Pour le bien de l'humanité

Chapitre 5 : Le cri des armes

1577 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour 04/09/2020 11:02

Depuis combien de temps le combat durait-il ? Sans avait perdu le compte. Papyrus et Undyne, en proie à une violente crise de larmes, étaient pelotonnés contre lui. Le stress avait gagné la plupart des monstres qui ne parlaient plus, ne bougeaient plus. A quoi bon ? Tous savaient que la situation était critique et que si Toryne et les rares soldats encore debout tombaient, ils étaient tous condamnés.


Le jeune squelette baissa la tête vers son frère, toujours caché dans sa grande couverture. Il tremblait sous ses doigts et il ne savait pas quoi y faire. Même s'il gardait un semblant de contrôle sur la situation pour lui, Sans était terrorisé juste comme tous les autres. Il passa une main sur la joue de son frère pour le rassurer. Cela faisait beaucoup trop pour lui, pour eux deux. Toute leur vie volait en éclats et il ne pouvaient qu'assister impuissants à la chute de leur univers tout entier.


Les coups de feu se rapprochaient dans leur direction. Il ne savait pas si c'était lui, mais il semblait à Sans que les éclats de voix étaient de moins en moins nombreux. Le petit squelette se releva, nerveux. S'ils devaient fuir, il n'hésiterait pas une seconde à abandonner toutes les personnes présentes pour sauver son frère. Il était sans doute la seule personne qui lui restait à présent. 


Entre les branches qui recouvraient la clairière, il repéra les derniers combattants. Toryne tenait le front vaillamment, accompagnée de quelques autres monstres qui avaient réussi à voler des fusils et les retournaient contre les hommes. Sans en compta cinq au total, sur les douze partis les défendre. C'était bien trop peu. Leurs opposants étaient encore nombreux, il pouvait voir leurs formes menaçantes à la lisière de la forêt. La mère d'Undyne envoya un violent sort de recul qui repoussa la première ligne, mais cela ne suffit pas à les dissuader d'avancer. Ils lui tenaient tête.


"Maman va les battre, entendit-il dire Undyne à Papyrus. Ma maman, c'est la plus forte de toute la Garde Royale. Quand je serais grande, je serais aussi forte qu'elle."


Si tu deviens grande un jour, songea Sans, d'humeur macabre. Néanmoins, la petite fille réussit à calmer temporairement son petit frère, concentré sur ses histoires. Papyrus avait cette faculté étonnante de se lier d'amitié avec presque n'importe qui ou quoi. Il ne voyait pas le mal chez les autres et ne comprenait pas la guerre, ce qui le rendait plus vulnérable que les autres à celle-ci. Plus le temps passait, plus cette personnalité s'affirmait. Son père craignait de le laisser sortir seul pour cette raison. Avec cette mentalité, il aurait pu simplement vouloir parler aux humains et se faire tuer sans comprendre ce qui lui arrivait. Sans craignait qu'il ne veuille devenir garde royal plus tard. Non pas qu'il ne croyait pas en ses capacités, Papyrus était une vraie force de la nature lorsqu'il le voulait, mais tout simplement parce que son frère serait incapable de tuer quelqu'un de sang froid.


Une détonation plus forte que les autres lui fit relever les yeux. Toryne vacilla et il crut apercevoir des traces de sang dans la neige. Elle tomba à genoux et se serra l'épaule, essoufflée. Sans mit du temps à remarquer qu'il ne restait plus qu'elle sur le champ de bataille. Des tas de poussière s'évaporaient sous le vent glacial de l'hiver. 


Undyne se rapprocha de lui. Des soldats s'approchaient de la garde royale, épée à la main. Ils allaient l'abattre. La guerrière se releva soudainement et frappa deux hommes de sa lance, avant de se planter quelque chose dans la jambe. De la détermination, songea Sans en reconnaissant l'une des seringues si familières de son père.


Enragée, elle réussit à transpercer trois autres hommes avant qu'un sniper ne la fauche violemment en pleine action. Sans serra la tête d'Undyne contre lui alors qu'une balle traversait le crâne de sa mère. Elle tint debout encore quelques secondes avant de s'effondrer dans la neige. Bientôt, comme les autres, son corps se transforma en cendres noires, trop noires sur la poudreuse blanche.


Sans se plaça devant la petite fille, qui tremblait de tous ses membres. C'était terminé. Elle était morte. Il n'y avait plus personne pour les protéger. La petite hoqueta. Elle l'avait lu dans ses yeux, dans son geste. Elle savait. Mais elle ne pouvait pas pleurer, leur position était trop proche des soldats. Sans s'accroupit près d'elle.


"Tout va bien se passer, d'accord ? Je... Je sais que c'est dur, mais tu ne dois pas pleurer. Sinon, ils vont venir pour nous.

