Parmi mon peuple

Chapitre 5 : Merveilles de Fondcombe

5067 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 08/11/2016 21:20

 

    Fondcombe, La Vallée Caché, Imladris… Autant de noms pour un endroit si merveilleux, magique et éclatant.

 

    Ce qui se profilait sous ses yeux était d’une beauté sans pareille. Comme l’un de ses noms l’indiquait c’était une vallée bien cachée, une gorge naturellement creusée et illuminée par un splendide soleil qui cherchait à s’incruster à travers les falaises parfois sinueuses du cœur desquelles coulait une rivière d’une pure clarté. L’astre doré se reflétait en mille couleurs sur quelques cascades rugissant d’entre les falaises qui allaient  brutalement se fracasser en éclats d’argent sur la pierre et l’eau. De même, la vallée semblait s’étendre à l’infini dans l’horizon vers des terres lointaines et secrètes.

    Au creux même de cette magnificence flottait une demeure à l’architecture gracieuse et raffinée ; celle des elfes si purs et délicats, sages dans leur grand âge mais redoutables à la fois. Ce palais elfique était en tout point en harmonie avec la nature environnante dans un véritable havre de paix. Taillée dans la roche elle paraissait appartenir corps et âme à ces falaises, se mélangeant avec la pierre et la flore. La saison estivale rendait d’ailleurs cet endroit encore plus admirable grâce à ses remarquables arbres feuillus d’un vert de jade, dont l’ombre se répercutait sur les toits gris de la majestueuse maisonnée.

    Amerys pouvait y apercevoir au loin de grandes colonnades blanches et grises, des voûtes célestes, des fontaines, de hauts balcons, des gloriettes et des cloîtres. Des ponts serpentaient entre la roche, reliant la demeure ici et là qui paraissait comme suspendue, flottant dans une poésie indéfinissable. Elle n’eut pas de mots pour décrire l’immense beauté de ce palais elfique. La jeune demi-naine en eut le souffle coupé et resta pantoise devant ce chef-d'œuvre d’architecture. Elle n’en fut pas la seule car le reste de la troupe sembla régir de même, en particulier Bilbon qui de ses petits yeux brillants et sa bouche grande ouverte admirait cette œuvre d’art avec plaisir et fascination.

    Ce moment de paix intense fut néanmoins bouleversé par un Thorïn encore d’humeur bougonne « Toujours là pour gâcher les plus beaux moments de sa vie en ce moment le roi sous la montagne… » Accusa la jeune femme intérieurement. Fort heureusement le nain se fit encore réprimander par le magicien.

- La seule animosité ici est celle que vous avez apportée avec vous » siffla le vieillard entre ses dents.

    Thorïn n’osa contester les dires du Gris et sa mine renfrognée s'allongea encore. Puis c’est sur ces paroles que le groupe se mit en marche pour atteindre leur refuge elfique, guidé par un Gandalf fier de sa chaparderie exécutée au nez de son ami roi.

    Ils dévalèrent un chemin étroit et pentu à la queue leu-leu, se rapprochant toujours plus près de la demeure. Amerys ne pouvait détacher son regard de la splendeur du palais qui l’éblouissait de minutes en minutes. Mais alors qu’elle marchait devant Thorïn, celui-ci ne se cacha pas de faire une remarque des plus déplaisantes :

-  Ne posez pas trop vos yeux sur cette demeure… Regardez-donc ou vous posez vos petits pieds maladroits plutôt ! Un cadavre désarticulé de demi-naine ne serait pas joli à voir dans le contre-bas...

- Je ne vous ferai jamais ce plaisir, répliqua dans une déconcertante simplicité la jeune femme qui avait gardé le dos tourné à son interlocuteur. Je sens votre souffle dans ma nuque, vous êtes si près que vous seriez là pour me rattraper si par mégarde je tombais. Sauf si vous souhaitez ma mort…

- Ah… oui… ?

    Le guerrier stoppa intentionnellement sa marche, comme piqué au vif par une réplique sanglante et amer.

