La voix de l'ombre - Livre I : Les murmures du passé

Chapitre 31 : Des nouvelles de Grim Batol

3591 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour 28/02/2024 19:28

Chapitre 31 : Des nouvelles de Grim Batol.



Le souterrain avait changé. De nombreuses peaux d'animaux séparaient à présent les galeries, tandis que des armes s'amassaient ci et là. Et, bien que les Chanteguerres semblaient encore plus fatigués qu'auparavant, l'on pouvait voir la lueur dans leurs yeux qui témoignait de leur lutte intérieure. Grommash lui-même avait maigri. Cette vie sédentaire à se cacher n'aider pas à recouvrer des forces et les obligeait peut-être à broyer du noir.


Les diverses sorties qu'ils tentaient, dont les parties de chasse, devenaient depuis peu risquées. Et celle-ci avait bien failli y laisser son chef.

  • C'était dangereux de sortir aussi peu nombreux, gronda Orgrim.
  • Pah ! L'humain qui me fera trembler n'est pas encore né ! avertit Grom.
  • Mais celui qui pourrait t'abattre, si ! dit Keera, l'air sérieux. Les soldats de Hurlevent doivent être animés par la vengeance, après que leur royaume ait été détruit par la Horde. Et je ne te dit pas cela pour t'effrayer.
  • Ce qui n'aurait pas fonctionné, cracha Grom.
  • Elle te met en garde, Grom, ne t'offusque pas, dit Orgrim. Elle connaît ces humains mieux que nous.
  • Peuh ! expectora Grom qui se leva et s'éloigna.


Keera parut choquée de sa réaction, mais Orgrim lui expliqua :

  • Grom est certainement le plus fier et le plus orgueilleux de nous tous. C'est ce qui le rend aussi arrogant et impulsif.
  • Mais il met sciemment les siens en danger ! Un chef doit penser avant tout à les protéger, dit Keera.
  • C'est ce que son clan reconnaît, c'est ce qu'il attend de lui : Grom est un défi. C'est de ça dont nous sommes faits. Nous méprisons la peur et révérons la force, même si elle conduit à la mort.

Keera n'était pas du tout convaincue. Elle comprenait l'importance de l'honneur, bien-sûr, mais de là à tout lui sacrifier...

  • Alors vos vies valent moins que l'honneur ?
  • J'ai perdu une guerre pour que la Horde conserve son honneur, O'nosh. Comme je disais, c'est de ça dont nous sommes faits.


Keera était stupéfaite. Il est vrai qu'Orgrim avait choisi de se séparer de plusieurs clans pour rattraper le traître Gul'dan et venger la trahison, mais elle n'y avait jamais vraiment réfléchi. Alors ils étaient réellement prêts à tout sacrifier pour l'honneur. Pourtant, la plupart des orcs qu'elle avait rencontré ne donnaient l'impression que de vouloir étriper tout ce qui bougeait. Peu d'entre eux avaient montré un réel attachement à leurs traditions et leur honneur. Mais les Chanteguerre semblaient en effet fidèles à leurs coutumes et leurs valeurs, et respectaient leur chef impétueux plus que tout.



  • Comment fais-tu pour accepter ?
  • Accepter quoi ? demanda Orgrim.

Orgrim et Grommash étaient assis devant un braseros, dans le tunnel privé de Hurlenfer. Marteau-du-destin l'avait rejoint après qu'il les ai quitté un peu plus tôt et surtout contrarié.

  • Accepter qu'elle soit plus forte que toi, grimaça Grom.

Orgrim réfléchit.

  • Je ne crois pas qu'« accepter » soit le mot, dit-il. Je le sais, c'est tout.

Grom dévisagea Orgrim, d'abord médusé, puis pouffa.

