Doctor Who Alternative: Saison 9

Chapitre 7 : Mona [Partie 3]

7308 mots, Catégorie: K+

Dernière mise à jour 10/11/2016 02:53

Le Docteur ne voyait plus rien: tout était blanc et vaporeux. Le gaz lui brûlait les yeux et la gorge, bien qu'il tentait tout pour ne pas le respirer. Il fallait qu'il retrouve le tournevis, qu'il ouvre cette porte. Mais se jeter au sol, là où le gaz était le plus concentré (n'étant vraisemblablement pas une fumée habituelle), équivalait à se jeter directement dans l'estomac du loup.

Il y eut un grand bruit, une sorte de mélange entre le cri d'un chat et le son d'une énorme machine rendant l'âme, et un léger flash blanc éclata à coté de l'alien, qu'il devinait à travers ses paupières.

 

« Ramassez le tournevis!! hurla Osgood à ses cotés.

- Que...

- TOURNEVIS!

 

Le Seigneur du Temps ouvrit les yeux, et fut surpris de voir que devant lui l'air avait repris ses droits sur le gaz, dans une petite zone de 4-5 mètres de large. Il ne chercha pas à comprendre tout de suite, et s'empara du tube métallique, pour le faire vibrer à nouveau face à la porte. La fumée blanchâtre continuait à s'avancer vers eux, et le temps pressait. Il fallut quelques secondes pour que le verrou se désactive, mais dès que celui-ci lança son déclic électronique, les deux "intrus" se jetèrent sur le battant de métal et atterrirent au sol dans le couloir.

Osgood eut le réflexe de se relever immédiatement pour se jeter à nouveau sur la porte et la refermer, s'assurant que le gaz ne sortent pas du laboratoire.

 

Face à elle, l'alien était acculé au mur d'en face, les yeux rouges et humides, lançant une forte respiration rauque et serrant fort son tournevis.

 

- Ce... C'était... Oh...

- Elle a... elle a voulu nous tuer! s'exclama la jeune femme.

- Non... non, elle... elle, non. Mais la chose qui l'influence, par contre...

- Mais pourquoi?

- Je pense... Je pense que cette chose veut le TARDIS. Elle a réussi à l'amener jusqu'ici, mais sans la clef, elle ne peut pas entrer. Il lui suffisait juste de l'obtenir.

- En nous tuant?

- Difficile d'empêcher quelqu'un de nous voler si l'on est mort...

- C'est vrai...

- Mais comment a-t-on survécu, d'ailleurs? Qu'est-ce qui s'est passé?

- Oh, c'était moi! s'exclama Osgood, toute joyeuse.

 

Elle pointa le céleri qu'elle portait sur la poitrine avec fierté, et le Seigneur du Temps remarqua qu'il était aplati vers le milieu, comme si on l'avait serré très fort entre ses doigts.

 

- Que... Qu'avez-vous fait?

- J'ai pressé le céleri. Et le gaz a été repoussé.

- P... pourquoi ça a pu faire ça?

- Parce que c'est ce que ça fait, non? Votre céleri, à vous, il repoussait les gaz.

- Non... Non, pas vraiment. J'ai porté un céleri pendant toute une vie, sauf qu'il ne faisait que détecter certains gaz, rien de plus. Mais ça veut dire que vous n'avez même pas un vrai céleri?

- Euh, si. Enfin, il y a une cartouche anti-gaz au milieu.

- Maintenant il n'y en a plus, je suppose.

- Non.

- Je vois. Ne perdons pas de temps, voulez-vous, nous devons nous rendre jusqu'au vaisseau le plus vite possible.

- Vous allez m'expliquer ce qui se passe, à la fin!?

- Plus tard! »

 

Mona

PARTIE 3

 

Le flash blanc éclata dans la petite pièce, laissant apparaître Osgood et le Docteur. Les soldats en faction devant la salle de téléportation se retournèrent brusquement, et pointèrent leurs armes en direction des arrivants.

 

« Qu'est-ce que...

- Je suis le Docteur! rappela l'alien en levant ses mains en l'air. Vous devriez vous en souvenir, non?

- Euh... Oui, mais comment avez-vous pu venir jusqu'ici?

- On nous a laissé passé, expliqua Osgood.

- Mademoiselle, vous n'avez pas le droit de...

- Elle est avec moi! coupa le Seigneur du Temps. Maintenant, si ça ne vous dérange pas, je dois retrouver Miss Stewart.

 

Les soldats se regardèrent quelque secondes, puis haussèrent les épaules et laissèrent passer les deux arrivants.

Ceux-ci coururent pour atteindre la pièce-entrepôt où se trouvait le vaisseau. La lourde porte blindée était ouverte, et derrière, on pouvait voir la chef scientifique de UNIT, au pied de l'appareil.

 

- Kate! Lethbridge! Stewart!

- Docteur! hoqueta la jeune femme en se retournant.

- Vous êtes surprise? ironisa l'alien.

- Mais... Le gaz devait...

- On avait un céleri, coupa simplement Osgood.

 

La fille du Brigadier fronça les sourcils, et finit par soupirer. Un petit sourire se dessina sur son visage, et elle fixa l'alien.

 

- Et que pensiez-vous donc faire en venant ici, exactement?

- Trouver des réponses. Et vous empêcher de faire quoique ce soit à Mona.

- Des réponses? Je pensais que vous auriez pu comprendre tout seul.

- J'ai compris beaucoup de chose, mais il reste des zones d'ombres. Mais l'important c'est Mona. Que lui avez-vous fait?

- Chu là, Docteur... répondit la québécoise d'une voix étrangement calme.

 

Le Seigneur du Temps tourna son regard vers l'origine de la voix féminine, et vit que la canadienne descendait une échelle qui sortait du vaisseau. Elle mis les pieds à terre, et s'avança jusqu'à Kate, un sourire satisfait aux lèvres.

 

- Osgood, c'est ça, non? lança l'étudiante avec un ton innocent. Hello! Elle, c'est Mona.

- Elle?

- Qu'est-ce que vous avez...

- Roh, Doc', vous pouvez pas réfléchir deux minutes? Allez, un indice! Vous voyez, ça, c'est Mona... commença l'étudiante en posant ses mains sur ses hanches.

 

Elle pointa alors ses tempes, et lâcha un autre petit sourire.

 

- Mais ça, c'est pas Mona. C'est moé. Besoin d'autre chose?

- Vous n'êtes pas la Grande Intelligence... Mais vous êtes peut-être une forme de copie.

- Ben sûr que non! J'étais là avant elle. Elle m'a juste un peu... améliorée. Je suis légèrement moins "avancée" qu'elle, puisque je ne peux pas vraiment errer dans le vide, ou prendre le contrôle de n'importe qui. