Pour le bien de l'humanité

Chapitre 20 : - GASTER -

1946 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour 07/11/2020 11:16

"Gaster ! Gaster, ouvre les yeux ! Bon sang ! Doggalicia, rapport !

— Dogerina et Boomer sont morts. J'ai vu Blast partir après le petit squelette. Les humains ont abandonné la poursuite."


Gaster entrouvrit difficilement les yeux. Assis contre un rocher, il eut grand mal à reprendre ses esprits. Son cerveau l'avertit d'une lésion au niveau de la poitrine, mais ne parvenait pas à transformer le message en douleur, ne lui provoquant qu'un mal de tête aigu et malvenu. Un des autres effets secondaires de son opération mentale. Il se redressa dans un grognement mauvais et inspecta les dégâts d'un geste expert. Il avait perdu quelques points de vie dans l'opération, mais par chance, son fils ne faisait pas -encore- beaucoup de dégâts.


Il repoussa délicatement la main d'Asgore en train de lui fournir les premiers soins et se releva. Hors de question de se laisser aller à de la faiblesse en pleine crise. La situation était catastrophique. Cette bourde diplomatique pouvait leur coûter le traité de paix sur lequel le roi, le scientifique et la garde royale travaillait si dur depuis plusieurs mois.


"Tu es blessé, le réprimanda le roi. Ne fais pas l'enfant."


Il poussa un lourd soupir et tourna le dos pour bouder. La chef de la garde royale les dévisagea tous les deux avant d'adopter un ton plus autoritaire. Sur ses gardes, épée toujours au clair, elle décida de reprendre les choses en main.


"Votre Majesté, nous devons regagner le camp. Les bois sont trop dangereux. Blast fera un rapport dès que possible. Nous ne savons pas si les humains ont été touché par l'attaque de la cible, ne risquons pas votre vie inutilement.

— Nous devons retrouver Sans, s'interposa Gaster. S'il était là, ça veut dire que la reine et les autres enfants sont dans les parages. Il est essentiel de remettre la main sur l'enfant humain. Nous avons besoin de sa détermination. Cela passe avant tout le reste.

— Sauf votre respect, docteur, s'énerva le soldat, cette affaire n'est pas urgente. L'évacuation de Sa Majesté passe avant tout le reste. L'enfant ne tiendra pas longtemps face à Blast, c'est le meilleur limier de la garde royale.

— Oui, juste comme vous l'avez montré la première fois dans les bois, ce qui nous a plongé dans cette situation en premier lieu ! Asgore, ils sont incompétents ! Avec ma magie, on pourrait le tracer en quelques heures !

— Vous pouvez parler de compétence, alors que vous n'êtes pas capable de tenir tête à votre propre fils !"


Asgore serra les poings.


"Ça suffit ! cria-t-il pour couvrir leur voix."


Le squelette et la femme-chien se mirent immédiatement au garde-à-vous, toujours hostiles l'un envers l'autre. Le roi se massa les temps comme pour se forcer à réfléchir avant de relever la tête vers eux. Il regarda un moment autour de lui avant de prendre une décision.


"Doggalicia a raison. Nous ne pouvons pas rester là et risquer d'aggraver les choses. La dernière chose dont nous avons besoin et que l'un de nous trois tombe entre leurs mains. En particulier toi, Gaster, ajouta-t-il comme s'il grondait un enfant. J'ai toute confiance en votre général pour retrouver le jeune squelette, et peut-être même ma femme par la même occasion. Il ne sert à rien d'agir dans la précipitation."


Le scientifique poussa un grognement de mécontentement mais n'opposa pas résistance. Asgore savait qu'il n'oserait pas aller contre sa volonté. La garde royale lui lança un regard victorieux qui ne lui plut vraiment pas avant d'ouvrir la voie pour rentrer au camp.


Elle opta pour un voyage couvert, plus long mais plus sûr. Ils marchèrent près de deux heures dans un silence pesant, en essayant d'éviter les racines cachées et les orties qui leur irritaient les chevilles. Les sentinelles du camp les virent malgré tout arriver de loin et sonnèrent l'alerte afin qu'une équipe vienne à leur rencontre, accompagnée de quelques soigneurs. Gaster laissa le plaisir aux autres de se faire pomponner et traça jusqu'à son laboratoire sans même leur accorder un regard.


Dès qu'il passa les portes du laboratoire, ses suivants surent que ce n'était pas le bon moment d'entamer une discussion. La plupart s'écartèrent de son chemin la queue entre les pattes, les autres firent mine de s'intéresser brusquement à un quelconque dossier qui traînait ou à un pot de fleurs. Gaster insulta leur médiocrité entre ses dents avant de pénétrer dans son coin travail. Il claqua la porte de toutes ses forces pour bien faire comprendre à tous les crétins qui voudraient lui faire perdre son temps d'y réfléchir à deux fois.


Ses orbites balayèrent rageusement le contenu de la pièce avant de se poser sur son bureau, plein à craquer de dossiers inutiles. Parfait. Il poussa un cri sauvage et renversa l'intégralité du contenu du morceau de bois à terre, puis le meuble lui-même à grand coups de pied. Cela ne servit à rien, si ce n'était calmer temporairement cette frustration qui lui rongeait ses entrailles inexistantes.


Il ferma un instant les yeux et se frotta les tempes pour calmer son mal de crâne persistant. Il devait se calmer et penser logiquement. Dans son état, Sans n'irait pas bien loin, mais Gaster le savait plus malin que ces idiots de la garde royale. Le seul avantage de cette poursuite désastreuse était l'éloignement de son frère. Si la garde fouillait les bois aux alentours et débusquait Papyrus, il ne serait pas bien dur de le faire rentrer de lui-même avec quelques menaces. Il ne le laisserait pas tomber comme ça.


