Un nouveau monde

Chapitre 9 : Le chef de la Confrérie

5114 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 09/05/2020 18:04

Quand Gahahli reprit ses esprits, elle sentait qu'elle était transportée sur le dos d'une personne assez costaude tel un vulgaire sac à pommes de terres, et réalisa assez vite que ses mains dans le dos, de même pour ses jambes et qu'elle avait la tête dans un sac en toile de jute. De ce qu'elle pouvait percevoir à travers le sac, elle devait dans un lieu sombre, étroit, sinueux et humide, comme un tunnel sans fin sous la terre, et aussi qu'elle n'était pas seule avec son "transporteur". Elle entendait en effet des bruits de pas s'affairer le long du tunnel ainsi que des voix ordonnant de presser le pas, que "tout devait être prêt pour le lever du jour" et que "le chef ne tolérerait pas le moindre retard".

De quoi parlaient-ils, la jeune elfe n'en avait pas la moindre idée. Et quand bien même, ce n'était pas ce qui la préoccupait le plus à ce moment précis.

Elle se remémorait les derniers instants avant qu'elle ne se fasse assommer par derrière et se souvint de ses amis tous affalés sur le sol autour du feu de camp... ainsi que le garçon blessé qu'elle était venue faire soigner.

— Qu'avez vous fait des mes amis ? interrogea-t-elle à son transporteur impatiente en se débattant du mieux qu'elle pouvait. Et l'enfant ? Que lui avez vous fait ?

— Tais-toi, catin, et tiens-toi tranquille ! cria une voix grossière tandis que l'elfe reçut un violent coup de bâton sur le sommet du crâne.

— Que leur avez vous fait ? insista la jeune elfe impatiente et malgré la douleur.

— Je t'ai dis de te taire ! reprit la voix tout en assenant un second coup de bâton.

— Doucement, mon frère ! intervint la voix du transporteur qui était plus calme et posée que la première. Le chef a été clair. "Amenez-les dans mes quartiers et ne me les amochez pas". Et pour répondre à tes questions, l'amie, tu n'as pas à t'en faire pour tes amis... pour le moment. Quant au gosse, j'ai bien peur que tu n'aies plus à t'en soucier.

Gahahli n'eut pas besoin d'en entendre plus. À tous les coups, l'enfant avait dû succomber à sa blessure. Ou alors, "on" avait fini le travail de son agresseur. La jeune elfe sentit quelque chose se briser en elle. Ou plutôt se re-briser. C'était comme si on avait raviver une cicatrice vieille de cinq ans.

— Pas la peine de pleurer sa mort, reprit la voix du bourrin. Ce morveux n'a eu que ce qu'il méritait. On lui avait dit qu'il ne lui arriverait rien tant qu'il resterait à Ruisselune, qu'il aurait une chance de revoir ses parents s'il faisait exactement ce qu'on lui disait. Et quand ils paieront la taxe qu'ils nous doivent.

— Et comme chacun sait, les enfants désobéissants doivent être puni, ajouta la voix du transporteur en ricanant.

La tristesse que ressentait la jeune elfe laissa aussitôt place à de la colère. Jamais elle ne serait attendu à autant de méchanceté de la part de ses ravisseurs, même en étant consciente que ceux qu'elle était partie affronté dans la Marche de l'Ouest n'étaient pas des enfants de choeur. À cause d'eux, non seulement un enfant était mort après avoir été séparé de ses parents, non seulement elle n'avait rien pu faire pour le sauver, mais en plus de ça, quelque part dans le royaume, un couple d'honnêtes gens attendaient désespérément la libération et le retour d'un fils qu'ils ne reverraient jamais. Et le pire était qu'ils s'en félicitaient. Même les orcs avaient plus de dignité que ces bandits. Ça ne pouvait être des humains, songeait l'elfe révoltée, pour se complaire ainsi dans autant de cruauté. Ça ne pouvait être que des démons dans des corps d'humains.