- Cette piquante demoiselle me parait plus qu'à moitié naine ! ricana alors un Dwalïn amusé par ces piques acerbes entre son ami et Amerys.

- C’est une impertinente ! cracha alors Thorïn. Je vous mettais en garde contre les dangers du chemin et vous m’insultez. Vous êtes jeune et sans respect pour vos aînés.

    Le sang d’Amerys ne fit qu’un tour dans ses veines et se retournant promptement malgré ses douleurs dorsales, fit face au roi sous la montagne dans un regard fier et menaçant qui ne lui ressemblait pas.

- J’ignore pourquoi mais j’ai bien compris que vous ne m’appréciez pas. Soit ! Gardez-le pour vous et nous devrions nous entendre. Je ne vous insultais pas Thorïn Ecu-de-Chêne, j’ai un profond respect pour votre statut et votre personne mais vous avez un comportement exécrable envers moi…

- Allons allons mes amis, cessez de vous quereller ! tempéra Gandalf. Pas seulement vous Thorïn mais cette jeune demoiselle également. Nous entrons dans une demeure de paix et je ne veux pas d’animosité, je le répète. J’ai l’impression d’être entouré d’enfants c’est une abomination…

- Pardonnez-moi Gandalf, ce sont cet air et cette magie elfique qui m'embrouillent l’esprit… accusa le chef nain penaud.

- Huuum…, souffla alors l’istari avec un rictus étrange sur la bouche.

    Amerys, peu fière de s’être emportée, tourna le dos à son adversaire. Le regard fuyant cette altercation embarrassante où elle ne s’était pas montrée digne d’elle-même, puis continua prudemment sa marche, essayant de faire attention car malgré tout Thorïn avait raison. Le chemin était sinueux et le vide en contrebas effrayant, un simple écart et c’était le grand plongeon. Alors pourquoi avoir répliqué sur des dires tout à fait pertinents ?  Il fallait vraiment qu’elle arrive à s’entendre avec le chef de la compagnie sinon cela allait devenir de plus en plus tendu. Elle ne comprenait pas l’origine de sa rancœur à son égard. Qu’avait-elle fait pour s’attirer ses foudres en si peu de temps ? Totalement perplexe face à cette situation pour le moins déstabilisante elle se laissait instinctivement emporter par ses émotions. Il était hautement nécessaire de pacifier la relation pour éviter toute confrontation avec ce grand nain qui l’avait accueilli dans sa compagnie bon gré mal gré. Une discussion serait la bienvenue mais encore fallait-il aborder Thorïn au bon moment dans des circonstances apaisées et dénuées de colère. Sans quoi elle devrait quitter le groupe et faire son chemin seule…

    Elle sentait toujours la présence de Thorïn dans son dos, muet comme une tombe tandis que les autres gaillards bavardaient jovialement comme si rien ne s’était passé. Mais la tension entre Amerys et le roi était palpable et elle n’eut plus de plaisir à contempler la demeure elfique. C’est tête baissée qu’elle continua son chemin pas à pas, prenant garde de ne pas s’écarter du chemin.

    Après cette marche tumultueuse et parfois périlleuse ils arrivèrent enfin aux portes de la résidence. Ils empruntèrent un pont gardé par deux majestueux princes elfiques de marbre blanc. La passerelle leur permit la traversée de la rivière qui coulait en contrebas et c’est ainsi qu’ils débouchèrent dans une belle cour. Un léger vent s’engouffra dans les longs cheveux d’Amerys et fit voler quelques mèches devant son visage, voilant la magie du palais elfique. Elle s’empressa de s’en dégager pour admirer les merveilles de plus près. Le marbre laiteux des colonnades illuminait d’une douceur virginale l'argent des faîtières et les joyeuses touches vives des arbres elfiques.  Mais la palette dévoilait également un camaïeu de bleu, d’orange, de vert et de gris. Les détails y étaient délicats et fins, entremêlés dans de jolies figures et tressages raffinées. Des voûtes arrondies s’élevaient ici et là reliées par des colonnes horizontales et blanchâtres. Tout était calme et la demeure ne chantait que de ses petites mésanges et rouges-gorges nichés dans les arbres caducs tandis que la rivière ruisselait de petit clapotis discrets. Tout était à l’opposé de ce qu’elle avait vu ou s’était imaginé jusque-là.

