Vivre

Chapitre 7 : Ne t'envoles pas sans moi

6306 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 14/06/2016 00:03

En l'espace d'un instant terriblement infime, tous les efforts de Yami pour aller de l'avant ainsi que sa joie de vivre, s'envolèrent en fumée à la simple vue du corps de son meilleur ami étendu au sol. Cette surprise de le voir ici, laissa rapidement place à cette peur de le perdre véritablement. Tout était allé si vite, si rapidement et dans un silence de mort, presque assourdissant. Le médecin de garde de Saru, s'étant évidemment attendu à ce genre d'éventualité, s'était chargé de secourir le jeune homme par ses propres moyens. Pour cet homme, nul besoin de s'inquiéter outre mesure, ces crises étaient commune dans le métier et surtout concernant cette maladie. Seulement, malgré le professionnalisme de ce médecin, Yami était totalement incapable de garder son calme et d'arrêter de pleurer. Son cœur en pleine confusion devant cette scène, ne lui offrait la possibilité de relativiser la situation, la plongeant dans une inquiétude et une folie sans pareille.

Alors qu'elle souhaitait rejoindre son meilleur ami afin de lui parler, de l'aider à ouvrir les yeux grâce au son de sa voix, la jeune fille se retrouvait bloquée par son père ainsi que Ham. Elle se fichait complètement de cet homme, de ce médecin qui visiblement était qualifié pour sauver son cher Saru. Tout ce que souhaitait Yami, c'était rejoindre son ami en se débarrassant de tous ces gêneurs. Toute fois, la jeune demoiselle avait beau se débattre de toutes ses forces et dans tous les sens, ni Ham et encore moins Kaku ne desserraient leur emprise sur la jeune fille. Ils se doutaient tous les deux que voir ce garçon dans un tel état, la rendait sûrement folle de crainte et de tristesse. Après tout, c'était grâce à l'aide de Saru si aujourd'hui, Yami se retrouvait ici à pratiquer le sport de ses rêves. Elle lui devait tellement, il n'était pas question pour elle de l'abandonner et de le laisser mourir ainsi.

  • Saru, Saru !! Lâchez-moi tous les deux, laissez-moi rejoindre Saru tout de suite !
  • Tu n'es pas dans ton état normal, Yami. Tu as besoin de reprendre tes esprits et de te calmer. Le médecin de Saru peut parfaitement s'occuper de l'état de ton ami sans ton aide, alors calme-toi tout de suite ! Ordonna le père de famille avec une certaine autorité, regardant la jeune fille dans les yeux sans la quitter.
  • Je m'en fous complètement de ça ! Je veux être auprès de Saru tout de suite, vous m'entendez tous les deux ?!

 

C'est à cet instant bien précis toute fois, qu'un geste malencontreux eut l'effet de complètement calmer Yami. Une gifle en plein visage, donnée par Bou en personne qui exprimait un sérieux ainsi qu'une colère bien plus intense que son père ou même quiconque dans les environs. Elle qui avait vu son élève être aussi douée, tant investie dans son travail, la voyait maintenant perdre ses esprits. Évidemment qu'elle souffrait pour elle, car la crainte de perdre un être cher, le professeur connaissait ça mieux que quiconque et compatissait pour son élève. Seulement, elle ne souhaitait pas la voir sombrer dans le désespoir, dans la folie comme ce fut son cas quelques années plus tôt. A ce geste, bien que la jeune fille était maintenant calmée et ne s'agitait plus dans tous les sens, elle était choquée et surprise. Jamais elle ne se serait attendue à recevoir une baffe venant de son professeur, et encore moins de ce professeur.