A bien y réfléchir, Sans était-il vraiment seul ? Il n'avait vu que lui, mais il n'était pas exclu que son cadet soit caché dans les parages, même s'il en doutait. Son fils paraissait en pleine détresse et n'avait pas maîtrisé ses pouvoirs, signe qu'il devait avoir fait une crise récemment. Le stress, sans doute. L'attaque était encore faible, l'enfant ne lui avait pas fait trop mal, confirmant au moins une des ses théories sur le choc psychique nécessaire pour déclencher des sorts plus destructeurs. La peur n'était pas un facteur assez important pour arriver à son objectif.


Il plaça ses mains dans son dos et se mit à faire les cent pas dans la pièce. Si seulement Toriel ne s'en était pas mêlée ! Elle avait tout gâché, et il n'arrivait pas à croire qu'Asgore lui trouvait encore des excuses. Plusieurs têtes avaient sauté pour haute trahison pour bien moins que ça. Elle masquait aussi bien ses traces. Les pisteurs avaient localisé le tunnel par lequel elle avait pris la fuite, mais n'avaient pas pu suivre sa piste dans la neige. Les chutes de la nuit avaient couvert leur échappée. Pourtant, avec quatre enfants sur les bras, elle ne pouvait pas être bien loin. Maintenant que Sans était réapparu, la théorie se confirmait. Mais où pouvait-elle se terrer ? Elle était bien trop soigneuse et bienveillante pour les laisser dormir dans la neige.


Il s'approcha de la grande carte dans le fond de son laboratoire. Son regard buta sur son reflet dans le miroir disposé au centre de celle-ci. Il n'était pas encore tout à fait habitué à ces deux énormes cicatrices de part et d'autre de son visage. Plus inquiétant, un liquide rouge coulait de son nez. Il passa une main dessus et tira une grimace. Du sang. La détermination avait des effets secondaires surprenants. Des monstres qui saignent comme des humains, c'était bien une première. L'écoulement n'était que superficiel, aussi il n'y accorda pas plus d'attention et centra son attention sur la carte.


Il traça un grand cercle rouge là où s'était déroulé leur rencontre avec les humains dans la forêt et inspecta scrupuleusement les environs à la recherche d'une planque où la reine aurait pu trouvé refuge. En admettant le fait que Sans n'avait sans doute pas marché plus de deux heures et venait de l'est, son doigt traça une ligne droite jusqu'à un point plus clairsemé dans la forêt.


"L'ancien camp... Bien sûr."


Une décision risquée. Les monstres avaient quitté ce camp à la hâte après une charge des humains des villages situés à quelques kilomètres à peine derrière eux et qui avait coûté la vie à beaucoup d'entre eux à cause de la couverture des arbres. L'endroit était dangereux et difficile d'accès, mais un champ de force pouvait être activé autour depuis l'ancienne résidence des Dreemur. Toriel ne laisserait pas tomber sans se battre.


Il entoura le village en rouge et sortit son téléphone portable. Il composa le numéro d'Asgore et attendit patiemment que le roi décroche après quelques sonneries.


"Gaster ! Bon sang, mais où es-tu passé ?

— Laboratoire, répliqua-t-il froidement. Je sais où est cachée Toriel et les enfants.

— Tu en es sûr ?

— Certain. Elle est dans l'ancien camp, mais elle est bien protégée. Elle a pour ainsi dire tout l'arsenal de protection de l'époque sous la main. Il me faut un escouade de la garde royale, pas des idiots, les meilleurs guerriers. Elle ne va pas se rendre aussi facilement. Départ cette nuit.

— Gaster... Tu devrais te reposer, se plaignit le roi.

— Tu en seras ou non ? l'ignora-t-il copieusement.

— Oui...

— Bien. A ce soir."


Il raccrocha sans lui laisser la possibilité de répliquer. Il n'avait pas le temps pour ça. Son regard se posa sur l'immense extracteur à détermination au-dessus de lui. Il restait le problème de Sans. Et s'il le privait temporairement de détermination grâce aux ondes ? Les deux frères tomberaient inconscients en quelques secondes. L'humain résisterait peut-être plus longtemps, mais cela ferait des dommages. Un fin sourire éclaira ses lèvres. S'il parvenait à injecter un peu de détermination à la reine, cela suffirait peut-être à l'affaiblir temporairement et l'empêcher d'agir. Le seul problème était que le rayon allait également le toucher. Il allait devoir faire très attention à ce que ça ne tombe pas entre d'autres mains. Et cela commençait par ne pas en parler à Asgore. Il n'apprécierait forcément pas que le scientifique s'amuse avec des forces qu'il ne contrôlait pas entièrement.


Si l'opération était un succès, les enfants pourraient être livrés le soir-même, afin d'éviter que la situation diplomatique ne s'aggrave. Ensuite, leur avenir serait placé dans les mains de Sans. Mais il ne devait pas brûler les étapes. Il devait aussi penser à l'enfermement des enfants dès leur arrivée au camp. Il leur avait donné bien trop de libertés et il était grand temps d'intervenir.


Il redressa son bureau et ramassa le téléphone de service. Il tapa le numéro du service de mécanologie. Une voix hésitante lui répondit.


"Numéro vingt-huit à l'appareil, que... Que puis-je pour vous docteur Gaster ?

— J'ai besoin de pièces et d'un kit de construction, ainsi qu'un de vos ingénieurs. Immédiatement.

— Très bien. Je vous fais livrer ça dans dix minutes.

— Cinq, ordonna-t-il avec autorité.

— C...Cinq, oui, bien sûr !"


Il raccrocha et posa ses deux mains sur son menton.


"Bravo Sans, dit-il à voix basse. Tu viens de tous les trahir. Je savais que je pouvais avoir confiance en toi."


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