Un nouveau monde

Chapitre 11 : Un père dans la tourmente

4315 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 29/08/2020 12:30

Il s'était écoulé plus d'une semaine depuis que Fyrvas avait eu sa prise de bec avec sa fille.

Sur le moment, une partie de lui se demandait s'il n'était pas allé un peu fort avec elle, surtout sachant à quel point sa fille était forte de caractère, détestait être consigné et qu'elle avait la rancune plutôt tenace. De plus, le druide savait que sa fille voulait juste aider, se rendre utile, qu'elle croyait bien faire.

Seulement, elle ne pouvait être d'aucune aide à qui que ce soit tant qu'elle manquera de discipline et de maturité. Pour cette raison, un autre partie de Fyrvas lui disait qu'il avait bien fait, qu'il n'avait que son devoir en tant que père. Et ayant déjà failli à sa tâche en tant qu'époux cinq auparavant, il était hors de question pour lui de subir un second échec. Pas avec la seule famille qui lui restait et qu'il n'avait autant chéri de sa vie d'elfe.


Et puis, l'incident de sa fille avec les nagas et les champignons dans la grotte l'avait amené au sud de Sombrivage à enquêter sur les étranges activités d'une secte avec laquelle les nagas s'étaient alliés. Une enquête dans laquelle plus le druide avançait plus elle s'avérait être ardu et périlleuse, et qui en conséquence l'occupa les jours qui suivirent. Elle avait amené Fyrvas à un rivage bordant l'ouest d'Orneval, où se tenaient les ruines d'une ancienne cité elfe datant d'avant la Grande Fracture (une sombre période qui continuait de hanter l'esprit des plus anciens elfes de la nuit) et où se cachait également le repaire de cette sombre et sinistre secte, à savoir un ancien temple dédié à Elune, englouti sous la mer suite à la Grande Fracture et devenu un lieu de culte voué aux Anciens Dieux. Une bonne chose que Gahahli ne fut pas à ses côtés, elle s'en serait mêlée rien qu'en voyant les sectateurs profaner un lieu de culte autrefois dédié à leur déesse vénéré et y pratiquer des sacrifices en nombre considérable. D'autant que la mission était d'enquêter et SEULEMENT d'enquêter, d'espionner et de recueillir des informations, pas d'ouvrir les hostilités avec les sectateurs.

Chose que à laquelle Fyrvas avait lui-même du mal à tenir malgré sa bonne volonté, n'étant pas encore à l'aise avec la forme de félin (pourtant plus adéquate pour ce genre de mission) qu'il n'avait adopté que depuis peu, lui qui était plus habitué à adopter la forme d'un ours quand il lui fallait traiter avec ses ennemis.

Heureusement pour lui, les quelques fois où il dût avoir recours à la force (et donc à sa forme d'ours) pour se tirer d'un mauvais pas n'eurent que de légères conséquences sur sa personne. Pour ce qui est de son enquête cependant, sa discrétion fut légèrement compromise. Définitivement une bonne chose que sa fille ne fut pas à ses côtés, elle se serait moqué de lui.

En plus de ça, procédurier comme l'était le "jeune" druide, il lui fallait faire son rapport à ses confrères à chaque nouvelle information qu'il dégotait, l'obligeant ainsi à faire des allers-retours entre le lieu de son enquête et le Bosquet des Anciens à Sombrivage ou le Poste de Maestra qui était plus proche de la rive à Orneval. Et maintenant qu'il arrivait à la fin de son enquête, il devait en informer ses supérieurs à Reflet-de-Lune puis à l'Enclave Cénarienne à Darnassus.

Vivement qu'on lui apprenait la forme de corbeau ! se plaignait Fryvas. Quitte à devoir jouer les coursiers, cela lui faciliterait tellement la vie !


Néanmoins, il allait rentrer à Teldrassil et ainsi, il pourrait passer le bonjour à sa fille, histoire de s'assurer qu'elle aillât bien et n'ait pas fait de bêtise en son absence.

Il avait songé à poser la question à son supérieur et vénéré maître, l'archidruide Fandral Forteramure qui présidait au Cercle Cénarien en l'absence de Malfurion Hurlorage, quand il vint lui faire son rapport.

Pour toute réponse, l'archidruide lui dit sèchement :

— Je n'ai que faire des agissements de votre mauvaise graine de fille, thero ("étudiant, élève" en darnassien).

