Red Dawn Knights - Partie 5 : Créatures, pirates et ninjas

Chapitre 9 : Bilgewater

4691 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 10/11/2016 00:35

Le vaisseau atteignit l’Île de la Flamme Bleue et Bilgewater en début de soirée. Le navire zigzaguait depuis une bonne dizaine de minute entre d’énormes piliers naturels, surmontés de gigantesques cors aux formes hâtivement forgées, en forme de poissons ou d’autres créatures mystiques.

-Que ce soit par magie ou par quelque astuce architecturale, les charmeurs de serpent utilisent ces piliers évidés pour imiter les cris des habitants des profondeurs, afin de les inviter à la surface pour pouvoir les chasser, leur expliqua Skau’tie en tournant la barre à tribord.

-Que trouve-t-on dans l’océan ? s’interrogea Xathote en se penchant par-dessus bord.

-D’énormes monstres marins. Nul ne sait pourquoi ces bêtes sont attirées par les îles, mais leur impact est indéniable. Elles représentent une véritable menace pour les eaux qui entourent Bilgewater et, au fil des siècles et des noyades de nos plus grands navires, toute une industrie de chasse s’est développée.

Le yordle remit immédiatement ses pieds sur le bois du navire alors que Skau’tie explosait de rire.

-Avec un peu de chance, on croisera les Flottes de la Grande Chasse. Elles partent tous les jours au crépuscule pour chasser ses monstres et, bien qu’elles oeuvrent pour la protection de Bilgewater, elles sont rivales et luttent pour la prééminence.

Au détour d’un pilier, le navire se retrouva devant un véritable champ de bouées qui flottaient, au gré des vagues, sans jamais s’éloigner de leur point de départ. Skau’tie demanda aux chevaliers de rentrer les voiles afin de perdre de la vitesse avant qu’ils croisent un Nautonier amarré près de ce cimetière typique de Bilgewater. Devant la mine dégoûtée des voyageurs, le pirate leur raconta :

-A Bilgewater, les morts sont rendus à la Grande Barbue. D’habitude, les cadavres sont plongés dans des cercueils, mais ceux-là ne devaient pas être bien riches.

Il pointait du menton des corps sans vie que l’on attachait en masse à de vieilles ancres sous des tonneaux gonflés d’eau, avant de les jeter sans la moindre compassion à la mer.

Une nouvelle bouée prit place dans cet océan désolé.

 

Une fois les créatures marines harponnées, les flottes de la Grande Chasse se rendaient aux quais-abattoirs où les immenses monstres étaient débités. Les bâtiments jonchant le bord étaient remplis de viandes, d’ossement et de peaux.

-Le commerce lucratif des glandes, des organes et des sécrétions est vraiment florissant à Bilgewater, avait précisé le pirate avant qu’Elyonah ne vomisse par-dessus-bord.

La mer qui entourait les quais-abattoirs était souvent souillée par le sang des monstres marins abattus et remontés sur d’énormes pentes grâce aux mécanismes ingénieux d’énormes grues en bois.

L’odeur qui se dégageait de l’endroit retournerait plus de quelques estomacs bien accrochés, et ce mélange d’odeurs, couplé au sang et aux restes morbides des cadavres pourrissant sur le sol, attiraient en masse les requins et autres prédateurs.

Maimoime fut le premier à sauter au sol, donnant un coup de pied violent à un rat des quais qui cracha à son arrivée. Mélange terrifiant entre un rat et un requin et plus grand qu’un chien, les rats des quais vivaient en meute et étaient connus pour s’en prendre aux ivrognes et autres pêcheurs solitaires les nuits sans lune.

Le jungler tira de toutes ses forces sur sa corde pour garder le navire près du quai, en attendant que ses camarades l’aide à attacher le vaisseau.

