Recueil d'un vampire
Fred dormit toute la journée, son cœur eut d’horribles ratés et je commençais à craindre sérieusement pour sa vie. Sa respiration, elle aussi, ne s’était pas améliorée. Parfois, il oubliait tout simplement de respirer. Alors, je tapais des mains et le bruit, qui dérangeait son sommeil, la faisait repartir.
Le silence s’étirait entre Corin et moi, chacun perdu dans ses pensées. Etrangement, le silence et l’immobilité de cire que nous avions adopté me semblait toute naturel. Je me repassais le film des récents événements, essayant d’y voir claire. J’étais intimement persuadée qu’il était vital de garder secrète cette variante de mon don. D’ailleurs, Corin partageait mon opinons. Nous nous retrouvions déjà, malgré nous, avec Caïus sur le dos alors que celui-ci ignorait la nature exacte de mon pouvoir et un vampire qui se sent menacé est un vampire dangereux.
D’un autre côté, je ne pouvais pas cacher cela indéfiniment, surtout pas à Volterra. A un moment ou à un autre, Aro l’apprendrait forcement. Si j’arrivais à échapper à Caïus, Aro et Marcus me laisserait-il vivre malgré la menace que je représentais pour leurs trônes ? Qu’adviendrait-il réellement si les immortels venaient à connaitre l’existence d’une alternative à l’immortalité ?
Je n’avais pas de mal à l’imaginer. Les vampires comme Fred, mal dans leurs peaux d’immortel, viendraient frapper à ma porte espèrent que je leur rends ce qu’ils avaient perdu des siècles plus tôt. Quand aux vampires partageant le sentiment de menace de Caïus, ils viendraient en découdre avec moi ou Corin, mon protecteur, pensant éliminer une menace contre l’espèce tout entière. Ma vie deviendrait un véritable enfer, sans parler du risque qu’un de ces vampires viennent à blesser ou tuer mon amour. Je n’aspirais qu’à vivre en paix avec mon ange, les luttes pour le pouvoir ne m’intéressaient pas, mais je me doutais qu’en convaincre les grands chefs ne serait pas gagné d’avance.
Un autre point me tracassait cependant, les vampires éveillés en moi une sorte d’instinct protecteur dont la nature pouvait s’apparenter à l’instinct maternelle. Sans aucune raison, je m’étais sentie trahis et blessée par les tentatives de suicides de Fred et je ne pouvais m’empêcher d’éprouver un faible pincement au cœur devant l’acharnement de Caïus à me supprimer du paysage, c’était un horrible personnage, mais malgré tout, une petite, toute petite, partie de moi le voyait comme un enfant qui tapait des pieds inutilement devant des parents autoritaire. Paradoxalement, j’étais bien loin de le porter dans mon cœur ! Ces sentiments contradictoires me dérangeaient. Il était déjà difficile de ne pas pouvoir me fondre dans la masse comme je l’avais toujours fait au milieu des livres poussiéreux, maintenant je devais dissimuler ma vraie nature à mes semblables et pire je leur faisais peur.
Je due laisser transparaître mon agacement, car Corin tourna son magnifique visage vers moi. Il me contempla un moment sans bouger. Il y avait dans ses yeux un monde d’amour, mais aussi d’admiration et de d’adoration. Je fus un peu gêné par l’intensité de ce qu’il me communiquait, mais je ne détournais pas les yeux lui rendant ses sentiments au centuple.
Fred s’agita brisant le charme.
- J’ai terriblement mal au ventre, je crois que je vais vomir, grogna-t-il, en s’enroulant sur son abdomen.
Mais bien sûr, il était humain il n’y avait rien dans son estomac, cela expliquait les crampes et les nausées.
- Je pense que tu as faim, c’est ça qui provoque tes nausées.
Il leva la tête brutalement et gémie.
- Tu crois, la nausée passé il écarquilla les yeux sous la surprise.
- C’est logique tu n’as rien mangé depuis des siècles, expliqua Corin.
Et il parti chercher de quoi sustenter notre ex-vampire.
- Comment te sens-tu à présent ? Lui demandais-je.
Il eut une grimace comique.
- Mieux que ce matin, je pense que mon corps réapprendre à vivre.
- Ca me parait normal. Quel âge as-tu ?
- Je ne suis pas très vieux, j’ai vingt et un ans humain et seulement deux en tant que vampire.
- Tu es si jeune que ça ? M’étonnais-je.