Sur le moment, Fyrvas avait réprimé une envie de s'insurger contre l'archidruide pour avoir traiter sa fille de la sorte, chose qu'il aurait fait en temps normal. Mais face à un elfe de la nuit aussi sévère et intransigeant que Forteramure, élevé en plus de ça à titre aussi prestigieux que celui d'archidruide, il valait mieux ne pas se le mettre à dos quelqu'en soit les circonstances.

— Est-ce qu'au moins elle va bien, shan'do ? insista poliment le jeune druide.

— Qu'est-ce que j'en sais ? lui répondit toujours aussi sèchement Forteramure. C'est votre fille, pas la mienne ! Vous pouvez disposez, thero.

Fyrvas l'ignorait à ce moment-là, mais le désintérêt que lui affichait son maître à l'égard de sa fille aurait dû lui mettre la puce à l'oreille. D'habitude, chaque fois qu'il laissait Gahahli sans surveillance à Darnassus, Forteramure était le premier à se plaindre de la jeune elfe turbulente et du moindre de ses agissements, et ne manquait jamais de lui rappeler qu'il devrait se montrer plus intransigeant envers elle.

Pourtant, le jeune druide n'y avait prêtait guère attention et s'était simplement retiré comme si de rien n'était.


Sur le chemin de la maison, situé aux alentours de l'Enclave Cénarienne, en périphérie de Darnassus, il s'attendait à retrouver sa fille sur le pas de la porte sinon dans sa chambre en train de jouer avec son Sabre-de-nuit ou bien avec un bâton pour passer le temps, qu'en le voyant arriver elle allait se mettre à bouder et continuerait de l'ignorer.

Il n'y eut aucune trace ni d'elle ni de son tigre quand il arriva à la maison, et au vue des toiles d'araignées et de la poussière qui recouvraient les meubles, il était clair que personne ne l'avait occupé depuis qu'ils sont parti pour Sombrivage. Sans parler des plantes que personne n'a songé à arroser depuis des semaines.

Fyrvas fut prit d'un doute affreux et commença à interroger le voisinage si par hasard ils n'auraient pas vu ou même aperçu sa fille depuis leur départ pour le continent. Puis il interrogea les maîtres chasseurs qui avaient enseigné à Gahahli les rudiments de la chasse, du tir à l'arc et du dressage des animaux, et bientôt, il interrogea toute la ville jusqu'à la prêtresse Tyrande Murmevent en personne. Tous affirmèrent qu'ils n'avaient pas revu la jeune elfe depuis le jour de leur départ pour Sombrivage.

De plus en plus inquiet, il dût se rendre au village portuaire de Rut'theran situé au contrebas de Teldrassil, où apparement, personne ne se rappelle d'avoir vu d'elfe adolescente et toujours accompagnée d'un Sabre-de-nuit rentrer de Sombrivage. Du moins pas par bateau, mais de toutes manières, traverser la mer à dos d'hippogriffe n'aurait pas été adéquat pour rentrer au bercail avec un tigre et Fyrvas savait sa fille encore trop jeune pour monter de tels montures.

Il dût finalement retourner à la ville portuaire de Sombrirvage, Auberdine, l'endroit exact où il avait vu sa fille pour la dernière fois. Ses recherches ne furent pas plus satisfaisante qu'à Teldrassil, car les résidents n'avaient que vaguement souvenir de Gahahli, de son Sabre-de-nuit qui la suivait partout et de si oui ou non ils avaient bien prit le bateau pour Teldrassil le jour de leur dispute.

Fyrvas fut désemparé. Sa fille avait disparu et il n'avait aucune piste pour la retrouver. Même son flair quand il adopta sa forme d'ours ne lui fut d'aucune aide car l'odeur de Gahahli s'était dissipé au fil du temps et bien trop voilé par d'autres odeurs plus récentes, si bien qu'il n'en restait qu'un bien trop infime trace à peine détectable.

Il lui fallait pourtant des réponses...

"Où peut-elle être ? Qu'a-t-il bien pu lui arriver ?"


Un hululement l'arracha de ses pensées et il vit un hibou au plumage vert émeraude perché dans un arbre qui le fixait longuement. Il ne s'agissait évidemment pas d'un hibou ordinaire ou même d'une créature vivante, mais d'un être issu de la magie des elfes de la nuit. Les Sentinelles sont servent habituellement pour aller en reconnaissance dans les territoire ennemis en toute sécurité.

