Recueil d'un vampire
- Ca va ? Me demanda-t-il soucieux. J’étais toujours dans ses bras froids et durs, mais cela ne me gênait pas. Je me sentais bien. À ma place.
Il était assis sur mon lit adossé aux cousins et me tenait entre ses jambes écartées contre son torse.
- Oui mieux, dis-je effaçant les dernières traces de larmes sur mes joues. Excuse-moi, ta chemise est toute mouillée.
- Ne t’en fais pas pour ça, du bout du doigt il me caressa le bras. J’eus un frisson et mon cœur s’emballa.
- Je ne te ferais pas de mal Olivia murmura-t-il à mon oreille caressant ma joue de la sienne.
Croyait-il vraiment que mon cœur s’emballait parce que je pouvais avoir peur de lui ? J’aurais certainement dû, mais cela n’était pas le cas. Je ressentais pour Corin une attirance de plus en plus forte et je devais bien avouer que cette attirance soudaine me faisait un peu peur.
Il m’enveloppait et sa peau froide commençait à me geler sur place. J’eus un frisson, mais ne voulais pas bouger. Il s’en rendit compte et un courant chaud courra bientôt le long de mon corps.
- Je n’ai pas peur de toi, murmurais-je à mon tour.
- Tu devrais pourtant, nous sommes dangereux pour toi de bien des manières.
- Je sais.
Corin ignorait que j’avais lu le journal d’Aro, je n’étais pas une novice dans le domaine et lui dis.
- Je sais que certain d’entre vous, détenez des pouvoirs plus ou moins dangereux, que vous avez une force et une ouïe extraordinaire, que vous êtes très rapide. Votre peau… ajoutais-je en caressant sa main qui reposait sur mon bras, est froide et dure comme le marbre, que du venin coule dans vos veines.
- Tu en sais bien plus que je ne pensais en effet dit-il, souriant le nez enfoui dans mes cheveux détachés.
- Bien plus que je ne voudrais en savoir, soupirais-je.
Je lui racontais la découverte du recueil, l’enchainement d’événements qui m’avaient amenée à vivre cette histoire digne d’un roman, sans mentionner toutefois, qu’Arnaldo Gianni et Aro étaient une seule et même personne. Il m’écouta longtemps sans m’interrompre si bien que je le crus endormit.
-Tu dors, chuchotais-je.
- Voilà une chose que tu ne sais pas sur nous, dit-il me soulevant sans effort pour que je lui fasse face.
Il planta ses prunelles rouges dans les miennes et me caressa la joue.
Je n’avais jamais vraiment eus de petits copains au collège comme toutes mes amies, ni au lycée où je n’étais pas assez populaire. Je n’en éprouvais pas l’envie de toute façon. Je trouvais les garçons immatures et ennuyeux à souhait et préférais de loin la compagnie des livres. Ils étaient bien plus fascinants, mais aujourd’hui dans les bras de Corin je me sentais bien.
- Nous ne dormons pas, m’apprit-il.
Je restais interdit.
- Pas du tout ?
- Non, notre corps n’a pas besoin de repos, nous ne nous fatiguons jamais.
C’était étrange, les journées devaient être longues, où plutôt sans fin. Cette notion d’éternité m’intriguait. Moi qui pensait vivre dans le passé à travers mes livres je réalisais, que Corin avait vécu toutes ces époques merveilleuses.
- Tout ça te fait peur ? Demanda-t-il devant mon silence.
- Pas vraiment. Étrangement je ne suis pas effrayée par… Je ne savais pas comment nommer tout ça, ton monde finis-je par dire, c’est comme si j’étais destinée à vivre tout ça.
Je me rendais compte que c’était vrai j’étais destinée à vivre cette aventure, je sentais le fil qui m’avait mené là, ce fil avait toujours existé.
- Alors, tu as deux cents cinquante ans, dis-je curieuse d’en apprendre plus sur lui.
Il m’examina attentivement tête penchée sur le côté, surement pour s’assurer que je n’allais pas tourner de l’œil à la moindre information un peu bizarre.
