Dragons - Volume I : l'Ordre

Chapitre 14 : 14.

2678 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour 21/08/2019 20:46

Pendant ce temps, Arthas était retourné à Hurlevent et, après avoir réfléchi à la situation, il partit voir Baros Alexston. Par chance, le sage était encore sur la capitale humaine et avait retardé son séjour prévu à Darnassus d’une semaine. À peine était-il devant la porte de la demeure du sage qu’Arthas toqua vigoureusement sur celle-ci et patienta pour avoir l’autorisation d’entrer. Cette dernière ne se fit pas attendre très longtemps et Arthas pénétra dans la bâtisse en disant aussitôt, d’une voix assurée :

— J’ai besoin de beaucoup d’informations.

— Que se passe-t-il, Arthas ?

— Les pacificateurs sont là, Vincent a fait un face à face avec Amadeus puis, a eu l’autorisation de quitter cette ville après l’avoir prise en otage, elle et tous ses habitants... expliqua sans détour le jeune homme.

— Prise en otage ? demanda Baros, étonné.

— Vincent a menacé de libérer toute sa force.

— Il n’est pas du genre à dire des choses à la légère… C’est étrange.

— Il était très sérieux en effet. Je suis arrivé quand Amadeus lui parlait d’une femme que Vincent croyait morte et qui, en réalité, ne le serait finalement pas.

— Une femme… c’est le sujet de la tension ?

— Je le pense, oui… Vincent voulait savoir où elle se trouvait. Ils ont fait allusion aux Maleterres. La nuit dernière, une cinquantaine de personnes sont décédées d’une cause inconnue, sans avoir la moindre blessure apparente.

— Cela ressemble à quelque chose dont seul Vincent serait capable... marmonna le sage, confus.

— Amadeus en personne a disculpé Vincent à ce sujet. Il aurait passé la nuit sur Darnassus avec l’impératrice Whisperwind.

— Vous aviez donc raison sur au moins une chose jeune homme ! s’exclama le sage.

Arthas demeura parfaitement stoïque, n’étant pas d’humeur à la moindre légèreté et le vieil homme qui l’avait tout aussitôt compris, toussota quelques instants avant de se reprendre :

— Quoi qu’il en soit, quelque chose se trame, en effet. Et c’est plutôt inquiétant, dit Baros en fronçant les sourcils.

— Une fois que Vincent a quitté la capitale, il a été suivi par un pacificateur. Un peu plus tard, ils se sont affrontés. Je crois que le combat a été à sens unique... Il est réellement d’un tout autre niveau... ajouta Arthas, déconfit.

— Comment le sais-tu ?

— J’en ai été témoin de mes propres yeux.

— Et tu es encore en vie ?! s’exclama Baros, étonné.

— Je cherche juste à comprendre. Vincent m’a donné rendez-vous dans deux jours pour me parler de tout ça, je pense.

— Je vois…

— Mais je ne saisis pas de qui il pourrait bien s’agir. Je croyais que Vincent était un loup solitaire.

— Il ne l’a peut-être pas été toute sa vie… Après tout... Il a plus de trois mille ans d’après les écrits les plus anciens.

— Je pense qu’il est même plus vieux que ça… Mais comment est-ce possible ? Seuls les elfes peuvent avoir une telle espérance de vie ! s’exclama le futur empereur.

— Certains ont émis l’hypothèse que ça soit lié à sa grande puissance spirituelle. Mais nous nous égarons… As-tu le moindre indice sur cette femme ?

— Non…

— Alors on nage dans le noir total…

— Ah si ! Elle doit avoir des cheveux blond platine, en tout cas c’est une piste.

— Bon… regardons dans les écrits anciens… peut-être trouverons-nous quelque chose.

Baros se releva de sa chaise en soupirant, se doutant qu’avec aussi peu de variables, cela revenait à chercher une aiguille dans une botte de foin. Malgré tout, il fut rapidement rattrapé par l’optimisme d’Arthas qui se leva à son tour en s’écriant :

— Faisons cela !

Puis, les deux hommes se mirent à fouiller dans les livres ancestraux que le sage collectionnait. Arthas finit donc par jeter un coup d’œil sur les grandes bibliothèques en bois remplies à ras bord de centaines d’écrits et qui semblaient être classés par chronologie avec assiduité. Tandis qu’il se perdait devant autant de livres, il put entendre Baros au loin lui parler :

— Avouez Arthas. Vous n’êtes pas venu pour ça. Vous étiez impatient de repasser une soirée avec moi !

— Je dois l’admettre Baros, c’est un plaisir que de parler avec vous. J’étais déjà curieux sur beaucoup de choses avant d’entrer ici. Mais tous ces livres... toute cette connaissance...

— La connaissance, c’est le pouvoir Arthas. Ne l’oubliez jamais.

Vous ferez un excellent empereur, c’est certain, pensa Baros.