De plus, Fyrvas aurait juré que ce hibou n'était pas présent deux secondes plus tôt et qu'hormis le hululement, aucun bruit suspect n'avait trahi sa présence. Pas un bruissement d'aile ou même le son d'une branche se pliant sous le poids d'un animal aussi volumineux. C'était comme si le volatile était apparu de nulle part.

Mais qui avait bien pu l'invoquer ? Et pourquoi dans les alentours d'Auberdine où il n'était nullement besoin de surveiller la présence ou les agissements d'ennemis. Même pour garder le village, la présence des Sentinelles résidentes suffisait largement.

À moins qu'il ne s'agissait d'un signe d'Elune. Ou du Rêve d'Emeraude. Peut-être même avait-il envoyé par l'esprit de Méridia, sa défunte épouse.

Fyrvas en fut persuadé quand le hibou reprit son hululement de plus bel. Ce cri avait la même tonalité que l'hibou qu'invoquait habituellement Méridia de son vivant.

Il supplia le hibou du regard :

"Je t'en prie, donne moi une piste !"

Puis le hibou prit son envol vers le sud tandis que le jeune druide se lança à sa poursuite.


Le hibou-émeraude lui fit longer Sombrivage et traverser la forêt d'Orneval et à son grand soulagement, lui fit éviter tout territoire ennemi, que ce soit le lieu de culte avec les sectateurs avec lesquels il avait eu affaire ses derniers jours, les camps d'orcs, de satyres, de nagas et même les lieux où s'étaient réfugié les démons ayant survécu à leur défaite au Mont Hyjal. Au moins Fyrvas pouvait être sûr que Gahahli n'était pas aller se friter avec ceux qu'elle s'était jurée de combattre jusqu'à la mort, il aurait redouté le pire des scénarios si ça s'était produit.

L'oiseau le guida toutefois vers le sud, vers la chaîne de montagnes arides qu'on appelait les Serres Rocheuses et le jeune druide fut de nouveau rongé par l'angoisse. Cette région marquait la frontière naturelle du domaine des elfes de la nuit avec le reste de Kalimdor et n'était pas la plus hospitalière, avec ses falaises et ses pentes vertigineuses, ses canyons et ses vallées où il y faisait chaud et sec, le fait que c'était infesté de harpies, de kobolds et d'autres bêtes sauvages et féroces tels les chimères, les wyvernes, les basilics et les lézards-tonnerre.

De plus, les elfes de la nuit avaient pour habitude de partager cette région avec les taurens, une races d'hommes-bovins pourtant paisibles et respectables, avec lesquels les elfes de la nuit partageaient un mode de vie en harmonie avec la nature mais qui n'étaient pas moins de redoutables guerriers quand la situation les y obligeaient et qui depuis la récente invasion de la Légion Ardente ont prêté allégeance à la Horde des orcs. Autant dire qu'ils étaient passés à l'ennemi. Pour une histoire de dette qu'il auraient avec les orcs pour les avoir sauvé et protégé de leurs ennemis ancestraux, les centaures, et aidé à atteindre les terres verdoyantes du Mulgore situées plus au sud.

Pour ne rien arranger, Fyrvas dut passer par la Combe des Cisailles pour entrer dans les Serres Rocheuses, où s'était établi une entreprise de déforestation tenus de gobelins et de gnomes lépreux, transformant une des rares zones verdoyantes et forestières de la région en une vallée stérile parsemée de souches d'arbres et aux polluées. La peste soit de ces êtres chétifs et de leurs machine infernales ! fulminer le jeune druide. Ils n'avait décidément aucun respect pour la nature ni même pour la vie. Même dans une région où l'eau et la verdure était ce qu'il y avait de plus précieux, ils fallait qu'ils la saccagent de leurs salles pattes.

Fyrvas aurait aimé en venir à bout de ces petits êtres abominables et leur faire payer ce qui à ses yeux équivalait à un meurtre de masse, mais le hibou-émeraude le rappela à l'ordre de son hululement et lui fit contourné le campement des petits êtres verdâtres.


En suivant le chemin que lui indiquait le volatile et qui semblait montait en pente douce, Fyrvas pria pour que le hibou-émeraude l'amène au Pic des Serres Rocheuses. Cela le rassurait de retrouver sa fille saine et sauve au dernier endroit de la région encore tenu par les elfes de la nuit.