  • Yami, tu vas me faire le plaisir de te calmer immédiatement... ! Crois-moi, je sais ce que tu ressens en ce moment. La peur de perdre un être cher, la peur de le voir s'envoler et qu'il nous laisse à tout jamais. Je connais cette peur, crois-moi car c'est elle qui m'a forgé durant des années. Mais tu ne dois pas t'abandonner à ce sentiment, tu dois te battre, rester forte pour montrer que tu te bats pour ton ami. Tu ne peux pas céder au désespoir, tu dois combattre l'adversité, comme tu l'as toujours fais depuis ton arrivé ici, est-ce que tu comprends ?!
  • Professeur Asane... Murmura avec fragilité la demoiselle, avant de venir se blottir contre son professeur sans aucune retenue pour s'abandonner à des larmes de chagrin. Bou resserra son étreinte autour d'elle, pouvant comprendre tous les sentiments qu'elle ressentait en cet instant.
  • Ça va aller, Yami. Tout va bien se passer. Mais tu dois rester forte pour ton ami, tu dois continuer de te battre pour qu'il voit la chance qu'il a d'avoir une amie comme toi à ses côtés, d'accord ?

 

Tandis que le pauvre Saru était toujours plongé dans l'inconscience, dans un genre de coma, bien sûr à cause de sa maladie, une vision ne tarda pas à se présenter à son esprit encore endormi. Il ne pouvait toujours pas percevoir les échos du monde réel, et encore moins les pleurs et les lamentations de sa meilleure amie, morte d'inquiétude à son sujet. Étrangement et contre toute attente, le jeune homme se sentait simplement... Bien et serein. Rien ne venait perturber sa plénitude, alors qu'un silence aussi calme que la surface d'un lac venait de s'installer dans son cœur et dans son esprit. Jamais au cours de son existence, Saru ne s'était senti ainsi, sans le moindre besoin de se soucier du plus petit problème existentiel. Ils avaient tous disparus de sa mémoire, ainsi que sa meilleure amie. Le monde réel n'existait plus, son existence passée n'existait plus. Juste l'instant présent, juste cette irrésistible sensation de bonheur, de calme qui inondait toujours plus son être.

Ce n'était pas uniquement au niveau des ressentis que cette vision se passait, mais aussi au niveau oculaire. Face au jeune homme se dressait un panorama d'un bleu azur comme il n'en avait jamais vu auparavant. En un sens, tout ceci était complètement irréaliste, mais il ne s'en souciait guère. Se contentant simplement de se laisser bercer par ces sensations, par cette vue magnifique et pourtant si proche de son être. Au contraire de son habituel manière d'admirer le ciel depuis la terre, ce dernier se trouvait juste devant lui en l’occurrence. Mieux encore, Saru se trouvait juste au milieu du ciel, planant comme un ange au sein de celui-ci.

Il n'avait pas besoin de se retourner pour remarquer qu'en dessous s'étendait des kilomètres de vide vers le bas de sa planète bleu. Pourtant, cette impression de vide ne l'impressionnait pas du tout, ne l'effrayait aucunement, se sentant en confiance ici. Laissant cette quiétude s'installer progressivement dans son cœur, Saru commença à sentir dans son dos, des ailes blanches pousser sans lui causer la moindre douleur. Au contraire même, en les sentant se déployer ainsi, le jeune homme put ressentir un soulagement mérité. Comme si tout ceci au fond, n'était autre que la manifestation d'une justice, d'une normalité, d'un juste retour des choses.

Il était loin le temps de son existence terrienne, de sa vie en tant que Saru. Tout ceci était si loin derrière lui, et pourtant si proche en même temps. Le jeune homme n'avait aucune idée de sa véritable identité ici, et au fond cela lui était bien égal sans même qu'il n'ai l'envie d'essayer de comprendre pourquoi. Quel intérêt de se soucier de ce genre de chose quand ce bien-être étreignait son cœur de cette manière, avec tant de tendresse ?

