmonie avec les siennes. Les optiques closes, il appuya doucement son casque contre le sien, savourant ce rare moment d’affection.
Si l’amour pouvait se matérialiser, il dépasserait la largeur de Cybertron.
Comme un ancien réflexe, il toucha le bout de ses antennes pour apaiser les tensions dans son protoforme. De l’autre main, il appuya au milieu de ses ailettes afin d’atténuer toute la pression accumulée. Des gestes qu’il appliquait lorsqu’elle était étincelant. Si quelqu’un lui avait dit qu’un cycle, il aimerait un robot de cette façon, il ne l’aurait jamais cru. Pas une seule astroseconde, il n’aurait imaginé avoir le privilège de vivre quelque chose d’aussi fort, d’aussi pur. C’était cependant une arme à double tranchant, il l’avait compris très vite. Toute cette peur, cette angoisse, ces innombrables soucis, cette inquiétude constante… Balayés par de simples gestes comme ceux-ci. C’était cela, l’amour qu’un créateur pouvait porter à sa création. Même sans lien biologique, rien n’empêchait d’éprouver ces émotions contradictoires. Il y aurait toujours des hauts et des bas, mais ensemble, ils les affronteraient. Ils les surmonteraient. Rien ne pourrait jamais briser leur lien symbolique. L’essentiel était de toujours se retrouver et d’avancer vers un monde meilleur, malgré toutes les épreuves qui se dresseraient devant eux.
Sans peur, ni regrets.
Moonlight s’éloigna de son Opiluk après deux bons kliks dans cette position, gardant un instant ses mains sur la barre de son pare-brise avant de reculer de deux pas. Ce contact lui avait profondément manqué, presque vital après toutes ces pensées négatives qui avaient empoisonné son processeur… De son côté, Optimus semblait lui aussi chercher un réconfort, surtout après avoir dû affronter son mentor sous les optiques du peuple de Iacon, accusé d’un jugement considéré comme injustifié. Elle n’osait imaginer la douleur, le sentiment de trahison, l’impression d’abandon… Optimus croyait fermement en la rédemption, mais Moonlight doutait sérieusement qu’il puisse un cycle se racheter à ses optiques si Sentinel était vraiment à l’origine de son enlèvement. À l’origine d’un complot contre les Autobots, sa propre famille.
Quelque part au fond d’elle, elle espérait qu’il serait innocent. Rien que pour ne plus revoir cet abattement dans les optiques de son créateur, qu’il s’efforçait en vain de dissimuler derrière son impartialité.
Après ce court moment d’affection, Moonlight déposa les datapads à leur place sur le bureau avant d’aller chercher un tabouret dans un coin de la vaste pièce pour s’installer aux côtés d’Optimus. Le grand robot rouge et bleu la suivit du regard, sans un mot, tandis qu’il tentait de déchiffrer son visage désormais lavé de toute expression. Il se tourna alors vers leur lien, mais celui-ci ne lui apporta pas davantage de clarté. Sa fille avait retrouvé cette neutralité qu’elle développait depuis son retour à Iacon. À nouveau inquiet, Optimus se pencha légèrement pour lui demander ce qui n’allait pas, sauf que la fembot leva un doigt à ses lèvres pour lui faire signe de ne rien dire. Elle prit calmement place sur son tabouret, les optiques bleues inexpressives fixées pensivement sur le Prime qui lui laissait tout le loisir de s’exprimer à son propre rythme. Il attendait, simplement. Restant ainsi un instant dans un silence chargé où leurs regards se croisaient, Moonlight finit par se lancer.
«Laisse-moi te dire toute la vérité.» Proposa-t-elle tout en croisant les bras sur ses genoux, son regard se perdant sur le sol quand elle entama enfin le récit qu’elle avait si longtemps gardé pour elle.
