Dragons - Volume I : l'Ordre

Chapitre 8 : 8.

2401 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour 21/08/2019 16:59

Les bateaux d’Arthas et de Vincent se croisèrent en mer, à quelques dizaines de kilomètres l’un de l’autre et tandis que l’un d’eux s’éloignait du royaume elfique, l’autre s’en approchait rapidement. Il n’était pas encore midi et Vincent serait sur Rut’theran dans moins de dix minutes. Son navire avait pu filer à pleine allure tout le long du trajet grâce à une mer parfaitement calme.

Bien sûr, à peine l’homme débarquait-il de son transport qu’il revêtit sa capuche avant de se diriger dans un coin du village. Ce n’était pas le chemin pour accéder à l’entrée de la capitale, mais cette dernière était, comme à son habitude, hautement gardée. Vincent avait à l’évidence un chemin bien à lui pour entrer dans la ville.

Après quelques minutes à grimper d’un arbre à un autre, l’homme finit par tomber devant l’épais mur de briques qui faisait le tour de la capitale. Le mur était haut d’une dizaine de mètres et épais d’au moins deux. Malgré cela, la capitale n’était plus toute jeune et après avoir encore longé ce mur pendant quelques instants, il s’arrêta devant ce dernier et posa ses mains sur quelques briques avant de les pousser. Tout un ensemble de briques se déplaça aussitôt, pivotant telle une porte autour de ses gonds tandis qu’une obscurité totale émanait de l’autre côté du passage secret.

L’homme n’hésita pas et y pénétra tout en refermant la porte cachée. Il était en réalité au fond d’une ruelle obscure, bien loin du cœur de la ville. Vincent la traversa rapidement avant d’être baigné par la lumière magique de la capitale et que la vie qui y fourmillait ne lui éclabousse au visage ; il venait en effet d’entrer dans Darnassus.

À partir d’ici, il n’eut pas fallu longtemps pour que le visiteur arrive devant le palais impérial. Depuis ses jardins moins bien surveillés, il fit un bond en l’air de plus de cinq mètres et arriva sur un balcon avant de réitérer le procédé jusqu’au deuxième étage du bâtiment. Une des pièces de ce palais avait toujours une fenêtre d’ouverte, comme si quelqu’un de l’intérieur lui donnait l’opportunité d’entrer sans effraction.

Quelques couloirs plus loin, la sécurité était renforcée et la porte d’une pièce était surveillée par deux gardes de chaque côté, semblant y être postés pour une durée indéterminée. Vincent ne sembla pas s’en enquêter et s’y dirigea en marchant comme si de rien n’était. L’un des gardes finit par entendre les pas de l’homme et se tourna vers lui, sans piper mot.

Vincent arrivait finalement face aux deux gardes et ces derniers s’écartèrent de la porte, toujours dans un silence total. L’homme au visage pâle ouvrit aussitôt la porte de la pièce et y entra. La chambre ne faisait pas moins de cent mètres carrés. D’un côté se trouvait un luxueux bureau surplombé d’un lustre en cristal tandis que sur le mur qui donnait vers la capitale, une impressionnante baie vitrée y était encastrée, dépassant les deux mètres cinquante de haut et faisant toute la longueur de la pièce de travail, soit presque huit mètres.

De l’autre côté de la suite se dressaient les quartiers personnels de la femme, cloisonné par un mur dans lequel une grande arche de trois mètres de large donnait un subtil aperçu sur le luxe qui s’y trouvait. Mais Vincent ne s’y dirigea à aucun instant, l’impératrice se trouvant à son bureau à cet instant, jetant un regard foudroyant à l’intrus.

— Que fais-tu là ? demanda l’elfe en colère.

— Quand les pacificateurs sont-ils supposés arriver ?

— Demain, dans la matinée...

— Et tu m’as dit qu’ils étaient là pour vous épauler contre les déviants ?

— Oui. Après tout ils sont sous les ordres de l’église, ça paraît logique.

— Tu sais très bien que c’est faux. Tu sais ce qu’ils sont... répondit Vincent d’un ton très grave.

L’elfe fronça des sourcils sans pour autant prononcer le moindre mot, posant ses mains sur son bureau et regardant d’autant plus sérieusement son invité surprise.

— Méfie-toi d’eux.

— Je suis impératrice d’Avalon, Vincent... Je me méfie de tout le monde, rétorqua d’une voix froide la femme.

— Je vais rester dans le coin jusqu’à demain, quelque chose m’intrigue.

