La cour des grands

Chapitre 65 : Galmar

5547 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour 24/09/2018 11:26



Galmar



"Les lions sont sans merci. Les loups protègent le troupeau. Les guerriers combattront sans répit. La paix viendra au plus tôt". Joué au luth et au tambour, cette nouvelle chanson écrite exclusivement pour la Guerre des Cinq Rois était joliment reprise par des troubadours ambulants qui avaient fait halte dans l'auberge de Viergétang. Tous applaudirent les artistes de passage qui s'en allèrent se reposer dans leur chambre. La salle redevint bruyante de conversations joyeuses et de rire gras. Galmar appréciait venir dans cette auberge désormais, et il y venait de plus en plus. Sans pour ambition de vexer son frère, les soirées dans ce lieu étaient bien plus captivantes que les dîners mondains avec le roi Hästrid. Et puis, Galmar voulait voir si ses agresseurs qui l'avaient attaqués il y a quelques jours étaient toujours de passage en ville. Ne remarquant personne de suspect, il décida ce soir-là de profiter de la soirée. De plus, il n'était cette fois pas seul. Miranda était avec lui. Galmar, ne voulant que sa sécurité, voulait lui en priver mais rien n'aurait pu la faire fléchir à ce sujet. Elle voulait profiter d'une dernière soirée en sa compagnie. En effet, Galmar devait partir le lendemain en compagnie d'Olliver et de plusieurs soldats. Ils étaient invités par le Roi Robb afin d'assister au mariage d'Edmure Tully avec l'une des sœurs Frey. Galmar se demandait bien avec laquelle de ses sœurs Edmure allait se marier. Cependant, cela n'avait que peu d'importance pour lui. Ce qui occupait son esprit était plutôt de savoir si son père, Walder, pardonnerait à Olliver l'indépendance de Viergétang. Il essaya de mettre tous ses doutes dans un coin de sa tête et de profiter de la soirée avec Miranda, même si cela fut assez difficile. Cette soirée dans l'auberge se passa très bien. Le jeune couple mangeait, buvait et s'amusait jusqu'à ce que la fatigue se fasse ressentir. Cette fatigue arriva pile au moment où l'auberge allait fermer. La barman somma à toute sa clientèle de rentrer chez eux. Un peu soûl, quoique assez lucide pour ne pas tomber par terre, Galmar et Miranda rentrèrent au château sans faire trop de bruit.


-Tu dois être content de revoir ton père, hein, Galmar? Ironisa Miranda qui savait très bien que Lord Walder n'était pas très aimé de ses enfants.


-Je l'emmerde, mon père! Qu'il pourrisse dans les Sept Enfers! Tonna Galmar d'un ton éméché.


-Hey, Galmar. Je te l'ai jamais dit les yeux dans les yeux mais je t'aime tellement.


Galmar ne répondit pas. Il préféra sourire et embrasser tendrement sa compagne. Ils arrivèrent dans leur chambre et profitèrent de cette dernière nuit comme il se doit. Il se rendit compte cette nuit-là à quel point il était devenu fou amoureux de Miranda. Il trouvait presque magique que deux êtres s'aiment si intensément alors qu'ils ne se connaissent que depuis quelques semaines. Pour rien au monde il ne la sacrifierait, ne la mettrait en danger ou la laisserait derrière lui. Il allait partir le lendemain pendant au moins une semaine mais ses pensées, elles, resteront toujours à Viergétang près de sa compagne. Il commençait même à regretter de s'être porter volontaire pour partir avec son frère. Mais d'un autre côté, il avait envie de revoir quelques uns de ses frères et sœurs, dont Hilda qui était parti avec Lord Karyl qui, à en croire Olliver, était quelqu'un de très respectable. Il finit par s'endormir dans les bras de Miranda, décidant de ne pas encore penser aux retrouvailles familiales.


L'aube se leva donc sur ce jour du départ. Encore endormi, Miranda ne fit pas attention à Galmar qui se leva pour respirer l'air frais à sa fenêtre. Par coïncidence, de sa fenêtre, il pouvait voir le chemin qui menait vers l'ouest et qui les guidera vers les Jumeaux. Avec un profond soupir, il s'habilla et descendit prendre un petit-déjeuner. Olliver l'attendait dans la salle à manger.


