Coeur de Bronze
Disclaimer : L'histoire et les personnages de Saint Seiya appartiennent à Masami Kurumada.
Auteur : Ardell
Cœur de Bronze
Chapitre quatre : De force brute
La force, ça c'était tout. Sans force on n'était rien.
Ce fut en voyant le petit Shun pour la première fois que Geki se fit cette réflexion. Le gamin avait l'air si fragile, et en plus, il avait besoin de son grand frère pour lui sauver les miches ! Celui-là, mieux valait ne pas lui chercher des noises. Il n'empêche, ce Ikki, personne ne l'ennuyait.
Depuis aussi longtemps qu'il s'en souvienne, Geki avait toujours vécu en orphelinat. Là, il avait appris que plus on était fort, mieux on s'en sortait. La rencontre avec Shun n'avait fait que renforcer cette conviction. Aussi, lorsque cet homme mystérieux, ce Kido, les avait emmenés, lui et les autres, Geki s'était juré de lui prouver qu'il était un garçon fort et courageux, prêt à tout pour se faire adopter.
Bien sûr, il avait été étonné de constater que d'autres enfants l'accompagnaient chez le multimillionnaire. Peut-être le vieil homme voulait-il s'assurer de leurs qualités avant de faire son choix parmi eux ? En tout cas, on pouvait dire que Kido était un excentrique ; aussitôt arrivés dans sa propriété, les jeunes garçons avaient été conduits dans une sorte de hangar, où se trouvaient toutes sortes d'objets relatifs au sport et à la lutte. Il y avait même un ring. Décidément, cette idée que ne serait gardé que le plus fort d'entre eux n'était pas si bête, finalement.
Geki se jeta alors dans les exercices physiques, il y mettait toute son ardeur. Si ce Kido voulait un enfant fort, qui sache se défendre seul, alors Geki était celui qu'il lui fallait. Course, corde à sauter, frapper un sac de sable, tirer une lourde charge... Tout ce qu'on lui demandait, il le faisait. De tout son cœur. Il ne pouvait pas se permettre d'être renvoyé à l'orphelinat.
Comme les autres, il avait fait la connaissance de Saori, la petite-fille de leur bienfaiteur. Et il trouva un mot, un seul, pour la désigner. Peste ! Ce terme, évidemment, il le gardait pour lui, bien qu'il ait deviné que les autres n'en pensaient pas moins. En tout cas, en voilà une qui avait de la chance. Unique héritière d'un vieil homme qui la gâtait outrageusement, elle n'avait aucun souci d'avenir et elle savait que, sur cette Terre, quelqu'un pensait à elle et la chérissait. Qu'avait-il, lui, Geki ? Qu'avaient-ils, eux tous ? Quant à l'enfant qui serait finalement adopté, serait-il aussi pourri qu'elle l'était ? Pendant un moment, le garçon avait cru qu'il s'agirait de Jabu, vu comme il s'était proposé pour servir de monture à Saori... Certainement, ce coup de langue aux bottes de la "princesse" lui ouvrirait les portes de ce paradis : avoir une famille.
Mais au lieu de cela, on les avait fait tirer au sort. Et on leur expliqua qu'ils allaient partir s'entraîner, pour tenter de rapporter chacun une armure de Bronze. Ces armures étaient spéciales, elles étaient liées aux constellations. De plus, la préparation des enfants les rendrait forts, bien plus forts qu'ils ne pourraient l'imaginer.
En entendant cela, Geki fut très heureux ; il allait pouvoir devenir encore plus fort, et lorsqu'il reviendrait, Kido ne pourrait pas faire autrement que de le garder. Parce qu'il reviendrait avec l'armure, c'était évident.
Le hasard voulut qu'il soit envoyé dans les Montagnes Rocheuses, au Canada. Pour Geki, qui n'avait jamais quitté le Japon, ce fut toute une aventure. Une fois sur place, il découvrit la splendeur de la nature sauvage. L'entraînement, lui, était incroyablement plus difficile qu'il l'avait cru. Bien souvent, les mots "pitié, j'abandonne" affleuraient à ses lèvres mais jamais ils ne les quittaient. Abandonner ? Et puis quoi encore ? Non, il fallait juste qu'il devienne encore plus fort, voilà tout.
Un jour, alors qu'il frappait de ses poings le tronc d'un arbre, Geki entendit des petits gémissements. Il alla voir du côté du bruit et vit deux oursons, en prise avec un énorme ours mâle. L'animal s'approchait des petits.
Sans réfléchir, le garçon s'élança. Grâce à sa préparation physique, il était en bien meilleure condition qu'il l'avait jamais été. Sûr de lui, il vint au-devant de l'animal. Celui-ci se dressa sur ses pattes arrière, menaçant.
N'importe qui aurait été terrassé. N'importe qui se serait retrouvé recroquevillé au sol, bras sur la tête pour la protéger, espérant que l'horreur prenne fin, grièvement blessé.
Et Geki fut blessé, ça oui. Seulement la douleur de l'entraînement, qu'il ressentait maintenant tous les jours, l'avait en quelque sorte immunisé contre la souffrance physique. Quand on s'éclate les poings à force de frapper une pierre, qu'était-ce que les coups de griffe d'un ours furieux ?
