L'elfe Noire et la Communauté de l'Anneau

Chapitre 9 : Dans la plaine

2171 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 01/03/2019 23:58

La troupe continua de marcher jusqu’à la tombée de la nuit, sous la direction de Gandalf. Les Hobbits étaient toujours aussi joyeux, bien que Frodon semblait souvent perdu dans ses pensées. Eliana le soupçonnait de lutter en permanence contre l’attraction qu’exerçait l’anneau. Depuis le conseil d’Elrond, elle n’entendait plus la voix maléfique mais elle se doutait que ce n’était pas le cas de tous. Sam tenait Bill par la bride et semblait avoir développé une profonde affection pour le petit poney. Aragorn et Legolas était souvent avec Mithrandir à l’avant de la troupe, le premier discutant avec le magicien tandis que le second surveillait constamment l’horizon et les alentours. La jeune princesse aurait bien aimée se joindre à eux, mais elle se doutait qu’il ne fallait pas trop en demander au prince de la Forêt Noire. Il semblait déjà tolérer sa présence dans la compagnie, mieux valait ne pas jouer avec le feu. Alors elle se tenait au milieu, juchée sur Shaylan, entre Gimli et Boromir. L’homme du Gondor avait bien tenté de lui parler mais il s’était le plus souvent heurté à des réponses courtes ou lapidaires. La princesse n’était pas d’humeur à entendre l’opinion d’un homme qui la voyait comme une petite chose fragile et le lui avait fait savoir. Il avait alors battu en retraite et laissait à présent Gimli tenter de la dérider en lui racontant des blagues naines. Elles étaient souvent de mauvais goût mais certaines avaient le mérite de tirer un sourire à la jeune princesse. Cela semblait rassurer quelque peu Aragorn et Mithrandir, qui ne cessaient de lui jeter des regards inquiets.


Au grand soulagement des Hobbits, le magicien finit par s’arrêter à l’orée de la forêt. Ils étaient protégés par de grands rochers qui rendaient difficile leur visualisation par un quelconque ennemi. La princesse se retint de faire remarquer que les pierres empêchaient aussi leur propre visualisation. Très rapidement, un campement des plus sommaires fut monté, Aragorn et Legolas ramenèrent du gibier et Sam commença à faire le dîner. Ce dernier se déroula dans une ambiance qu’Eliana aurait qualifiée… d’étrange. Boromir s’était muré dans le silence, Gimli et Legolas se lançaient des regards noirs, Gandalf et Aragorn semblaient perdus dans leurs pensées et les Hobbits mangeaient dans le plus religieux des silences – une fois n’était pas coutume. Toujours dans le calme, les membres de la compagnie se couchèrent peu à peu. Legolas avait annoncé qu’il prenait le premier tour de garde et s’assit donc près du feu.


Pourtant, allongée sous sa couverture, Eliana ne trouvait pas le sommeil. Même le sommeil elfique si propre à sa race semblait la fuir. Au fond elle savait pertinemment pourquoi elle était comme ça. Parler de son passé était difficile. Dans ces moments-là, elle ne pouvait s’empêcher de ressasser des images qu’elle aurait préféré oublier. Et dormir ne l’aidait pas. Dès qu’elle fermait ses paupières, les souvenirs l’assaillaient. Des images sombres, avec des cris et des larmes.


Soupirant, Eliana se releva. Cela ne servait à rien de chercher le sommeil ce soir. Elle jeta un coup d’œil autour d’elle. Seul le prince de la Forêt Noire était encore debout. La jeune elfe hésita quelques instants à s’asseoir près de lui mais elle n’était pas sûre qu’il accepterait. Il semblait déjà prendre énormément sur lui en la tolérant…


Alors elle s’installa à une extrémité du campement, le dos contre les rochers. Même si elle ne pouvait toujours pas voir ce qui se passait sur la plaine, elle était en mesure de percevoir les mouvements et les bruits à proximité d’eux. Si le prince de la Forêt Noire remarqua son manège, il n’en laissa rien paraître. Au bout de quelques instants, la Nimrôl s’évada dans ses pensées. La conversation qu’elle avait eue avec les autres membres de la communauté lui revenait en boucle. Evidemment que personne ne connaissait le peuple Nimrôl ! Haï par les elfes depuis des siècles et ne commerçant plus avec personne, son peuple était peu à peu tombé dans l’oubli. Et dans la folie. Une des nombreuses causes qui avaient décidé la jeune princesse à partir…. Quelque peu amère, elle pensa alors qu’elle n’avait pas tout dit à ses compagnons. Elle cachait encore bien des choses. Et elle se doutait que ni Legolas, ni Aragorn, ni Mithrandir n’étaient dupes.