Mais à sa grande déception, le hibou ne l'amena qu'à mi-chemin vers le Pic avant de faire le détour vers le bord d'une falaise surplombant la vallée, bord sur lequel l'oiseau se posa avant de disparaître comme s'il n'avait jamais existé, laissant le jeune druide hébété et furieux.

— C'est tout ? tempêta-t-il. Tu m'as fais faire tout ce chemin pour m'amener ici ? Pourquoi ? Pourquoi m'avoir entraîner ici ? Qu'est ce que je suis censé trouver ? Qu'est ce que je suis censé comprendre ? En quoi c'est censé m'aider ? QU'EST CE QUE ÇA VEUT DIRE ?

— Hé, il faut se calmer, l'ami ! intervint une voix grave et éraillé. Tu pourrais nous causer un éboulement.

C'était un tauren. Au pelage blanc. Vieux, à en juger par sa démarche (il se déplaçait lentement avec une cane), ses cornes usées, sons visage bovin fripé et ses yeux ternes. Malgré sa vieillesse, il semblait assez imposant et robuste, le genre à venir à bout d'un lézard-tonnerre à la seul forces de ses mains. Et à en juger par ses vêtements en peau de bête et le totem qui lui servait de pendentif, il avait clairement affaire à un chaman.

Fyrvas resta sur ses gardes, ne sachant comment réagir face à l'individu qui approchait.

— Rassures-toi, mon jeune ami, lui dit le tauren d'un air amusé. Je n'ai aucune intention belliqueuse, surtout pas avec un elfe de la nuit et comme tu peux t'en douter, je n'ai plus vraiment l'âge de chercher la bagarre. Seulement, je voudrais te signaler que tu te tiens sur un lieu sacré.

Le jeune druide ne comprit pas tout de suite, jusqu'à il remarqua un cercle de terre brulé à ses pieds.

— Oui, mon gars, reprit le tauren d'un ton cette fois plus mélancolique tandis qu'il s'agenouillait devant. C'est ici que j'ai dû brûler la dépouille de deux des êtres qui m'ont été les plus chers avant de disperser leurs cendres et j'y viens chaque année me recueillir. Oh, ne t'excuses pas, mon jeune ami à la peau violette. Tu peux rester et me tenir compagnie. Les esprits m'avaient prévenu que j'allais avoir aujourd'hui, de la compagnie.

La dernier phrase de l'homme-bovin intrigua Fyrvas. "Les esprits aurait prévenu le tauren de sa présence". Ne serait-il pas une sorte de... ?


— Ne te demandes-tu pas qui sont ces êtres si chers que j'ai perdu ? le questionna le vieux tauren.

Il aurait été honnête, le jeune druide aurait répondu qu'il n'en avait rien à ciré, d'autant qu'il n'était plus en si bon terme avec les taurens depuis qu'il avaient fraternisé avec la Horde. Même s'il lui arrivait d'en croiser à Reflet-de-Lune, pratiquant comme lui le druidisme et ayant dû conserver leur "neutralité", il évitait autant que possible de leur adresser la parole. Cela étant dit, cela n'aurait pas été très convenable dans une situation pareil.

— Qui étaient, ces personne ? demanda-t-il donc poliment.

— L'une d'elles était ma tendre épouse, répondit tristement le tauren. Morte suite à un accouchement difficile. C'était une taurène d'une grande bonté. Elle avait ce don de voir de la beauté dans toutes choses, même les plus improbables. Même ses montagnes arides et inhospitalières, elle leur trouvait du charme. Du moins... à l'époque, quand cette vallée en contrebas était encore verdoyante. J'ignore si elle aurait une quelconque beauté là-dedans. Par ailleurs, j'ai toujours pensé qu'elle s'émerveillait des régions comme les Serres Rocheuses et les Tarides car elles ne pouvait être moins hospitalier et vivable que l'endroit où elle avait vu le jour, le désert de Désolace. Ah, si seulement elle avait vécu assez longtemps pour pouvoir contempler le Mulgore...

Fyrvas eut un léger pincement de cœur tandis que le tauren lui parlait de sa défunte épouse, lui rappelant tristement Méridia. Il se surprit à partager la peine de l'homme-bovin.

— Et la seconde ? se risqua de demander le jeune druide.