— Mais, ma... maman, ils l'ont... 

— Je vais m'occuper de toi. Je... Tu vas rester avec Papyrus et moi. On va s'en sortir. Je... Je te le promets."


Elle explosa en sanglots dans ses bras. Sans la serra contre lui pour essayer d'étouffer ses hoquets de détresse. Il leva les yeux vers Papyrus. Le petit squelette ne comprenait pas pourquoi elle pleurait, mais Sans le connaissait suffisamment pour savoir qu'il allait lui aussi se mettre à pleurer, simplement par empathie. Il ouvrit un deuxième bras et son petit frère courut se réfugier contre lui.


Plusieurs blessés s'étaient redressés dans leurs couchettes de fortune. La mort de Toryne se répandit comme une traînée de poudre et la panique gagna les coeurs de chacun. Le premier à craquer fut un jeune soldat qui ressemblait à une tortue. Undyne avait expliqué à Sans qu'il avait été traumatisé par la guerre. Le bruit des balles avait réveillé ses souvenirs et, complètement dément, il se jeta vers la sortie. Personne ne bougea pour l'arrêter, abasourdi par son acte. Des tirs le cueillirent dès qu'il passa le pas de la caverne.


"Il y en a d'autres là-bas ! cria un humain."


Sans écarquilla les yeux et regarda autour de lui, effrayé. Ils étaient pris au piège, il n'y avait aucun échappatoire. Le jeune squelette tira Papyrus et Undyne sur le côté, pour éviter la première avalanche de balles de fusil. Les deux cadets se mirent à pousser des cris perçants alors que l'enfer se déchaînait dans la cavité rocheuse. Les monstres trop faibles pour se lever périrent tous les uns après les autres, sous leurs yeux. Ceux qui avaient eu l'intelligence de se coller contre les murs commençaient à se battre entre eux pour s'enfuir les premiers. Plusieurs essayèrent, aucun n'atteignit l'entrée. Les hommes envahirent l'espace. Excités par l'adrénaline et le combat récent, ils tirèrent sur les monstres sans aucune pitié, dans un concert de hurlements de peur et de rage. 


Sans, recroquevillé de l'autre côté, sentait son coeur bondir de peur dans sa poitrine. Le mur leur offrait une faible couverture, mais ils ne seraient plus invisibles très longtemps. Papyrus avait enfoui sa tête dans son manteau et hoquetait de peur, Undyne, terrorisée, ne retenait plus le torrent de larmes qui dévalait ses joues. Devant eux ne s'étendait plus qu'un tapis de cendres. Personne n'avait survécu. Comment l'auraient-ils seulement plus ? 


Les hommes ne remarquèrent pas les enfants immédiatement, camouflés juste à côté de l'entrée. 


"Encore un groupe de moins. On a eu quelques gardes royaux, Asgore va être bien affaibli après ça.

— Ne crie pas victoire trop vite, le plus gros de ses troupes est toujours avec lui. Personne n'a réussi à percer son front encore.

— C'est qu'une question de temps, les magiciens arrivent bientôt."


Le roi était toujours vivant, songea Sans, toujours en maintenant les enfants contre lui. Paralysés par la peur, ils s'étaient enfin tû. C'était bon signe. Tout espoir n'était peut-être pas encore perdu. D'eux tous, Asgore était un guerrier dont la renommée n'était plus à prouver. Il maîtrisait les armes, une magie destructrice et excellait dans l'esquive. Avec Toriel, sa femme, la reine, maîtresse de la diplomatie et du feu, ils étaient imbattables. Le père de Sans, Gaster, ne cessait de le répéter. Se pouvait-il que ce dernier soit à leurs côtés ? 


"Là ! Il y a trois gosses !"


Sans se figea. Il leva la main un os bleu fin vint transpercer sans aucune difficulté le donneur d'alerte de part en part. Surpris, le soldat hoqueta avant de se mettre à cracher du sang. Une force étrange lui parcourut les mains. Tuer était dangereux. Une fois que l'on commençait sur cette voie, recommencer devenait bien plus facile. 


Choqués par la mort de leur camarade, les autres soldats les encerclèrent. Il était encore trop jeune pour utiliser la magie plusieurs fois d'affilée. Ce petit miracle lui avait certes accordé quelques secondes de répit, mais c'était terminé. Les armes se tournèrent vers eux, vengeresses.


Le squelette, mû par l'instinct de survie, sentit une forte aura le traverser. Il fit confiance à ses sens et l'étendit jusqu'à Papyrus et Undyne. Il ferma les yeux et laissa le pouvoir exploser. 


Les soldats tirèrent, mais ne touchèrent jamais leur cible. Sans et les deux enfants venaient de s'évaporer sous leurs yeux.


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