— S’ils te voient, ça va mal finir et tu le sais. Pourquoi ne m’écouterais-tu pas pour une fois ? reprit la dame en se levant de sa chaise, commençant à s’énerver.

— Quelque chose ne tourne pas rond dans cette affaire... je dois en avoir le cœur net.

L’elfe ferma les yeux et soupira longuement, consciente qu’elle ne raisonnerait pas Vincent.

— Et puis je m’inquiète pour toi.

Le visage de l’impératrice sembla se dérider tandis qu’elle ne quittait plus du regard l’homme face à elle. Après un long moment de silence, l’elfe finit par esquisser un sourire timide et commenta :

— Tu devrais t’inquiéter pour toi, idiot.

— Je ne vais pas te déranger plus longtemps... soupira l’homme au regard toujours préoccupé.

Tandis qu’il s’approchait à nouveau de la porte, Tyrande finit par reprendre la parole :

— Et cette Alessa ?... Tu t’en es... occupé ?

— Pas encore. Mais ça ne saurait tarder. Je reste dans le coin demain, après j’irais m’en occuper.

— Soit... marmonna timidement l’impératrice.

L’homme sortit finalement de la pièce et quitta le palais par le même itinéraire qu’à l’aller tandis que dans sa pièce, l’impératrice se dirigea vers les grandes vitres et plongea son regard sur la ville chatoyante. La femme adorait perdre son regard sur la capitale et plus principalement lorsque ses pensées étaient confuses ou qu’elle avait besoin de faire le vide dans son esprit.

~*~

La nuit tombait sur Azeroth et le monde tournait au ralenti. Dans les Maleterres, petit pays de terre aride et très peu peuplé habituellement, une patrouille d’une dizaine de soldats sillonnait la région. Celle-ci était assez chaotique, au terrain peu praticable et où d’énormes pitons rocheux parsemaient son paysage tristement vide. Les Maleterres se situaient à plus d’une centaine de kilomètres au sud de la grande capitale des nains, Forgefer.

La troupe qui était basée sur la garnison du Loch Modan, territoire mitoyen entre les Maleterres et Dun Morogh, là où se trouvait la capitale naine, avait l’habitude de ces manœuvres nocturnes. En effet, la région regorgeait de civils et d’archéologues recherchant sans cesse des trésors dans les nombreuses grottes dangereuses qui parsemaient le lieu. C’était d’ailleurs pour ces raisons que cette patrouille avait été instaurée, garantissant un minimum de protection contre un éventuel banditisme.

Mais en réalité, les gardes discutaient paisiblement entre eux, ne semblant pas faire preuve de toute l’attention qu’aurait été souhaitée par leurs supérieurs. Après tout, ce pays n’était plus très dangereux depuis l’union entre l’alliance et la horde et seules quelques bêtes errantes dans le désert pouvaient toutefois surgir à l’improviste, mais les risques étaient minimes.

Au bout de quelques heures, les gardes entendirent une sorte de troupe en mouvement vers leur position et se mirent aussitôt sur le qui-vive, prêts à intervenir à toute éventualité. Aucune cavalerie alliée n’avait été signalée dans les parages, et il n’y avait donc aucune raison qu’un tel raffut se produise à un moment pareil, en tel lieu. Soudain, une vingtaine de destriers passèrent en face d’eux sans s’arrêter. Les gardes furent effrayés par ce signe de mauvais augure en remarquant qu’aucun des cavaliers n’était en vie, leurs corps pendant sur leurs montures, à la limite de tomber s’ils n’étaient harnachés à ces dernières.

La patrouille rattrapa les bêtes et réussit à les calmer tandis que leur stupeur ne faisait que de grandir ; les cavaliers semblaient avoir perdu la vie de façon spontanée, ne présentant aucun signe de blessure apparente. À la vue de l’équipement des victimes, ils s’agissaient de soldats d’Avalon. Le chef de la patrouille décida de remonter en direction inverse des destriers affolés afin de tenter de faire la lumière sur ce mystère.

Après près de vingt minutes au galop, la troupe repéra au loin une excavation d’où une lumière intense semblait émaner. Quelques pas plus près, plus aucun doute n’était permis. Autour de l’entrée de cette grotte, devant un petit feu de camp improvisé et d’une tente de fortune, trois autres corps inanimés étaient allongés au sol.

Le chef de patrouille désigna deux de ses gardes pour partir signaler l’incident au Loch Modan pendant que le reste de l’équipe irait jeter un coup d’œil dans la grotte. Les deux gardes en question se sentirent presque chanceux de s’éloigner de ce cauchemar, mais galopaient au plus vite possible pour revenir avec toutes les troupes imaginables.