- Oui deux cents cinquante-sept pour être précis, je suis né en mille sept cents clinquantes trois. En Angleterre, j’étais le fils d’un cordonnier.
- Comment es-tu devenu un immortel ?
Il soupira se passa la main sur le menton comme s’il cherchait un moyen de ne pas me le dire.
- Tu n’es pas obligé de me raconter, je comprends, je suis indiscrète, dis-je.
Il posa la main sur ma joue, j’étais un peu surprise de l’intimité dans laquelle nous nous étions enfermés tout deux naturellement comme si là était notre place, l’un avec l’autre.
- Ce n’est pas que je ne veux pas te raconter Olivia, je n’ai rien à te cacher, mais l’histoire n’est pas belle. C’est rarement le cas tu sais. C’est souvent violant, douloureux et bête dans mon cas, ajouta-il. Un sourire triste aux lèvres.
- Raconte-moi, insistais-je.
- J’avais Vingt et un ans, comme je te l’ai dit mon père était le cordonnier du village, nous n’étions pas riche, mais pas pauvre non plus une chance à cette époque où la famine faisait des ravages. J’étais donc un bon parti et mon père voulait me marier avec la fille du boulangé. Elle était très jolie et aurait fait une merveilleuse femme, mais moi je rêvais d’être solda dans l’armée de sa majesté le roi d’Angleterre. Je rêvais de gloire, de victoires. J’étais bien naïf ! Il me caressait naturellement les cheveux en parlant.
- Que s’est-il passé ?
- Mon père s’y opposa fermement. Ma mère avait faillie mourir en couche lors de ma naissance et n’avait jamais pu avoir d’autres enfants, mon père répétait souvent qu’il ne sacrifierait pas son fils unique à un roi qu’il ne respectait même pas. Je me sentais incompris, bridé. Je me souviens avoir pensé que mon père ne m’aimait pas, je n’étais qu’un jeune arrogant qui ne connaissait rien à la vie et à la chance qu’il avait.
Après une dispute particulièrement virulente avec mon père sur le mariage que je refusais, je partis en colère et bien décidé à réaliser mon rêve. Il eut un rire amer, je n’ai plus jamais vu mes parents, reprit-il, pour tout te dire je ne suis pas allé bien loin, alors que je m’engageais dans une ruelle pour rejoindre le port dans l’intention de monter dans un bateau en partance pour la France où j’aurais pu intégrer l’armée, je fus happé par derrière, je me souviens de la douleur soudaine dans mon cou, puis il y eut un bruit je ne sais pas trop tout est confus et puis nos souvenirs s’effacent plus ou moins avec le temps sauf ceux que l’on ravive sans cesse, dit-il en baissant les yeux sur mon visage.
- La dispute avec ton père ?
- Oui les regrets m’empêchent d’oublier cette partie de ma vie humaine.
- Que c’est-il passé ensuite ?
- Quelque chose ou quelqu’un avait dû déranger le vampire, puisqu’il me l’achat et disparu. Je me retrouvais seul allongé sur les pavés. La douleur de mon cou s’étendit à tout mon corps, je pensais que j’allais mourir. Un vieux pêcheur qui passait par là m’entendit implorer là mort et me ramena chez lui. Il pensait que j’étais malade et la transformation de mon corps n’était que les symptômes de la maladie qui allait m’emporter.
Il s’interrompit, eut un regard dure et s’éloigna de moi, j’eus froid d’un coup loin de lui, il arpentait la pièce comme la première fois que je l’avais aperçu. Il reprit sans me regarder.
- Le troisième jour, je cessais enfin de hurler, et ouvrit les yeux, tout était différent, plus claire comme si avant j’avais été sourd et aveugle, comme si ma tête avait contenu du coton m’empêchant de penser et qu’on me l’avait retiré. Mais avec ça vint aussi la soif.