-Tu n'avais pas besoin de m'attendre, roi Hästrid. Proclama Galmar avec un sourire.


-Je n'avais rien d'autre à faire, et ne m'appelle pas roi Hästrid. Répondit Olliver en entamant une pomme. Surtout devant notre père.


-Tu n'as rien à faire? Même pas préparer nos hommes et les chevaux au voyage?


-C'est déjà fait. Je suis plus matinal que toi.


-C'est pas faux. Admit Galmar en prenant un bout de pain. Quand partons-nous?


-Dans une heure.


Durant l'heure, les deux frères partirent chacun de leur côté enfiler leur armure. Olliver s'habilla de sa toute nouvelle armure de roi, une armure de plate bien solide d'une couleur bleu très foncée. Il s'occupa de son épée «Samwell» qu'il rangea dans son fourreau. Lord Karyl devait voir que jamais l'épée qu'il lui avait offerte ne l'avait quitté, comme pour signifier leur amitié. De son côté, Galmar enfila l'armure que lui avait commandé Olliver au forgeron. Elle était à peine plus fine que celle d'Olliver mais elle était également en plate bleu foncée. La seule différence visible qu'il y avait entre son armure et celle d'Olliver était que ce dernier allait porter une cape en peau de bête sur son dos. Pendant qu'il s'habillait, Galmar assista au réveil de son amante. Elle l'aida à attacher ses sangles et discutèrent du voyage. Celui-ci allait durer un peu moins de trois jours le temps d'arriver aux Jumeaux. Là-bas, ils ne resteront pas plus de deux jours et se dépêcheront de rentrer. En effet, aucun des deux frères ne voulaient rester trop longtemps, même si Olliver, lui, voulait profiter de voir Lord Karyl et discuter avec Robb des prochaines offensives contre les Lannister afin d'en faire partie. Olliver réclamait souvent son souhait de participer à l'offensive finale sur Port-Réal et tuer le roi Joffrey de ses mains. «Après tout, qui ne le voudrait pas?», lui disait Olliver.


Lorsque l'heure de préparation fut passé, Galmar, accompagné de Miranda, partirent du château pour rejoindre Olliver et les soldats qui les accompagneront aux Jumeaux. Ils étaient tous prêts à partir. Galmar partit aux écuries et prit un nouveau cheval qu'il avait appelé Darius, car il était «aussi fort et robuste que mon défunt ami». Il passa la grande porte de la ville et tous empoignèrent la selle de leur cheval pour se mettre en route. Avant qu'il ne monte à son tour, Galmar sentit une main le retenir par le col. Il se retourna instinctivement et embrassa Miranda. Galmar sentait l'émotion le submerger. Il vit dans les yeux de Miranda qu'elle était dans le même état, au bord des larmes. Galmar n'arrivait pas à comprendre pourquoi cela lui faisait tant de mal de se séparer seulement une semaine de Miranda.


-Viens avec nous. Supplia Galmar.


-Je ne peux pas. Il me reste trop de blessés à soigner.


-Prend soin de toi, Miranda.


-Toi aussi, Galmar.


Galmar empoigna pour de bon la selle de son cheval et, après un dernier regard, galopa vers son frère. À peine était-il arrivé en tête de la troupe que celle-ci se mit en marche vers l'ouest. Galmar regarda derrière lui pour revoir encore une fois Miranda mais la grande porte de Viergétang était déjà fermée.


La troupe, composée d'Olliver, de Galmar et d'une trentaine de soldats perdit peu à peu de vue la ville de Viergétang derrière eux et prirent la direction de la Route Royale. Celle-ci longeait pendant quelques lieues la Fourche Verte, le nom de la rivière sous laquelle le pont des Jumeaux était construit. La route allait être longue. Et Galmar aurait voulu voyager au grand galop, histoire d'arriver aux Jumeaux le plus vite possible afin d'en repartir le plus tôt. Mais ce fut à une marche régulière qu'ils voyageaient tous. Galmar soupçonnait son frère d'avoir voulu voyager ainsi afin d'être le plus longtemps hors de sa ville, hors de ses responsabilités.


