Jusqu'à ce que la mort nous sépare

Chapitre 2 : La découverte

2461 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 10/11/2016 05:08

Il y avait tant de préjugés dans notre monde, tant de choses tellement stéréotypées par des humains en colère et écervelés que la populace devenait complètement ridicule. C’est ça que je haïssais, que j’exécrais, rien d’autre n’aurait pu me dégouter plus. Pourtant, il y avait tant de chose qui existe, mais qui restaient secrètes, et qui me dégoûtaient encore plus. Ce que j’étais, par exemple. Je me le répétais sans arrêt : j’avais honte de moi-même, de ceux qui m’avaient « élevée ». Si on peut appeler élever un enfant que de le laisser se débrouiller seul dans un immense palais, alors qu’il n’était âgé que de cinq ans d’années humaines.

Pendant les six ans où j’avais vécu enfermée, où l’on avait souillée mon âme de mensonge et de paroles affables, je m’étais rendue compte avec une certaine violence, que j’étais différente. Je n’allais pas à l’école ; il y en avait une, à Volterra, on m’interdisait d’y aller. Je vivais dans un beau palais. J’avais de beaux habits. Mais qu’aurais-je donné pour éviter à tout prix ces moments où de pauvres touristes s’égaraient devant la beauté de notre palais, et se voyaient dévorés par eux ; cruels vampires.

Il y avait de beaux jardins, et il y brillait en permanence un soleil éblouissant. Entourés d’un mur de pierre qui m’affirmait que si j’osais m’enfuir, rien ne se passerait bien pour moi. Pourtant, j’ai osé m’enfuir. Oh, oui, tant de fois. C’était couverte de boue qu’on me ramenait aux pieds du maître des lieux : Aro.Il m’adressait sans  arrêt ce sourire angélique qui en avait trompé plus d’un. L’instant d’après, j’étais fouettée, attachée, torse nu contre un mur de pierre, subissant la sentence attribuée à mon échappatoire. La dernière fois que j’avais essayé de m’enfuir, une semaine auparavant, on m’avait retrouvée, et j’avais récolté mes flagellations habituelles. J’aurais dû renoncer, j’aurais dû comprendre que cette torture aurait pu être terminée si j’étais restée sagement aux ordres des Volturi.

Non, jamais. Pour moi, la torture n’avait pas été d’être blessée, fouettée, giflée, affamée pendant des jours en guise de punition. Ma vraie torture était qu’il m’était tout simplement impossible de rester là haut, à contempler les massacres, à voir des vies innocentes sacrifiée pour satisfaire un désir capable d’être comblé autrement. Je m’étais de nouveau échappée, deux jours plus tard. Mes blessures, dans mon dos, avaient à peine eut le temps de guérir, et les péripéties que j’avais traversé n’avait fait qu’aggraver mon état. Fièvre, courbatures, froid. Mais j’avais lutté, jusqu’ici, où la mort me berçait contre elle comme un nouveau-né. Pourquoi ici ? Je l’ignorais. Mes pas m’avaient guidée. Ma peur m’avait emmenée jusqu’ici. Avant que je saute, néanmoins, il m’avait parut reconnaître la végétation propre aux abords de Seattle.

J’avais entendu parler d’un autre clan vampire vivant ici, ne se mêlant pas aux cruelles expériences se déroulant à Volterra.

Et sans le vouloir, mes jambes avaient fuis jusqu’ici.Mais j’ai préféré mettre fin à ma vie, plutôt que de retourner là-bas. Plutôt que de subir de nouveau les coups de fouets, le bruit discret de mon sang se dispersant à terre…Un geignement me sortit à moitié de ma torpeur. Ce n’était pas moi qui avais gémit. Mais ce son avait réussit à brouiller ces images d’horreur et à me forcer à sortir du coma. Je n’aurais jamais cru que la mort ferait mal. Mon dos me faisait souffrir, mes bras, mes jambes, mon cou, tout mon corps me faisait mal.

- Qui a-t-il, Edward ?

Un son étouffé dans le brouillard qui engloutissait mon esprit.

- Excuse-moi, Carlisle, d’avoir perdu mon sang-froid. C’est juste que…ses pensées sont…

Un silence.

- Exprime-toi, je t’en prie.

Le silence dura encore un instant.

-…disons que ça à été l’enfer, pour elle.

J’entendais à peine ces voix qui paraissaient si lointaines.

- Est-elle consciente ?

- Elle oscille entre conscience et inconscience.

Le brouillard s’épaississait de minute en minute. Allais-je enfin m’en aller ? La mort prendrait-elle enfin ce qui lui est dû ? Felix et Démétri m’avaient-ils rattrapée ? Etais-je de retour à Volterra, attendant de me réveiller pour subir à nouveau la torture ? Je sentais ma respiration calme, posée. Comme si j’étais impassible. Mais mon esprit tourbillonnait dans une tempête de question.

La douleur provoquée par le fouet s’atténua soudain. La cicatrisation commençait. Enfin. Mais bon, j’avais toujours mal partout. Je m’étais certainement cassée deux ou trois os à vouloir sauter du haut d’une falaise. J’espérais néanmoins avoir réussi à me tirer des pattes de ces sales Volturi. Je ne me considérais certainement pas comme telle. Bien qu’ayant grandi et vécu au château de Volterra, je ne considérais pas les vampires y habitant comme ma famille.Oh, et après tout, qu’est-ce que ma mort allait changer chez Aro ? Il tourmenterait une autre personne. Il se délecterait de la souffrance d’un autre.