Ma gorge me brulait, mais l’eau que me proposait le vieil homme ne me faisait pas envie. En revanche, sa peau dégageait une odeur merveilleuse, j’apercevais le sang qui courrait sous sa peau, tentant la bête en moi. Ma gorge était si douloureuse je savais que c’était de lui dont j’avais besoin, mais aussi envie précisa-t-il en me regardant enfin.
A cet instant il était le vampire dans toute sa splendeur il n’était pas humain. C’était un immortel et il buvait le sang de mes semblables. Il pouvait s’abreuver du mien. Etrangement ce constat ne m’effrayait pas. Je ne le voyais pas comme un humain, mais bien comme un vampire, avec les forces et les faiblesses de sa condition. J’aurais dû m’éloigner, morte de peur, mais au contraire je ressentais le besoin de le serrer dans mes bras. Il était ce qu’il était. Il était dans sa nature de se nourrir de sang humain, comme il était dans la mienne de me nourrir de viande.
Corin ne me lâchait pas du regard à présent.
- Guidé par mon instinct, j’ai planté mes dents dans sa chair, elle était tendre comme du beurre et je bus son sang, mais la soif n’avait pas disparu pour autant, elle était toujours là.
- Je sais murmurais-je, me souvenant les premiers pas d’Aro en tant qu’immortelle, j’avais compatis pour cet homme et aujourd’hui je compatissais encore pour Corin.
- Tu n’avais pas le choix c’est dans ta nature tu n’y peux rien, lui dis-je.
- Crois-tu ? Me questionna –t-il, Aro t’as parlé des Cullen.
- Les Cullen ? Je n’en ai pas souvenir.
- C’est une famille d’immortels, pas un clan comme nous les Volturri, mais une famille, Carlisle, le père est le créateur de presque tous.
Je fronçais les sourcils, j’avais moins de compréhension pour la transformation que pour les questions alimentaires. Si un vampire ne pouvait pas grand-chose contre sa nature, transformer intentionnellement me gênais beaucoup plus. Corin dû le comprendre à mon expression, car il précisa :
- Carlisle les a transformé alors qu’ils étaient agonisant, Edward d’abord son fils et Esmé sa femme puis Rosalie et Emmett qui sont mari et femme, mais aussi les enfants de Carlisle et Esmé. Puis plus tard Alice et Jasper les ont rejoints. Alice a des visions du futur, Edward lit dans les pensées et Jasper contrôle les émotions comme je contrôle les sensations. Les autres n’ont pas de dons comme nous l’entendons, mais des particularités.
C’était les mêmes personnes dont m’avait parlé Aro en effet. Alice était l’immortel qui m’avait vu dans ses visions, Edward devait être le jeune suicidaire.
- Comment ça des particularités ? Demandais-je intriguée.
- Carlisle est médecin, annonça-t-il.
- Les vampires peuvent être malades ? Questionnais-je innocemment, je pensais que vous étiez invincibles et immortels.
- Oui, c’est le cas, Carlisle soigne les humains, il travail dans les hôpitaux.
Je le regardais éberluée. Comment était-ce possible ? Les vampires se nourrissaient des humains ils ne les soignaient pas. Il fallait avoir un sacré contrôle pour exercer une telle fonction.
- Je ne comprends pas.
- Les Cullen ne se nourrissent pas de sang humain, mais de sang animal. Tu Comprends, il y a une alternative dit-il en revenant vers moi, mais pour tout te dire seul les Cullen et une autre famille, utilise cette alternative.
- Pourquoi ? Demandais-je déroutée.
- Parce que c’est bien trop difficile de résister au sang humain. L’histoire de cette famille est extraordinaire par bien des côtés et une épine dans le pied d’Aro depuis quelque temps.
Je ne savais pas quoi faire de ces révélations, il y avait une alternative au sang humain, mais pas si valable que cela au vu du nombre restreint d’immortels ayant fait ce choix.
- Nous sommes des prédateurs, des chasseurs Olivia et beaucoup tue avec plaisir, cela n’est pas mon cas, précisa-t-il toutefois.
J’en avais l’intime conviction. Je savais qu’il ne tuait pas par plaisir.
- Aro va peut-être me transformer, murmurais-je.