Elyonah jeta un coup d’oeil à la cité pendant qu’elle tenait une corde tendue. Bilgewater manquait clairement de ressources naturelles pour la construction. De nombreux bâtiments étaient incorporés à des restes de navire venu d’Ionia, de Demacia, voire même de Freljord.

D’énormes plateformes surélevées et parfois armées transportaient des marchandises à travers les îles sur des rails rouillés et manquant d’huile. Skau’tie avait expliqué que le parcours ne se faisait pas toujours sans heurt, d’où le nom spirituel donné par les habitants aux nacelles : les gondolées.

Le Pont du Boucher surplombait la ville. C’était autrefois un pont de pierre menant à l’entrée d’un temple, mais, faisant l’objet d’un entretien des plus aléatoires, il servait à relier les quais-abattoirs et l’un des bas quartiers de Bilgewater.

Situé au bout de la jetée et gardé sur trois côtés par des eaux infestées de raies mantas et de requins et, sur le dernier, par le terrible gang des Crochets crantés, l'entrepôt de Gangplank était riche d'un butin pillé aux quatre coins du monde. Les rumeurs locales ne cessaient de vanter les valeurs des biens ramenés et entreposés dans l’antre aux trésors de ce pirate. La bannière des Crochets crantés flottait paresseusement au vent doux de la soirée, ce nom de gang provenant des outils que beaucoup utilisaient pour chasser les monstres marins.

Maimoime attachait la dernière corde du navire quand Skau’tie descendit du navire. Une fois sur les quais-abattoirs, il se retourna vers la mer et y jeta une pièce d’argent sous le regard étonné des chevaliers.

-La Grande Barbue, soupira le marin, ou la Mère Serpent pour les indigènes des îles qui entourent la cité, est la déesse tutélaire de Bilgewater. Les mythes qui la concernent sont très anciens et un marin ne manque jamais de jeter sa dîme dans le Puits du Serpent quand il rentre à Bilgewater.

Bien que l’heure était tardive, les commerçants s’échangeaient encore bruyamment des marchandises et des richesses de Runeterra. Malgré le fait que nul ne refusait une pièce d’or, quel que soit le dignitaire gravé dessus, Bilgewater avait sa propre monnaie, comprenant des krakens d’or et des serpents d’argent.

Skau’tie les abandonna en disparaissant dans la Fleet Street, la rue la plus longue et la plus connue de Bilgewater, pour ses commerces et autres bars diversifiés. Sur certains établissements, une silhouette familière était grossièrement gravée, ornant les portes ou les seuils.

-Ce ne serait pas, Tahm Kench ? s’enquit le yordle en désignant une de ces silhouettes.

-La silhouette de Tahm Kench marque les antres d'avarice de Bilgewater, raconta Paladïn en suivant la rue. Symbole de cupidité et de liberté sans limites, son visage apparaît à peu près partout où l'on propose d'offrir ce qu'ils cherchent à des gens aux goûts douteux.

Il fit passer les chevaliers dans une rue adjacente, leur permettant de limiter leur jeu d’esquive entre les différents futurs clients des bars naviguant déjà entre les bâtiments, certains rouges comme des pivoines.

Les habitants locaux de Bilgewater étaient de robustes marins folkloriques dont beaucoup, naturellement, étaient des pirates. Du simple coutelas au pistolet à silex, les habitants portaient sur eux une grande variété d’armes à leur ceinture ou dans leur dos.

-Le dix-neuf septembre, il y a cent cinquante ans, la cité portuaire connue comme Bilgewater a été officiellement fondée, créant un havre et une destination aux pirates et gens de la mer venant de toute part. Ce qui a débuté comme un unique jour de célébration pour la création de Bilgewater est devenu un week-end, et, dû à la nature rauque des habitants, est devenu un mois entier de célébration. Septembre est depuis le mois des pirates, pour qu’ils se réjouissent de la fin de la saison tempérée, buvant les dernières bières de l’été et participant à des jeux turbulents pour prouver leurs valeurs en tant que plus féroces pirates de Valoran.