Seulement, alors que ses ailes maintenant lui permettaient un voyage au travers de ce monde aux frontières désormais mortes à ses yeux, une main vint lui attraper délicatement la jambe pour le stopper dans son élan. Gêné par cet obstacle, le jeune homme tenta de faire de son mieux pour s'en détacher, secouant la jambe en y mettant toute sa volonté, sans pour autant en être capable. Il n'y avait qu'une main, rien de plus au bout et pourtant celle-ci l'attrapait avec toute la force du monde. Bien qu'ennuyé par cette entrave, Saru était aussi très curieux de comprendre le sens de tout ceci, mais aussi et surtout pourquoi, cette main lui semblait aussi familière, et qu'elle dégageait une telle peine, une telle détresse.

Celle-ci d'ailleurs, ne tarda pas à le tirer vers le bas tout à coup, avec une énorme vitesse, ce qui eut l'effet de surprendre énormément le jeune homme. Lui qui souhaitait rester dans son royaume aérien, en était maintenant privé par cette main inconnue. Toute fois, les souvenirs de Saru lui revinrent en mémoire, retrouvant leur place dans son esprit. Cette main, elle n'était pas celle-ci d'une inconnue, mais bien celle de sa meilleure amie.

Et cette détresse, elle était synonyme d'une crainte, celle de le voir s'en aller pour toujours. Il en eut d'ailleurs confirmation lorsque dans sa chute, Saru put entendre « Ne me laisses pas seule... » Ce monde était délicieux, le jeune homme mourrait d'envie d'y retourner, de s'y plonger corps et âme pour abandonner son existence terrienne. Mais il était hors de question dans la mesure du possible, de laisser sa meilleure amie toute seule. Elle était encore tellement perdue, tellement égarée dans ce monde qu'il aurait été monstrueux de lui infliger l'horreur de la solitude. Saru quittait alors cette lumière, sacrifiant en même temps cette plénitude afin de rejoindre son corps, retournant à son existence humaine. 

 

Je t'en prie, Saru... Ne me laisse pas ici...

 

Ces mots émanant de cette demande, même de cette supplication, avaient été prononcé avec une faiblesse dans la voix. Tout était si flou autour du jeune homme, autour de Saru qui venait de retrouver conscience et de regagner son propre corps après cette folle aventure astrale. Il savait pourtant, mieux que quiconque la raison de son retour sur Terre, de son vivant. Allongé dans un lit d'hôpital et le bras perfusé, Saru réalisait progressivement tout ce qui venait de se passer et se souvenait de cette scène avant son évanouissement. Il était en train de courir, pour rejoindre Yami. Seulement, pendant sa course, un gros blanc s'était installé, un moment de pur vide dans sa mémoire. Sûrement était-ce à cet instant qu'il avait perdu connaissance. C'était inconscient de sa part de courir ainsi, alors qu'il était encore en convalescence. Mais il souhaitait tellement la rejoindre, être avec elle dans cet instant si unique pour elle.

Il ne lui fallut pas longtemps pour remarquer que sa main était prisonnière d'une autre. Saru releva alors son visage vers la propriétaire de cette main, pour voir qu'il ne s'agissait de personne d'autre que de Yami. Celle-ci était endormie, le visage posé sur le bord du matelas sans pour autant gêner le repos de son meilleur ami. En ressentant son inquiétude même au travers de son sommeil, Saru ne put qu'émettre son bonheur d'avoir une telle personne à ses côtés. Il n'avait pas eu tort ce jour-là de lui venir en aide, de la sortir des ténèbres. A ses yeux, Yami était une personne merveilleuse, pleine de courage et de ténacité, beaucoup plus que lui en tous cas.

Pour cette raison, le jeune homme s'abandonna à la regarder tendrement en approchant sa main de son visage. Ce n'était pas la première fois que son amie s'endormait ainsi à ses côtés, car après tout, elle était la plus fidèle représentation d'un chat. Ce côté de sa personnalité, Saru devait bien avouer que cela le faisait quelque peu craquer. Pas dans le sens d'amour, mais juste qu'il la trouvait mignonne, touchante en un sens. Sa main se colla au visage de Yami pour la caresser tout doucement, sans éprouver le désir de la tirer de son sommeil. Seulement, ce simple contact avec la demoiselle eut pour effet d'interrompre son sommeil. Il aurait voulu lui accorder d'avantage de repos, mais sans doute que son odeur si familière aux narines de Yami eut raison de sa torpeur.

La réaction première de Yami en apercevant son meilleur ami éveillé, dès l'ouverture de ses yeux, fut de tout simplement bondir dans ses bras en exprimant toute sa surprise ainsi que son soulagement. Elle avait réussi au prix d'un lourd combat avec les médecins, le droit de rester aux côtés de Saru jusqu'à son réveil. Elle avait espéré, durant des heures et des heures qu'il ne finisse par revenir à lui. Jusqu'à finalement tomber de fatigue en laissant derrière elle toutes ses peurs, qui finirent par la suivre même dans ses rêves. Jamais en se laissant tomber dans le royaume des songes, elle n'aurait pensé que celui qui l'en tirerait ne serait autre que Saru, ce cher Saru. Elle était si heureuse que des larmes lui montèrent aux yeux, tandis que ses bras s'entouraient tout autour du jeune homme, le privant de sa bonne capacité à respirer et l’incitant à se débattre, sans pour autant brusquer ou bousculer son amie.

  • Saru, je suis tellement heureuse que tu sois finalement revenu … Je me suis tellement inquiété pour toi, t'imagines même pas à quel point j'ai pu me faire du soucis. Grâce au ciel tu n'as pas succombé à ta maladie...
  • Oui oui, moi aussi je suis content de te revoir Yami. Seulement, est-ce que tu pourrais faire plus attention ? Disons que je ne suis pas en super bon état et j'aimerais éviter qu'il ne m'arrive encore d'autres bricoles !
  • Oh oui, pardon excuse-moi. Répondit la demoiselle en se dégageant tout doucement pour finalement venir se rasseoir sur sa chaise, en regardant par terre sous l'effet de la gêne. Je me suis laissée emporter par mes émotions. J'ai bien cru que j'allais devenir folle lorsque je t'ai vu t'écrouler au club... J'étais si heureuse de te voir ici, c'était une merveilleuse surprise que tu m'as fais. Mais... Tout s'est enchaîné tellement vite, et... Et... Expliqua finalement Yami en ne pouvant retenir ses larmes, qui vinrent s'écouler sur ses mains, posées sur ses genoux. En revoyant ces images, sa douleur lui revenait également au cœur.
  • Je suis sincèrement désolé de t'avoir causé autant de soucis, Yami. Je ne voulais pas te créer autant d'inquiétude... Se contenta de rétorquer le jeune homme avec douceur, avant de poser sa main sur celle de son amie pour lui adresser un sourire, qu'elle admira en relevant le regard. Mais sache que ton attention me touche. Grâce à toi, je ne me sens absolument pas seul. J'ai avec moi la meilleure amie dont on pourrait rêver, ma chère Yami.
  • Bien sûr que je n'allais pas t'abandonner, qu'est-ce que tu croyais au juste ? Déclara Yami en passant la manche de son vêtement sur ses yeux pour sécher ses larmes qui s'écoulaient encore. Elle laissa s'exprimer son plus beau sourire une fois de plus. Ce regard avait toujours un effet monstrueux sur la jeune fille, même en cet instant alors qu'elle se remettait de ses émotions. Tu es le seul à m'avoir tendu la main ce jour-là. Tu es le seul dans ce monde que je considère vraiment comme un ami... Le seul, il n'y a personne d'autre.
  • Ah bon ? Et ce garçon aux cheveux roux que tu fréquentes au club ? Tu n'as pas tissé un lien d'amitié avec lui ? De ce que j'ai pu voir, tu as l'air de le porter en estime dans ton cœur.
  • Ah... Tu veux sûrement parler de Ham. C'est vrai que c'est un garçon gentil, même surprenant après tout ce qui s'est passé entre lui et moi au début. Répondit la demoiselle en laissant paraître toute la perplexité dans son cœur. Mais... Je pense qu'il me faudra du temps avant de vraiment le considérer comme un ami, comme un proche. Au moins autant que tu l'es pour moi.
  • Surtout prends tout le temps dont tu auras besoin pour cela, rien ne presse. Tu as toute la vie devant toi, et tâches de profiter de chaque seconde qu'elle peut t'offrir. Tu es une fille vraiment forte, Yami. Très courageuse et c'est pour cela en un sens que je t'admire. Il fallait vraiment que tu le saches.
  • Mais... Pourquoi est-ce que tu me parles comme ça d'un coup ? Tu n'es pas vraiment comme d'habitude. Il y a quelque chose qui ne va pas ? Demanda Yami, perdue et perplexe d'entendre son meilleur ami lui parler ainsi. Tout simplement elle inclina son visage légèrement sur le côté pour faire comprendre son interrogation.
  • Simplement parce que je reviens d'un long voyage, d'un très long voyage au cours duquel j'ai ressentis une immense plénitude de mon être. Répondit Saru en détournant son visage pour regarder en avant avec une nostalgie bien présente dans son regard, se remémorant ces instants vécus avant son réveil. Plus rien n'avait d'importance, plus rien ne pouvait m'atteindre... Il n'y avait que moi, ainsi que le ciel, rien d'autre.
  • Qu'est-ce que tu racontes exactement, Saru ? Je ne comprends rien à ce que tu essaies de me dire. Si tu essaies de me parler du rêve que tu as fais avant de te réveiller, je n'en comprends pas bien l'intérêt ni même le but.