  • Tu es sage, Marteau-du-destin, avoua Grom. Si je ne te savais pas si fier et avisé, je penserais que tu mens ! Et je sais combien aimer peut obscurcir le jugement, ajouta-t-il.
  • Les sentiments n'ont pas leur place dans une bataille, ou même la guerre, affirma Orgrim. Et on peut garder la tête froide avec une compagne à ses côtés. Tant que cela ne nous fait pas oublier qui nous sommes.


Grom parut réfléchir. Il est vrai que sa compagne décédée, Golka, était d'un tempérament plus tempéré, bien que sa nature sauvage avait séduit Grom. Il se souvenait qu'elle lui permettait de voir les choses d'un point de vue différent, parfois contraire au sien. Mais il avait toujours accueilli son avis avec égard. Et il reconnaissait volontiers les qualités de Keera, bien qu'elle ne soit pas une orque.

Orgrim le sortit de ses pensées :

  • Je préfère une compagne forte capable d'assurer mes arrières qu'une compagne à protéger pour qui je devrais m'inquiéter à chaque instant et qui n'aurait pas mon respect.
  • Mff, et voilà pourquoi tu étais un si bon chef de guerre, grommela Grommash. Je t'admire, Orgrim, d'être aussi pragmatique. En ce qui me concerne, je pense d'abord avec ma hache.
  • Utilise davantage ta raison, Grom, proposa Orgrim en souriant. Je t'assure que c'est utile parfois.

Tout à leur réflexion, les deux chefs reprirent une position plus confortable contre la paroi de la caverne.


De son côté, Keera inspectait les armes que les Chanteguerre avaient ramassé dans les environs, ou sur des cadavres fraîchement tués. Rekshak lui expliqua qu'ils pillaient les camps, parfois les villages près de Grim Batol. Tout à ses explications, ils furent rejoints par Orgrim et Grommash.

  • As-tu des nouvelles des Gueule-de-dragon ? s'enquit Orgrim. Ils ont dû rejoindre le reste du clan à Grim Batol.
  • Il en reste très peu à Grim Batol, et j'y ai envoyé une petite troupe il y a peu. Mais le reste a suivi Zuluheb en Draenor avant son implosion. Et depuis, plus de nouvelles.


Grom fit une grimace qui déforma son visage au point que, dans cette pénombre, il ressemblait davantage à un démon. Orgrim devina ce qui le préoccupait : il pensait à son fils, dont il n'avait aucune nouvelle. Grom perçut son regard empathique, et le remercia tacitement de ne pas le questionner sur Garrosh.

  • Il serait intéressant de savoir si le portail, ou ce qu'il en reste, est surveillé par les nôtres, songea Orgrim.
  • D'après ce que j'en sais, les humains gardent les lieux et ont érigé une sorte de bastion, dit Grom. Si la faille entre les deux mondes est rouverte, il sera difficile aux nôtres de passer sans perte.
  • Mff, si seulement on pouvait délivrer nos frères des camps, dit Orgrim. Enfin, si tant est qu'on puisse les réveiller de leur torpeur...
  • Chef Hurlenfer !


C'était un Chanteguerre qui semblait revenir de la chasse.

  • Qu'y a t-il Gorauk ?
  • Okol est revenu de Grim Batol, il est gravement blessé, annonça Gorauk essoufflé.
  • Conduit-moi à lui, ordonna Grom.

Orgrim et Keera suivirent, tandis que Grom les précédait. Okol était étendu sur une paillasse, dans un tunnel protégé d'une peau d'ours. Grom s'assit à ses côtés :

  • Parle, mon ami. Que s'est-il passé ? demanda Hurlenfer.

Okol toussait et crachait du sang. Il n'en avait plus pour longtemps.

  • Chef, … les... orcs....

Puis il désigna Orgrim du doigt. Marteau-du-destin comprit :

  • Des orcs rochenoire ? À Grim Batol ? s'enquit Orgrim, le regard mauvais.

Okol opina du chef.

  • Dal'rend Main-noire ? demanda Orgrim, que Keera scrutait.