Ne pouvant plus contenir sa colère, elle se débattait de plus bel malgré ses membres attachés, traitant ses ravisseurs de tous les noms et jurant que si elle n'avaient pas les mains attachés, elle leur aurait fait connaître leur douleur.

Elle eut pour toute réponse à troisième coup sur la tête qui lui fit perdre à nouveau conscience.


En reprenant à nouveau ses esprits (non sans un sérieux mal de crâne), Gahahli sentit qu'elle était assise sur un sol en bois et entendit les voix de ses compagnons émergeant de leur léthargie.

— Les gars, vous êtes là ? s'écria la voix de Baelbo trahissant la panique. Qu'est ce qui nous arrive ?

— Oh pas si fort, Bilbo ! répondit celle de Batël. Je crois bien m'être encore pris une cuite.

— C'est BAEL-bo, maître nain ! corrigea le gnome d'un ton énervé. Comme Lor-DAE-ron, bon sang de bois ! Et je n'ai pas souvenir qu'on ai consommé de l'alcool, l'autre soir !

— C'était peut-être la soupe qui était indigeste, supposa Bartélo.

— On vous a drogué, leur dit sèchement l'elfe d'un ton maussade.

— Dame Gahahli, vous êtes là aussi ? s'exclama le gnome. Loués soient les Titans, vous êtes... dans la même galère que nous, c'est ça ?

La jeune elfe resta muette, n'ayant plus le moral de répondre quoi que ce soit.

— Alors si je comprends bien, on a tous été piégés ? en conclut le nain. Maudit soit ce Roidemantel ! Je savais qu'on aurait pas dû lui faire confiance !

— Comment aurait-il pu faire ça ? demanda l'humain incrédule. C'est un ancien chevalier de la Main d'Argent ! Un paladin ! Jamais il n'aurait fait une chose pareille !

— Roidemantel n'a piégé personne, annonça une voix que Gahahli reconnut comme étant celle du capitaine de la Colline. Il a juste été naïf de croire que sa base d'opération serait entre de bonnes mains en son absence, ignorant qu'elle a été infiltré.

On retira le sac en toile de jute qui enveloppait la tête de la jeune elfe, ainsi que pour ses compagnons. Il était temps ! On peinait à respirer dans ces sacs.

L'elfe comprit alors qu'elle et ses compagnons, tous attachés, se trouvaient sur le pont de ce qui s'apparentait à un navire à l'intérieur d'une immense grotte. Tous étaient adossés à la balustrade de ce qui devait être le côté tribord du navire. Un local ressemblant étrangement à une chaumière mais dépourvue de fenêtre se tenaient à sa poupe tandis qu'un autre aux murs blindés semblaient faire office de proue, devant lequel se tenait ce qui ressemblait à une immense porte blindée faisant toute la largeur de la grotte.

La faux capitaine leur faisait face, non plus dans sa tenue de garde de la Colline, mais dans une élégante tenue noire rehaussé d'un fil doré, lui donnant l'air d'un noble ayant plongé dans la criminalité, le foulard rouge pendant à son cou. Son air charmeur malgré ses traits fatigués avaient fait place à de la malice brillant dans ses yeux.

Deux bandits se tenaient à côté de lui, tels des garde du corps, ainsi qu'un bolein en tenue de pirate et au sourire sadique se curant les ongles avec un sabre d'abordage.

Il tenait fermement dans un de ses bras une jeune femme en tenue de Défias que Gahahli ne tarda pas à reconnaître comme étant celle qui avait tenté d'égorger Bartélo l'autre soir, malgré son visage tuméfié. Elle semblait encore plus apeurée que les quatre aventuriers ligotés.

— Alors dis moi, ma chérie, seraient ceux qui t'ont causé du tort l'autre soir ? demanda le faux capitaine à la jeune femme d'une voix qui se voulait douce et rassurante mais n'en était qu'encore plus terrifiante dans le contexte ici présent.

— H-h-hormis le nain, o-o-oui, répondit la jeune femme en balbutiant.

— Donc tu confirmes que l'un d'eux a permis à l'arrestation de bon nombre de mes hommes, qu'en raison de cela, je t'avais donné pour seule et unique tâche de l'assassiner à la manière qui te conviendra et dont la présence parmi nous confirme que tu as misérablement échoué dans ta pourtant simple mission ? redemanda le faux capitaine d'un ton surprenamment serein.

La jeune femme répondit d'un nerveux hochement de tête. Elle sembla sur le point de pleurer, d'implorer pardon ou pitié.

— Merci, mon enfant, c'est tout ce que je voulais savoir, dit calmement son chef avant de lui planter un cimeterre dans le ventre. Merci pour ton inutilité !

Il desserra son étreinte et laisser tomber la jeune femme aux pieds des aventuriers captifs.

Baelbo réprima une envie de vomir.

— Une si jolie femme ! protesta Bartélo. Vous n'avez vraiment pas de cœur !

"Ho ! Fermez la, vous !" voulut répondre Gahahli à l'intention du jeune humain, sachant qu'elle avait vu pire avec la tentative du meurtre du petit garçon. Cependant, elle ne pouvait s'empêcher, bien que secrètement, d'éprouver de l'empathie pour la jeune femme, quand bien même elle était prête à lui cribler de flèches la dernière fois qu'elle s'était vue. Encore une victime de la Confrérie. Sauf que cette fois, la victime était dans son propre camp. Même à l'égard de ses sous-fifres, rien n'arrêtait l'impitoyabilité de la Confrérie.

— Balancez moi ça par dessus bord ! ordonna le chef à deux de ses gardes du corps qui s'exécutèrent aussitôt et transportèrent le corps sans vie de la jeune femme.


— Et maintenant ? demanda fébrilement le gnome. Ça va bientôt être notre tour, n'est-ce pas ?

— Oh, pas de suite, maître gnome ! le rassura le chef des bandits. Pas tout de suite ! D'abord, vous allez avoir l'honneur d'assister aux premières loges à la victoire définitif de la Confrérie sur ce royaume corrompu qu'est Hurlevent ! Et vous avez de la chance ! Normalement, ça devait être ce bon vieux Gryan qui devrait être à votre place pour assister à sa cuisante défaite. Mais ce lâche ne s'est toujours pas pointé. Alors honneur aux fières et néanmoins dernière recrue qu'il m'a "si gentiment envoyé" !

— De quoi parlez vous, à la fin ? s'impatienta la jeune elfe.

— Ne vois tu donc rien, l'elfe ? la questionna le gobelin-pirate d'un ton méprisant. Avec tes grands yeux brillants si sensible à la lumière ? Ne vois-tu pas où toi et tes p'tits copains vous vous tenez ?

Gahahli avait balayer les environs du regard, elle ne voyait rien d'autre qu'un bateau. Batël quant à lui parvint à jeter un coup d'œil par dessus la balustrade sur laquelle le groupe était adossé, afin d'avoir une plus large vision du navire.

— Un pont surélevé... des canons de partout... des roues à aube... la coque blindé... Par les Titans ! Nous sommes sur un cuirassé !

— Exactement, le nain ! confirma le gobelin. Et notre cher VanCleef m'en a nommé capitaine.

— Et ceci n'est rien d'autre que l'apothéose de notre projet de vengeance sur Hurlevent et ses habitants corrompus, ajouta le dénommé VanCleef.

— Attendez ! intervint le gnome. Une "vengeance" ? Mais de quoi ? Qu'est-ce qu'on vous a fait, à la fin ?

— Ouais, pourquoi vous faites ça ? ajouta l'apprenti paladin. Je veux dire, détrousser des gens sur les routes, c'est une chose, réduire tout un royaume à néant...

