Dragons - Volume I : l'Ordre

Chapitre 23 : CHAPITRE V - Le réveil

2533 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour 24/08/2019 22:58

La pleine lune était de sortie et illuminait l’océan de mille feux à quelques centaines de mètres au sud d’Auberdine. Le vent très léger en cette heure ne provoquait que peu de remous sur la mer et sifflait très doucement dans les oreilles de l’équipe de dragons. Finalement, après quelques minutes de marche à s’éloigner de toute vie, Vincent s’arrêta et ses compagnons en firent aussitôt de même. Après quelques minutes de plus, le long de la côte, Vincent s’immobilisa et dit :

— Je vais libérer beaucoup d’énergie… vraiment beaucoup. Érigez une barrière pour protéger les alentours.

— Euh… Et on fait ça comment ? s’intrigua Arthas.

— Nous allons nous positionner autour de lui à une cinquantaine de mètres et graduellement libérer notre énergie vers lui pour lui faire obstacle, expliqua rapidement Sélène.

Shanna fronça des sourcils, se rappelant cette énergie qui avait franchi Hyjal, se demandant comment ils pourraient contenir une telle chose. Vincent avait remarqué son visage inquiet et reprit d’une voix calme :

— Vous allez y arriver… Je dirige l’énergie vers le ciel, les quelques résidus autour de moi devraient être bloqués sans grande difficulté.

— Nous sommes prêts, dit Sélène, tandis qu’elle prenait position en dernière.

— Bien, acquiesça Vincent en fermant les yeux.

Aussitôt fait, l’air autour d’eux se réchauffa d’un coup tandis que sable fin de la plage au pied de Vincent se mettait à tournoyer. L’afflux d’énergie était déjà impressionnant et chaque dragon autour de l’homme aux yeux écarlates se concentra afin de libérer tout autant de force. La montée en puissance devint cependant plus lente, comme si Vincent aidait ses équipiers à suivre la cadence tandis que peu à peu, la mer à quelques dizaines de mètres d’eux gagnait en agitation.

Cette libération de force n’était sûrement pas grand-chose pour Vincent. C’était ce que pensait Arthas. Malgré tout, l’homme était déjà incroyablement impressionné par cette capacité à extérioriser avec aisance tant d’énergie. Peu à peu, le futur empereur se sentit plus à l’aise avec cette force, presque palpable du bout de ses doigts, fermant les yeux et se laissant guider par ses sensations.

Sélène surveillait les deux jeunes dragons dont elle ne connaissait pas grand-chose et tandis que Shanna semblait déjà avoir expérimenté ce genre de moments, la blonde se concentrait sur Arthas. La sœur de Vincent était particulièrement impressionnée que cet homme qui n’avait jamais réalisé la force qui coulait dans ses veines soit aussi rapidement capable de l’exploiter.

Cela faisait presque cinq longues minutes que la libération d’énergie se faisait et sa puissance avait quintuplé, créant de véritables tumultes dans la mer aux vagues d’une rare force dans cette région. Soudain, alors que les répercussions dans la barrière semblaient enfin se calmer, comme si l’accélération s’était arrêtée, une énorme énergie fut libérée d’un coup et le vent gagna en vitesse même en dehors du champ d’action de Vincent. Les vêtements de ce dernier virevoltaient à vive allure et de plus en plus rapidement avant qu’il ne tende sa main droite devant lui tout en desserrant le poing.

Après quelques secondes, un énorme choc se produisit et Vincent braqua la tête vers le ciel comme affecté par la puissance malgré lui avant qu’il ne soit noyé dans une lumière aveuglante. Cette même lumière s’éleva à quelques mètres dans les airs, prenant peu à peu la forme d’un dragon.

Chacun des participants et témoins de la scène put voir cette majestueuse créature d’énergie s’envoler dans un silence total, n’arrivant pas à quitter des yeux le monstre rayonnant qui se dessinait lentement à quelques mètres au-dessus d’eux. Après deux bonnes minutes, la créature était finalement totalement matérialisée et cette dernière prit son envol. Ses battements d’ailes firent voltiger le sable et soufflèrent les quatre guerriers au sol qui eurent du mal à rester en position. Le dragon monta haut dans les airs avant de pousser un hurlement qui sembla uniquement résonner dans le corps même de chacun des membres de l’équipe. Cette sensation qui les traversa d’une puissance et d’une clarté sans équivoque fut la preuve irréfutable de leurs potentiels.

Le dragon de lumière finit par s’estomper en prenant de l’altitude tandis que Shanna et Arthas avaient encore leurs regards complètement rivés vers la majestueuse créature, sous le choc de ce qu’ils venaient de vivre. Pour Vincent et Sélène, ce qu’il venait de se passer ne sembla pas les affecter outre mesure et tandis que l’équipe se réunissait à nouveau, l’homme aux cheveux hirsutes reprit d’une voix très calme :

— Attendons ici au moins une demi-journée…

— Aussi longtemps que ça ?! s’étonna Arthas.