Et Optimus écouta. Sans intervenir, sans émettre le moindre jugement. Il la laissa lui confier l’origine de ses cauchemars, les souvenirs de torture infligés par les Decepticons, quelques bribes de conversations, sa rencontre avec Sentinel chez l’ennemi, sa dispute avec ses amis, la solitude, les pensées sombres… Cette sensation de sombrer dans la folie, cette rage permanente qui la rongeait. Stoïque en apparence pour ne pas l’influencer, le commandant était pourtant dévasté intérieurement par de tels aveux. C’était douloureux. Insoutenable. Il serra les poings à plusieurs reprises face à une telle souffrance, étouffant en silence la tempête d’émotions qui menaçait de l’emporter. Mais jamais il ne flancha. Pour Moonlight, il resta solide, présent, prêt à encaisser jusqu’au bout. Il n’aurait jamais cru qu’elle portait un fardeau aussi lourd, d’autant plus que leur lien était devenu si silencieux, presque éteint. Sa fille se confiait enfin à lui sur cette peur qui la rongeait, cette terreur qu’elle ressentait lors de ses rêves où elle voyait des images liées à son emprisonnement.
Il s’agissait essentiellement de flashs aléatoires qu’elle était incapable de comprendre, sans savoir d’où ils provenaient ni pourquoi elle les subissait. Leur signification restait un mystère. Elle lui parla aussi du nouveau programme mis en place par Ratchet pour aider son CPU à trier les fichiers corrompus afin qu’elle puisse être libérée de leur emprise. Elle lui confia ses doutes concernant l’avenir, ses craintes vis-à-vis de la suite de la guerre. Les expériences que Shockwave avait menées sur elle semblaient, selon elle, directement liées à ces cauchemars étranges. Elle partagea également ses visions d’horreur qui se manifestaient de plus en plus fréquemment…
Pendant plus de deux groons, Optimus resta une audio attentive à la détresse de sa fille. Extérieurement imperturbable, intérieurement terrassé. Il prenait note de chacune de ses confidences avec une grande attention, aussi bien d’un regard pragmatique que d’un regard compatissant, l’encourageant à s’ouvrir à lui grâce au lien créateur qu’il inondait de bienveillance. Il était si fier d’elle, fier de son courage et de cette force qui l’aidait à affronter chaque cycle les épreuves de la vie. Moonlight était tellement précieuse, tellement bénéfique pour tous les robots qui la côtoyaient… Elle ne se rendait pas compte à quel point elle était importante. À quel point sa présence illuminait son quotidien. Aussi bien pour les autres que pour lui. Alors, savoir qu’elle vivait en perpétuel conflit avec elle-même lui brisait le Spark. Cependant, il était là pour la guider et lui faire comprendre qu’elle était une fembot exceptionnelle, avec un avenir radieux devant elle. Qu’elle n’était pas destinée à souffrir le restant de ses cycles dans la solitude et la peur. Il serait là, toujours. Pour l’aider à se reconstruire, pour raviver en elle l’espoir et la confiance.
Il ne laisserait jamais Megatron obtenir ce qu’il voulait.
À la fin de son récit poignant, le Prime attendit quelques instants avant de se pencher pour lui prendre la main dans la sienne, trois fois plus grande, avec un sourire chargé d’émotion. Ce geste inattendu surprit Moonlight… Mais elle ne le repoussa pas. Elle sentit alors un soulagement profond, immense, qui se propagea dans leur lien comme une onde apaisante. Un poids venait de s’envoler. Aucun mot n’était nécessaire dans cet instant unique. Partageant ce nouveau moment de complicité, les deux s’égarèrent ensuite sur d’autres sujets pour finir par parler de leurs recherches sur les Ruines du Passé, côte à côte au bureau d’Optimus. Face à de nombreux datapads dévoilant clichés et fragments d’histoire, ils discutèrent activement de théories et d’idées novatrices, sans prêter attention au temps qui s’écoulait. Comme le souvenir d’une autre époque… Où tout n’était pas encore si compliqué.
Où ils étaient tous les deux heureux.
À suivre…
Une dépression n’est pas à prendre à la légère. Des hauts et des bas, il y en aura toujours. L’essentiel, c’est d’être avec ceux que l’on aime, ceux qui nous soutiennent.
Optimus sera toujours là pour elle, quoi qu’il arrive.
Quoi qu’il arrive…
Merci pour votre lecture.
VP