- Oui, j’étais un fugueur, junkie de surcroit, ricana-t-il amer. Un soir j’étais dans une ruelle sombre de Seattle, je venais de prendre une dose de blanche quand quelque chose s’est abattue sur mon dos et plaqué au sol. Shooté comme je l’étais, je n’avais ni la force, ni franchement l’envie de bouger pour me défendre. De toute façon je n’aurais rien pu y faire. Quand la douleur a enfin disparu, je me suis retrouvé dans une cave avec une vingtaine d’autres nouveau-nés. On nous a gardés là pendant des mois, c’était l’enfer. Des bagarres éclataient sans cesse. Des vampires mourraient et étaient aussitôt remplacés par d’autre. J’ai découvert l’existence de mon don petit à petit, les autres n’ont pas remarqué tout de suite, ils pensaient seulement que j’étais particulièrement antipathique et que c’était pour ça qu’ils ne voulaient pas s’approcher de moi. Cela m’a permis de survivre. Personne n’osait me toucher encore moins me parler. Puis une nuit, nous avons enfin su pourquoi nous étions tous là. Nous devions servir de machine à tuer pour l’immortelle qui nous avait crées, d’ailleurs je ne l’ai jamais vu. Je me suis enfuit dès qu’on s’est mis en marche, cette histoire puait le suicide collectif à plein nez et je n’étais pas d’accord pour servir de chaire a canon à une immortelle inconnu. Je ne suis pas resté assez longtemps pour savoir ce qu’il advenait des autres.
J’étais atterrée que de tels procédés puissent exister. Créer des vampires dans le seul but de faire la guerre était à mes yeux, impardonnable. Mon instinct protecteur s’offusqua bruyamment en arrachant un grognement menaçant de ma gorge.
- Du calme, c’est de l’histoire ancienne, m’apaisa Fred.
- C’est inhumain.
- Nous ne sommes pas humain Olivia, or n’oublie pas que j’étais un drogué, une loque. Cette expérience a au moins eu l’avantage de me faire aimer la vie. Dommage qu’il ait fallu que je meure pour m’en rendre compte, dit-il amer. Grâce à toi j’ai une deuxième chance je vais pouvoir retrouver des proches, que je n’appréciais pas à leurs juste valeur avant tout ça. Contrairement à d’autres je n’ai pas eu le temps de perdre ma famille, enfin je l’espère.
Son récit était bouleversant, néanmoins il soulevait quelques questions. Fred était un très jeune vampire, peut-être que ce fait avait été déterminant quant au sucée de sa re-transformations. En serait-il de même pour un immortel de plusieurs dizaines d’année ou de plusieurs siècles ? Je tâtonnais, je sentais que je n’avais exploré qu’un dixième des possibilités, je n’avais aucune idée des limites imposées par ce don et si je devais en croire les vampires que j’avais interrogé ce sujet, nos pouvoirs ne cessaient de croître avec les années. Par lâcheté, indéniablement, je souhaitais que les miens soit sacrément limité, je me doutais bien, vu leur progressions, que je ne serais pas exaucée.
Malgré le visible succès de cette première tentative, j’étais toujours terrorisée à l’idée de faire du mal à l’un des vampires qui pourrait mettre sa vie ou sa mort entre mes mains. Je ne voulais pas être responsable d’un aussi lourd fardeau.
- Tu te fais trop de mouron, me fit remarquer Fred en claquant une langue désapprobatrice.
- Trop ? Mon inquiétude est légitime, tu aurais pu y passer je te signale.
- Non tu ne m’aurais pas laissé mourir, sourit-il.
- Qu’aurais-je pu faire si tu avais cessé de respirer ? Si ton cœur c’était arrêté après avoir battu deux trois fois ?
- Il te suffit de croire en toi comme nous croyons en toi.
- Je ne comprends pas cette foi absolue que vous avez en moi, je ne vous connais même pas et vous non plus !
- Bien sûr que si, tu nous connais, dit-il tranquillement, tu sens nos auras, tu vois nos âmes. Personne ne peut nous voir et nous connaitre mieux que toi Lumineusa.
Il s’efforçait de contenir la ferveur et l’admiration qu’il ressentait, pour ne pas m’effrayer, mais je l’entendis quand même transparaitre dans sa voix.
J’en avais la gorge serrée, il avait raison bien sur. J’avais beau me mettre la tête dans le sable, tout était là. Je m’étais pourtant promis d’accepter ce que j’étais, mais je n’y avais pas vraiment cru, je n’avais pas cru pouvoir aider Fred comme il le désirait tant, je m’étais mise en tête de jouer un rôle de psychologue, au lieu de ça je m’étais transformée en Dieu ! Je me retrouvais désormais devant le fait accomplit et cela me terrifier littéralement.
