Ses yeux verts

Chapitre 14 : Chapitre quatorzième - Les yeux verts et les yeux noirs

2287 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 09/11/2016 15:43

Le cours d'aujourd'hui en tête à tête avec le professeur Rogue ne s'annonce pas sous les meilleures hospices pour Ingrid. La jeune femme redoute un coup tordu de la part de son professeur pour lui faire regretter la honte qu'elle lui a fait ressentir la veille au club de duel, lorsqu'elle a combattu face à lui, lorsqu'elle l'a vaincu en faisant appel à des sortilèges informulés. Si elle avait pût, la demoiselle se serait volontiers fait porter pâle mais, comme il lui faudrait tout de même affronter l'homme tôt ou tard, la sorcière avait finalement fait le choix de se confronter à lui le plus tôt possible. Autant ne pas laisser augmenter l'amertume de l'enseignant à son égard.

Néanmoins, quand elle tape à la porte du bureau de son professeur, Ingrid ne se montre pas aussi sûre d'elle qu'à l'accoutumé. Et quand la voix de son professeur l'invite à entrer, la jeune femme hésite une seconde avant de s'exécuter. Une seconde pas plus, de peur de faire croître l'agacement de l'ancien, mangemort à son égard. Et puis, prenant son courage à deux mains, elle ouvre cette porte, entre et ferme derrière elle, avant de tourner son regard vers Rogue qui griffonne à l'encre rouge sur ce qui semble être une copie - et ressemble désormais davantage à un torchon - ou avoir été une copie.

 

Elle est là, devant lui. La fille de James. La fille de Lily. Cette petite Potter qui lui a fait la veille l'affront de le mettre à terre devant un parterre d'élèves, tandis qu'il pensait avoir l'avantage de l'expérience. Elle aura été plus rapide. Oui, plus rapide mais sans tricherie. Le professeur est intimement convaincue que seul le talent de Lily, qu'elle aura transmis à son enfant, a pût le mettre en déroute de la sorte. Pas un instant il ne la pense capable d'avoir triché en lançant son sort en avance. Cela serait plutôt une manie des Serpentard, mais pas d'une fille comme elle, il s'en doute quelque peu.

 

Au fond, il ne parvient même pas à en vouloir à la jeune femme pour ce qui est arrivé la veille. L'observant, le professeur ne dit rien dans un premier temps et la rouquine ne peut que remarquer son air calme, presque pacifique. Pour elle, cela est forcément mauvais signe. Alors que justement non. S'il n'aurait pas accepté la victoire de n'importe quel autre élève, le fait d'avoir été battue par Ingrid ne le dérange pas. Ou plus, en réalité. Car la veille évidemment, il fulminait au coin de son feu en repensant aux évènements qui s'étaient produits.

 

"- Nous étudierons aujourd'hui le veritaserum, Miss Potter." indique le professeur Rogue.

 

Installant ses affaires, soulagée de constater qu'il ne s'est pas montré ni plus ni moins agréable qu'à l'accoutumé, l'étudiante se prépare psychologiquement en vu de la réalisation de cette potion. Puis, quand elle se sent prête, la sorcière commence à lire la recette dans son livre de potions, avant de la mettre en application. Comme d'ordinaire, la rouquine relit deux fois les écritures du livre, y réfléchit et, au besoin, améliore à sa sauce. Le professeur Rogue ne faisant aucun commentaire jusqu'à maintenant, la jeune femme songe que cela doit être bon, que sa préparation est en bonne voix. Toutefois au bout de trois quart d'heure, il n'y a plus rien à faire, sinon la laisser mijoter comme cela encore quelques heures. Le professeur assure qu'il s'en chargera.

 

Profitant de cette journée plutôt calme et du fait que ce cours se soit bien passé, la jeune femme s'installe plus confortablement sur son fauteuil. Un instant, elle détaille le visage du professeur Rogue, remarquant ainsi, pour la première fois, que s'il n'est pas beau il dégage tout de même un certain charisme. Celui d'un homme fort, qui en a vu d'autre. C'est l'impression qu'il donne à Ingrid en tout cas. Mais à vrai dire, ce n'est pas de cela qu'elle souhaite discuter avec lui. Elle n'oserait jamais lui faire part de ce genre de réflexion. A vrai dire, comme souvent, la jeune sorcière s'apprête à poser LA question, presque hebdomadaire.

 

"- Professeur, vous pourriez me parler un peu d'elle ?"

 

S'il essaie tout d'abord de protester, Rogue ne tient pas longtemps. Malgré qu'il ait détourné le regard il sent sur lui le regard vert qui le décide. Alors il finit par acquiescer. Allant se servir un verre de Whisky, qu'il boit d'une traite, l'homme revient s'installer auprès de son étudiante, tout en cherchant ses mots, pour lui parler le mieux possible de qui était Lily. En se faisant le moins de mal possible. Il ne compte par exemple pas parler du fait d'un jour, en cinquième année, il ai osé dire de Lily qu'elle était une sang-de-bourbe. Des propos qu'il regrette encore aujourd'hui.