Le crépuscule arriva plus vite que prévu et Olliver ordonna à ses hommes de monter le camp. Ils installèrent toutes les tentes et entamèrent les victuailles autour d'un grand feu de camp. Galmar et Olliver étaient côte à côte. Ce dernier posa sa main sur l'épaule de son frère.


-Je t'ai vu avoir la mine basse toute la journée, mon frère. Tu l'aimes beaucoup, n'est-ce-pas? Cette Miranda?


Galmar vit le sourire de son frère lui remonter le moral.


-En effet. Affirma-t-il. Mais ne t'inquiètes pas. Je la reverrai bientôt, je n'ai pas à être dans cet état. Et toi, Olliver? Personne ne te manque, là-bas?


-Oh, loin de là! S'exclama Olliver. Absolument personne ne me manque. Et tant mieux.


-Pas même Azénor? Demanda Galmar avec un sourire vicieux.


-Que veux-tu dire? Si tu parles au niveau des choses de l'amour, ce ne sera pas avec elle. Elle n'est vraiment pas mon style.


-Ronmac, alors?


-Quoi?! Tu te fous de moi?! Cet homme est bien trop ennuyant!


-Le mestre Kyren, peut-être?


-T'es dégueulasse!


Après s'être amusé à se charrier, ils sentirent la fatigue les envahirent et s'endormirent dans leur tente respective.


Le lendemain, toute la troupe continua son voyage. Ils atteignirent enfin la Route Royale et virent à l'Ouest la Fourche Verte les accompagner. La Route Royale était très peu fréquentée ces derniers temps, en raison de la guerre, et la troupe ne croisa que quelques voyageurs. Ces derniers faisaient état de plusieurs troupes comme eux qui partaient en direction des Jumeaux, notamment celle du roi du Nord, accompagné de plusieurs milliers de soldats. Galmar comprit qu'ils allaient faire pâle figure avec leur vingtaine de guerriers face à l'armée du Nord. Le roi Robb était donc déjà arrivé sur place. Ainsi que plusieurs autres seigneurs comme les Manderly, les Bolton, les Reed et plein d'autres dont surtout les Tully, la famille qu'Olliver avait trahi, sans compter évidemment celle des Frey. Les deux frères se demandaient bien comment Brynden Tully, dit le Silure, allait réagir quand il allait se retrouver face au roi Hästrid. Robb Stark avait dit dans sa lettre qu'il allait se porter garant d'Olliver quand il se retrouvera face au Silure ou même face à son père Walder. Mais Olliver savait que l'indépendance de Viergétang allait lui causer des problèmes, et il en restait indifférent. Il ne pouvait revenir en arrière et il en avait conscience. La veille, en plus de leur cachotterie, Galmar et Olliver avaient parlé de la position politique que s'était attribué ce dernier. Il avait fait cela pour sauver sa ville de la pauvreté et pour la reconstruire après la bataille de la Baie des Crabes. Pourtant, il n'avait pris aucun plaisir à le faire. Olliver lui avait avoué qu'être roi le dépitait et que la seule chose qu'il voulait, c'était partir à l'aventure. Galmar l'avait rassuré en lui disant qu'il faisait un excellent roi qui savait mieux diriger son royaume que plein d'autres seigneurs au monde. Olliver ne lui avait répondu qu'avec un petit sourire et ils avaient continué leurs plaisanteries.


Galmar ne savait pas réellement quoi faire pour aider son frère. Comment le rendre plus joyeux à l'idée de gouverner? En n'ayant aucune réponse à cette question, il nourrit l'espoir qu'aux Jumeaux, Lord Karyl pourra lui venir en aide. Soudain, Olliver s'approcha de lui et voulu lui parler.


-Galmar. J'ai à te parler. Prenons quelques mètres d'avance par rapport à la troupe.


Surpris, Galmar suivit Olliver et ils s'éloignèrent de la troupe.


-Qu'y a-t-il? Demanda Galmar. Un problème?


-Non, ne t'inquiètes pas. Juste, j'ai réfléchi, à ce que tu m'as dis hier soir.


-Ah oui? Et qu'en as-tu tiré?


-Rien. J'ai mis longtemps à comprendre mais je déteste gouverner cette ville alors que tous les autres alliés du Nord sont au combat. Rester sur mon trône sans rien faire, je n'aime pas ça.