» Le pouvoir de la nation se dispute entre Miss Fortune et Gangplank, bien qu’ils aient les mêmes buts la concernant. Bilgewater est une nation sans loi, particulièrement dans les taudis des pirates. Les marins, assez intrépides pour voguer sur ces eaux, sont libres de décider de leur propre sort et de leur propre fortune.

Les chevaliers s'arrêtèrent devant le Plankwalkin Pete’s, d’où sortait une douce odeur d’arômes. Le gérant, un gars loufoque avec une jambe de bois, les toisa quand ils s’assirent au bar et demanda, comme par réflexe, au plus robuste d’entre eux :

-Alors, qu’est-ce que je leur sers, aux voyageurs ?

-Votre meilleure boisson ! sourit Maimoime.

-Et pour la mam’zelle et la p’tite peluche ?

Maimoime jeta un oeil inquiet à Xathote qui, trop occupé à dévisager les clients, n’avait pas entendu le barman.

-La même.

-Ok, cinq Mount Atin Eclipse !

-Éclispe ? Comment ça Éclipse ? demanda Elyonah.

-C’est le nom de notre spécialité, ma p’tite dame. Une cuvée bien trop forte pour vous.

Elyonah se leva sur son tabouret et s’appuya sur ses bras tendus :

-C’est ce qu’on verra, sourit-elle avec un air de défi au barman.

Ce dernier sourit en acceptant le pari et cria un ordre à sa serveuse. Aussitôt dit, aussitôt fait : les chevaliers furent servis instantanément.

Couleur ambre clair, le Mount Atin Eclipse était composé d’un arôme d’herbes douces, de mélasse, de noix de muscade et d’un soupçon de citron. Un peu sec sur les bords, la dose était donnée avec un tonique et de la chaux. Sans suivre le protocole habituel, Xathote commença à s’empourprer rapidement après son rhum sans ajout et jura ne plus toucher une chope de la soirée. Maimoime, lui, après avoir bu cul-sec son tonique gazeux, mélangea la chaux avec son rhum. Le contenu de la pinte se mit à fumer dû à la réaction entre la chaux et l’eau de l’alcool. Sans modération, Maimoime l’avala. L’acidité du tonique fut immédiatement compensée par l’amertume et la basicité du Mount Atin Eclipse. La réaction était étrange en bouche, bien que cela ne sembla pas secouer le jungler. Caërwyn et Paladïn s’en sortirent sans trop de problème tandis qu’Elyonah eut du mal à finir sa boisson. Mais elle tenue bon et lança un regard de fierté au barman qui, après avoir marmonné dans sa barbe, posa quelques pièces sur le bar devant elle.

Ils sortirent du bâtiment quelques minutes plus tard. Maimoime jeta un coup d’oeil à sa bourse :

-Bon, ces semaines d’évènements et de voyage en mer ont au moins le mérite de m’avoir fait économiser. Tavernes et autres bar de la Fleet Street, tenez-vous bien, parce que le Siffleur Rouge arrive !

Le Fortune’s Favor était mieux soigné que les autres bars de la rue. Il semblait plus éclairé que les autres, plus entretenu. De fines lettres manuscrites accueillaient les visiteurs qui, curieusement calmes, s’asseyaient à des tables rondes joviales. Le bâtiment était exclusivement tenu par des serveuses qui clamaient haut et fort :

-Le Fortune’s Favor vous met au défi de boire le célèbre Rapture Rum de Miss Fortune ! Détentrice du titre du Scab lors du célèbre jeu du GrugMug Grog Slug !

Attirés par ces arguments étrangers, les chevaliers se frayèrent un passage jusqu’à une des seules tables libres de la soirée. Une serveuse, assez peu habillée et avec une couche trop importante de maquillage sur les lèvres, les accueillit.

-Qu’est-ce ce qu’on peut vous servir, mes chewis ?

L’accent les troubla, comme le mot étrangement familier qu’elle avait utilisé pour les désigner.