L'orc mourant fit non de la tête. Keera posa une main sur sa blessure, une longue entaille traversant son torse dont le sang avait coulé abondamment. Elle essayait de limiter sa souffrance.

  • Que fait-tu ? la questionna Grom.
  • Elle apaise sa douleur pour qu'il parte sereinement vers les Ancêtres, dit Orgrim qui observait l'orc fermer paisiblement les yeux.

Grommash observa également, reconnaissant à la princesse de veiller ainsi sur son chasseur.

Keera leva délicatement sa main, et annonça :

  • Il est mort.

À ces mots, Grom parut encore plus fatigué, comme si un poids supplémentaire venait s'ajouter sur ses épaules. Il s'avachit.


Après un moment, Orgrim reprit :

  • Où as-tu trouvé Okol ?
  • Près d'un marécage au sud, répondit Gorauk. Il était seul.
  • T'a t-il dit si il y avait d'autres survivants ? demanda Grom à son tour.
  • Il pensait que non, sans en être sûr, chef.

Grommash se redressa, et informa Orgrim et Keera :

  • Bazol faisait partie de l'expédition.
  • Bazol ! Orgrim, nous devons y aller ! l'implora presque Keera.
  • Grommash, nous avons une dette envers lui, assura Orgrim.


Grom pris une minute pour réfléchir à la situation. Il massa son menton tatoué, puis dit :

  • Je ne peux que vous déconseiller ce voyage. On ignore ce qui vous y attend !
  • Je veux croire que s'il reste encore des Gueule-de-dragon, ils seront restés fidèles à la Horde, grogna Orgrim. Quant aux Rochenoire, s'ils ont donné leur loyauté à Rend, ils le paieront de leur vie, dit sinistrement Marteau-du-destin.
  • Dans ce cas, emmenez Iskar et trois autres Chanteguerre. Et revenez vivants !

Grom épaula Keera et Orgrim, puis les quitta pour donner ses ordres. Zhulba, qui avait beaucoup chassé avec Keera, se porta volontaire pour les accompagner. Iskar fut chargé de choisir deux autres orcs et ils prirent la route à l'aube.



Les contrées marécageuses des Paluns avaient récemment été débarrassées de nombreux gnolls avant leur arrivée au souterrain. L'air était lourd malgré le refroidissement qui annonçait le début de la basse saison.

Ils avaient marché une journée entière vers l'est, et fixèrent leur campement à l'abri d'un grand arbre entouré de roches. Le gibier ne manquait pas, et le feu de camp les réchauffa du froid. Le lendemain, ils allaient devoir contourner la montagne pour arriver au bastion de Grim Batol.

  • Nous ferons le chemin inverse qu'à suivi Okol, c'est la meilleure façon de tomber sur des orcs survivants, dit Orgrim.
  • Bien, chef de guerre, acquiesça Iskar. Et nous étriperons chaque humain qui se trouvera sur notre chemin.

Keera les observait. Cela faisait longtemps qu'elle n'avait pas entendu Orgrim être appelé par son titre. Elle sourit, se rappelant cette époque où elle suivait la Horde.


Le ciel était voilé, et la petite troupe piétinait dans la gadoue. Une fois à la base de la montagne, ils purent apercevoir des tourelles intégrées à la pente montagneuse. Elles annonçaient le but de leur destination. Dans les cieux, ils distinguèrent un dragon rouge qui tournait autour du bastion, comme pour le protéger.

  • Avançons prudemment, dit Orgrim. Nous ne sommes pas parés contre une attaque de dragon.
  • Ce dragon n'a pas l'air d'être chevauché, nota Keera de ses yeux perçants. Seraient-ils libres ?
  • S'ils se sont libérés, ils ne seront pas ravis de croiser des orcs, avoua Iskar.
  • Non, effectivement, dit Orgrim. Ce qui rend la présence d'orcs rochenoires encore plus énigmatique.
  • Tu ne penses pas que ça aurait un lien, justement, émit Keera. Peut-être veulent-ils les soumettre à nouveau.
  • S'ils suivent les ordres de Rend, c'est très probable, assura Orgrim. Mais sans le savoir-faire de Zuluheb et de Nekros, j'en doute.