— Pourquoi je ne suis pas surpris par tant d'ignorance ! s'exclama le chef d'un ton désabusé. La corruption de l'Alliance dépasse décidément toute compréhension. Sachez que nous n'étions pas toujours de bandits de grands chemins. Avant nous étions d'honnêtes maçons. C'est nous qui avions reconstruit la cité de Hurlevent après qu'elle fut détruite par la Horde des orcs pendant la guerre. Mais le roi et ces nobles véreux ont refusé de nous payer pour notre dur labeur, et même pire, nous ont injustement chassé jusqu'aux frontières de leur royaume corrompu, tout en profitant de notre travail pendant dix ans. Mais cela va prendre fin, aujourd'hui même.

— À l'aube, et qui ne saurait tarder, nous ouvrirons les portes qui sont derrière vous et nous prendrons la mer, annonça le gobelin. Nous longerons la côte et une fois que nous serons en vue de la cité...

— Holà, pas si vite ! l'interrompit Batël. Je suis d'accord qu'on aurait dû vous payer, surtout que vous avez fait un plutôt bon travail avec la cité, mais là, pardon de le dire, vous allez trop loin ! Parce qu'on ne parle plus du tout de vous venger à proprement parler des riches qui vous doit de l'argent, là. On parle de faire payer vos problèmes de dettes à des innocents qui demandaient juste un toit où se loger et de quoi se nourrir. Et puis "injustement chassés", j'ai ouïe dire que votre dernière émeutes pour réclamer votre paiement a dégénéré et a fait au moins une victime. Et non des moindres...

— N'inversez pas les rôles ! s'énerva VanCleef qui commençait à perdre patience. C'est nous les vrais victimes. C'est nous qui sommes les plus à plaindre dans l'histoire. Et en tant que tel nous réclamons, justice.

— Vous parlez de "justice" ? marmonna Gahahli elle aussi à bout de patience. Alors que vos actions ont causés plus du tort qu'autre chose ?

— Dame Gahahli, voulut intervenir le gnome, vous ne devrez pas...

— Vous vous dites les "vrais victimes" de l'histoire, reprit la jeune elfe ignorant le gnome. Que l'on devrez vous plus plaindre qu'autre choses ? Mais qu'en est-il de ceux qui ont subi contre lesquels vous vous êtes acharnés ces derniers temps ? Qu'en est-il de ces marchands que vous avez détroussés ? De ces fermiers que vous avez harcelé jusqu'à les chasser de leurs terres ? De ces enfants que vous enlevez à leurs parents pour leur extorquer de l'argent en échange ?

— Taisez vous, petite dévergondée ! lui ordonna sèchement le chef des bandits.

— Vous vous prétendez être les gentils de l'histoire alors que vous n'avez aucun scrupule à vous en prendre à des innocents et jouer avec la vie de vos propres hommes, continua l'elfe. Comme si eux n'avaient pas leur propre problème. Comme si leur vie valaient moins que la votre. Comme s'ils ne comptaient pas.

— Je vous ai dit de vous taire, insista VanCleef.

— Et le pire c'est que vous vous en félicitez ! tempêta l'elfe. Vous êtes prêt à recommencer tant qu'il y aura à dérober, à tuer et à détruire ! Et tout ça pour quoi ? Pour de l'argent ? En quoi ça vous rend meilleur que ceux qui vous en doivent ? Même les orcs ont plus de dignité que vous !

— ASSEZ ! cria VanCleef en pointant son cimeterre sur la gorge de l'elfe, menaçant. Encore un mot qui sort de ta sale bouche et je te jure que ce sera le dernier.

— Allons, mon bon Edwin ! tenta de calmer le gobelin. Tu ne vas pas perdre tes moyens à cause d'une pauvre elfe écervelée ?

Le chef de bandit resta silencieux, fixant du regard la jeune elfe qui la défiait ainsi.


Une détonation provenant de l'autre bout de la grotte résonna soudain, brisant ainsi le silence qui y régnait. En bas, sur la jetée, ce fut le branle-bas de combat.