-Dites-moi que c’est une coïncidence... s’inquiéta Maimoime en murmurant.

-Avec quoi est fait le Rapture Rum ? s’enquit Elyonah.

-La spécialité de la maison est une recette dont seule Miss Fortune a le secret. Mais je peux vous donner quelques informations, comme le fait qu’elle contient de la canne à sucre, du poivre et de la cannelle.

Bien qu’ils n’aient pas compris la moitié des mots, Maimoime en commanda cinq.

-On fait aussi auberge si vous cherchez un endroit tranquille ou dormir, mes amours.

Sur ce, elle lança un clin d’oeil et envoya un baiser dans le vent vers Paladïn qui frémit de dégoût.

-Hors de question que l’on dorme ici, lança-t-il quand elle fut éloignée.

-Je pensais avoir une grosse poitrine, mais là je m’avoue vaincue !

Ils regardèrent tous, surpris, Elyonah dont les joues avaient commencé à se teinter.

-Ben quoi ?! s’indigna-t-elle. Vous avez vu la paire qu’elle a ?!

-Non...

-Allez, les gars ! Détendez-vous un peu !

Au moins, son mal-être était oublié.

-Je pense que je vais aller la coucher après ce verre, rigola Caërwyn. L’alcool, ça ne la réussit pas.

-Elle fait pas l’poids, rigola Maimoime.

-Laisse-là, c’est drôle ! s’amusa Xathote.

-Et toi encore moins ! continua le jungler en regardant le yordle.

Ses joues, déjà colorées par l’alcool, devinrent écarlates sous le poids de la rage :

-Hey oh ! Les yordles tiennent l’alcool, eux aussi !

Il hoqueta.

Le Rapture tenait toutes ses promesses. Cuvée privée de Miss Fortune et claire comme le diamant, son côté exotique la rendait irrésistible, surtout servie avec des fruits frais.

-Cet alcool est un vrai poison, déclara Paladïn en finissant son verre. Il est tellement fruité qu’on oublie qu’il est aussi doux qu’alcoolisé.

Elyonah déclara le Rapture comme son rhum préféré avant une remarque du jungler :

-Mais tu n’en a goûté que deux !

-Ouais, mais c’est le meilleur !

Maimoime sourit en abandonnant l’idée de se battre contre les idées d’une saoulée. Paladïn finit son verre et interpella une serveuse, plus jeune, mais dont les traits trahissaient l’esprit souillé des centaines de fois, sans doute.

-Encore un verre ? demanda-t-elle.

-Non, je voudrais savoir ce qu’est le GrugMug Grog Slug dont vous avez parlé, tout à l’heure.

La serveuse tenue son plateau sous son bras et, prenant bien soin de laisser sa jambe à l’air libre, s’assit partiellement sur la table.

-La fameuse GrugMug Grog Slug de Bilgewater est une compétition annuelle entre les corsaires voulant prouver leur courage comme les plus ardus buveurs des grandes mers. Les buveurs de grog et les faiseurs de grogs se rejoignent dans la GrugMug taverne pour couronner le meilleur “Scab” et “Glug”. Le Scab est offert au créateur du plus fort et du plus corrosif des grogs, alors que le Glug est donné à la seule âme capable de boire le plus du grog sélectionné avant d’avoir besoin de soins médicaux. Gangplank a gagné le titre du Scab pendant quinze ans avant de s’être fait détrôné par Miss Fortune !

-J’imagine que la compétition a dû être rude !

-La final entre elle et Gangplank s’est déroulée pendant six heures ! Le panel de juge a déclaré Miss fortune vainqueur quand sa mixture s’est mise à faire fondre la tasse en étain, la table et le sol. Celle de Gangplank ne faisait que grignoter le sol vernis dans une flaque fumante.

-Merci bien, conclut Paladïn.

-Mais de rien, trésor.