— Ma fille, répondit le tauren. Qui regrettait tellement de n'avoir jamais connu sa mère que j'ai jugé bon de l'incinérer à l'endroit même où elle a vu le jour, pensant qu'elle aurait davantage de chance de la rejoindre ainsi. Une vraie petite terreur, qu'elle était ! Une vraie tête de mule ! Dès l'instant qu'elle voulait quelque chose, elle n'en démordait pas ! Je crois d'ailleurs que pas une fois on a été d'accord. Je ne compte plus les fois où j'ai dû la gronder parce qu'elle se comportait de manière inconsidérée. Sans me rendre compte que plus je me montrais dur avec elle, plus je l'incitais à se rebeller et à n'en faire qu'à sa tête.

"Ça, ça me rappelle aussi quelqu'un !" commenta silencieusement l'elfe de la nuit avant de risquer une remarque à voix haute :

— J'imagine que ça l'a bien réussi ?

— Dans un sens... oui, répondit le vieux tauren. Je m'en suis rendu compte trop tard mais en vrai, cette gamine aimait la vie avec une passion débordante. Tout ce qu'elle avait durant sa vie, c'était motivée par cette amour. Même quand elle avait commencé à mûrir, c'était par principalement qu'elle agissait, qu'elle combattait et qu'elle défendait les siens. Et ce jusqu'à la bataille du Mont Hyjal durant laquelle elle a péri.

— Oh !... Je suis désolé.

— J'aurais aimé ne pas avoir à l'enterrer, moi son père. Mais je peux me consoler, au moins elle est morte en héroïne. Elle a su faire preuve d'un courage qui m'avait toujours fait défaut à son âge. Et puis, elle a eu le temps de m'offrir un petit-fils avant de quitter ce monde. Petit-fils qui est parti rejoindre la Horde, sa "nouvelle tribu" désormais. Fut-il le dernier de ma tribu.

— Et cela ne vous dérange pas plus que ça ? demanda Fyrvas.

— Qu'est ce que ça changerait ? L'expérience que j'ai eu avec ma défunte fille m'a fait comprendre qu'il est vain d'aller à l'encontre des rêves de ses enfants, peu importe qu'on ne les approuve pas. Et même si je parvenais à le décourager, à l'empêcher de faire ce qui lui plaît, je n'arrivais seulement à me faire passer pour un être abominable. Et puis la vie m'a fait comprendre qu'il était plus sain de laisser ses enfants voler de leur propres ailes plutôt que constamment leur tenir la main par peur de les voir se faire mal. Hé ! Cela pourrait être la raison de ta présence ici.

— Qu... Que voulez vous dire ? demanda le jeune druide interloqué.

— Tu est à la recherche d'un être qui t'es cher, lui répondit calmement le tauren. D'une personne que tu as peur de perdre.

C'est un devin ! songea Fyrvas. Cela ne faisait plus aucun doute.

— C'est tout à fait compréhensible et même très honorable de ta part, reprit le vieux tauren. Mais peut-être n'as tu pas trouver les réponses que tu cherchais en venant ici, plutôt celles dont tu avais besoin...

— Bon, ça suffit, monsieur je-sais-tout ! s'invectiva le jeune druide qui perdait patience. Oui, je suis à la recherche d'une personne qui m'est chère et oui, je me fait du souci pour elle. Mais je n'ai aucunement envie qu'on me fasse la morale et qu'on me dicte comment je dois la traiter. Ce que je veux, ce sont des réponses à mes questions, ni plus ni moins. Et vous avez intérêt à m'aider, vous qui êtes si clairvoyant. Et sans devinette, s'il vous plaît, je n'ai pas le temps pour ça !

— Pas la peine de prendre un ton pareil, rétorqua le tauren toujours aussi calmement (quoique sa voix laissait transparaître de l'indignation). Bien sûr que je vais t'aider dans ta quête de réponses. Ce serait la moindre des choses. Seulement, à t'entendre, tu m'as l'air d'avoir la gorge sèche, je me trompe ?


Le vieux tauren ne se trompait pas. Le jeune druide n'aurait peut-être pas dû s'égosiller ainsi. Pas avec la chaleur et la sècheresse environnantes, ni après son périple qu'il l'avait complètement de ses forces. Il réalisa qu'il ne s'était pas abreuvé depuis qu'il s'était rendu compte de l'absence de sa fille et qu'il se trouvait dans l'une des régions les plus secs de Kalimdor.

Comme s'il avait lu dans ses pensées, le vieux tauren lui tendit sa gourde que Fyrvas considéra avec méfiance.