 

"- C'était un jour de novembre. C'était en troisième année, nous venions d'avoir un cours de défense contre les forces du mal, au sujet des épouvantards. Votre mère était bouleversée après l'apparition de sa plus grande peur. Une araignée géante. Ce jour-là votre père a jugé bon de lui jouer une farce tandis que je la consolais. Il a fait apparaitre une araignée près d'elle. Autant dire que Lily n'a guère apprécié. Après que j'ai chassé la bête, votre mère a comme qui dirai à son tour usé de magie, pour donner à votre père une bonne correction. Ce jour-là, le célèbre James Potter a vu son "merveilleux" visage couvert de furoncle." annonce le professeur Rogue d'un air rêveur. De toute évidence, le souvenir de l'aspect physique de James ce jour-là amuse beaucoup celui qui dans le temps était son rival. Et qui le serait toujours probablement, si un mage noir n'en avait pas décidé autrement.

"- Oh... ma mère n'était pas commode alors ?" interroge la jeune femme, légèrement amusée en imaginant ce qu'elle prend pour une querelle d'amoureux, même si elle sait que ce n'est que plus tard que ses parents ont commencés à se fréquenter.

"- Le plus souvent si. Mais comme tout le monde, il arrivait qu'elle perde ses moyens."

 

Comme sa fille, finalement. Cette dernière a beau être une fille douce et calme, il vaux mieux ne pas l'agacer. Sa confrontation avec le professeur Rogue au début de l'année en est la preuve : elle n'aime pas se laisser faire, être à la merci de quelqu'un. Elle ne se laisse pas ridiculiser sans riposter et ne laisse pas ses amis l'être. Le professeur Rogue d'ailleurs, manque de lui faire cette réflexion avant de se rétracter. Il ne manquerait plus qu'il lui dise cela. La comparer aussi ouvertement à sa mère serait, à son goût, complimenter cette jeune femme. Hors, il n'est pas près à cela, loin de là.

 

"- Je vois. Et à part cela ?" interroge encore la jeune femme intriguée, désireuse d'en apprendre encore plus au sujet de sa mère et, en même temps, au sujet de son père.

"- Miss Potter, vous en demandez beaucoup. Vous pourriez déjà vous estimer heureuse que je réponde à vos interrogations." lui lance le sorcier avec sévérité.

"- C'est vrai, pardon." reconnait l'étudiante, baissant le regard.

 

Devant la tête que tire Ingrid Potter, le professeur Rogue sent sa résistance s'amenuiser. Après tout, elle souhaite simplement découvrir des morceaux de passé de sa mère. L'observant un instant sans rien dire, il finit par soupirer. Un soupir qui fait relever la tête de la jeune femme et leurs regards se croisent alors. Le regard sombre se mêle au regard vert. Cloué sur place, le professeur Rogue ne dit plus rien, piégé par les yeux de son élève, ceux de Lily. De longues minutes s'écoulent ainsi et aucun d'eux n'ose détacher son regard de celui de l'autre. Ingrid pas plus que son professeur, sans qu'elle ne sache exactement pourquoi. Il se passe quelque chose en cet instant, dans cet échange de regards, mais aucun des deux protagoniste ne le comprend.

 

Un plop sonore tire les deux sorciers de leur torpeur tandis que la voix fluette de Dobby l'elfe de maison se fait entendre.  La petite créature déclare que le professeur Dumbledore s'étonnait de ne pas les voir à table et l'a envoyé les chercher, songeant qu'ils étaient peut-être encore en train de travailler et n'avaient pas vu l'heure avancée. Tournant la tête vers lui, Ingrid dessine sur ses lèvres un fin sourire. Décidément, le professeur Dumbledore est un drôle de personnage. Drôle mais attachant. Toujours à se soucier de ceux qui l'entourent. Ou à fourrer son nez partout, diraient d'autres.

 

"- Merci." répond furieusement le professeur Rogue, jetant à l'elfe un regard noir comme il se sent agressé par son intrusion dans ses appartements. Même si au fond, Dobby vient de le tirer d'une situation qu'il juge désormais désagréable, quoiqu'il était loin de penser ainsi à peine quelques instants auparavant.

 

L'elfe disparait dans un nouveau plop sonore et le professeur remarque les joues rougies de son étudiante qui cherche à masquer une certaine gêne. Peu sûre d'elle, la sorcière prend congé du professeur et se précipite hors du bureau avec précipitation, encore toute chamboulée par ce qu'il s'est passé entre eux il y a quelques instants. Rejoignant la grande salle, la jeune femme se perd dans ses pensées, essayant de comprendre pourquoi, tout à coup, elle s'était sentit incapable de s'extraire de cet échange de regard. Ou plutôt si, elle comprend, comme Rogue. Mais aucun des deux ne souhaite assumer ce qu'il a pensé à cet instant là.

 

C'est comme un automate que la demoiselle prend place à table aux côtés de ses amis qui s'étonnent et s'inquiètent devant son air absent. Ils tentent de la questionner mais la rouquine ne répond qu'évasivement à leurs interrogations. Ce manque de réponse ne les inquiète que davantage. Le comportement de leur amie n'est clairement pas normal mais cette dernière est muette comme une carpe au sujet de ce qui la tracasse. Et voyant arriver le professeur Rogue dans la salle, le petit groupe finit par lui mettre sur le dos l'étrange état de leur amie qui proteste, prenant la défense de l'enseignant. En vain. Ses amis sont désormais convaincus que Rogue est coupable et c'est des regards noirs qui s'abattent sur ce dernier. Regards qu'il ne doit pas comprendre, ou mettre sur le compte d'une indiscrétion de la rouquine qui n'ose pas le regarder. Grâce à ses amis, la demoiselle se sent encore plus mal que lors de son entrée dans la salle. Elle est mortifiée, pour dire le vrai et crains la prochaine rencontre entre son professeur et elle.  

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