-Le combat est quand même venu à toi à Viergétang. Les Lannister ont failli détruire la ville.


-Et ils ne reviendront plus. Je ne veux pas provoquer les batailles. Mais j'ai peur de devoir m'y mettre pour….j'en sais rien, trouver un semblant de vie palpitante. Du coup, je mettrais tout le monde en danger si je reste roi. Je ne sais pas ce qu'il m'arrive mais j'ai tout le temps envie d'empoigner mon épée et de terrasser des ennemis. Karyl a dit que j'avais été pris d'une folie meurtrière sur le champ de bataille. La même folie qui m'a fait tué William Mouton, mon prédécesseur. J'ai même l'impression que quand j'ai déclaré l'indépendance de Viergétang, c'était plus pour me mettre à dos le plus de force possible que pour aider ma ville.


-Tais-toi, imbécile! Rétorqua Galmar qui ne pouvait plus entendre un autre mot de son frère. Tu te montes la tête parce que tu te laisses emporter pendant les combats. Arrêtes tes âneries, Olliver. Tu as tout pour être roi. Et si vraiment tout ce que tu me dis là est vrai, quelle importance? Jamais la ville ne s'est mieux porté de toute son existence. Et c'est grâce à toi. Si savoir ça ne te fais rien, alors tant pis pour toi. Mais je te connais. Je sais que quelque part au fond de toi, tu es heureux de rendre meilleur la vie de tes habitants. Si j'avais été à ta place, peut-être aurais-je fait la même chose.


Olliver ne répondit pas tout de suite. Il avait un sourire figé et un regard vide.


-Tu sais que le port de Viergétang n'était pas à la ville avant que tu arrives?


-Oui, et alors?


-Le port était privé, dirigé par un noble, Frenrir Hillman. Tu as appris ce qu'il lui était arrivé?


-Il a été retrouvé dans son bureau, enfermé dans une armoire, un bâillon sur la bouche et la veine tranchée.


-C'est moi qui l'ai tué. Juste parce qu'il m'énervait. Comme William Mouton. Qui tue de sang-froid des personnes désarmées sans regret si ce n'est un démon?


-Je...tu n'es pas un démon. Répondit Galmar, un peu secoué par l'aveu d'Olliver. Un démon, c'est quelqu'un qui n'a même pas conscience de faire le mal, qui tue en étant indifférent. Tu n'es pas comme ça, toi.


Olliver avait perdu son sourire pendant son aveu. Il jeta un regard dépité vers Galmar et soudain, fit faire demi-tour à son cheval. Il cria alors à sa troupe:


-Stop!


Et la troupe se stoppa. Olliver se remit en place à côté de Galmar qui s'était arrêté et qui ne comprenait rien à la situation.


-Galmar. Proclama Olliver d'une voix étrangement solennelle. Cela fait longtemps que j'y pense mais il est désormais l'heure de t'en parler. Depuis ton arrivée, je t'observe autant que toi, tu m'observes. Et j'en suis venu à cette conclusion. Galmar, quand nous serons rentrés à Viergétang, tu seras le nouveau roi Hästrid.


-Quoi?! S'exclama Galmar.


-Tu as bien entendu. Tu feras un bien meilleur roi que moi, j'en suis persuadé.


-Tu fais erreur, Olliver. Je n'ai jamais voulu être un seigneur, faire partie des puissants de ce monde! Notre père s'est chargé de m'en dégoûter. Désolé, Olliver, je n'accepte pas. Je ne refuse pas par modestie. Je ne veux juste pas toucher au trône. Pour rien au monde. Cette cour des grands n'est pas pour moi.


-Tu en es sûr? Insista Olliver, déçu. Impossible de te faire changer d'avis?


-Impossible. Désolé.Conclut Galmar d'un regard ferme ponctué tout de même d'empathie.


Olliver ordonna à sa troupe de se remettre en route. Celle-ci dépassa les deux frères qui restaient immobiles à se regarder.