— Que se passe-t-il encore ? tempêta VanCleef à bout de patience.

— Nous sommes attaqués ! lui rapporta un des bandits en panique. Roidemantel a libéré ses troupes et a trouvé notre base secrète. Et il est venu avec du renfort. Ils viennent de faire exploser la porte de la crique !

— Et c'est seulement maintenant qu'il se pointe, ce vieux débris ? s'énerva le chef des bandits.

— Sans vouloir t'offenser mon bon Edwin mais pour ses troupes, j'avais bien dit qu'on aurait dû les tuer plutôt que les garder enfermer à Ruisselune, réprimanda le gobelin. Mais monsieur tenait à ce qu'ils assistent quand même à leur propre défaite sans pour autant qu'on encombre le navire de leur présence...

— Taisez vous, Vertepeau ! lui répondit sèchement VanCleef. Gardez un œil sur nos "invités" pendant que je m'occupe de Roidemantel. Personne ne défie la Confrérie !

À peine eut-il finit sa place, le chef des bandits quitta le navire d'un bond phénoménal qu'il fut déjà sur la jetée, prêt à affronter les assaillants.

— "Garder un œil", "garder un œil", répéta Vertepeau en maugréant. Je me suis engagé comme navigateur, pas comme baby-sitter. (Il se tourna vers les deux gardes du corps de VanCleef sur le point de rejoinrde leur chef) Vous deux, enfermez les dans la cale ! Et que ça saute !

— Pas si vite, gobelin ! protesta un des gardes. On ne reçoit des ordres que de VanCleef.

— Ouais, et notre devoir est auprès de lui ! ajouta le second. Alors excuse nous mais on doit lui couvrir les arrières.

— Lâches ! vociféra le gobelin à l'intention des gardes s'éloignant. Mutins ! Marins d'eau douce ! J'en informerai à votre chef que vous avez désobéi à un autre direct de votre supérieur !

Tandis que Vertepeau continuait à lâcher des insultes et des menaces dans le vent, Gahahli entendit quelque chose escalader la balustrade à la poupe du bateau, là où le gobelin ne regardait pas. Elle vit alors Jakua passer par dessus la balustrade et s'approcher furtivement du groupe ligoté. La jeune elfe réprima une envie de crier de joie à la vue de son Sabre-de-nuit vivant et libre de ses mouvements. Elle n'avait aucune idée d'où il avait été durant tout ce temps ni de comment il s'était retrouvé ici, mais au vu de son pelage mouillé (ainsi qu'à l'odeur), il avait clairement dû passer par la flotte.

— Vite, détache nos liens ! lui ordonna la jeune elfe dans un murmure et en présentant au tigre ses mains liés.

Le Sabre-de-nuit ne se le fit pas dire deux fois et rongea les liens du mieux qu'il pouvait avec ses incisives et y parvint juste à temps avant que Vertepeau ne se retourne dans la direction des otages.

La jeune elfe fit de son mieux pour cacher de sa propre stature son tigre qui enchaîna sur les liens de Bartélo, l'air de rien, mais en voyant le gobelin s'approcher d'eux d'un air méfiant et inquisiteur, il était clair qu'il avait flairer quelque chose. SOn expression se figea d'horreur lorsqu'il jeta un œil par dessus l'épaule des prisonniers, repérant ainsi le Sabre-de-nuit.

— D'où il sort, celui-là ? s'écria Vertepeau. Alerte ! Un tigre s'est infil...

Il n'eut pas le temps de finir sa phrase que Batël, bien qu'ayant toujours les mains liés, se jeta sur le gobelin et le plaqua au sol de tout son bois. Gahahli remarqua seulement maintenant que le nain, à cause de sa jambe de bois, était le seul à ne pas avoir eu les jambes attachés, lui laissant davantage de mobilité.