 

Sans prononcer le moindre mot, sans prendre le temps de répondre aux multiples interrogations de sa très chère Yami, Saru de manière totalement spontané et sans laisser présager de son geste, vint prendre la jeune fille dans ses bras pour la tirer vers lui. Celle-ci, ne s'étant clairement pas du tout attendue à une telle étreinte, surtout d'une telle force, témoigna de toute sa surprise. Elle ne pouvait que constater l'étrange comportement de son ami depuis son réveil, bien qu'elle se disait qu'il était très certainement sous l'influence de son coma, ou bien de ces médicaments qu'on lui injectait depuis son arrivé ici. Mais clairement, Saru n'était plus le même, plus du tout dans son état normal. Son étreinte autour d'elle se resserrait, il ressentait quelque chose en approche, toujours plus près, toujours plus près. Il savait mieux que quiconque qu'il ne pourrait repousser l'inévitable plus longtemps, et que le tragique arriverait très prochainement.

Secrètement, mais l'exprimant sûrement au travers de son câlin, Saru ressentait une énorme culpabilité. Au fond, jamais il n'avait souhaité que les choses se passent ainsi. Mais il le ressentait, au plus profond de son être, c'était viscérale, et en un sens, il remerciait la providence de lui envoyer ce message pour qu'il puisse se préparer. Mais aussi et surtout, préparer sa meilleure amie à affronter cette terrible épreuve, qui pour elle, il le savait, serait la pire à endurer de toute sa vie.

Détachant alors son étreinte tout autour de la jeune Yami, celle-ci regardait maintenant son meilleur ami avec ce même trouble dans le regard. Celui-là même qu'elle lui avait exprimé et qu'elle lui exprimait toujours en sentant sa main se poser dans ses cheveux pour les caresser ou même quand il la prenait ainsi contre lui. Au fond, même si ce n'était pas de l'amour qui unissait la jeune fille à ce garçon, ils avaient tout de même un lien extrêmement fort. Une amitié indestructible. Il était comme son âme-soeur, mais au niveau de l'amitié. Celui qui la connaissait mieux que quiconque.