-Si tel est ton souhait. Accorda Olliver. Laisse-moi au moins faire quelque chose. À partir de ce jour, Galmar, et jusqu'à ton dernier souffle, tu porteras le nom d'Hästrid. Une nouvelle grande famille voit le jour. Tu n'es plus un bâtard des Frey. Tu es Galmar Hästrid, un des premiers représentants d'une famille qui traversera les hivers.


Galmar ne s'attendait pas à cette annonce. Dans son esprit, ce n'était pas si important pour lui de porter ce nouveau nom mais, rien que pour le geste et le symbole que cela représentait, il remercia grandement Olliver. Les deux frères se remirent enfin en route et prirent de nouveau la tête de la troupe.


Peu à peu, l'après-midi passa et le crépuscule allait bientôt se montrer. La troupe venait de quitter la Route Royale pour continuer à longer la Fourche Verte et entrèrent dans une forêt. Sachant que lorsqu'ils sortiraient de cette forêt, la nuit sera déjà presque arrivée, Olliver profita de se retrouver dans une forêt pour ordonner à trois de ses hommes, des archers, de partir en chasse d'éventuels gibiers. Il devait retrouver les trois archers à la sortie de la forêt. Pourtant, la troupe remarqua l'absence des chasseurs. Olliver ordonna de les attendre. Le crépuscule touchait déjà à sa fin quand Olliver comprit que quelque chose n'allait pas. Ses archers avaient disparu. Il dit alors à ses hommes de se répartir dans les bois. Lui-même, accompagné de Galmar et de deux soldats, se lança à la recherche des archers. Ils allumèrent tous leur torche et se dispersèrent dans les bois.


-Je suis sûr qu'ils se sont juste perdus, sire. Estima un des hommes qui accompagnait Olliver et Galmar. Ils ne se sont pas équipés de torches en allant chasser.


-Je sais, soldat. Nous sommes là pour leur montrer le chemin, justement. Répondit Olliver.


Tout à coup, ils entendirent un cri de douleur, loin derrière eux. Puis plusieurs. Tous avaient entendus ces cris et se dirigèrent vers la source de ces bruits.


-Que tout le monde soit sur ses gardes! Cria Olliver.


Tous dégainèrent leurs armes. Courant vers l'endroit où les cris se sont fait entendre, ils se stoppèrent nets. Devant eux, des torches roulaient sur le sol, descendant d'une pente et brûlant les feuilles mortes sur leur passage. Ils levèrent la tête pour voir le haut de la pente et aperçurent des reliefs sur le sol. Ils distinguèrent soudain les cadavres de quelques soldats, tous transpercé de flèche. Olliver se posa près d'un des cadavres et retira une flèche qui avait atteint le pauvre homme dans l’œil.


-Des flèches de fer. Constata-t-il.


-Des Lannister? Interrogea Galmar.


-Non, les Lannister prennent des flèches en acier. Ça, ce sont des flèches de brigands.


-Mais pourquoi des brigands attaqueraient une troupe armée? Ça n'a aucun sens.


-Nous allons vite le savoir. Ne nous dispersons plus et retournons doucement vers les chevaux. Peut-être y sont-ils.