- Que c’est magnifique ! s’exclama ainsi Amerys dans un souffle.

- Oui c’est merveilleux, acquiesça Bilbon tout aussi éperdument ébloui par le domaine et partageant alors un sourire complice avec la demi-naine.

    La jeune voyageuse n’entendit  cependant rien venant des nains qui restaient  en retrait car trop méfiants vis-à-vis des elfes. Il aurait dû en être de même pour elle mais ayant grandie parmi les hommes elle n’éprouvait aucune amertume envers ces êtres, bien au contraire. Elle avait hâte d’en découvrir plus sur leurs mœurs, coutumes et mode de vie.

    Ainsi ils se rassemblèrent en cercle dans cette cour suspendue dans le vide et attendirent calmement. D’un escalier entouré de lierre et permettant d’accéder à un niveau supérieur apparut un elfe qui vint poliment à leur rencontre. Il était aussi gracieux qu’un cygne et son visage était androgyne, un trait notamment accentué par de longs cheveux lisses et une robe bleue finement cousue. Il ouvrit les bras dans un accueil respectueux avant de lancer d’une voix résonnante:

- Mithrandir !

- Lindir ! répondit alors Gandalf qui semblait connaître l’elfe. »

    Ils échangèrent quelques paroles en langue elfique, que la jeune femme ne comprit bien évidemment pas, tandis que les nains, soupçonneux se rapprochaient l’un de l’autre pour se protéger d’une quelconque menace. Soudain, un cor lointain retentit et des martèlements de sabots résonnèrent en écho d’entre les falaises. Une nuée d’elfes guerriers fit son apparition sur le chemin sinueux jusqu’à traverser le pont en encerclant dangereusement le groupe. Les nains nerveux et animés par la crainte se serrèrent derechef et sortirent leurs armes en signe de défense. Amerys et Bilbon furent pris en étau dans leur cercle et assistèrent non sans peur à la scène qui se déroula en cet instant.    Les elfes continuèrent leur trot circulaire, les entourant alors de leurs grands chevaux. Fièrement armés de leurs lances acérées ils tournoyaient sans cesse à en donner la nausée tout en adressant des regards hautains.

- Gandalf ! s’exclama alors l’un deux.

- Seigneur Elrond, répondit alors le magicien dans un sourire ravi et soulagé pendant que les montures s’arrêtèrent pour faire silence.

- Mon ami… renchérit alors le Gris. Où étiez-vous ?

    Amerys, curieuse, essaya de jouer des épaules et se mit sur la pointe des pieds pour tenter d’apercevoir ce seigneur elfe à la voix si sage et grave tandis qu’il descendait de son destrier. Son apparence laissait transparaître un âge entre quarante et cinquante ans mais il ne fallait pas s’y fier, cet elfe avait probablement des centaines et des centaines d’années voire bien au-delà. Ses longs cheveux bruns finement coiffés étaient retenus par un diadème d’argent, laissant dépasser de longues et fines oreilles en pointe, de même ses yeux bleus semblaient tout savoir de tout et sur tout le monde en cette terre. Elle sut instantanément à son regard que c’était une créature très ancienne. Ses vêtements et son armure brillante quant à eux traduisaient une belle richesse et un raffinement inégalé pour les tissus et les broderies. Ce seigneur était tout bonnement très élégant et avait une prestance digne d’un roi.

- Nous chassions des orques venus du Sud annonça-t-il dans une banale simplicité. Nous en avons tués plusieurs près du Col Caché. C’est étrange que des orques s’aventurent si loin de leurs terres. Quelque chose ou quelqu’un les a attirés par ici.

- Ah… Il se pourrait bien que ce soit nous, avoua Gandalf un peu gêné en s’appuyant instinctivement sur son bâton.

    Sur ces paroles, maître Elrond, héraut de la Dernière Alliance, promena alors un regard plein d'une ironie curieuse sur la compagnie de nains et fixa son attention sur la personne de Thorïn, avant d'adresser une radieuse bienvenue au chef nain qui s’avançait avec arrogance.

- Bienvenu à vous Thorïn, fils de Thraïn, déclara-t-il de sa puissante tonalité.

- Il ne me semble pas vous connaître…

- J’ai bien connu votre grand-père du temps où il était roi sous la montagne.

- Etrange, il ne m’a jamais parlé de vous… grogna-t-il encore une fois.

    Elrond dans sa sagesse ne parut pas pour le moins offensé et un éclat d’amusement  s’insinua même dans ses pupilles, avant qu’il n’ajoute encore une fois quelque chose en langue elfique à l’adresse même du roi sous la montagne.

- Qu’est-ce qu’il a diiiiit ! lança alors un Gloïn méfiant et levant sa hache. Est-qu’il est en train de nous insulter ?

- Non maître Gloïn, il vient de nous inviter… traduisit Gandalf avec un petit sourire.

    Les nains se regroupèrent alors pour débattre dans de petits chuchotements sur la proposition du seigneur, toujours avec une méfiance non retenue. Amerys et Bilbon se retrouvèrent dans le cœur de la discussion mais restèrent muets l’un et l’autre. Se lançant un regard complice et approbateur ils s’abstinrent à donner leur opinion dans ces circonstances. Le débat fut néanmoins très bref car la perspective de tables opulentes et de lits moelleux rallia rapidement les suffrages.

- Dans ce cas allons-y ! répondit un Gloïn bout en train.

    Mais alors que la troupe s’avançait pour suivre les elfes, l’œil d’Amerys fut soudain attiré par un cheval dénué de son cavalier. Elle plissa les yeux et s’avança, que fut sa surprise quand elle comprit que c’était Plumerette ! Elle trottina vers elle le cœur haletant, se frayant un chemin parmi les grands chevaux des guerriers elfes. L’un d’eux tenait la jument par son harnais et fut étonné par le geste de cette petite jeune femme qui entoura le cheval de ses bras.

- Ma belle Plumerette tu es vivante ! J’ai eu si peur…

- Connaissez-vous ce cheval ? demanda alors le soldat aux oreilles pointues qui tenait soigneusement l’énergumène en question.

- En effet, c’est ma monture. Elle s’est enfuie tout à l’heure quand les orques nous ont pourchassés. Je pensais ne plus jamais la revoir…

- Nous l’avons trouvé non loin de là, elle pâturait tranquillement d’une belle herbe verte ben méritée. C’est une jument docile alors nous n’avons eu aucune difficulté à l’approcher.

- Je vous en remercie infiniment, souffla Amerys qui colla sa tête contre l’encolure de Plumerette.

    C’est alors que le seigneur Elrond fit une apparition très discrète près d’elle, aussi léger que la brise, et la regardant avec un sourire de toute sa hauteur et sa majestuosité. Il gratifia sa jument d’une lente caresse du bout de ses longs doigts avant d’ajouter :

- Mademoiselle, si vous le permettez, nous pouvons ramener votre amie dans nos écuries où elle pourra se revigorer et où nous prendrons soin d’elle le temps de votre séjour ici.

-Oh… Oui, je vous remercie pour votre hospitalité Monsieur.  Je remets entre vos mains Plumerette, je suis certaine que vous saurez lui apporter tous les soins nécessaires à son bien-être. Je vous fais entièrement confiance.

    Le seigneur lui adressa en réponse un sourire en coin et posa une main rassurante et amicale sur son épaule.

    C’est ainsi qu’elle laissa sa jument entre les mains expertes des elfes et rejoignit le groupe qui l’attendait impatiemment.

