La voix de l'ombre - Livre I : Les murmures du passé

Chapitre 16 : Le rituel ressuscité

1592 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 14/02/2024 18:54

Chapitre 16 : Le rituel ressuscité.



Le printemps tirait sa révérence, et laissait place peu à peu à un climat plus chaud et doux. La flore s'épanouissait, et la récolte de fruits s'annonçait.


L'arrivée de la belle saison signifiait également que les Marteau-du-destin allaient quitter le clan Chanteguerre. En effet, Orgrim et Keera avaient décidé de partir seuls, à la recherche d'un endroit, peut-être, ou bien simplement de partir à la découverte du monde. D'autant que, lorsqu'elle parlait en langue orque, Keera utilisait à présent l'horrible accent de Nagrand, tiré du dialecte des Chanteguerre, et dont l'intonation était étrange dans la bouche d'une non-orque. Orgrim allait devoir y remédier.


En tout cas, rien ne les séparerait plus, et Grommash, bien que déçu de ne pas pouvoir les retenir, avait proposé qu'ils passent la saison froide au souterrain. Ainsi, ils se retrouveraient chaque année, et profiteraient du récit de leurs aventures, tout en leur assurant un logis chaud et sûr le temps d'une saison.

Orgrim avait toutefois confié que s'ils s'aventuraient trop loin, ils ne pourraient pas honorer l'invitation cette année-là.


Cependant, il leur restait une chose à faire avant de partir : s'unir devant les Ancêtres en bonne et due forme.

Les préparatifs avaient pris plusieurs jours. Comme de coutume, un tapis de peaux sur lequel se tiendrait le rituel avait été spécialement préparé, non pas en peau de talbuk blanc ou gris, comme en Draenor, mais de chèvre, l'animal azerothien qui s'en rapprochait le plus.

Les tuniques de cuir portées par le couple devaient s'harmoniser, quelle que soit la couleur choisie ou bien le clan. La peinture avec laquelle le couple allait s'oindre était faite d'un pigment obtenu après avoir broyé plusieurs plantes sauvages.


Le lieu avait été choisi avec soin, et quelques guerriers surveilleraient les alentours. Les quelques raptors tachetés qui s'y trouvaient avaient été tués, et seraient consommés. On avait suspendu à l'arbre sous lequel serait célébré l'union sacrée un collier rituel composé de plusieurs pierres naturelles qui remplaceraient la Taladite utilisée sur Draenor. Ces gemmes, l'Aigue-marine et la Citrine, étaient supposées protéger l'union.


Dès que le soleil se situait au sud, le rituel pouvait commencer. Une sorte de cortège accompagnait chaque parti l'un après l'autre. Le mâle, d'abord, était précédé du chef de clan, et conduit devant le lieu où se tiendrait le rite. Orgrim, vêtu d'un pagne de cuir brun, arborait une peinture tribale verte sur le visage. Le reste du corps était nu. Il suivait Grom jusqu'à l'arbre.

Derrière suivaient d'ordinaire la femelle du chef de clan, mais celle-ci fut remplacée par une guerrière chanteguerre nommée Tanyar. Elle précédait Keera, simplement affublée d'une sorte d'amazone de cuir brun et d'une simple brassière de cuir fine. Une longue natte ornée de fleurs appelées Mage royal dansait dans son dos, et son visage aussi portait une peinture verte.


Déjà en place, Orgrim la regardait s'avancer vers lui. Il lut dans ses yeux un certain malaise. Il était vrai qu'elle n'avait pas pour habitude de parader aussi peu vêtue devant la foule. Cependant, elle ne devrait pas se sentir si embarrassée devant un peuple si peu pudique, d'autant qu'elle présentait un corps svelte et musclé, certes plus élancé que celui d'une femelle orque, mais qui ne comprenait aucun défaut. Et cela ne semblait pas avoir échappé à plusieurs mâles qui lorgnaient sans scrupule, jusqu'à ce qu'ils croisent le regard de Marteau-du-destin.


Keera rejoignit donc Orgrim sous l'arbre. Le rituel débutait par quelques paroles du chaman qui se tenait à leur côté. Les deux amants se faisaient face, debout, et furent invités à s'asseoir sur la peau. Une fois agenouillés, c'était au mâle de se prononcer en premier. D'ordinaire, le dialecte du clan était de mise, mais la langue orque commune avait été choisie puisqu'à présent, les clans formaient la Horde, et qu'il s'agissait d'une union sacrée entre deux personnes de clan différent.


Orgrim se lança :

  • Par mon bras, je te protège.

Il pivota légèrement sur sa gauche et plongea deux doigts dans la peinture verte disposée au sol dans un pot de terre. Les doigts joints dessinèrent une trace sur le front de Keera. Le signe sur le front était un gage de protection.

Orgrim poursuivit :

  • Par mon corps, je t'honore.