Le reste du contingent descendit de leurs montures et empoigna leurs épées avec appréhension. Le chef ouvrait la marche et s’arrêta un instant, voyant bien les visages remplis d’effroi de ses subordonnés et il reprit d’une voix basse :

— Allons, gardez votre calme. Nous ne savons pas ce qu’il se passe. Ils ne semblent pas avoir été attaqués. Peut-être est-ce un poison, si vous voyez quoi que ce soit d’étrange, faites-en part aux autres et regardez où vous marchez. Si vous voyez de la fumée, éloignez-vous-en.

Malgré les consignes claires et précautionneuses du gradé, l’équipe restait tétanisée et l’officier reprit :

— Vous êtes des soldats d’Avalon ! Des civils sont morts ici. C’est notre travail de découvrir pourquoi !

Puis, la troupe pénétra enfin dans la grotte naturelle. Des lanternes étaient accrochées tous les trois mètres sur les parois argileuses tandis que l’endroit se complexifiait, se transformant en un labyrinthe exigu. Après quelques minutes à descendre des escaliers taillés grossièrement dans le sol, la petite troupe arriva face à un petit campement bien éclairé où divers outils scientifiques recouvraient de nombreuses tables. À quelques mètres de là se trouvaient plusieurs tentes et chacune d’elle fut ouverte à la recherche du moindre survivant, mais l’inquiétude se transforma en dégoût en découvrant d’autres corps à l’apparence indemne, mais sans vie.

Alors que la majorité des soldats auraient bien attendu les renforts, le chef était déterminé à comprendre ce qu’il se tramait et espérait peut-être pouvoir encore sauver quelqu’un, continuant sa descente dans cet enfer, suivant toujours le sentier de fortune. Au fur et à mesure de leur progression, le nombre de corps se densifia et leur nombre s’élevait déjà à plus d’une vingtaine. Les soldats ne comprenaient toujours pas quoi ni comment avait pu faire autant de morts. Aucune fissure n’avait été repérée, pas de gaz ni d’odeur particulière. Les indices étaient bien trop maigres pour établir la moindre hypothèse.

Soudain, des bruits commencèrent à se faire percevoir, résonnant dans le long tunnel. Le bruit était bien trop loin et flou pour percevoir son origine, mais peu à peu, en devenant plus clair, l’équipe reconnut des voix humaines. Des personnes étaient encore en vie dans cet enfer. Étaient-ce des survivants ? Ou leur assassin ? Cette question fut sur les lèvres de chaque soldat avant qu’ils n’arrivent dans une nouvelle caverne au haut plafond. De nombreux objets jonchaient le sol, dont certains sûrement de valeur inestimable. Peut-être étaient-ce des voleurs ?

Mais tandis que les spéculations allaient de bon train, l’équipe avançait toujours, se dirigeant vers la source de bruit avant qu’une discussion devienne difficilement discernable, il semblait y avoir deux interlocuteurs, deux femmes :

— Je ne comprends toujours pas... Il n’y a que lui pour faire ça.

— Que cherchait-il donc ? Cet endroit renferme une forte puissance résiduelle...

— À quoi penses-tu ?

— Au vu des autres objets trouvés, peut-être une relique, un vestige ancien et puissant.

— Mais pour faire quoi ?

— Aucune idée... Mais de toute façon nous continuerons cette discussion plus tard, nous ne sommes pas seuls.

Ces mots furent parfaitement compris par le chef qui décida de rompre le silence et chargea vers la source de la discussion en criant :

— Soldat d’Avalon !! En avant !!

Mais tout à coup, lui ainsi que tous ses soldats furent aveuglés par une lumière brillante et tombèrent à terre aussitôt.

Pendant ce temps, l’alerte avait été donnée et les premiers renforts arrivèrent une vingtaine de minutes plus tard. Une escouade de cinquante soldats était déployée rapidement sur le site et pénétrait la grotte. Les deux gardes qui avaient donné l’alerte en faisaient partie et, tout comme les nouveaux arrivants, découvrirent l’horreur qui avait été perpétrée ici. En s’enfonçant plus profondément, ils finirent par retrouver le reste de leur équipe. Celle-ci était également inanimée au sol et les deux membres de cette unité se ruèrent sur eux et tentèrent de les réveiller quand soudain, le chef rouvrit les yeux sous les vives secousses de son subordonné revenu avec les renforts.


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