- Veuillez m’excuser… murmura-t-elle gênée tandis qu’elle retrouvait sa place dans la masse de nains.

- Je suis heureux que Plumerette aille bien, lança alors Fili qui vint se poster près d’elle tandis qu’ils grimpaient les marches à la suite de Gandalf et de leurs gracieux hôtes. N’avais-je pas raison ?

- Je dois admettre que vous aviez raison… sourit la jeune femme, heureuse d’avoir retrouvé sa chère jument. C’est une joie inespérée.

- Vous apprendrez avec le temps mon amie que j’ai souvent raison et que vous pouvez m’accorder une confiance aveugle ! plaisant-t-il.

- Bien moins souvent que moi ! surenchérit alors son frère taquin.

- Là-dessus je ne suis pas d’accord, insista l’aîné très sérieusement.

    Mais ils n’eurent pas le temps de continuer leur chamaillerie bien longtemps car ils arrivèrent à destination, non loin du cœur de la demeure. Ils déambulèrent à travers un spacieux cloître qui laissait passer les rayons du soleil, zébrant alors le sol dans un jeu d’ombre et de lumière qui hypnotisa la jeune naine. On les emmena dans des chambres aux couleurs chaudes et douces, faites de boiseries et de délicatesses et aux décors finement sculptés. Les draps semblaient soyeux, les coussins moelleux à souhait et quand ses yeux se posèrent sur un des lits elle n’eut qu’une seule envie, celle de sauter dedans pour partir au pays de rêves. Mais ces chambres-là étaient destinées aux nains et à Bilbon. En effet, les elfes tout en politesse estimèrent qu’il lui fallait une chambre à part. Quel honneur ce fut d’avoir une petite pièce rien que pour elle, prévue pour une seule personne et qui n’avait rien à envier aux précédentes visitées. Au contraire ! Il y avait tout le nécessaire et ses hôtes lui proposèrent même de prendre un bain et de laver ses vêtements.

    On lui laissa le temps de s’installer et de se défaire de son épée, puis on vint lui annoncer qu’un repas serait servi très bientôt. Déçue de ne pas avoir eu le temps de faire trempette, elle n’en était pas moins affamée. Elle aurait tout le temps nécessaire par la suite pour se décrasser et nettoyer ses vêtements. L’elfe lui assura qu’un habit « à sa taille » lui serait déposé incessamment sous peu. Oui comment trouver une tenue à sa taille et sa largeur parmi tous ces grandes et sveltes personnes… Grand bien leur fasse c’était leur problème après tout. Elle se nettoya toutefois le visage grâce à de l’eau tiède versée dans une écuelle et tamponna son visage avec une douce serviette embaumée de lavande. Cette odeur lui rappela son chez elle, lorsqu’elle aidait sa mère à tendre le linge de si beau matin, une activité qu’elle avait continué seule à la mort de cette dernière. Mais alors qu’un brin de nostalgie s’insinua en elle, elle sursauta  à la venue tambourinante d’un Fili guilleret !

- Wow ! Une chambre rien que pour vous ! s’extasia-t-il en furetant la pièce entière avec un sifflement.

- Oui, sourit fièrement alors Amerys. Seriez-vous encore jaloux de moi ?

    Il haussa ridiculement son sourcil droit dans une mimique théâtrale et d’un geste vif chassa une mouche invisible. Elle remarqua alors qu’il s’était délesté de son attirail et de ses armes.

- Moi ? Pfff… Non bien sûr ! Vous sembliez perdue dans vos pensées avant mon arrivée… devina-t-il.

- En effet… Je repensais à mon chez moi, du temps où mes parents étaient encore vivants.

- Ils doivent vraiment vous manquer.