Tandis que la soirée passait rapidement en cherchant un moindre indice dans cette source infinie d’information, Vincent de son côté, passait la nuit à la belle étoile juste devant l’auberge du petit et unique village du Loch Modan. Il n’aurait pas été contre un indice à cet instant, ne sachant plus où aller, la piste vers cette Sélène s’était arrêtée nette devant cette mine archéologique. Autre chose s’était produit devant cet endroit... Ces mots de Shanna semblaient encore résonner avec force dans la tête de l’homme. Avait-il réellement manqué d’honnêteté ? Qu’aurait-il dû faire ? Bien sûr, aucune réponse ne lui vint tandis qu’un orage se formait dans le ciel, grondant de plus en plus fort.

Une pluie abondante finit par s’abattre sur la région et Vincent resta immobile, ne s’en souciant pas un instant. L’homme finit par rouvrir les yeux et froncer des sourcils tandis qu’une ombre grandissait et se rapprochait dans l’obscurité de la pénombre, arrivant lentement dans le dos de Vincent. Ce dernier ne fût pas le moins du monde surpris, et engagea la conversation sans même se retourner :

— Qui es-tu ?

— À vos yeux ? Je n’en ai aucune idée pour le moment…

— Que me veux-tu ?

— Je désirais rencontrer l’homme dont j’entends parler chaque jour.

— Ce n’est peut-être pas très prudent… grogna légèrement Vincent.

— Je prends le risque, insista la femme d’un ton certain.

Vincent se retourna et vit une vénus au teint très pâle, ses cheveux étaient filiformes et blancs. Elle avait une grande robe serrée qui se terminait en lamelles à partir de la taille, et qui descendait jusqu’au milieu de ses fins mollets. Les manches, amples, disqualifiaient d’emblée l’habit d’être une tenue de combat. Mais sur sa joue gauche, ses mains et ses jambes nues, partiellement visibles, un tatouage rouge étrange était dessiné. Les yeux de la femme étaient de la même couleur que le tatouage en question et son léger sourire lui donnaient un air sûr d’elle-même que Vincent n’aimait pas au vu de la situation. Cette dernière s’avança encore de quelques pas et s’assit à côté de Vincent, sans s’en inquiéter le moindre instant, puis elle engagea la conversation :

— J’ai toujours aimé la pluie. La fraîcheur de celle-ci, l’odeur de l’herbe mouillée.

L’homme aux cheveux hirsutes était toujours très intrigué et scrutait la femme, voyant ses longues jambes à découvert et sur lesquelles ruisselait l’eau saline tombant du ciel. Même sa robe, sous le poids de l’eau, prenait davantage les formes de son hôte et révélait des courbes particulièrement charmeuses.

— Qui es-tu vraiment ? insista Vincent.

— Disons... une amie ? répondit la femme d’un grand sourire.

Vincent ne sembla même pas un instant desserrer sa mâchoire, toujours très alerte et particulièrement méfiant de cette femme aux penchants exhibitionnistes.

— Les rumeurs vont de bon train par ici... On dit que vous auriez tué des dizaines d’innocents non loin d’ici... Que tentiez-vous de faire ?

— Je commence à perdre patience... grogna Vincent.

La femme aux tatouages se caressa un court instant les jambes de ses longs et fins doigts et soupira longuement avant de reprendre :

— Si je suis ici… C’est parce que je sais qui vous cherchez.

— Sélène...

— En effet, se contenta de répondre la femme.

— Où est-elle ? demanda Vincent sur un ton menaçant.

— Elle ne tient pas à vous voir pour le moment. Elle voudrait que vous arrêtiez de la chercher.

À cet instant précis, Vincent bondit en attrapant de sa main droite la gorge de la femme. Il la plaqua contre le sol avec violence et tout en l’étranglant, lui dit avec fermeté :

— Tu as plutôt intérêt à me répondre.

— Et vous, dans votre intérêt, vous devriez me lâcher. Sinon vous n’aurez jamais la moindre occasion de revoir votre précieuse sœur, dit la femme en suffoquant.

Vincent ferma les yeux et après quelques instants supplémentaires où la femme se débattait en jetant ses longues jambes dans tous les sens, l’homme se résigna à desserrer son étreinte. La femme reprit aussitôt son souffle en toussant quelques instants avant qu’un silence de plomb ne s’abatte sur eux. Une interminable minute passa avant que Vincent ne repose une question :

— Quand ?

— Je ne sais pas encore…

— Je vais continuer à la chercher. Là-dessus, n’aie aucun doute… Et si tu es réellement son amie, tu devrais peut-être m’aider à la trouver...

— Et que feriez-vous si je vous le disais ? Elle n’est plus la même... Elle a changé...

— On ne change pas. On s’adapte au monde qui nous entoure. Mais au fond, on reste toujours la même personne. Qui plus est, elle a déjà eu sa vengeance…

— Pensez ce que vous voulez…

— C’est elle qui a fait ce massacre aux Maleterres ?

— C’est ce que vous croyez ?

— Je n’en sais rien... Mais je sais de quoi elle est capable... Et ce ne serait pas la première fois qu’elle ferait un acte aussi barbare...

— Alors en effet, mieux vaut que vous ne la retrouviez pas... marmonna la femme.