Ils poursuivirent leur route et remarquèrent deux orcs assis sur une paroi. Armés d'une hache pour l'un et d'une arme de pugilat pour l'autre, ils observèrent la troupe qui s'arrêta.

  • De quel clan êtes-vous ? demanda Orgrim avec autorité, et qui s'était légèrement avancé pour se faire connaître à la simple vue de son armure.

L'un des deux jeunes se leva et s'avança, l'air presque soulagé.

  • Chef de guerre Marteau-du-destin ? C'est bien toi ?
  • Et toi, qui es-tu ? l'interrogea Orgrim.
  • Ethrok, du clan Rochenoire, affirma le jeune orc.
  • Ethrok ? Le fils de Tula ? demanda Keera qui s'était avancée vers lui.
  • Je ne t'ai pas oublié, princesse, amie de ma mère, dit Ethrok qui semblait content de les retrouver. Elle nous parlait souvent de toi, elle était fière d'être ta sœur. J'ignorais que le chef de guerre était libre, dit-il en tournant son regard vers Orgrim.
  • Tu as bien grandi, dit Keera, nostalgique. Où est ta mère ?
  • Dans un de ces camps, je l'espère ! Nous avons vu mon père mourir en se battant, mais elle a sûrement pensé se rendre pour nous retrouver ensuite, confia le jeune orc.
  • Et Daninah, ta sœur ? s'enquit la princesse.


Ethrok eut une moue dégoûtée. Mais, avant qu'il ne poursuive, Orgrim le questionna :

  • C'est vous qui avez tué les orcs chanteguerres qui se sont approchés de Grim Batol ?

Ethrok parut hésiter. Mais un orc ne ment pas à son chef de guerre :

  • Nous avons participé, Nakur et moi, dit-il en désignant l'autre jeune orc de la tête. Chef, nous ne voulons pas suivre Rend Main-noire plus longtemps.
  • Et pourquoi les avoir tués ?
  • Ils ne sont pas tous morts. Et parmi eux, il y avait un Rochenoire aussi.
  • Bazol ? Il est vivant ? demanda Keera, impatiente.

Ethrok opina du chef.

  • Nous devrions nous mettre à l'abri, vous allez tout nous raconter, proposa Orgrim qui scrutait les airs.


Ils s'installèrent entre deux imposantes roches tandis que la pluie les trempait. Mais ils avaient hâte d'entendre le récit du jeune rochenoire.

Iskar, qui était pourtant le représentant du clan Chanteguerre, et par extension, de Grom Hurlenfer, laissa la prérogative à Marteau-du-destin qui était le plus gradé dans la hiérarchie. Plus gradé que son propre chef de clan.

Orgrim leva donc la main vers Ethrok qui commença :

  • Après la défaite de la Horde, nous nous sommes cachés au Pic Rochenoire avec les adultes qui nous gardaient. Très vite, les orcs du Rictus de Noirdent sont arrivés.
  • Continue, dit Orgrim.
  • Ils ont pris le pouvoir, puisque tu n'étais plus là, et, par loyauté envers leur père, les autres orcs ont obéi. Encore petits, nous n'avons pas osé nous rebeller, jusqu'à ce qu'ils prennent ma sœur et une autre jeune femelle, Zolga.

Keera fronça les sourcils. Elle était très bien placée pour savoir ce dont les Main-noire étaient capables.


Ethrok poursuivit :

  • Nous nous sommes jetés sur eux, mais avons été vite maîtrisés, dit-il à sa grande honte. On avait à peine huit ans. Ils nous ont enfermés dans une geôle, et nous ont dit que les cris du cachot juste à côté allaient nous faire obéir.
  • Les cris de ta sœur ? demanda Keera, choquée.
  • Non princesse, les tiens, avoua le jeune orc qui la fixait, confus.