- Oui, chaque jour qui passe, avoua la jeune naine tandis qu’elle s’assit sur le rebord du lit boisé. J’ai passé plus de temps avec mon père ceci dit, nous étions très proches. J’ai perdu ma mère il y a de cela bien longtemps. Comme vous le savez la vie humaine est plus courte que la vie naine. Mais lorsque papa m’a quitté il y a peu, j’ai ressenti une terrible douleur. Je me suis sentie perdue et déboussolée, esseulée… Nous n’avions pas de famille au village. Celle de ma mère est morte à Dale, idem pour cher père. Il n’avait qu’une  petite sœur de son jeune temps mais elle a péri dans les flammes d’Erebor…

- Je peux le comprendre… dit doucement le guerrier nain de sa belle voix en venant se poser à ses côtés tout en gardant une distance correcte entre eux deux.

- Avez-vous toujours vos parents ? questionna la jeune voyageuse désireuse d’en apprendre plus sur le nain avec qui elle avait le plus d’affinités.

- J’ai cette chance en effet. Ma mère, Dis, est la sœur de Thorïn qui est comme vous le savez si bien, mon oncle. Ceci dit j’ai perdu mon père Gwalon et mon oncle Frerin à la bataille d’Azanulbizar il y a de cela plusieurs années déjà et j’ai été en partie éduqué par mon oncle. Cependant j’ai encore des cousins ici et là, plus ou moins lointains. Et bien sûr j’ai mon frère !

- Votre mère est-elle du même caractère que Thorïn ? demanda alors curieuse Amerys, décochant un fin sourire au jeune nain.

- Mon oncle est parfois dur je le reconnais mais la vie ne lui a pas fait de cadeau, j’imagine que cela a forgé son caractère. Il ressort de lui l’image d’une personne méfiante et bourrue mais derrière tout cela, il est possédé par l’honneur et la loyauté envers les siens, c’est un protecteur né. Quant à ma mère elle est d’une gentillesse extrême, sauf quand elle se met en colère, mieux vaut ne pas être dans les parages ! Elle a un sacré caractère ! Elle nous a fait toute une scène à moi et à Kili quand notre oncle nous a choisis pour l’accompagner.  Je lui ai alors dit : « Mère, nous ne sommes plus des enfants mais de valeureux guerriers ! L’aventure nous appelle et c’est notre devoir que de servir notre roi !

- Que vous a-t-elle alors répondu ?

    Une étrange sérénité enveloppa Amerys, comme Fili plongeait dans le sien son regard d'un bleu si doux.

- La colère a instantanément disparu sur son visage rond. Des larmes ont perlé sur ses joues et elle nous a pris dans ses bras, nous pressant fort contre elle et nous faisant promettre de faire attention à nous. Mais surtout de revenir pour faire un beau mariage avec une naine ! Haha !

- Voyez-vous, c’est moi qui suis jalouse de vous au final.

- Euuuh… jaloux pour… le mariage ? bégaya un Fili hésitant et gêné.

- Oh euh non… ! Jalouse de vous car vous avez une famille, rougit Amerys amusée par le quiproquo. Vous êtes entourés de gens qui vous aiment, ils tiennent à vous. Mais moi…

    La jeune femme dut retenir chaudement ses larmes pour ne pas montrer de faiblesse devant le jeune guerrier. Il la regarda néanmoins embarrassé, ne sachant probablement que dire face à cette situation mélancolique et éventuellement peu habituelle pour lui.

- Excusez-moi, sourit la jeune naine en se levant vigoureusement pour ne rien laisser paraître. Nous devrions aller manger maintenant. Je ne sais pas vous mais en tout cas moi j’ai un appétit de troll !

- Ne parlez plus de troll par pitié… ironisa Fili dans une moue grotesque.

    La jeune femme éclata alors d’un rire clair et tonitruant avant de prendre la sortie de la chambre, suivit par  Fili aussi amusé qu’elle et vraisemblablement soulagé de ne pas avoir eu à rassurer une jeune demoiselle triste. Ils rejoignirent ainsi le reste de la compagnie et furent ensuite emmenés à travers la demeure dans un endroit où les attendait un bon repas, qui elle l’espérait, remplirait son estomac vide et revigorerait son âme. 

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