— C’est toi… Qui la manipule ? redemanda l’homme en foudroyant du regard son interlocutrice.

— Voyons… Votre sœur n’est pas du genre à se laisser manœuvrer par autrui.

— Mène-moi à elle… grogna Vincent perdant patience.

— Je crois qu’il est temps que je parte aussi… Mais seule, répondit la femme en contournant la requête de l’homme.

À l’instant d’après, son tatouage et ses yeux brillèrent légèrement et Vincent tomba sur les genoux, pris d’une douleur incroyablement puissante. Pour qu’une magie affecte Vincent, la femme en question devait être d’une étonnante force spirituelle. Cette dernière s’abaissa devant Vincent et dit :

— Ah oui… Je m’appelle Sakura. J’étudie les poisons sur mon temps libre.

Soudain, Vincent réussit à saisir le cou de la femme comme plus tôt, il ferma les yeux et murmura un mot que seul lui put clairement comprendre juste avant qu’il ne perde prise et finisse en disant d’une voix faible à Sakura : « Enchanté de t’avoir connu ».

Finalement, Sakura relâchée de cette puissante étreinte repartit aussitôt en courant, sentant sa gorge la brûler avec violence. Vincent quant à lui, utilisa une grande quantité d’énergie pour expulser la magie, mais cette dernière n’avait que partiellement disparu et Vincent ne pouvait pas faire grand-chose pour le moment. Il s’allongea dans l’herbe et attendit que le poison passe.

Jetant une fois de plus son regard sur la voûte céleste, Vincent était paralysé dans tous les sens du terme. Qu’aurait-il donc fait s’il savait où était sa sœur ? La magicienne lui avait posé une question à laquelle il n’avait pas de réponses.

~*~

Sakura, de son côté, arrivait dans les Maleterres. Son cou lui faisait incroyablement mal et elle avait l’impression de mourir lentement, marchant avec difficulté dans une tempête de sable qui grandissait en intensité, la simple tâche de rester debout devenait de plus en plus ardue. Elle réussit tout de même à arriver dans une petite zone du pays totalement carbonisé : le sol était noir de cendre et seulement quelques animaux extrêmement dangereux y vagabondaient encore avant qu’elle ne finisse soudainement par s’écrouler à terre, sentant la fin imminente.

Elle vit au loin approcher Sélène. La femme avait un visage pâle, ses cheveux blond platine formaient deux grandes mèches de chaque côté de son minois tandis qu’elle avait un chignon derrière la tête pour ne pas avoir sa crinière qui la dérange en combat. Ses yeux étaient de la même couleur que ses cheveux, et son regard semblait glacial, prêt à tuer n’importe qui, n’importe quoi sans la moindre émotion. Ce regard se rapprochait de toute évidence à celui de Vincent ou du pacificateur Amadeus.

La blonde était habillée d’une robe noire sur laquelle était posée une épaisse cuirasse dans la même teinte et au design très acéré. L’armure était composée d’un plastron massif ainsi que d’épaisses tassettes couvrant le flanc des cuisses par d’énormes plaques de métal d’ébène. Les bras étaient tapissés d’un veston en cuir aux sangles apparentes tandis qu’elle avait une protection sur le cou qui remontait jusqu’au début du visage et se terminant sur deux longues pointes acérées se hissant encore jusqu’au milieu des joues de la femme.

Les avant-bras étaient équipés d’énormes protections ressemblant à des écailles de reptile ; faites avec des rangées de piques des côtés extérieurs des avant-bras ainsi qu’aux coudes. Toute la main était recouverte de l’armure des avant-bras jusqu’au niveau des doigts d’où de petites pointes étaient incrustées formant une sorte de poing américain bien plus létale. Ses bottes avaient le même design acéré et violent que le reste et remontaient à hauteur du genou.

Sous cette tempête bientôt à son paroxysme, la robe sombre de Sélène virevoltait avec fureur tandis qu’elle s’approchait de la femme aux cheveux blancs, agonisante. La blonde arriva finalement devant Sakura et vit la peau du cou totalement rongée. La femme fronça des sourcils, comme sachant parfaitement ce dont il était question et dit aussitôt à Sakura d’une voix rassurée, mais néanmoins perturbée :

— Tu ne mourras pas.

— Que m’arrive-t-il alors ? demanda Sakura, morte d’inquiétude.

— Tu te vides de toute ta force spirituelle.

— C’est donc ça qu’il t’avait fait... soupira Sakura.

— Oui, répondit simplement la blonde, d’un visage attristé.

— Dans ce cas, je ne peux plus rien faire pour t’aider dorénavant, rajouta la magicienne, désemparée.

— Que tu sois à mes côtés est suffisant Sakura…

Puis, Sélène enlaça Sakura, et les deux femmes finirent par s’échanger un long baiser avant que la blonde ne porte sa compagne sur ses épaules et que les deux femmes partent vers le sud de la zone, très certainement vers leur repère, pour se mettre à l’abri du climat violent.

Laisser un commentaire ?