- Tu as peur, pourtant, il n’y a pas lieu, repris l’ex-vampire. Tu es une bénédiction pour nous, ne laisse personne te dire que tu es une aberration, toi la première. Tu ne t’en rends pas compte, mais tes yeux brillent quand un immortel entre dans la même pièce que toi, inconsciemment tu goûtes son essence, son aura. Je pense que tu détermines ainsi son humeur, on voit que tu t’inquiètes de notre bien-être et tout ça sans conscience réel de le faire. Je me trompe ?
- Je…Comment peux-tu le savoir ?
Il eut un petit rire amusé.
- Quand nous nous sommes rencontré tu as su que j’étais dans la pièce avant même d’y entrer, pourtant tu ne me voyais pas j’en suis certain, tu as penché la tête comme si tu entendais quelque chose, puis ton regard s’est emplit d’inquiétudes et je mettrais ma main au feu que ce n’était pas seulement l’inquiétude de te retrouver face à un vampire inconnu, cela n’a duré qu’une seconde, mais je n’ai pas rêvé tout ça. Il eut une quinte de toux comme s’il avait avalé sa salive de travers.
Mon dieu il avait raison, j’avais toujours eu une conscience aiguë des vampires présents, sans y penser, comme un réflex. Je touchais leur auras comme pour m’assurer que tout allait bien pour eux, toucher ou gouter, oui c’était ça le bon terme gouter. Volterra était particulièrement vaste et depuis ma transformation je m’étais cantonné à une partie du château, de ce fait je ne rencontrais souvent que les vampires qui y logeaient, au final toujours les mêmes.
Mais je « connaissais » les autres, ceux qui étaient en mission et qui revenaient brièvement dans nos murs, ceux qui n’étaient que de passage, ceux qui séjournaient dans les autres parties du château et que je n’avais pas eu le temps de rencontrer. Pour beaucoup j’aurais été bien en peine de les décrire physiquement, mais en ce qui concernait leur essence, j’étais capable de reconnaitre chacune d’elle au milieu d’une foule d’immortel.
- Oui, c’est vrai, soufflais-je consternée.
Fred ce redressa sur les coussins que j’avais empilés dans son dos l’air satisfait.
- Arrête de lutter, ça ne sert à rien, conclut-il.
Corin arriva sur ces entrefaites, je savais qu’il avait tout entendu, mais il ne fit aucun commentaire.
- Tiens mange, dit-il à Fred en lui fourrant dans les mains ce qui ressemblait à un sandwich au poulet.
J’avais adoré ça étant humaine, mais l’odeur qui se dégageait du sac en papier était affreuse, beurk !
Il se mit à manger goulument, comme si sa vie en dépendait, ce qui devait être le cas, son corps était absolument vide de tout nutriment, cela ne pouvait pas être très bon pour sa nouvelle santé.
- Va doucement quand même, lui recommandais-je, tu risques de vomir si tu manges trop vite.
Je vis des larmes briller dans ses yeux. Son air extasié en disait long sur le plaisir qu’il avait à manger un aliment aussi banal que fut un sandwich au poulet.
- J’ai dû appeler Heidi pour qu’elle vienne nous relayer auprès de Fred, m’annonça Corin impassible.
- Pourquoi ?! Demandais-je outrée.
Il soupira visiblement ennuyé, comme un adulte devant un enfant récalcitrant.
- Mon amour, je suis désolé, mais malgré tout nos efforts nous ne pouvons pas garder ce secret qu’entre nous, nous devons retrouver Capa dans une heure et Fred ne peut rester seul. Pense à ce qu’il se passerait si nous le laissions seul, il est encore trop désorienté et il s’arrête de respirer dans son sommeil.
- Je suis là je vous signale, baragouina-t-il la bouche pleine.
- désolé.
Corin et moi avions parlé en même temps et nous nous mîmes à rire nettoyant ainsi la pièce de toute la tension qui l’avait envahit après sa déclaration.
- Ok, je reconnais que nous avons besoin d’aide, mais il faudra impérativement qu’elle garde ça pour elle.
- Heidi contrairement à son habitude, s’est beaucoup attaché à toi, elle ne fera jamais rien qui t’attirerait des ennuis.
- Peut-être, mais tu oublis qui règne sur les vampires à Volterra, que se passera-t-il si Aro touchait Heidi, toi ou moi ?
- A chaque jour suffit sa peine Olivia, me dit Corin sagement, nous ne pouvons pas faire face à tout nos problèmes en même temps et pour le moment la priorité c’est Caïus et notre ami ici présent, ajouta-t-il à l’attention de Fred.
Je m’inclinais devant la sagesse de ses propos et nous attendîmes la belle immortelle, tout en discutant des projets de Fred qui n’avait pas vraiment eut le temps d’y penser bien longtemps.
Nous interceptâmes Heidi dans le couloir, Corin lui raconta, sans rien omettre, ce que j’avais fait aujourd’hui, elle écouta sans faire le moindre commentaire et sans me regarder, mais j’aperçu son âme s’embraser au fond de ses yeux au fil du récit de mon ange.
A la fin elle lâcha un sifflement choqué et m’adressa un regard circonspect, il y avait une bonne dose de surprise, une pointe d’admiration et, cela m’attrista, un éclaire de crainte.
- Hum…je vais m’occuper de Fred marmonna-t-elle, en se glissant dans la chambre les yeux rivés au sol.
Je soupirais tristement.
- Voilà exactement le genre de réaction que je redoutais, elle va me voir comme un monstre à trois têtes capables de la dévorer.
Mon ange me souri et me serra dans une étreinte tiède, le menton posé sur le sommet de mon crâne il me dit :
- Olivia comment aurais-tu réagi si un vampire t’avait dit pouvoir te retransformer en humain ?
- Je ne sais pas, mais je suppose que cela ne m’aurait pas choqué dans la mesure où le concept de vampirisation était déjà inconnu pour moi.
- Suppose que tu es un vampire aussi ancien que Heidi, pour qui la nature et irréversible, comment penses-tu que tu réagirais ?
- Je sais où tu veux en venir, soupirais-je en fourrant mon nez dans son teeshirt, mais comprendre ne m’empêche pas de me sentir blesser.
La porte s’ouvrit sur une Heidi penaude.
- Je ne voulais pas te blesser Olivia, me dit-elle sincère, je ne sais tout simplement pas quoi penser de tout ça, c’est tellement dingue ! Ca fait deux siècles que je crois qu’être un vampire et la meilleure chose qui me soit arrivé et je n’aie jamais remis cela en question puisque de toute façon il n’y avait pas de possibilité pour que cet état change. Je ne suis pas du genre à vivre avec des « et si j’étais toujours humaine » et là vous m’annonçais tout de go que tu as le don de nous faire redevenir humain, il ne s’agit plus de « et si… » Mais de quelque chose de possible désormais, comprend que cela secourait le plus flegmatique des vampires.
Oui je comprenais, mais je me sentais dans la peau d’une tornade qui s’acharnait sur un pays en reconstruction. Il avait été difficile pour la plupart des vampires d’accepter ce qu’ils étaient et j’arrivais comme un cheveu sur la soupe en décrétant que désormais tout était possible pour eux, qu’ils avaient le choix de rester immortels ou de vivre une vraie, mais courte vie avec maison jardin femme et enfants.
- Oui je comprends, me contentais-je de dire.
- Il est l’heure d’y aller, nous pressa Corin.
Après les dernières recommandations qui s’imposaient à la survie de notre ami nouvellement humain, nous retrouvâmes Capac au promontoire comme convenu.
Il se méfiait toujours de nous et nous regarda en chien de faïence tendis que nous avancions vers lui.
Nous devions faire un récapitulatifs du plan que nous avions élaboré. Il était plutôt rudimentaire somme toute, cela constituait en une action simple, mais directe. Il était hors de question de tourner autour du pot comme Corin l’avait suggéré, jouant la carte de la prudence. Je l’avais convaincu de mettre tout de suite les pieds dans le nid de vipères. Je servirais d’appât avec l’aide de Capac qui me mènerait tout droit à Caïus et une fois là, nous libérerions la femme de Capac et neutraliserions Caïus
- Changement de programme, lâcha-t-il quand nous arrivâmes à sa hauteur.
Corin et moi, nous regardâmes sourcils froncés, cela sentait le piège.
- C’est à dire ? Demanda Corin en grondant tout bas.
Capac soupira comme s’il n’était pas plus heureux que cela d’être le messager de cette nouvelle.
- Caïus a fait appeler un de ses sous fifre pour me prévenir qu’ils étaient de retour à Volterra et que la « transaction » devrait se faire aux ruines du théâtre romain.