Une parole de son maître lui vint alors à l'esprit. Le cosmos... Ce fameux cosmos dont il lui rabâchait les oreilles. Sans trop savoir ce qu'il faisait, Geki se battit de plus belle, tout en sentant une force incroyable irradier de ses muscles.
Et ce fut fini. À ses pieds, l'ours, mort.
Incroyable ! Ainsi, voilà ce qu'on pouvait faire avec le cosmos ? Ah mais dans ce cas, il allait s'entraîner encore plus dur, pour perfectionner ce cosmos qu'il venait de sentir en lui pour la première fois. Les deux oursons s'étaient sauvés pendant la bataille, à présent ils devaient être avec leur mère. Le garçon, quant à lui, raconta tout à son maître, lequel lui apprit qu'il l'avait observé. Il ne semblait pas impressionné par l'exploit de son élève, comme si c'était la moindre des choses. Geki en fut assez vexé, lui qui avait cru aux félicitations !
L'entraînement reprit. L'apprenti Chevalier comprit que sa force résidait dans ses bras. Ceux-ci devinrent si puissants, qu'il fut capable de terrasser d'autres ours. Il ne s'en prenait qu'aux mâles, laissant les femelles et leurs petits. Dans ce coin des Montagnes Rocheuses, il n'était pas rare de croiser un ursidé. Il suffisait de les déranger pendant leurs repas, et ces animaux ne demandaient qu'à se battre.
Un jour, son maître apprit à Geki qu'il avait gagné l'amure de l'Ours. Tous ces animaux qu'il avait tués, seul un Chevalier en était capable. En se battant contre eux et en gagnant, il avait prouvé qu'il était digne de la constellation de l'Ours. Car il était devenu aussi, non, plus fort qu'un ours. Ses avant-bras étaient capables de briser n'importe qui comme une brindille. De plus, la Cloth l'avait reconnu comme étant son porteur légitime.
Geki fit ses adieux à son maître et retourna au Japon. Où il apprit la mort de Mitsumasa Kido et l'organisation, par sa petite-fille, du tournoi inter-galactique.
Ce fut confiant en lui-même que Geki se retrouva face à Seiya. Allons ! Ce gringalet ne ferait pas long feu. Certainement les bras ultra puissants de l'Ours réduiraient ce jeune inconscient en bouillie. Effectivement, tout se déroula comme prévu. Geki sentait la victoire approcher en même temps qu'il pouvait sentir les forces de son adversaire quitter celui-ci. Et la victoire est pour...
Geki s'attendait à entendre le présentateur déclarer sa victoire. Lorsque, soudain, coup de théâtre ! Seiya parvint à... non c'était impossible ! Comment avait-il pu, alors qu'il était près de sombrer dans l'inconscience, briser les avant-bras de Geki ? Aussi incroyable que cela puisse paraître, Pégase avait remporté ce combat, grâce à son Pegasus Ryû Sei Ken.
Honteux, mortifié, Geki se demanda ce qu'il avait fait de travers. Plus tard, comme si chacun reconnaissait en l'autre sa propre image, les perdants se réunirent. Geki mais aussi Jabu, Ichi, Nachi et Ban. Tous, ils avaient cru à leur victoire facile. Tous, ils se rendaient compte de leur impuissance et de leur faiblesse. Quand Ikki était apparu, ils avaient compris qu'il s'agissait là d'un adversaire plus dangereux que ceux auxquels leur entraînement les avait habitués.
Seiya et les autres Chevaliers étaient partis à sa poursuite, même ce Shun, qui semblait si fragile ! Mieux valait ne pas se fier aux apparences...
Toujours était-il que les cinq Saints restants décidèrent, d'un commun accord, de retourner sur les lieux de leurs formations, afin de compléter leur entraînement. Parce qu'ils ne pouvaient rester ainsi, des perdants, des faibles.
Geki retourna dans les Montagnes Rocheuses. Son maître accepta de le former encore quelque temps, et l'homme put déceler une forme de maturité chez l'adolescent. Cette fois, il ne tuait pas d'ours, mais s'appliquait à élever son cosmos à son maximum. Il était plus humble aussi, comme s'il avait conscience que, sur cette Terre, rien n'est jamais acquis.
Une fois que Geki se jugea prêt, il se rendit au Japon. Là il reçut un appel de Jabu l'informant que Saori la "peste", était en réalité Athéna. Décidément. Alors elle, soit elle était princesse, soit elle était déesse. En tout cas, ça lui allait bien.
Le devoir d'un Chevalier étant, comme le lui avait dit son maître, de protéger Athéna, Geki se fit le serment d'honorer ce principe. Ce fut ainsi qu'il se retrouva en Grèce, au Sanctuaire, à veiller sur Saori. De la voir allongée là, sans défense, émut le cœur de Geki. Ah elle était loin la petite princesse gâtée de son enfance ! À présent ne restait qu'une jeune déesse qui mettait tous ses espoirs en ses Chevaliers.
Et jamais, non jamais Geki ne trahirait cet espoir !
Parce que la force brute n'était rien sans conviction, sans idéal, sans but. Jadis il avait cru que cet idéal était justement la force brute. A présent il l'avait compris : sans espoir, la force brute n'est rien.