— Je le retiens ! dit le nain tandis que le gobelin suffoquait sous son poids. Libérez-vous et mettez-vous à l'abri !

La jeune elfe en profita pour défaire les liens à ses jambes, saisit Baelbo dans ses bras et suivie de son Sabre-de-nuit ainsi que du jeune paladin ayant finit de ses libérer, va se réfugier dans le local en toit de chaume. Aussi sombre fut l'intérieur du local, ils ne tardèrent pas à y trouver des armes, dont ceux qui leur avait été confisqué quant ils étaient encore dans les vapes.

Gahahli récupéra ainsi son couteau de chasse et s'en servit pour libérer le gnome de ses liens avant de reprendre son arc et son carquois remplie de flèches, tandis que Bartélo se saisit d'un marteau de combat, ainsi que de la hache de guerre que le nain avait récupérer à la Colline.

Ils sortirent de la cabine, la jeune elfe s'occupant de détacher les nains de Batël, toujours allongé sur le gobelin qui peinait à se dégager et à crier à l'aide, tandis que le jeune paladin lui remit sa hache, juste à temps avant que des pirates Défias armés de sabre arrivent en renfort.

— Là, ça commence à me plaire ! commenta le nain avant charger sur les pirates en tournoyant de sa hache. Vous croyez m'impressionner avec vos cure-dents ? J'ai fait le Mont Rochenoire !

Bartélo lui prêta assitance avec son marteau de combat, de même que Jakua qui après avoir incité le gobelin à s'enfuir et sauter par dessus bord, tenait les assaillants à distance en rugissant et balayant l'air de ses griffes, tandis que Gahahli couvrit les arrières de ses compagnons avec ses flèches. Seul Baelbo restait en retrait, ne sachant visiblement pas quoi faire.


Le groupe parvint à mettre les pirates en déroute quand Roidemantel parvint à les rejoindre sur le pont supérieur après s'être frayé un chemin depuis la jetée, essoufflé.

— Par la Lumière, vous êtes tous sains et saufs, mes amis ! s'exclama-t-il entre deux souffle. Si vous savez comme je regrette...

— ATTENTION ! s'écria Bartélo en s'élançant sur le vieux chevalier.

VanCleef venait d'apparaître dans le dos de Roidemantel, prêt à le poignarder de ses deux cimeterre, mais le jeune paladin parvint à temps à intercepter le coup de son marteau. Puis d'un mouvement brusque, il envoya une des deux épées dans l'air avant de disparaître dans les ténèbres de la crique.

VanCleef riposta aussitôt en saisissant Bartélo au corps et plaçant son arme restant sous sa gorge.

— Un mouvement de plus et je le fais saigner ! cria-t-il à l'intention du groupe.

— Décidément, c'est une manie ou quoi, qu'on veuille m'égorger comme un porc ? protesta le jeune paladin.

Le Sabre-de-nuit tenta d'impressionner le chef des bandits avec des grognements, comme il l'avait l'autre soir avec l'assassine dans la même situation. Mais VanCleef resta indifférent à ses menaces.

— Ça va aussi pour le tigre ! ajouta-t-il. Qu'il avance encore d'un pas et...

— Jakua ! Tout doux ! ordonna Gahahli.

Le tigre cessa aussitôt de montrer les crocs et s'arrêta net, tout en fixant le chef des bandits du regard.

— Voilà qui est plus sage ! commenta VanCleef ravi. De toutes façons, vous êtes loin d'avoir gagné.

D'un simple coup d'œil, le groupe se vit aussitôt encerclés de toute part par les bandits restants, tous armés de dagues et d'épées pointés sur le groupe. Et ils étaient nombreux. Beaucoup trop nombreux.

— Maintenant, vous allez gentiment déposer vos armes, vous mettre à genoux et les mains sur la tête, annonça doucement VanCleef. Et ainsi, je laisserai "peut-être" à votre ami la vie sauve...

