Le Sixième Elément

CHAPITRE XXVIII : OU EST-ELLE ?



A l'heure du déjeuner, les WITCH prirent une table. Elles appréciaient ces moments de convivialité plus encore qu'avant. Bien sûr, aujourd'hui, ce fut Taranee qui se retrouva le centre de l'attention. La jeune métisse rougit et malgré ses supplications, Irma se montra impitoyable.

« Et une vierge de moins ! s'exclama la gardienne de l'eau.

-Ne crie pas si fort, fit Taranee.

-Il ne faut pas avoir honte. Tu es entrée dans le clan de celles qui se font plaisir avec plaisir !

-Tu as eu peur ? demanda Will.

-Oui. Je mentirais si je disais le contraire. Jusqu'au dernier moment, j'ai douté et j'ai failli lui dire d'arrêter. J'ai eu mal. Très mal. Mais comme vous me l'aviez dit, au bout d'un moment, c'est le plaisir qui a remplacé la douleur. Nigel a été très doux.

-Et alors ? Et alors ? questionna Irma.

-Alors quoi ?

-Tu en as eu un.

-Un quoi ?

-Un orgasme bien sûr ?

-Chut ! Ne parle pas si fort.

-T'es pas marrante. Tu pourrais nous le dire, on est tes amies.

-Est-ce que je te demande si Hanabi arrive à te faire jouir ?

-Elle y arrive très bien. Je suis obligée d'étouffer mes cris dans l'oreiller quand on se fait un câlin et que ma mère et mon frère sont à la maison. Par contre quand il n'y a personne, je m'en donne à cœur joie ! Je crois que les voisins nous ont entendus. Ils nous ont regardés bizarrement l'autre jour, et la veille on était toute seule.

-C'est l'amour fou, sourit Will.

-Je crois que j'ai trouvé la femme de ma vie. Alors ?

-Tu n'abandonnes jamais, dit Taranee.

-Jamais. Alors ?

-Oui. J'ai joui. Et c'était très bon.

-Hay Lin, tu n'as pas pris de petit-déjeuner ou quoi ? questionna Cornelia. »

Hay Lin avait déjà fini son entrée, une assiette de saucisse-purée et son dessert. Pendant la discussion de ses amies, elle s'était levée pour demander du rab et continuait à manger avec entrain. Ce n'était pas habituel chez la jeune chinoise de manger autant. Depuis quelques temps, elle avait même doublé sa consommation de bonbons déjà largement au dessus de la moyenne.

« Euh…oui c'est ça, balbutia t-elle. Je n'ai pas eu le temps, je me suis levé trop tard.

-Faut avoir jeûné durant au moins trois semaines pour prendre une double-ration de cette purée à l'eau, ironisa Irma.

-Je trouve que tu manges beaucoup depuis quelques temps, fit remarquer Will. Tu devrais faire attention ou tu vas devenir énorme. Tu es sûre que tu n'as pas de souci particulier en ce moment.

-Non. Tout va bien. C'est juste que je crains de ne pas passé en terminal.

-Arrête, contredit Cornelia. Tu es loin d'être nulle. Si l'une de nous devait s'inquiéter, ce serait Irma.

-Je ne répondrais même pas à ça, finit Irma. »

Hay Lin se sentait mal. Elle avait encore menti à ses amies. Durant encore combien de temps leurs cacherait-elle la vérité ? Quand aurait-elle le courage de leur dire ? Elle se sentait vraiment mal. Elle sentait sa tête lui tourner. Elle s'engouffra dans les toilettes, refermant la porte de la cabine derrière elle. Il était temps d'arriver. Elle eut à peine le temps de se pencher au dessus de la cuvette qu'elle y déversa une partie de ce qu'elle avait mangé au déjeuner.

Elles le remarqueraient un jour. C'était obligé…

Le soir, Irma eut la surprise de ne pas voir Hanabi l'attendre à la grille. Peut-être était-elle seulement en retard ? Elle décida de rentrer, espérant la trouver sur le chemin. Mais elle ne la croisa pas. Peut-être que le ménage n'était pas terminé à la maison. Irma souriait en pensant au massage qu'elle allait prodiguer à sa petite amie pour la délasser de cette journée de labeur.