- Ce serait si terrible que ça ? Demanda Corin en s’asseyant à côté de moi sur le lit, une main sur la mienne.
Je pris un moment pour réfléchir à la question. J’avais compris que je ne rêverais plus jamais ma famille et mes amies, malgré la douleur quand je repensais à eux, je commençais à en faire le deuil. Et puis il y avait Corin je m’étais attachée à lui bien plus que je ne le croyais en peu de temps, mais je ne voulais pas m’attarder sur la force de mes sentiments pour lui c’était trop tôt.
- Non ce ne serait pas si terrible, mais je ne pourrais pas tuer. Dis-je en baissant la tête, je ne te juge pas corin, je comprends, mais je ne pourrais pas.
Il attrapa mon menton entre ses doigts ramenant mon visage au niveau du sien.
- Alors, il ne nous reste plus qu’à trouver une alternative, me dit-il en souriant.
Je lui souris en retour, oui il devait bien y avoir une solution, il suffisait de trouver laquelle. Ses doigts quittèrent mon mentons et effleurèrent ma joue aussi légers que les ailes d’un paillions. Il fit courir un courant chaud sur la peau qu’il frôlait. Mon cœur fit un bon dans ma poitrine. Puis le courant devint froid et tiède. De délicieux frissons m’agitaient.
La sensation se modifia en fourmillements, c’était grisant. Ma respiration s’accéléra, devint bruyante ce qui me gêna un peu, son visage n’était qu’à quelque centimètre du mien, il inspira profondément et ferma les yeux comme pour savourer mon odeur.
- Tu sens si bon, dit-il ouvrant les yeux pour les plonger dans les miens.
- Merci souris-je.
Il posa sur ma joue ses lèvres froides et sa propre odeur me monta aux narines. Elle était sucrée. Un mélange de menthe, de vanille, de caramel. Je pris conscience que je le reniflais quand son rire résonna, je me redressais brusquement en rougissant.
- Ne soit pas gêné me dit-il en attrapant ma main. Il lâcha un soupire, je dois aller dans la tour il y a un rassemblement, tout le monde doit s’y rendre. Profit-en pour te reposer ajouta-t-il.
- Vous allez parler de moi, c’est ça ? Lui demandais-je.
Son silence m’en dit long, apparemment le problème Olivia allait être soumis à tous les immortels.
- Olivia ? J’avais baissé la tête.
- Oui ?
- Je ne sais pas ce qui nous arrive, mais nous sommes liés d’une façon ou d’une autre, en plus de deux cents ans, je n’ai jamais été attaché a qui que ce soit, mais dès que je t’ai vu un lien invisible c’est étendu jusqu'à toi.
- Comme tous les vampires ici, marmonnais-je.
- Tu es lié a notre monde, aux immortels en général oui, convient-il, mais l’attraction que nous ressentons n’est pas de même nature. Tu le sens aussi je le vois aux battements de ton cœur qui redoublent quand tu me vois, à ton odeur qui s’intensifie, à ta façon de te pencher vers moi quand nous parlons.
Il avait raison, je n’étais pas consciente de mon comportement envers Corin, me l’entendre dire par lui me fit rougir.
- Ne sois pas gêné répéta-t-il, je ressens la même chose pour toi, il tourna la tête brusquement vers la porte, je n’avais rien entendu. Je dois y aller.
- Démétri ! Gronda soudain Corin.
Je me retournais brusquement en sentant un courant d’air froid dans mon cou pour me trouver nez à nez avec un vampire. Il était grand, mince et brun.
- Olivia, me salua-t-il en souriant.
- Démé…tri, le saluais-je en bégayant.
Je me souvenais de ce que m’avait dit Corin, Démétri était un traqueur, il s’imprégnait de l’aura de la personne en quelque sorte et pouvait le traquer n’importe où, ça faisait froid dans le dos.
Il me fixait curieux, il fini par se tourner vers Corin :
- Tu as trop tardé Aro m’envoie.
- Allons-y.
En moins d’une seconde je me retrouvais seul dans la chambre.