Mais en un sens, Yami s'en voulait de ne pas le connaître aussi bien que lui avec elle, car en cet instant bien précis, elle était incapable de décrypter le message de Saru. Dans son regard, elle voyait bien qu'il voulait lui dire quelque chose, qui lui hurlait même une vérité. Seulement, elle avait beau faire de son mieux, rien ne lui venait. Parfois, Saru était ainsi, à mettre ce masque autour de son cœur, par crainte, ou simplement pour conserver un peu de mystère. Mais aujourd'hui, c'était d'avantage par peur, mais aussi par honte... Une nouvelle fois alors, le jeune homme posa sa main dans les cheveux de Yami et lui adressa un sourire d'une pleine sincérité, cachant toute fois, une once de mensonge, de culpabilité.

  • Tout ce que tu as besoin de savoir aujourd'hui, Yami. C'est que je suis terriblement fier de toi, de ce que tu es devenue et de ce que tu as accompli depuis ces derniers mois. Qui aurait cru après tout que tu deviendrais une athlète amateur en route pour participer à un championnat ? Demanda Saru dans le vent, comme pour lui remémorer tous ces événements avant que ceux-ci ne se réalisent. Un sourire presque mélancolique sur le visage tandis que ses yeux se fermaient tout doucement, sous les yeux craintifs de Yami juste en face.
  • Saru, tu me fais peur... Pourquoi est-ce que tu me parles comme ça ?
  • Il ne faut pas que tu prennes peur, Yami. Tout va bien se passer, tu verras. Je veux seulement que tu gardes dans ton cœur, cet objectif que tu as toujours eu... Déclara Saru en venant poser sa main sur la poitrine de sa meilleure amie, afin de toucher son cœur. A ce contact, Yami ressentit une augmentation de son rythme cardiaque, en le laissant toute fois faire en l'observant, curieusement. Celui de t'envoler aussi haut que possible pour toucher les étoiles, pour toucher le ciel de tes mains. Est-ce que tu m'en fais la promesse, dis ?
  • Saru, arrête de me parler comme ça.. Je t'en supplie... Ordonna presque la demoiselle en commençant à verser des larmes de peine authentique. Progressivement, au travers des mots de son ami, Yami comprenait son message. Ce n'était pas qu'elle ne réussissait pas à le comprendre, mais qu'elle ne voulait pas décrypter ses mots, afin de ne pas affronter cette vérité, qu'elle connaissait depuis son écroulement au club. Je ne peux pas t'écouter me dire des choses pareilles, c'est trop horrible à supporter pour moi.
  • Te dire toutes ces choses n'est pas facile pour moi également, Yami. Je m'excuse de te faire autant de mal, mais de tout mon cœur, j'aimerais que tu souffres le moins possible. C'est pour cela que je m'adresse à toi de cette manière, est-ce que tu comprends ? Répliqua le jeune homme dans toute la tendresse de sa voix, en venant essuyer les larmes sur les joues de son amie, qui s'écoulaient encore de ses yeux humides. Il s'en voulait énormément de lui faire autant de peine et aurait aimé qu'il en soit autrement. Mais finalement, à son tour, craquant sous le coup de l'émotion mais aussi sous la réalité qui l'attendait les bras ouvert, Saru laissa éclater les portes de son cœur pour sombrer dans la tristesse en versant des larmes. Excuse-moi, Yami. Je suis vraiment désolé, pardonne-moi pour tout cela. Je ne voulais vraiment pas te voir ainsi... Cela me fend le cœur plus encore que tu ne peux le croire. A mes yeux tu es loin d'être une simple fille que j'ai rencontré dans des toilettes pour fille. Commença à expliquer le jeune homme en essuyant ces larmes s'écoulant de son visage avec le revers de sa manche. Tu es une fille talentueuse, qui possède un don inné pour un sport qu'elle a réussi à pratiquer en affrontant son handicap. Est-ce que seulement tu arrives à te rendre compte de cela ? Toi, que tout empêchait de réaliser son rêve, tu as réussi. Tu as brisé ces barrières et tu t'es libérée de ta cage pour t'envoler comme un oiseau totalement libre. Tu vis, Yami. Tu existes en tant qu'un être humain normal dans ce monde. Je veux... Je veux que tu continues de Vivre, ma meilleure amie. Sois heureuse et profite de chaque instant de ton existence. Savoure chaque petite seconde comme si c'était la dernière, et surtout, garde toujours ce merveilleux sourire qui est le tien.
  • Je... T'en fais la promesse, Saru. Compte sur moi pour Vivre comme tu me le demandes... Accepta finalement Yami avec beaucoup de difficulté, les mots se perdant entre ses lèvres tellement l'émotion était intense. Elle serra même le drap de son matelas entre ses mains pour contenir sa haine, sa tristesse et sa rage. Elle comprenait ce qu'il était en train de lui dire, alors qu'elle aurait souhaité ne rien décrypter de son message.
  • Et surtout quand tu toucheras le ciel de tes mains, pense à me passer un petit bonjour... D'accord ? Demanda Saru en fermant timidement les yeux, sachant que cette demande allait signer la vérité de son aveu. Ne sachant pas si son amie avait compris son message, il était maintenant certains que tout était clair pour elle. Laissant son cœur exprimer un petit rire d'ironie pour essayer de voir les choses du bon côté, ce simple geste eut cet effet de le faire tousser une nouvelle fois, affolant ainsi son rythme cardiaque sur le cadrant.
  • Saru, qu'est-ce qui se passe ? Qu'est-ce qui t'arrive exactement ?! Demanda Yami, affolée en voyant son meilleur ami se tordre de douleur dans son lit et en voyant son cœur prendre un tel rythme. La jeune fille était morte de peur, bien qu'elle était maintenant consciente de la suite des événements. Seulement, malgré sa promesse adressée au jeune homme, elle ne pouvait se résoudre à le laisser. Il était trop précieux pour elle, si important et même vital pour elle. Cependant, des médecins et infirmiers ne tardèrent pas à entrer dans la salle avec du matériel de soin, interpellant la demoiselle qui était toujours au chevet de son ami.
  • C'est un cas d'urgence que nous avons là. Excuse-moi d'agir ainsi, ma petite, mais nous allons devoir te demander de quitter la chambre le plus rapidement possible. Ce jeune homme a besoin de soin d'urgence. Affirma le médecin en chef en envoyant ses collègues chacun à leur poste.
  • Non, je refuse de laisser tomber mon meilleur ami. Je ne l'abandonnerais jamais, vous m'entendez ?! Hurla presque la demoiselle avec des larmes aux yeux, s'accrochant au drap du lit pour les empêcher de l'emmener.