Outré, le reste de la troupe cessa de respirer. Keera se renfrogna. Tous restèrent silencieux quand Ethrok reprit :

  • C'était horrible. Tous les jours, et même parfois la nuit, on entendait ce qu'ils te faisaient.

Nakur serra la mâchoire. Ethrok le regarda, et ajouta :

  • Nakur s'est même crevé les tympans pour ne plus entendre. Il a enfoncé ses doigts au fond de ses oreilles. Ils n'avaient pas le droit, ces orcs n'ont jamais eu d'honneur.

L'air indigné, il poursuivit :

  • Un jour, ils sont venus dans notre cellule et ont jeté Zolga au sol, la pauvre était dans un sale état. Elle nous a raconté qu'ils la forçait à s'accoupler chaque jour, comme ma sœur, parce que les femelles devaient être soumises, et juste bonnes à produire des enfants. Ils ont dit qu'ils gardaient Daninah parce qu'elle portait un enfant.


Il fit une petite pause, ce qui permis au reste de la troupe de reprendre son souffle. Orgrim s'était mis à serrer les poings compulsivement, et Keera ne put se résoudre à le regarder.

  • Ils nous ont dit qu'ils ne nous rendraient pas Daninah tant qu'on ne se soumettait pas. Alors on s'est soumis. Ils ont commencé à nous envoyer en mission avec des adultes. Mais on n'a jamais revu ma sœur.
  • Et cette mission, elle consiste en quoi ? questionna Orgrim.
  • Des orcs ont fui la place parce que les Gueule-de-dragon ont perdu leur emprise sur les dragons. Rend veut les rallier à sa cause. On est là pour les recruter.
  • Pourquoi chercher à les tuer alors ? demanda Orgrim l'air menaçant.
  • Rend veut qu'on punisse ceux qu'il ne peut pas enrôler, répondit Ethrok. C'est l’allégeance, ou la mort.
  • C'est sa mort qu'il va voir en face ! lança Marteau-du-destin qui peinait à se contenir.
  • Tu ne le trouveras pas facilement, chef de guerre, osa Ethrok. Il a rallié les dragons noirs qui protègent le clan en échange de sa loyauté. Après la mort de son frère, il se cache dans les profondeurs du Mont, gardé par de nombreux draconides. Sans une armée entière, tu ne perceras pas ses défenses.
  • Le lâche ! Ce qui signifie que nous ne pouvons pas non plus délivrer ta sœur ? demanda Orgrim.
  • Elle est morte, avoua Nakur, la mine sombre.
  • Qu'est-ce que tu dis ?
  • Je dis que ta sœur a rejoint les Ancêtres, parce que j'ai vu sa tête accrochée à une faux, et que je n'ai jamais pu te le dire. Je suis désolé mon frère.


Ethrok se laissa glisser contre la paroi rocheuse. Le souffle coupé, il s'affaissa.

Puis, après quelques minutes, il reprit fièrement contenance, et lança à Orgrim :

  • Je réclame vengeance, au nom de ma sœur, et de tous ceux qui ont péri de la main de ces lâches ! Certains nous ont dit que Rend avait peur, qu'il avait été terrorisé par la mort de Maim, et bien, si on ne peut pas l'atteindre, tuons tous les autres !
  • Chef de guerre, nous prêteras-tu main forte ? demanda Nakur pour rejoindre son ami.
  • Non, dit Orgrim. Et croyez-moi, si quelqu'un ici est légitime à se venger de ces couards castrés, c'est bien Keera et moi.
  • Mais alors, pourquoi, chef de guerre ? Ils déshonorent notre race entière ! répliqua Ethrok en colère.
  • Parce que nous ne vaudrions pas mieux qu'eux, déclara Orgrim.