Lorsqu'Irma arriva, elle trouva sa mère entrain de préparer le dîner. Elle vint l'embrasser et sentir le fumet qui s'élevait des casseroles.

« Ta journée s'est bien passée ? demanda sa mère.

-Oui, comme d'habitude, répondit-elle. Hanabi est dans la chambre ?

-Non. Je pensais qu'elle était avec toi.

-Elle est peut-être avec Eric. Elle ne devrait pas tarder. Vous avez tout nettoyé ?

-Moi oui, mais Hanabi n'est pas revenu depuis ce matin.

-Quoi ?

-Elle a dû passer la journée avec Eric.

-Elle avait promis de venir t'aider. Ce n'est pas dans ses habitudes de ne pas respecter une promesse.

-Ce n'est pas grave. Elle m'aidera une prochaine fois. J'espère qu'elle ne va pas être en retard pour le dîner. »

Irma alla commencer ses devoirs. Hanabi n'arriva pas. Et s'il lui était arrivé quelque chose ? Avec les Kagebushis dans le coin, on ne sait jamais. Sa mère appela Chris et Irma pour manger. Irma descendit en pensant trouver Hanabi assise à la table. Mais elle n'était toujours pas là. Malgré tout son optimisme, elle commençait à s'inquiéter.

Irma se saisit du téléphone et appela Hay Lin. Elle demanda à parler à Eric.

« Moshi moshi, fit-il. Euh…allo.

-Eric, est-ce que Hanabi est avec toi ?

-Non. Je ne l'ai pas vue depuis ce matin. Elle n'est pas chez toi.

-Non. Je m'inquiète. Elle n'était pas là de la journée.

-Je vais la chercher. Reste chez toi au cas où elle arriverait. »

Irma se mit à table mais elle ne toucha à presque rien. Toute son attention était tournée vers la porte. Guettant tout bruit de quelqu'un entrant. Ce ne fut pas le bruit de la porte qui la fit sursauter mais celui du téléphone. La mère d'Irma répondit.

« Allo, fit-elle... Oui… Oui, une japonaise… »

Irma se rapprocha.

« Nous arrivons tout de suite. »

Jeanne raccrocha et se tourna vers sa fille.

« Hanabi est à l'hôpital, informa t-elle. Elle a été trouvée dans un parc, blessée et sans connaissance. Elle n'avait pas de papiers sur elle mais comme elle avait ma carte de visite, ils ont appelé.

-A l'hôpital ! s'exclama Irma.

-Viens, on y va. »

En arrivant à l'hôpital, elles furent accueillies par un médecin qui leur en dit plus sur l'état d'Hanabi.

« Votre amie n'a rien de grave physiquement, il semblerait qu'elle ait reçu des coups de couteau. Mais psychologiquement, ça à l'air plus grave. Elle ne réagit à aucuns stimuli extérieurs. Elle ne fait que fixer le vide devant elle. Je suppose que l'attaque qu'elle a subi l'a choquée.

-Impossible, souffla Irma.

-Mademoiselle Lair ?

-Hanabi est solide comme un roc. Elle sait se défendre. Ce n'est pas une attaque au couteau qui peut la mettre dans cet état.

-C'était peut-être l'attaque de trop.

-Est-ce que je peux la voir ? S'il vous plait.

-Bien sûr. C'est cette chambre. »

Irma laissa sa mère avec le médecin. Elle entra dans la chambre. La jeune japonaise était allongée dans son lit. Elle fixait le plafond d'un regard vide. Elle n'avait même pas regardé vers la porte lorsqu'Irma était entrée. La gardienne de l'eau s'approcha et lui prit la main. Hanabi ne referma pas ses doigts sur elle. D'un geste affectueux, Irma lui remit quelques cheveux dans le bon ordre.

« Ma chérie, c'est moi, dit-elle. Réponds-moi s'il te plait. »

Le silence demeura. Pas un mouvement.

« Ce n'est pas grave. Tout ira bien maintenant. Je suis sûre que tu vas vite te remettre. Tu es forte. Bientôt tu souriras de nouveau. Tu me prendras dans tes bras. Tu m'embrasseras. »

Irma se pencha sur son amoureuse et déposa un tendre baiser sur ses lèvres. Ses larmes ruisselèrent sur les joues d'Hanabi.