— Rassures-toi, il n'y a rien de dangereux dans cette eau, lui dit le tauren. Cela dit, je ne voudrais pas non plus te forcer la main. Si tu préfères l'eau du lac en contrebas, c'est ton droit.

Ces derniers mots suffirent à faire céder Fyrvas. Hors de question à toucher de cette eau souillé par les gobelins et les gnomes lépreux. Il prit donc la gourde et en prit trois gorgée, assez pour se désaltérer avant de la rendre à son propriétaire.

— Et maintenant ? s'impatienta le jeune druide.

— Patience, mon jeune ami, lui répondit le vieux tauren. Ça en devrait pas tarder.

Fyrvas eut à peine le temps demander qu'est ce qu'il ne "devrait plus tarder" qu'il fut soudain pris d'un flash.

Il vit d'abord des formes et des couleurs indistinctes se mélanger comme s'il regardait à travers une couche d'eau en ébullition. Puis lentement, l'image se stabilisa et commença à prendre forme.

Fyrvas reconnut alors sa fille, Gahahli, et son Sabre-de-nuit qui comme à son habitude était sur ses talons. Ils erraient dans ce qu'il semblait être une cité en pierre blanche, d'un structure plus rustique que n'importe quel construction elfique, même les plus archaïques, et ils étaient pas seuls. Ils étaient en effet entourés toute une masse d'humains, de nains et de gnomes qui remarquaient à peine la présence de la jeune elfe. Puis une ombre vint recrouvrir la foule et Fyrvas vit s'élever au dessus de leur tête une forme gigantesque et menaçante aux yeux rougeoyant de haine et de malice. Une forme ailée et cornue. Comme un...

L'image se dissipa et Fyrvas fut revenu à la réalité, le souffle coupé. C'était comme s'il venait de faire un cauchemar. Un cauchemar éveillé.

— Oui, je sais, ça fait bizarre, la première fois, lui dit le tauren le plus sereinement du monde.

— Mais... Mais qu'est ce que vous m'avez fait boire, par Elune ? demanda l'elfe à bout de nerf.

— Rien de bien méchant, lui répondit le vieux tauren. Juste de l'eau que j'ai prélevé aux bassins de la Vision aux Pitons-du-Tonnerre. Plutôt pratique quand on a la tête tourmentée de questions dont seuls les Esprits ont les réponses. À condition d'en consommer avec modération, évidemment, sinon on risque de perdre tout sens de la réalité. Et j'avoue, c'est un peu le secret de ma... perspicacité.

— Mais ce que je viens de voir, est ce que ça va se produire ? demanda Fyrvas tandis qu'il se remémora et tenta d'interpréter sa vision. Est-ce que c'est en train de se produire ? Dîtes moi au moins que ça ne s'est pas déjà produit ?

— Ça, malheureusement, je ne peux pas te le dire, mon jeune ami, lui répondit sobrement le tauren. Seuls les Esprits savent ce que tu viens de voir. Et pour ce qui est de donner des précisions, il ne faut pas trop y compter. Les Esprits ont tendance à rester évasifs, aussi déplaisant et frustrant cela puisse être.

Qu'à cela ne tienne ! songea Fyrvas. Désormais, il savait dans quel genre d'endroit se trouvait sa fille et qu'elle n'était pas du tout en sécurité. Restait à savoir...

— Encore une dernière un question ! Où est-ce que je peux trouver une ville d'humains ? demanda-t-il au vieux tauren.

— Et bien... la seule ville d'humains que je connaisse c'est la citadelle de Theramore qui a été établi au large du Marécage d'Âprefange.

Le Marécage d'Âprefange ! Situé tout à l'est de Kalimdor ! Fyrvas allait encore avoir du chemin à faire. D'autant qu'en sortant des Serres Rocheuses, il lui faudra traverser les Tarides, une zone farouchement contrôlé par la Horde. Autant dire qu'il allait en territoire ennemi. Le jeune druide se jura de ne pas faire de cadeaux à sa fille une fois qu'il l'aura retrouver... si rien de fâcheux n'arrive à l'un ou à l'autre.

— J'y vais de ce pas ! dit-il d'un air décidé.

— Si j'étais toi, mon jeune ami, je n'irais pas, lui conseilla sobrement le vieux tauren.

— Et pourquoi ça ?

— J'entends par là que ce ne serait pas très sage de reprendre ta route l'estomac vide, précisa le tauren en fouillant son baluchon. Tiens ! Ça te dit de la viande de kodo encore fraîche ?

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