 

N'ayant en aucun cas besoin de s'encombrer de ce genre de chose, le médecin en chef ordonna par un geste du visage à une de ses assistantes, de faire sortir cette jeune fille de la pièce afin qu'ils puissent travailler en paix. Cela pouvait paraître monstrueux de la part d'une personne censée sauver des vies, mais avec le temps il était naturel de s'habituer à un tel comportement aussi froid et insensible, cela facilitait bien les choses.

C'est pour cela que la jeune femme accepta cette demande et tira Yami par le bras en la séparant de son drap en abandonnant ainsi le jeune homme. Face à cela, à cette réalité qu'elle était bien en train de le perdre, Yami eut le sentiment que ce regard qu'elle était en train de lui lancer, était le dernier qu'elle pourrait lui adresser et ce pour toujours.

C'est pour cette raison qu'elle ne voulait pas le laisser, qu'elle voulait encore pouvoir être avec lui, lui parler encore et encore. Écouter sa voix, la laisser s'inscrire dans sa mémoire pour toujours, dans son cœur. Cette sensation était juste insupportable pour elle, le voir s'éloigner de plus en plus, perdre ce beau sourire ainsi que sa voix. Pour que cette porte finalement, se referme sur Yami, l'enfermant de l'autre côté en compagnie de cette infirmière contre laquelle elle se colla avec l'espoir de la traverser en la tapant faiblement de ses mains. La jeune femme ne tenta en aucun cas de se défendre, comprenant la douleur de cette fille.