Quand la serveuse fut hors de portée, Paladïn déclara :

-Je me demande bien qui a pu boire une telle boisson.

-Bonne question, mais il a bien de la chance ! s’écria Maimoime.

Finalement, ils furent contraints d’abandonner Xathote et Elyonah dans deux chambres de l’auberge. Ils continuèrent leur tournée après avoir réglé la nuit. Leur pas les menèrent devant un énième bar. A l’atmosphère plus brutale que le Fortune’s Favor, il s’en dégageait une odeur limite nauséabonde de sueur de pirates et de boissons fortes. Dans un coin du bar, un ring était entouré par des clients en tout genre qui se défiaient dans des combats à mains nues, trempés dans le rhum, la sueur, le sang et des contenus d’estomacs. Les trois chevaliers s’assirent au bar en se félicitant d’avoir laissé le yordle et la support à l’auberge.

-Alors, qu’est-ce qu’on sert, ici ?! s’écria Maimoime d’une voix forte couvrant les discussions nombreuses de la salle.

-Je ne propose mes meilleures cuvées qu’aux vrais amateurs de rhum !

-Donnez un peu pour voir ! s’exclama le jungler.

-Vous êtes sûr ? s’étonna le barman. J’ai vu cette substance mettre à terre les plus rustres des pirates et cela malgré mon avertissement ! Le reste de votre estomac va se liquéfier et se mettre à courir dans mon bar !

-Pari tenu !

-Moi je prendrais un Rhum des îles, commanda Caërwyn, suivit par Paladïn.

-Ben alors, on a peur ? ricana Maimoime.

-Je laisse ce qui est aux amateurs, aux amateurs. En plus je crois que je ne tiendrais pas plus longtemps, tangua le top laner.

Selon le barman, le Gangplank Black Pearl était vieilli dans des fûts de chênes carbonisés et infusé dans quelques des meilleurs épices que Valoran pouvait offrir. La chope de Maimoime était remplie d’un liquide aussi noir et épais que du goudron, ce qui dégoûta ses compagnons.

-Alors, dirent-ils après que le jungler ait avalé une première gorgée. Comment c’est ?

-Alcoolisé.

-Mais encore ?

-Pâteux.

-Un dernier mot ?

-Goutte-le si tu tiens tellement que cela à savoir !

Caërwyn n’insista pas. Ce dernier et Paladïn abandonnèrent le jungler quand il fut attiré par une foule immense qui s’entassait dans un énorme bâtiment.

Le Myron’s Murderhole était un des plus célèbres bar de tout Bilgewater. Un énorme comptoir d’une vingtaine de mètre de long se tenait au bout de la salle dans laquelle étaient disposés de nombreuses tables aux tailles variées. Un orchestre local jouait de la musique entraînante et des danseuses se promenaient en rythme sur une scène. Les clients du bar osaient sans gêne gaspiller leur argent entre l’alcool, les services supplémentaires de nombreuses serveuses, les jeux de cartes et autres pari barbares et le Myron’s Dark Rum, une marque déposée de l’établissement.

Maimoime ignora une serveuse qui lui lançait un regard enjôleur et se dirigea vers le comptoir où il reconnut sans peine deux individus, l’un encapuchonné avec une cape aux tons violets et l’autre, roux et enrobé, posé à côté d’un énorme baril. Maimoime s’assit à côté du premier et interpella le barman avant que l’individu à sa gauche ne s’exclame :

-Alors, Maimoime. Comment se déroulent ces épreuves ?

-Hein quoi ? Ah... Ouais... Bah ça va, ça va... On tient le bon bout.

Jax lui souriait. Il finit son verre d’une traite et cria :

-Barman ! Ceux-là sont pour moi, deux Myron’s Dark !

-Trois autres ici, cria Gragas en finissant lui aussi sa chope.