Quelque chose changea en moi. Si j’avais fait tout ce chemin pour me laisser mourir par la suite, ma fuite n’aurait servi à rien.Pendant que je cherchais la force de sortir du néant, je sentais vaguement le brouillard se dissiper, élargir mon esprit, éclaircir mes idées. Je pouvais enfin sentir des choses autour de moi.

Je sentais quelque chose de doux sous mon corps blessé, comme un matelas, quelque chose de confortable.Ma tête reposait sur un oreiller de plume qui soulageait la douleur de ma nuque. Un dernier constat me rassura ;  je n’étais pas attachée. Lorsqu’on me ramenait au palais, que je sois blessée ou non, on me jetait dans un cachot froid, sombre, pieds et poings liés par de lourdes chaines ; un avant goût de ma sentence prochaine. Si je n’étais pas, en ce moment, blessée par le fer de ces chaînes que j’avais si souvent portée, peut-être que finalement, je n’étais pas de retour en enfer.

Viens, il est temps, me souffla mon subconscient, réveilles-toi.

En effet, il était temps.

M’attendant à ce que la lumière m’éblouisse, j’ouvrais lentement les paupières. C’est avec soulagement que mes yeux s’habituèrent à la douce obscurité qui régnait dans la pièce. Rien à voir avec la noirceur sombre et opaque des cachots de Volterra. Je clignais des yeux, soulagée d’être enfin debout.Enfin, si on peut appeler ça comme ça…

Je poussais un long soupir tandis que je sentais mes membres picoter de douleur. Je posais la main sur le drap qui recouvrait mon corps ; jamais, au grand jamais je ne m’étais sentie si bien, si calme, sans une once de peur me nouant le cœur. Et même si j’étais blessée, je me sentais en sécurité.Même si je n’avais aucune raison de croire que je l’étais.Soudain, je me rendis compte que j’étais…Oui, j’étais nue.

Je poussais un petit glapissement – complètement ridicule, et remontais le drap vers moi en me redressant brutalement.Tête en l’air, Jynn !Ma tête fut soudain martelée par le poing sans  pitié de la migraine. Bien sûr, que je n’étais pas en forme ! Quoi de plus normal après avoir chuté du haut d’une falaise de trente mètres et s’être à moitié noyée ?Et pourquoi étais-je dont nue ?

La réponse m’est venue immédiatement ; on avait dû me déshabiller pour pouvoir me soigner. Mes joues rougirent d’une honte non contenue.Grâce à mon ouïe particulièrement développée, j’entendis quelqu’un monter des escaliers, d’un pas léger et tranquille, et se rapprocher dangereusement de la porte. Mon cœur se serra de peur – et de gêne, surtout, et j’enveloppais mon corps frêle dans le drap si doux. Quel beau spectacle j’offrais ! Complètement vulnérable, morte de peur, et recroquevillée dans un lit qui me paraissait désormais immense. J’étais l’exemple même du courage !Je déglutis péniblement lorsque j’entendis les pas s’arrêter pile devant la porte. 

Faites qu’elle ne s’ouvre pas, je vous en prie. A mon grand soulagement, elle ne s’ouvrit pas. Deux coups secs retentirent contre le bois de la porte – joliment ornée, par ailleurs.

- Excuse-moi, souffla une voix féminine, et douce, de l’autre côté du battant, es-tu réveillée ?

Je cessais de respirer, et mes yeux s’agrandirent de peur. Si j’étais tombée sur une famille humaine, ils allaient se poser des questions, m’emmener à un poste de police, où quelque chose de semblable.

Par ailleurs, deux indices évident m’indiquaient que je n’étais pas tombée sur n’importe qui ; premièrement, si des humains m’avaient trouvée, ils m’auraient sans doute emmenée à l’hôpital sur le champ – quelle belle jambe ça m’aurait fait !Deuxièmement, lorsque j’inspirais de nouveau, il était évident que l’odeur de la personne se trouvant de l’autre côté de la porte n’étais pas humaine.Cela ne me relâcha pas, bien au contraire.

- O…oui, murmurais-je, tendue.

- Puis-je entrer ? répondit la voix douce, dans laquelle aucune trace de méchanceté, ou de sournoiserie ne perçait.

- Non ! m’écriais-je en remontant un peu plus le drap sur moi.

Un petit rire coquin me parvint. Je fronçais les sourcils. M’étais-je trompée ?

- Regardes sur la chaise du pupitre, me lança la voix.

Je cherchais la chaise en question, et mes yeux, habitués au noir, analysèrent la pièce. C’était une petite chambre chaleureuse aux murs peints de rouge sombre et de blanc ; une vieille petite armoire trainait dans un coin, et un grand miroir sur pied me faisait face, me révélant mon visage inquiet et orné de quelques ecchymoses. Le lit prenait presque toute la place, tellement il était imposant. Il était semblable à ceux du château de Volterra : à baldaquin, orné de lourds rideaux sombres et poussiéreux. Sauf qu’il n’avait pas l’air poussiéreux, lui.Mes yeux se posèrent en face du pupitre en question, joli bureau en bois datant de deux siècles environ. Sur sa large chaise en bois, trônaient des sous-vêtements, ainsi qu’une robe en coton blanc. Parfait.

Je me précipitais vers eux, et les enfilais aussi vite que possible, avant de retourner me protéger sous le drap tout doux.

- Puis-je entrer, désormais ?

La voix était calme, posée, et ne trahissait pas l’impatience.

- Oui.

J’avais raffermis ma voix. Pas question de leur montrer que j’avais peur.

Alors la porte s’ouvrit, et j’ouvris de grands yeux. 

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