Je ne connaissais pas ce lieu, mais mon âme d’historienne remua en moi.
- Des ruines ?
Corin se tourna vers moi, il s’était bien entendu porté au-devant de Capac me laissant derrière lui en une attitude protectrice, ce qui m’agaça bien entendu, mais son sourire plein de tendresse et de malice me fit oublier mon exaspération .
- Je voulais t’y emmener, mais je n’en ai pas eu le temps. Ce sont des ruines romaines, un ancien théâtre pour être exact, pour une personne, comme toi, qui aime les villes choses, c’est le paradis.
Je me glissais contre son dos, contente même si nous n’avions pu faire cette découverte ensemble et lui roucoulais dans le creux de l’oreille.
- Hum…oui j’aime les vielles choses.
Et je ne parlais pas des ruines !
Un bruyant raclement de gorge nous rappela à l’ordre.
- Heu… je vous signale que j’entends aussi bien que vous, si vous pouviez m’épargner les démonstrations d’affection je vous en serais reconnaissant.
Corin lui décocha un sourire moqueur.
- Que faisons-nous ?
- Le bon côté des choses, c’est qu’au moins nous ne nous mettrons pas Aro à dos. Nous ne quittons pas Volterra, me dit Corin.
J’écarquillais les yeux de surprise.
- Tu n’y as pas pensée, constata mon ange déchut.
- Non.
- Nous ne pouvons pas partir comme ça, sans en informer Aro, tu joues un rôle encore mal défini à Volterra, je pense qu’Aro te laisse du temps pour te faire à ta nouvelle condition, mais ce n’est pas pour autant que tu es complètement libre de tes mouvements. C’est toujours lui qui tire les ficelles au final, de préférence sans que tu t’en rends compte. Pour moi c’est encore autre chose, je fais partie de sa garde personnel, certes il ne se déplace pas souvent en dehors de Volterra, mais je suis tenu de lui faire des rapports et surtout de rester à disposition.
Comment avais-je pu croire un instant que je pouvais quitter Volterra même peu de temps sans en référer au préalable à Aro ? J’avais perdu de vu les motivations d’Aro à mon propos, il ne m’avait pas sauvé par bonté d’âme, mais bien par convoitise, quelle idiote je faisais !
- Tu lui fais un rapport de tout ce qui se passe ? Demandais-je à Corin en fronçant les sourcils d’inquiétude.
- Bien sûr que non, dit-il indigné, tu ne me crois pas capable de dénoncer tous tes fais et gestes quand même ?
- Mais non, ce n’est pas ce que je voulais dire.
J’avais parlé trop vite et mon amoureux me jeta un regard blessé. Je m’en voulu d’avoir pensé ne serait-ce qu’un instant qu’il pouvait me dénoncer.
- Ma loyauté envers toi va bien au-delà de ma loyauté pour Aro.
- Désolé, grimaçais-je, la situation me rend un peu parano.
Corin soupira et me frotta le bras pour me monter qu’il me pardonnait.
- Caïus m’a demandé de le rejoindre avec toi il te fait dire qu’il ne te sera fait aucun mal, il grimaça devant un tel mensonge, enfin on sait ce que ca vaut.
- Il ne sert à rien de tergiverser, allons-y.
Capac eut l’air embarrassé.
- Quoi ?
- Corin ne doit pas t’accompagner, Caïus a été inflexible sur ce point.
Je déglutis bruyamment, la peur s’empara de moi, faisant monter le venin à ma bouche. Je me sentais en sécurité auprès de Corin capable de soulever des montagnes, mais me retrouver face à Caïus, avec Capac pour toute escorte c’était du suicide. Nous comptions sur l’incapacité du chef à pouvoir me nuire. Nous avions Corin et moi convenu de ne pas compter Capac comme un allier. Certes, il avait coopéré avec nous, mais seulement parce qu’il n’avait pas réussi à nous tuer d’abord et qu’il souhaitait par-dessus tout retrouver sa femme. Si Caïus la blessait de quelque manière que ce soit, pour contraindre Capac à me faire du mal nous savions tout deux ce qu’il ferait. Les choses étant ce qu’elles sont, je comptais beaucoup sur Corin pour déjouer les piège du roi fanatique, pas que je ne me croyais incapable de me défendre, mes pouvoir à eux seuls m’assuraient une protection suffisante, mais je n’étais pas férue d’intrigues de cours et pour être sincère avec moi j’avais besoin de son soutien. D’un autre côté cette idée avait de l’attrait, elle empêchait mon amour de se trouver dans la ligne de mir de Caïus il pourrait faire passer cette histoire à son avantage et crier à la trahison. J’avais une assez bonne idée de la façon dont on traitait les traitres.