Les soldats toujours en vie avaient tous rejoint leur roi et le suivirent. Ils n'étaient plus qu'une dizaine. Tous étaient à l'affût du moindre mouvement, du moindre bruit suspect. Puis, le sifflement de plusieurs flèches se fit entendre, ainsi que des cris de rage, venant des ombres du bois. Ils virent alors des hommes qui, armes levées, fonçaient sur eux. Le combat s'engagea. Ces hommes qui les attaquaient était à peine plus nombreux qu'eux et la bataille n'était pas perdu d'avance. Galmar vit un immense guerrier devant lui brandir un grand espadon vers lui. Cette silhouette lui disait quelque chose mais il se concentra davantage sur le combat. Il esquiva le coup et contre-attaqua avec son épée. La grande silhouette, qui voyait l'épée de Galmar se diriger vers son visage, para le coup avec un protège-poignets en acier. Face à la lumière de la torche, Galmar finit par reconnaître la silhouette qui était celle de Boris, un allié de l'homme au bandeau noir qui l'avait attaqué à Viergétang. Galmar libéra alors sa rage et fonça sur Boris en l'assénant de coups plus rapides et féroces que jamais. Galmar se baissa pour esquiver un coup horizontal de l'espadon et en profita pour taillader l'une des jambes de Boris. Celui-ci s'écroula sur sa jambe et, dans un cri de rage, voulut abattre son arme sur son adversaire. Galmar réussit alors à agripper d'une main le poignet de Boris et, de son autre main, brandit son épée et la planta sous le menton de son ennemi. La lame traversa la tête et en ressortit derrière le crâne. Mort sur le coup, Boris s'effondra. Galmar eut du mal à retirer son épée et, lorsque ce fut fait, il se retourna pour voir le cœur de la bataille qui se jouait derrière lui. Il cherchait du regard cet homme au bandeau noir mais il était difficile de reconnaître les visages dans l'ombre et le mouvement brouillon des torches, surtout avec l’œil borgne qu'il avait. Il vit les soldats et les brigands tomber sans vie sur le sol. Il aperçu alors son frère en plein duel avec une femme portant un grand marteau de guerre. C'était Lissandra, une autre alliée de Boris. Galmar courut au secours de son frère. Un adversaire vînt soudain à sa rencontre mais il ne connaissait pas celui-ci. Il engagea le duel, prêt à en finir le plus vite possible. Il éloigna l'épée que son ennemi brandissait devant lui et taillada du bout de sa lame toute la largeur du torse. Quand son ennemi s'écroula, Galmar vit Olliver se prendre un violent coup de marteau dans le torse. Celui-ci fut alors projeté au sol et il avait du mal à se relever, ayant le souffle coupé. Galmar courut, rage au cœur, vers Lissandra pour l'attaquer. Il reçut soudain un violent coup de poing au visage qui le fit tomber au sol. Cette fois, son ennemi était cet homme au bandeau noir. Celui-ci cria alors à ses hommes:


-Tuez tous les soldats restants et éteignez le feu! Et amenez le roi et son frère devant moi.


Galmar voulut se lever pour trancher la gorge de son ennemi mais un homme l'attrapa par derrière et tenait fermement ses bras. L'homme au bandeau noir s'approcha alors de Galmar et lui enleva des mains son épée. Il la pointa soudain sur son seul œil valide.


-Calme-toi où je t'arrache l'autre œil et je le fais bouffer à ton frère. Menaça-t-il.


Alors que le dernier soldat tombait, les brigands vidèrent des gourdes sur les feux qui commençaient à se manifester dangereusement. Lissandra, elle, tenait fermement par le col Olliver et le traînait jusqu'à côté de Galmar. Le roi Hästrid avait encore du mal à respirer et il suffoquait. Il réussit tout de même à interroger d'une voix étouffée l'homme devant lui.


-Qui….qui êtes-vous?


-Je m'appelle Élias. Enchantez de faire votre connaissance, roi Hästrid. C'est un immense honneur d'être devant Votre Majesté. Clama-t-il d'un ton ironique.


-Ta gueule, chien! Invectiva Galmar. Que nous veux-tu?!


-Oh oui, toi, cela fait longtemps que nous nous connaissons. Répondit calmement Élias. Et oui, je ne fuis pas cette fois.


Un des hommes d'Élias s'approcha de lui et lui donna une torche. Galmar vit alors son regard à la fois moqueur et agressif.


-Allez prendre les chevaux sur le sentier! Ordonna Élias à ses hommes. Quand à vous, nous allons vous emmener.


-Où ça? Demanda Galmar. Vous êtes des mercenaires, n'est-ce-pas? C'est pour la prime sur ma tête que vous faîtes ça?


-Tss, tu ne vaux rien, Galmar. Si je n'étais pas aussi avide d'argent, je t'aurais déjà tuer aussi. Mais c'est vrai que ce serait mieux si je peux avoir ta prime en plus.


-Vous êtes venus pour Olliver alors? Pourquoi? Qui vous a payé?


-Votre père, voyons. (La réponse déséquilibra Galmar) Vous n'avez tout de même pas cru que Walder Frey allait laisser une cité lui échapper à cause d'un enfant capricieux?


-Quand le roi Robb saura ça!