Sans qu’elle en prenne réellement conscience, les pensées d’Eliana se dirigèrent vers son homologue masculin, qui continuait de veiller en surveillant le feu. La princesse se doutait qu’il devait, comme elle, être à l’affut du moindre bruit. Legolas était de dos. Mais même comme ça, on devinait qu’il s’agissait d’un elfe de haute lignée. Il avait un maintien et une prestance qui ne trompaient pas. Ses longs cheveux blonds montraient son appartenance aux elfes sylvains. Il était beau. C’était un fait qu’Eliana ne pouvait nier. Depuis le temps qu’elle vivait sur cette terre, elle avait rarement rencontré un homme, un nain ou même un elfe qui avait sa beauté. Mais il lui semblait aussi vaniteux. C’était une caractéristique des elfes de la Forêt Noire après tout. Leur prince la possédait forcément.


Legolas n’était pas conscient que les pensées de la princesse étaient tournées vers lui. Lui-même tentait de faire le vide dans son esprit. Sans qu’il le veuille réellement, il pensait beaucoup à la jeune elfe qui les accompagnait. Il avait promis de tenter de la supporter mais il devait s’avouer qu’il avait du mal. Depuis qu’il était enfant, on lui avait appris à haïr les Nimrôls. A les détester de tout son être. Il était difficile pour lui d’accepter de côtoyer l’une d’entre eux pendant plusieurs semaines, voire mois. Mais il allait devoir se contenir. Il avait juré à Frodon de l’accompagner et le protéger jusqu’à la fin de sa quête, quitte à y laisser sa vie. Attaquer Eliana ne l’aiderait certainement pas à tenir cette promesse.


Le silence régna pendant de longues minutes. Eliana regardait les Hobbits dormir avec un air attendri. On aurait dit des enfants. Toutes traces de maturité avaient disparues de leurs visages. La princesse savait qu’elle avait fait le bon choix en accompagnant le neveu de Bilbon Sacquet. Soudain, elle se redressa, tous ses sens en alerte. Elle avait perçu un bruit derrière les rochers.


« -Seigneur Legolas… »


L’elfe blond se retourna avec un air interrogateur. Mais elle n’eut pas le temps de continuer que le bruit recommença, un peu plus fort cette fois. Legolas l’entendit et compris immédiatement pourquoi elle l’avait appelé. Ils échangèrent un regard avant de bondir sur leurs pieds et de commencer à réveiller leurs compagnons, en leur intimant le silence. Aragorn et Gandalf comprirent immédiatement et ne posèrent aucune question. Pour Gimli et Boromir, il fallut qu’Eliana intervienne pour qu’ils se décident à faire confiance aux paroles de Legolas. Les Hobbits, encore à moitié endormi, se contentèrent de suivre le mouvement.


Le bruit se faisait de plus en plus fort et de plus en plus distinct. Legolas sortit son arc et le banda, près à tirer. Puis soudain le bruit cessa. Aragorn, qui était dos au rocher, l’épée à la main, prêt à attaquer, s’avança précautionneusement. Puis l’étonnement se peignit sur ses traits. Il se retourna vers ses compagnons, qui attendaient silencieusement son verdict.


« -Rien… Il n’y a personne. »


La stupéfaction se peignit sur le visage de tous. Ils étaient persuadés de ne pas avoir rêvé. Il y avait eu du bruit quelques minutes avant.


Par précaution, ils décidèrent tout de même d’écourter leur nuit et de repartir. Le silence régnait à nouveau tandis qu’ils avançaient. D’un commun accord, les deux elfes s’étaient placés devant les autres, les mains sur les gardes de leurs armes, prêts à dégainer au moindre danger.