— Rien ne dit que des dragons soient dans les parages. On doit leur laisser du temps pour nous rejoindre, expliqua Sélène.

— Et pourquoi ne pas le faire au Désert du Néant ? Nous gagnerions du temps, rajouta le blond.

Il aime bien tout remettre en question lui ! pensa Sélène en fronçant des sourcils.

— Cela n’aurait rien changé, il aurait fallu les attendre. Qui plus est, nous pourrions tout à fait être incapables de les appeler là-bas pour peu que les pacificateurs y soient déjà et tentent de nous en empêcher. Et dernière raison, il y a un port à Auberdine, cet endroit a été évacué et reste plus facile d’accès que le Désert du Néant, expliqua longuement Vincent.

— Je vois que tu avais pensé à tout. Très bien…

— Et si on s’installait à l’auberge pour le moment ? Ce sera toujours mieux que de rester debout, argumenta Shanna.

Tandis que l’équipe acceptait la proposition de la brune, partant vers le bâtiment désert, Arthas demeura immobile, jetant un œil sur l’un des pontons du quai à distance. L’équipe qui se rendit compte de l’absence du futur empereur s’arrêta et se tourna vers ce dernier avant qu’il ne regarde Vincent et reprenne avec détermination :

— Laisse-moi aller à Darnassus…

— Je te croyais recherché ? s’intrigua Vincent.

— Quelqu’un doit s’y rendre. Il faut s’assurer que la situation est sous contrôle. Et puis, je peux peut-être nous trouver un bateau pour faire le voyage vers Hurlevent. Autrement nous n’aurons jamais de navire en partance d’ici avant demain après-midi, dans le meilleur des cas…

Vincent fronça des sourcils, saisissant la pertinence des arguments du blond.

— Et si nous y allions tous ensemble ? rajouta à son tour Shanna.

— Impossible, il n’y a qu’un petit voilier apponté. Il n’y a que deux places, argumenta Arthas.

— Et puis quelqu’un doit rester ici si des dragons venaient à arriver, rajouta Sélène.

— Et ce ne peut être que Vincent, conclut à son tour Arthas en fixant la sœur de ce dernier.

Leurs regards fixés l’un sur l’autre, Sélène et Arthas étaient inconditionnellement sur la même longueur d’onde et avant que Vincent ne puisse dire quoi que ce soit, sa sœur s’avança d’un pas et se tourna vers lui avant de le regarder d’un air déterminé :

— Je vais l’accompagner.

Les frère et sœur se regardèrent longuement avant que Vincent ne soupire et réponde simplement : « Ne prenez pas de risques inutiles ». Sur ces uniques mots, le duo s’empressa de rejoindre la petite embarcation et partit très rapidement en direction de la capitale à plus de vingt kilomètres du continent. En voilier, il leur faudra plus d’une heure pour rejoindre Teldrassil.

~*~

À presque mille kilomètres au sud d’Auberdine, la lune haute dans le ciel n’arrivait pas à percer les épais nuages qui couvraient la région de Silithus. Au centre de cette région au sable carminé, à la cime d’une haute et large colline se dressaient des remparts imposants, couronnant le relief naturel sur toute sa périphérie. Une longue pente semblait avoir été creusée afin de rallier le niveau du sol depuis cette hauteur de plus de six mètres.

Staghelm était une forteresse comme on en faisait plus ; aux défenses intelligemment positionnées, tout comme son propre emplacement en contre-haut et au centre de la région. Pourtant, malgré cet emplacement si idéal tactiquement, chaque soldat qui s’y trouvait semblait courir ici et là à toute vitesse. La position militaire était en ébullition tandis qu’au sommet du donjon se trouvaient plusieurs officiers, scrutant l’horizon nébuleux de leurs longues-vues.

L’attaque des déviants était pour très bientôt, mais personne ne savait en réalité d’où celle-ci viendrait. Les ordres reçus d’Avalon avaient été très clairs et la forteresse devait à n’importe quel prix réduire cette poche de résistance à néant. Le plus expérimenté de ces hommes, commandant de Staghelm, ne semblait pourtant pas inquiet. Les déviants n’étaient pas organisés et il ne voyait pas comment une armée aurait pu se former tandis qu’ils aspiraient à s’entretuer les uns et les autres, ne voulant pas de la paix offerte par l’empire.