Les deux jeunes orcs se turent. Le chef de guerre avait raison. Ils étaient encore trop jeunes pour faire preuve d'autant de sagesse, ils se devaient d'écouter leurs aînés. Nakur le regarda et acquiesça, à contre-cœur.


Ethrok dévisagea la princesse qui le regardait avec compassion. Il avait entendu les autres dire que c'était elle qui avait tué Maim après s'être délivrée seule. Et quand il les avait questionnés au sujet de cris de nouveau-né, ils l'avaient giflé violemment. Il se souvenait que sa mère leur avait confié que Keera attendait un enfant. Il avait fait le lien. Qu'ils aient pu s'en prendre à un être aussi vulnérable le mettait hors de lui. Et pourtant, ce n'était rien comparé à ce qu'avaient dû ressentir Keera et Marteau-du-destin. Un profond respect l'envahit. Il déclara :

  • Je renouvelle les vœux de loyauté de mes parents et jure fidélité à la Horde et à son chef de guerre, dit-il fièrement.

Tous parurent impressionnés par tant d'abnégation. Cependant, la réalité était tout autre :

  • La Horde n'est plus, jeune rochenoire, dit Orgrim. Mais le jour de sa renaissance viendra, et ce jour-là, tu pourras te dresser bravement à nos côtés, car tu es le digne fils de ton père.
  • Et de ta mère, ajouta Keera, l'air fier.


Chacun était tellement absorbé par cette conversation qu'aucun ne remarqua le dragon rouge posé sur un rocher un peu plus haut. Il les observait silencieusement. Sentant sa présence, Keera leva la tête dans sa direction. Le dragon lui rendit son regard, son long cou reptilien s'ondulant pour tourner sa tête légèrement cornue. Keera lui transmis en pensée qu'ils ne leur feraient aucun mal, qu'ils étaient à la recherche de leurs amis qui se sont peut-être aventurés dans Grim Batol. Le dragon lui annonça que seuls deux d'entre eux avaient survécu, et se rendaient loin à l'ouest.

Le souterrain des Chanteguerres, se dit la princesse. Alors ils avaient dû se croiser.

Le dragon expliqua qu'il ne souhaitait pas les voir plus longtemps ici, et que c'est pour cela qu'il lui a révélé où étaient partis les deux orcs. Il lui avoua également être intrigué par elle. Mais il ne voulut en dire plus.


Orgrim scruta sa compagne. Il la voyait parfois s'immobiliser ainsi, et pensait qu'elle était en communion avec la nature. Il attendit qu'elle revienne parmi eux pour la questionner :

  • Qu'as-tu appris ?
  • Que deux seulement ont survécu, et qu'ils se dirigent vers le souterrain, dit Keera.
  • Comment le sais-tu ? demanda Iskar. Nous n'avons pas bougé d'ici.
  • Parfois, les êtres vivants me parlent, et je les écoute.
  • Es-tu une chamane ? demanda un autre orc chanteguerre.
  • Pas exactement, d'après Drek'Thar, souligna-t-elle. Nous essayons d'en savoir plus. En attendant, nous devrions essayer de les trouver, dit-elle en direction d'Orgrim.
  • Ils nous attendent déjà peut-être au souterrain. Faisons demi-tour et rentrons, ordonna Marteau-du-destin.
  • Attends, chef de guerre, l'interrompit Iskar. Pouvons-nous vraiment leur faire confiance ? dit-il en direction des jeunes rochenoires.
  • Je le crois, et je m'en porte garant, répondit Orgrim.


Le groupe reprit alors la route vers l'ouest. La pluie s'était calmée, et le froid commençait à prendre le dessus sur la lourdeur ambiante du marécage. En passant non loin des fortifications de Dun Algaz, Keera repensa à leur nouvel ami nain. Elle espérait que Hermand avait bien rejoint son habitat, et, pourquoi pas, commencé les recherches sur ses origines.

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