Noir dans sa couleur et avec un arôme de mélasses ligneuses, cet infâme spiritueux était un véritable incontournable des marins de Bilgewater sur les grandes eaux. Plus riches que ses congénères, alors plus légers, cette beauté noire se terminait d’une étrange douceur qui était juste parfaite pour prendre le large.

La présence de ces deux champions n’étonnait guère Maimoime. Gragas et Jax était des amis de beuverie connus, surtout Gragas qui, dit-on, cherchait la bière ultime qui pourrait enfin le rendre ivre mort. Ils discutaient de tout et de rien, n’hésitant pas à intégrer Maimoime dans leur conversation, enchaînant nombre de pintes.

-Si je puis t’aviser d’un conseil, déclara Jax en tanguant dangereusement, bien que tu aimes comme nous les boissons de cette magnifique cité-état, ne commande jamais, au grand jamais, un Bilgewater Special lors des festivités du Jour de Bilgewater.

-Aucune boisson n’a su me résister jusqu’à présent ! sourit Maimoime.

-Ouais, mais même moi je n’oserai y toucher ! s’exclama Gragas après un énorme rot. C’est un mélange non-identifiable de tous les liquides de derrière le comptoir, et chaque pirate du bar mélange un peu de ce qu’il peut trouver autour de la table ou dans ses poches. Et puis la récompense pour boire cette horreur n’en vaut pas la peine.

-Qu’est-ce qu’on y gagne ?

-Toutes les pièces d’or qui peuvent rentrer dans la tasse vide, une bonne indigestion et une tape dans le dos ! conclut Jax en joignant la parole aux gestes. Mais dis-moi, depuis combien de temps êtes-vous à Bilgewater ?

-Pas plus de deux ou trois heures, répondit Maimoime en entamant une nouvelle chope. Et fort heureusement d’ailleurs, parce que je n’aurai pas pu supporter quelques jours de plus en mer.

-Un grand guerrier comme toi qui aurait le mal de mer ?! rigola Jax, haut et fort.

-Il n’y a pas de mal à cela, marmonna le jungler.

-Ne le prends pas mal, s’amusa Jax. Je me bats avec un lampadaire ! Ah ah ah !

-Pas faux !

Ils trinquèrent bruyamment alors que l’autre voisin de Maimoime s’exclamait :

-Qu’est-ce que j’entends ?! Un marin trouillard qui a le mal de mer ?! Ah ah !

L’exclamation du pirate avait fait taire la moitié de la salle. Maimoime posa brutalement sa chope, ce qui eut pour effet de réduire au silence le reste de l’établissement. Même les musiciens avaient arrêté de jouer.

-Ok, alors je veux bien rigoler, mais si ce n’est que dans un sens, ça n’est absolument pas drôle !

Le jungler balança son poing gauche dans la figure du pirate qui renversa ses compagnons se tenant à côté de lui. Quand la musique reprit, une bataille générale naquit dans le Myron’s Murderhole.

Ça m’aurait étonné...

De quoi ? pensa Maimoime, avec le sourire, en prenant un pirate par le col pour l’envoyer valser à l’autre bout de la pièce.

Que tu ne recommences pas une bagarre.

Il afficha un très grand sourire et continua à distribuer des baffes par-ci par-là. Jax finit sa chope, s’essuya la bouche et prit son lampadaire. Il se leva en le faisant tournoyer au-dessus de sa tête et se jeta dans la bataille en criant sauvagement.

Gragars, lui, était imperturbable. Avec le barman, il continuait de boire sans limite, évitant d’un mouvement de tête les pirates passant au-dessus de lui. Quand un individu eut le malheur d'atterrir sur le comptoir, renversant sa chope, Gragas se leva.

-On ne rigole pas avec l’alcool !

Il lança avec force son énorme tonneau dans la mêlée qui éclata au sol. Du liquide rosâtre explosa à la figure des clients qui se retrouvèrent expulsés contre les murs du bâtiment. Mais cela ne les empêcha pas de continuer à se battre. Gragas fonça dans le tas.

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