— VANCLEEF ! retentit une voix fluette depuis le sommet de la cabine au toit de chaume.

C'était Baelbo. Il se tenait sur le toit, dominant l'assemblée d'un regard défiant malgré sa petite taille.

Gahahli n'avait aucune idée de comment il avait fait pour se rendre sur le toit sans que personne ne s'en rende compte, surtout avec ses petits bras ainsi que ses petites jambes, et qu'un sort de téléportation aurait été plus tape-à-l'œil. Mais une chose était sûre, à ce moment précis, jamais l'elfe n'avait vu autant de détermination et de hardiesse dans le regard du gnome, pas même quand il affrontait les orcs noirs dans les marécages.

Le gnome leva lentement les bras et chargea ses mains de boules de feu qui prirent de l'ampleur, allant jusqu'à paraître plus grosse que le lanceur de sort.

Une vague de peur saisit les Défias.

— Il ne va pas oser...

— Il est complètement fou !

— Il va faire sauter le navire !

— Et nous avec !

— Abandonnez le navire !

Tous les bandits sautèrent par dessus-bord, la plupart se jetant à l'eau, sous la protestation de leur chef.

— Revenez, bandes de lâches ! C'est du bluff !

Puis la colère sembla s'emparer du chef des bandits qui dépité laissa tomber son otage et d'un bond toujours aussi phénoménal, atterrit sur le toit de chaume, devant le gnome.

Gahahli vit alors VanCleef brandir son unique cimeterre avant de l'abattre sur le corps du gnome, le transperçant aussi facilement qu'une part de gâteau.

L'espace d'un instant, la jeune elfe crut voir son ami vaciller avant de disparaître de son champ de vision. Elle étouffa un cri d'horreur, puis se laissant envahir par la colère, elle tira ce qui lui restait de flèches sur le chef des bandits encore debout, le touchant à la jambe, à la hanche et à l'épaule.

Sous la douleur des flèches, VanCleef chancela et tomba du toit de la cabine, s'écrasant si lourdement sur le pont qu'il manqua de passer au travers.

— On direz bien que ta chance a tourné, VanCleef ! dit Batël en s'approchant du chef à terre la hache à la main, prête à lui donner le coup de grâce.

— Imbéciles ! rétorqua le chef des bandits entre deux souffles. La Confrérie... survivra ! La Confrérie... triomphera !

Gahahli ne prêta pas attention à la mise à mort de VanCleef, jugeant qu'il aurait son compte de toute manière. Et elle se souciait davantage de son ami gnome. Elle chercha désespérément son corps en contournant le local et appelant le gnome par son nom. Mais aucune trace de son corps, même pas de son sang, qu'elle soit sur le toit ou sur le pont. C'était comme si le gnome s'était évaporée. La jeune elfe fut au bord du désespoir tandis qu'elle continuait à crier le nom de son ami.

— Pas la peine de crier ! retentit la voix de Baelbo depuis la cabine. Je suis juste là, à l'intérieur !

La jeune elfe crut que son cœur allait exploser. La voix du gnome semblait faible, même de l'autre côté de la cloison en bois, mais assez distincte pour indiquer qu'il était vivant.

Elle se précipita à l'intérieur de la cabine et retrouva Baelbo agenouillé tout au fond de la pièce, caché dans l'ombre — si bien que seule la jeune elfe avec sa vision nocturne pouvait le repérer — en train de reprendre son souffle. Aucune blessure apparente.

— Je vais bien, rassura le gnome en voyant l'elfe se précipiter sur elle. J'ai juste... besoin de... récupérer.

Gahahli inspecta brièvement le plafond qui paraissait intact.

— Comment vous... ? demanda la jeune elfe perplexe. On vous a vu sur le toit ! VanCleef vous a...

— Un simple sort... d'illusion, ma chère, répondit le gnome souriant. Que j'ai réussi... visiblement. C'est bien... la première fois.