Il plongea cette fois la main entière dans le pot, et la posa sur le ventre de la jeune femme. Le signe sur le ventre promettait à la fois l'acte charnel et l'enfantement.

Pour finir, Orgrim annonça :

  • Par mon cœur, je te chéris.

Il plongea à nouveau la main dans le pot, et la posa délicatement contre la poitrine de Keera, bien au centre. Son énorme main recouvrait presque la moitié de son torse. Il pouvait alors ressentir sa respiration rapide, et la dévisagea. Elle lui souriait. Son cœur s'emballa, et il fut ému de sentir une main minuscule se poser doucement sur la sienne. Ce dernier gage symbolisait la promesse d'amour.


À présent, c'était au tour de Keera. Tous les deux s'assirent alors en tailleur. Le rituel était quelque peu différent, c'est pourquoi la princesse dut se rapprocher au point de s’asseoir sur les jambes de l'orc, le fessier sur ses pieds et ses pieds dans l'ouverture des jambes d'Orgrim.

  • Par mon corps, je t'honore.

De la même manière qu'Orgrim, elle baigna sa main entière dans le pot disposé près d'elle, et posa sa main sur sa nuque. Ce geste signifiait qu'elle acceptait l'acte charnel, puisque cette étreinte consentie était un don corporel.

Elle poursuivit le rituel en baignant cette fois-ci ses lèvres dans le pot :

  • Par mon âme, je te révère.

Elle pressa ses lèvres sur le front d'Orgrim qu'elle attrapa de ses mains. Un gage de respect et d'affection en témoignage des dons qu'il lui avait promis.

Keera trempa sa main dans le pot une dernière fois :

  • Par mon cœur, je te chéris.

Elle posa sa main contre le cœur d'Orgrim qui la recouvrit de la sienne. S'imprégnant du moment, tous deux se dévisagèrent longuement, et tous autour d'eux respectèrent ce silence. Une douce brise secoua le collier rituel accroché à l'arbre, comme pour les bénir.

Sentant le moment venu, Ulgal posa une main sur l'épaule de chacun, et bénit l'union :

  • Par ma voix, je porte cette union jusqu'aux Ancêtres, dit-il en levant les bras vers le ciel, mains ouvertes. Par mon âme, je supplie les Ancêtres de m'entendre, continua-t-il tout en fermant les yeux. Et par mon cœur, je bénis cette union sacrée. Que vos cœurs s'unissent.


La bénédiction consistait à amener des éléments extérieurs, tels que la peinture, les pierres rituelles, ou encore les vœux, vers le point central où, selon les croyances orques, tout se liait : le cœur.

À présent bénis devant les Ancêtres, il était de coutume que le couple, dans cette position entr'assise, s'enlace, puis s'accouple au su et au vu de tous. Les peintures et les corps s'entremêlant et ne formant plus qu'un. Cependant, les amants ayant déjà consommé leur union, ajouté au fait que rester trop longtemps à découvert était un risque, tous deux refusèrent cette partie du rituel. Keera, en particulier, avait rejeté cet usage par pudeur. En attendant donc les festivités qui suivaient une union sacrée, tous retournèrent au souterrain pour la suite des réjouissances.



Chacun s'affairait à la suite des festivités dans le souterrain, tandis que le couple à présent uni avait rejoint sa galerie privée. Le collier de pierres qui avait été attaché à l'arbre pour le rituel ornait à présent le mur contre lequel la couche de peaux était installée. Après quelques heures d'intimité, et les peintures étalées de façon hétérogène sur chaque corps, Keera et Orgrim se nettoyèrent afin de rejoindre le clan qui festoyait déjà.


Debout et entièrement nus, chacun se débarbouillait. Keera observait Orgrim qui essayait, comme à son habitude, d'atteindre son dos avec ses mains, mais les muscles de ses bras l'en empêchaient. Elle s'approcha donc, et saisit une coupe d'eau qu'elle déversa sur le dos de son compagnon, tout en le massant.

  • Si tu me touche encore, tu sauras ce qu'il t'en coûtera ! prévint l'orc qui, de toute évidence, n'était pas totalement rassasié.
  • Hin ! se moqua t-elle. Viens-donc si tu l'oses, tout en frottant son large dos.

Orgrim tourna la tête pour la regarder.

  • Oh, serais-tu trop fier pour répondre à une provocation, ou bien trop marié ? dit-elle sur un ton ironique.

L'orc se courba alors vers l'avant, pivota et plaqua sa compagne amusée contre le sol. Il lui faisait face.

  • Jamais trop fier pour ça ! assura-t-il.

Et il l'embrassa passionnément, la retenant au sol par les bras maintenus au-dessus de sa tête.

Il était toujours attentif à ne pas l'écraser, ce dont elle lui était très reconnaissante. Qui aurait cru qu'une telle brute pouvait se montrer aussi attentionné ?

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