Ce ne fut que quelques heures plus tard, alors que le soleil était levé depuis plusieurs heures, qu’ils décidèrent de faire une pause, en haut d’une construction rocheuse. Aussitôt, le prince de la Forêt Noire se mit à fixer l’horizon, pendant que les Hobbits prenaient leur première leçon d’escrime. Eliana les regardait, amusée, s’allier pour faire tomber Boromir sous les conseils d’Aragorn. D’une oreille distraite, elle écoutait Gimli qui tentait de convaincre Gandalf de passer par les mines de la Moria. L’information mit quelques secondes à arriver au cerveau d’Eliana.


Elle se retourna brusquement vers ses deux compagnons et lança un regard paniqué au magicien. Elle ne voulait pas passer par la Moria ! C’était au-dessus de ses forces ! Gandalf du sentir son regard, car il lui lança une brève œillade en hochant doucement la tête, avant de refuser de suivre l’idée du nain. La princesse sentit sa respiration revenir. Elle ne se rendit pas compte du regard inquiet que lui jetait Aragorn.


La suite se passa très vite. Legolas sonna l’alarme en voyant des formes noires arriver droit vers eux. La princesse eut le réflexe de se cacher, comme le reste de ses compagnons. Mais elle n’avait pas prévue de se retrouver à côté du prince elfe. Pourtant, il se contenta d’hausser un sourcil moqueur. Sentiment qui disparut dès qu’il remarqua que son homologue tremblait de tous ses membres. En entendant les ailes des oiseaux au-dessus d’eux, la princesse s’entoura de ses bras, ses tremblements s’accentuant. Il ne put rester de marbre devant cette détresse évidente.


« -Dame Eliana… Que se passe-t-il ?

-Ils… ils me cherchent. Ils sont venus pour moi. »


Pour elle ? Le cerveau du prince tournait à plein régime. Que voulait-elle dire ? Comment ça les oiseaux étaient venus pour elle ? Il allait lui poser la question mais se ravisa, se rappelant qu’ils n’étaient pas amis et qu’il ne devait pas se préoccuper d’elle.


Les oiseaux finirent par partir, et les membres de la communauté purent sortir de leur cachette. Aragorn remarqua tout de suite que la jeune princesse n’allait pas bien, même si elle tentait de se reprendre. Il se doutait que Legolas ne lui avait probablement rien fait, car lui aussi paraissait perturbé par quelque chose. Malheureusement, Boromir aussi avait remarqué le mal-être de l’elfe brune et tiré des conclusions hâtives.


« Dame Eliana ! Que vous arrive-t-il ? Que vous a fait le seigneur Legolas ? Dites-le moi ! Je vous vengerai ! »


Le prince de la Forêt Noire allait protester qu’il n’avait rien à voir avec ses tremblements mais Aragorn l’arrêta d’un geste, lui conseillant de regarder sur sa droite. Les paroles de l’homme du Gondor semblaient avoir fait parfaitement réagir la princesse puisqu’elle darda sur Boromir un regard noir avant de déclarer d’une voix froide.


« Le prince Legolas ne m’a rien fait, seigneur Boromir. Contrairement à ce que vous semblez penser, il est parfaitement capable de tenir la parole qu’il m’a faite. J’ai des problèmes personnels comme tout le monde. Ils ne vous concernent pas. Et cessez de croire que je ne peux pas me défendre ! Je n’ai pas besoin de protection ou d’une quelconque vengeance ! Je suis une Nimrôl, une elfe guerrière ! Je ne suis pas faible ! »


L’homme du Gondor sembla se tasser sur lui-même et ne répliqua pas. Pourtant, une haine farouche brilla dans ses yeux quand il les tourna vers le prince blond. Legolas ne sut si cette haine signifiait qu’il lui en voulait de peut-être savoir quelque chose sur la jeune femme que Boromir ne savait pas, ou tout simplement parce qu’elle avait pris sa défense. Ce qui était sûr, c’était que le fils de l’Intendant du Gondor lui en voulait et ne l’aimait pas. Et cela l’amusait plus qu’autre chose.


Ce fut dans un silence pesant que la Communauté de l’Anneau repartit. Gandalf avait décidé de passer par le col de Caradhras.

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