  • Arrêtez de me bloquer l'accès, je veux pouvoir retourner auprès de Saru. Laissez-moi passer tout de suite !
  • Je comprends la douleur que tu ressens, Yami. Yami, c'est bien ton prénom, n'est-ce pas ? Demanda la jeune femme avant de se mettre à la hauteur de son interlocutrice et de la regarder sincèrement dans les yeux. Je sais que pour toi ce n'est pas facile de laisser ton ami aux mains de notre médecin en chef. Mais ici, il n'y a que lui qui puisse avoir une chance de le sauver, alors essaies de lui accorder ta confiance, même un tout petit peu, d'accord ?

 

Sans pour autant apporter une nouvelle fois de réponse orale à l'infirmière, Yami accepta de se calmer et vint simplement s'asseoir sur une chaise disposée à côté de l'entrée de la chambre avec cette femme. Elle était en ce moment sa seule compagnie, les autres ayant quitté les lieux depuis bien longtemps. Les parents de Yami avaient accepté de la laisser seule ici quelques heures, mais de revenir la chercher avant la tombée de la nuit. Seulement, la nuit n'était pas encore sur le point de tomber... Et les minutes passèrent, et passèrent encore à une vitesse si lente, que la jeune fille eut l'impression de devenir folle à force d'entendre l'aiguille de cette horloge juste en face d'elle, s'agiter sans cesse.

Mais finalement, après une demi-heure de soin, le médecin en chef sortit de la chambre, accompagné de son équipe. Yami se leva alors pour entendre les résultats d'analyse, inquiète et en même temps réaliste, juste en voyant le regard triste de cet homme ainsi que des autres personnes qui s'en allèrent sans demander leur reste. Se doutant de la présence de ces deux femmes, l'homme se tourna vers elle en s'inclinant légèrement par respect envers Yami surtout, avant de se décider à s'adresser à la demoiselle sur un ton à la fois humain et professionnel.

  • Je suis au regret de vous annoncer que votre ami Saru Ryone nous a quitté des suites de sa maladie. Ses derniers mots ont été pour sa meilleure amie « Je souhaite qu'une fois que j'aurais rejoins le ciel, Yami puisse sauter si haut depuis la terre, que je pourrais toucher sa main une nouvelle fois. J'aimerais... La toucher encore une fois. » Ont été ses derniers mots à votre égard, Yami Mushine.

 

A l'écoute de ces quelques mots de la part du médecin en charge de son ami, Saru, la demoiselle, confrontée à cette cruelle réalité qu'elle savait mieux que quiconque, ne put que succomber à sa tristesse ainsi qu'à son désespoir. Elle cru en cet instant que son cœur allait éclater en morceaux. Bien que ses adieux avec Saru en quelque sorte avaient pu se faire, elle ne voulait pas y croire. Non, il était trop dur pour elle de s'avouer que son ami était bel et bien mort, qu'il l'avait bien quitté et que cette fois, il ne reviendrait plus jamais. Laissant alors tomber ses genoux, des larmes lui montèrent aux yeux avec une telle violence, qu'elle ne put qu'émettre à travers tout l’hôpital, cette souffrance qui était la sienne de par son cri.

 

 

NOTE DE L'AUTEUR : Même si depuis le début de cette histoire, j'avais l'intention de faire mourir Saru, c'est toujours compliqué de donner la mort à une de ses créations. On s'y attache, même si ce ne sont que des dérivés d'une création d'une autre, quelque part, c'est un peu une boule d'argile que l'on a emprunté pour la modeler à notre image. Au revoir Saru... Un petit commentaire peut-être?

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