-Le roi Robb? Le roi du Nord? Ce roi ne vaut rien. Autant que ce pauvre petit Olliver. Lissandra emmènera ton frère aux Jumeaux. Quand à toi, je m'occuperais personnellement de ton cas et je t'emmènerai à Winterfell. Ta tête a un plus grand prix dans le Nord. Peut-être même irons-nous jusqu'au Mur, Galmar. Sur ce, faîtes vos adieux entre frères car demain, vous faîtes chacun votre propre route vers la mort.


Galmar et Olliver se regardèrent. Puis, presque en même temps, les deux frères furent assommés par un violent coup derrière le crâne. En s'évanouissant, Galmar entendit la voix souffrante d'Olliver l'appeler.


-Ga...Galmar….Hästrid!


Comme sortant d'un sommeil douloureux et tourmenté, Galmar ouvrit les yeux avec peine. Le jour était levé et un petit vent d'hiver faisait frissonner les feuilles d'arbres autour de lui. Peu à peu, il apprivoisait de nouveau ses sens. Un goût de sang dans la bouche. Le bruit des feuilles secouées par le vent et d'un feu crépitant. Il sentit un arbre derrière son dos et des liens attachant ses poignets devant lui. Une odeur de viande grillée. Et enfin, la lumière du jour qui l'aveuglait. Il vit de petites flammes jaillir d'un tas de braises. Le feu allait s'éteindre très bientôt. À côté de ce feu, un homme astiquait un bout de viande. Cet homme était Élias, l'homme au bandeau noir qui l'avait tant énervé ces dernières semaines. Deux autres hommes étaient assis près d'un arbre, prenant plaisir à se partager une bouteille de vin. Galmar se souvînt rapidement de ce qu'il s'était passé la veille. Son frère était en ce moment en route vers les Jumeaux, emmené de force vers la mort. Lui aussi était dans la même situation. Mais c'était à Winterfell qu'il était emmené. Il ne ressentait plus qu'un picotement derrière la tête. Cette douleur était assez faible pour lui permettre de réfléchir à une échappatoire. Il devait aller secourir son frère.


Il tenta de dénouer ses liens mais sans succès. Il n'avait plus d'arme sur lui et il n'y avait pas de lame à proximité, hormis à la ceinture d'Élias. Mais celui-ci était trop loin.


-Ah, tu es enfin réveillé? Remarqua-t-il avec un sourire mesquin.


-Nous ne sommes plus dans le même bois, n'est-ce-pas? Demanda Galmar, sa rage retenue par ses liens.


-En effet. Nous avons pris vos chevaux et nous sommes partis au triple galop. L'énergie qu'on utilise pour t'emmener à la potence, c'est incroyable! Si on continue comme ça, on arrivera au Mur dans moins de trois jours.


-Au Mur? Tu ne veux plus aller à Winterfell?


-Winterfell a été attaqué par les Greyjoy et ils ont foutus le camp. Personne ne peut t'exécuter et nous payer là-bas.


-Il faut que…je retrouve mon frère.


-Si l'au-delà existe, tu le retrouveras, ton frère. Répondit-il en jetant l'os de poulet qu'il était en train de ronger. Bon! Il est temps de se remettre en route!


-Où sommes-nous?


-Dans la vallée du Neck. On verra Moat Cailin dans deux ou trois heures.


-On est aussi loin?! S'exclama Galmar, désespéré.


-Et oui. Comme je te l'ai dit, on s'est un peu dépêché. Allez, maintenant que t'es réveillé, tu peux te lever, maintenant.


Galmar se leva tant bien que mal en ayant les poings liés. Les deux autres hommes se levèrent et détachèrent les chevaux attachés à un arbre. Élias prit une épée attachée à son cheval et Galmar reconnut son arme.


-C'est ton épée, ça, n'est-ce-pas? Demanda Élias. C'est une jolie lame. De l'acier bien trempée. Toute neuve. Ça ne t'ennuie pas que je la garde après ta mort? Oh merci, tu es trop gentil. S'exclama-t-il sans attendre la réponse de Galmar.


Galmar, sachant qu'il fallait se dépêcher pour aider son frère, fonça sur Élias et lui donna un violent coup d'épaule. Pris par surprise, Élias n'eut pas le temps d'esquiver et se plaqua contre son cheval qui partit au galop.