— Un sorti d'illusion ? répéta l'elfe. Vous êtes... Vous êtes épatant.

L'espace d'un instant, elle jura avoir vu Baelbo rougir tandis qu'elle l'aidait à se relever.

— Mais pour l'amour d'Elune, ne me refaites jamais une peur pareille, lui dit l'elfe.

— Alors ça y est ? demanda le gnome. On l'a eu ? Le chef de la Confrérie, on l'a battu ?

— Même mieux, Bilbo ! répondit Batël qui se tenait sur le seuil de la cabine et présentait fièrement la tête décapitée de Van Cleef.

Gahahli laissa échapper un cri de dégoût devant cette vision. Elle en vint à se demander si c'était vraiment nécessaire. Même à l'égard du chef d'une confrérie de voleur ayant terrorisé le royaume pendant une décennie.

— Ben quoi ? J'aime bien le travail propre et bien fait, moi ! se défendit le nain.

La jeune elfe se retint de le traiter de rustre.


— Alors c'est bon ? demanda Bartélo. Tout est fini ?

— Il est encore trop tôt pour le dire, mon jeune ami, lui répondit Roidemantel en contemplant la dépouille de VanCleef. Qui sait si ces forbans n'ont pas prévu un plan de secours, au cas où ce genre d'incident arriverait ?

— Hé ! Vous pouvez arrêter de jouer les défaitistes cinq minutes ? intervint Batël. On vient de tuer leur chef. À l'heure qu'il est, les Défias doivent être désemparé et en train de ses disperser aux quatre vents ou de jeter les armes. Alors, si on fêtait notre victoire autour d'un bon tonnelet de bière et de victuailles ! Et puis, ah que ça m'a manqué, un petite victoire comme celle-là !

— Hmm... Votre ami le nain n'a pas tout à fait tort, répliqua le vieux chevalier. Bien que je crains que nous n'ayant pas de quoi organiser un banquet pour fêter. M'enfin, je vous propose de rentrer à la Colline avant que les Défias ne reviennent à la charge.

— Et le plus tôt sera le mieux ! approuva Baelbo. Ces grottes me filent la chaire de poule.

Le groupe descendit donc du bateau et arrivé à la jetée, il fut acclamé et félicité par le restant de la milice en train de relever leur camarades blessés au combat.

— Au fait, seigneur, comment vous nous avez trouvé ? demanda soudain Gahahli au vieux chevalier sur le chemin.

— Et bien, c'est grâce à votre tigre, ma chère ! lui répondit Roidemantel. Je dois admettre que j'ai eu du mal à comprendre ce qu'il faisait au beau milieu du sentier et ce qu'il me voulait quand il est venu à ma rencontre en arrivant. Mais clairement il insistait pour que je prenne la route pour Ruisselune plus que celui pour la Colline, pourtant bien plus court et direct. Je crois qu'il avait compris que ma base avait été infiltré, que vous étiez en danger et comptait que je prenne les Défias à revers. Mais ça je ne l'ai compris que trop tard, en arrivant sur place et en voyant les faux miliciens vous transporter jusqu'à la mine de Ruisselune où se situaient leur vrai base. Et c'est d'ailleurs à Ruisselune que j'ai trouvé mes vrais hommes, tous enfermés et ligotés dans une cave d'une des fermes du village.

La jeune elfe se souvint alors de l'attitude anormalement agressif de son Sabre-de-nuit lorsqu'ils s'étaient présenté devant le faux capitaine, et se sentit une nouvelle fois très sotte. Elle savait que son tigre pouvait flairer le danger, même caché ou déguisé, mieux que même le plus alerte des elfes de la nuit. Elle aurait dû s'en rendre compte plus tôt. Jakua avait même tenté de l'avertir pendant qu'elle faisait la sieste.

— Ah et navré de ne pas être intervenu à temps, s'empressa d'ajouter le vieux chevalier. J'ai été retardé à Hurlevent. Par... une vieille connaissance.

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