- Il est hors de question que je te laisse sans protection devant Caïus, décréta Corin en voyant l’idée se faire un chemin dans ma tête.
- Tu pourrais rester en retrait et ne te monter que si ça se mettait à sentir le roussi.
Il croisa les bras sur son torse puissant, impassible.
- Que suggères-tu ? Lui demandais-je.
- Olivia, Capac te livrera à Caïus pour sauver sa femme, celui-ci bras croisés nous écoutait sans piper mot pas le moins embarrassé, ou pire, gronda Corin, comment peux-tu envisager de l’affronter seul ?
- Avons-nous le choix ? Je peux me défendre, mon don me protégera.
Il poussa un profond soupir.
- Je connais bien ses ruines, il y a un petit bosquet en haut des tribunes, Caïus t’attendra surement plus bas au centre des piliers, je m’y cacherais, mais à la moindre menace, j’accours, me prévint-il.
- Ok.
Corin nous précéda, il voulait s’assurer qu’aucune surprise ne nous attendait.
Capac se métamorphosa caché derrière un bouquet d’arbres, je ressentie la vaguelette d’énergie qui faisait onduler l’air et il émergea sous sa forme animal.
Je ne pus m’empêcher d’admirer la magnifique fourrure tacheté, j’étais tentée d’y enfouir les doigts pour voir si elle était aussi douce qu’elle en avait l’air.
Me retenant cependant, je tenais à mes doigts, nous partîmes pour rejoindre le lieu de rendez-vous. Je me forçais à ne pas aller trop vite persuader de semer Capac sinon, mais à ma grande surprise il me dépassa au bout de trois secondes, amusé j’accélérais pour voir s’il pouvait me suivre. Comprenant la manœuvre il se prit au jeu et bientôt il me dépassait une seconde fois alors je n’eus plus de limite. Bien que je mette toute la gomme pour le semer, il réussit à me suivre, certes trois mètres derrière, mais cela restait très impressionnant.
Un feulement agacé, me fit me retourner, Capac venait de s’immobiliser brusquement. Je revins en arrière, comprenant que nous n’étions pas loin. Il disparut derrière un arbre et ne sortant que la tête de derrière le tronc, ce qui me fit bien rire, il dit :
- Dans moins d’un kilomètre nous allons déboucher sur une route, il suffit de la traverser les ruine sont de l’autre côté.
Je hochais la tête.
- Nous ne pouvons pas arriver là-bas comme des fleurs, il faut que Caïus croie que tu es pieds et poings lié.
Je croisais les bras sur la poitrine et lui demandais :
- Et comment comptes-tu t’y prendre ? Demandais-je arrogante.
Il plissa les yeux menaçant et grogna.
- Ne fais pas l’erreur de me sous-estimer, tu n’es qu’un nouveau-né inexpérimenté, j’ai des siècles d’expérience et je hais les sangsues dans ton genre, cracha-t-il.
Intérieurement je me recroquevillais de peur, mais peu prudente je relevais le menton dans une attitude bravache.
- Ne me sous-estime pas non plus, je suis peut-être jeune, mais j’ai des atouts cachés dans ma manche.
Il n’avait pas besoin de savoir que mes pouvoirs ne semblaient pas marcher sur lui, je n’avais jamais vu, lors de nos deux rencontres, la plus petite trace de son âme et je ne sentais pas non plus son aura bien que jusqu'à maintenant seule celle des vampires m’étaient accessible. Je trouvais ça étrange, mais pas impossible étant donné sa nature particulière.
Il renifla méprisant.
- Nous n’avons pas le temps pour ces joutes, me fit-il remarquer justement, je dirais à Caïus que tu as accepté de venir parce que j’ai menacé de tuer Corin.
- Ca se tiens.
Il disparu à nouveau derrière le tronc et c’est ainsi que je fus donc escorté par un Capac grognant et menaçant. Il me donna même quelques coups de dents pour faire bonne mesure, mais je le soupçonnais de prendre grand plaisir à me pincer le derrière. Quiconque nous aurait observés n’aurait pu croire que nous étions dans le même camp, ce qui finalement était le cas. Comme me l’avait fait remarquer Corin Capac me vendrait sans aucune hésitation pour sauver sa femme et je ne pouvais même pas le détester pour ça.