Depuis le départ, cette information lui avait semblée étrange, mais qu’importe, les ordres étaient les ordres et toute la garnison était sur le qui-vive quand soudain, un officier sur sa gauche se mit à hurler qu’il voyait quelque chose. Ses deux voisins s’empressèrent de regarder au même endroit, ne décelant rien dans cette obscurité asphyxiante. Tout à coup, des petites lumières, telles des torches, furent visibles dans leurs longues-vues avant que celle-ci ne semblent s’envoler violemment.

Le commandant comprit aussitôt le danger et hurla aussitôt : « Boucliers !!! » L’ordre fut très rapidement acheminé par de nombreux sous-officiers jusqu’à ce qu’il atteigne la cour intérieure du fort. L’amas de lumières réapparut enfin dans le ciel, bien plus proche qu’il n’avait été repéré initialement et vint s’abattre avec violence sur le château. Cette pluie de flèches enflammées fit aussitôt se lever quelques hurlements de douleur tandis que tout le monde ne parvint pas à y échapper. Un combat aurait bien lieu, il n’y avait pas eu d’erreur.

Face à cette réalité, le commandant reprit son poste d’observation et scruta tous les alentours avant de sembler se paralyser. L’homme lâcha sa longue-vue immédiatement et expliqua à ses lieutenants :

— Il y a au minimum quatre divisions différentes qui nous prennent d’assaut. Nous sommes encerclés. Faites relayer le message et que les sections se répartissent sur ces directions ! finit-il en montrant du doigt chacun des endroits où l’attaque arrivait.

Tandis que le sous-officier acquiesçait l’ordre, prêt à le transmettre aussitôt, le commandant posa sa main sur son épaule et reprit d’une voix grave :

— Autre chose… Envoyez un message à Avalon, le combat a commencé et les forces ennemies présentes sont supérieures à leurs estimations, il nous faut des renforts immédiatement.

Aussitôt les informations furent transmises, sans en perdre un instant l’anxiété initiale venant du commandant et rapidement les forces militaires s’organisèrent face aux murs et créneaux pour repousser l’attaque en cours tandis que dans une pièce au rez-de-chaussée d’une des tours, un homme attachait des messages aux pattes de pigeons dans des cages stockées par dizaine dans un grand châssis de bois.

Finalement, l’homme ouvrit la trappe de cinq cages différentes et les pigeons prirent leur envol en passant par une grande ouverture dans le mur adjacent. Les oiseaux prirent rapidement de la distance sur la forteresse assaillie, disparaissant dans l’obscurité avant qu’une impressionnante lumière n’éclate à quelques dizaines de mètres au-dessus de l’édifice de pierre, éclairant toute la plaine et les quelques nuages sur près d’un kilomètre à la ronde.

Cette lumière, en plus d’être un signal repérable par les avant-postes des régions voisines qui pourraient rapidement transmettre l’urgence, fut également propice pour tenter d’estimer les forces attaquantes et les officiers comprirent rapidement qu’il devait y avoir près de mille ennemis. La forteresse ne comptait que deux cent cinquante soldats sur place, mais l’avantage du terrain avait toujours suffi à repousser toute attaque ici même, au fil des siècles.

Soudain, une seconde nuée de flèches traversa le ciel avant de finir en s’abattant sur quelques soldats malchanceux. L’armée finit enfin par riposter et s’envolèrent de la haute forteresse une centaine de projectiles dans quatre directions différentes. Les assaillants étaient entièrement à découvert dans ce désert et n’avaient aucun endroit, aucun objet pour chercher la moindre couverture, subissant aussitôt de lourds dégâts.

Témoin de cet échange largement favorable à son armée, le commandant inspira un grand coup, se disant que tout était encore faisable quand soudain, ce dernier perçut le bruit inquiétant du bois qui craque au loin. « Armes de siège !!! » s’écria-t-il aussitôt avant que plusieurs boulets de plusieurs tonnes ne viennent s’écraser contre un mur à flanc de colline et au milieu de la cour, écrasant trois pauvres malheureux sur le coup.

Ces armes de siège pouvaient leur coûter la victoire et il fallait les neutraliser au plus vite. Le commandant s’empressa alors avec ses officiers de repérer leurs positions exactes puis d’ordonner le tir de flèches enflammées par tous les archers disponibles sur chacun de ses instruments de destruction, l’un après l’autre.

Le temps que ces engins soient neutralisés, une dizaine de projectiles firent mouche et causèrent la mort d’une trentaine de soldats, abîmant également le mur ouest. L’entrée depuis la pente se situait à l’est et pour peu que les forces ennemies ne progressent suffisamment et que le mur meurtri puisse être franchi, ils pourraient être pris en tenaille.

Le commandant savait tout cela et observait la situation en tentant de donner les ordres les plus clairs et les plus précis possible, gardant toute sa tête malgré le chaos ambiant, conscient que cela pourrait faire la différence.


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