-Non! Reviens, imbécile! Cria-t-il à sa monture. Tu vas me le payer, Galmar!


Élias se rendit alors compte que Galmar avait profité du choc pour lui prendre son épée. Galmar tentait tant bien que mal de défaire les liens qui attachaient ses poignets mais les deux autres mercenaires fonçaient déjà vers lui. Il para quelques coups d'épées et s'éloigna en courant afin de gagner du temps pour couper ses liens.


-Tu ne t'enfuiras pas, Galmar! Je te ramènerai au Mur mort ou vif! Hurla Élias qui prenait son épée qu'il avait laissé au sol pour manger.


La corde qui liait les poignets de Galmar était de plus en plus fragile mais elle ne put céder avant que les mercenaires ne le rattrapent. Il esquiva et para une nouvelle fois les coups de ses adversaires mais il avait du mal à en donner lui-même. Soudain, il se servit d'un grand coup hache de son adversaire pour enfin libérer ses poignets. Il profita de la surprise de ses adversaires pour tuer l'un d'eux et donner un grand coup de pied à un autre. Élias, lui, venait de rejoindre le combat.


-Tu me saoules, Galmar! S'énerva Élias. J'ai décidé de te tuer! Tant pis si la récompense baisse!


-C'est incroyable, ça! Tu m'as pourchassé aussi longtemps pour au final baisser la prime sur ma tête?! Tu fais un piètre mercenaire! Cria-t-il en tuant l'autre ennemi.


Galmar évita de peu un puissant coup d'épée et en donne un aussi violent dans la lame de son adversaire. Élias ne put s'empêcher de lâcher son arme qui partit au loin et vit alors la lame de Galmar atteindre son torse. L'épée de Galmar s'était incrustée dans l'armure de cuir d'Élias et quelques gouttes de sang l'éclaboussèrent. Élias tomba à terre, son bandeau noir se détachant de son visage et se laissant emporter par le vent.


-En...enfoiré! Bégaya-t-il.


-La traque est enfin terminée, Élias. Et je pars de mon côté retrouver mon frère. Annonça Galmar, retirant sans ménagement sa lame et prenant avec lui son cheval, Darius, que les mercenaires voulaient s'approprier. Derrière Galmar, Élias riait. Qu'est-ce qui te fait rire? Demanda-t-il.


-Ton frère est déjà mort.


-Si mettons tes acolytes ont voyagé aussi vite que toi, normalement, ils ne devraient atteindre les Jumeaux que dans une heure ou deux si je ne m'abuse.


-Combien de temps crois-tu t'être évanoui, Galmar? Ce n'était pas hier soir que nous vous avons capturé mais celui d'avant.


-Quoi?! S'exclama Galmar qui se mit aux côtés d'Élias. Le mariage a déjà eu lieu?


-Oh oui, Galmar.


-Mon père ne tuerait pas Olliver, en fait. Le roi Robb verrait ça comme une trahison.


Soudain, Élias pouffa de rire, tout en crachant du sang.


-Hier soir, je suis monté sur une colline et j'ai vue ce qu'il y avait en direction des Jumeaux. Il y avait des flammes et une gigantesque fumée s'élevait dans le ciel.


-Quoi?! Que veux-tu dire?! Parle, enfoiré!


-Ton père n'a pas attendu pour trahir. Tout le monde est mort là-bas. Ton frère, le roi Robb, son épouse, sa mère et tous les autres seigneurs du Nord ont été tués par ton père! (Galmar écarquilla les yeux). La guerre des Cinq Rois est terminée, Galmar! Elle a fini dans un bain de sang! Et ton frère n'y a pas échap….


Élias ne put terminer sa phrase. La lame de Galmar lui avait déjà tranché le cou. Galmar Hästrid tenait fermement sa lame. Il se rendit compte qu'il tremblait. Ce n'était pas possible. Walder Frey n'avait pas pu commettre un tel crime. Et pourtant, Galmar se dépêcha de prendre son cheval et de gravir la colline la plus proche. Il vit soudain une petite fumée au loin, presque éteinte, et ce, en direction des Jumeaux. Une larme coula de son œil encore valide. Il ne pouvait y croire. Au triple galop, il partit rejoindre la fumée, espérant que le pire n'était pas arrivé.

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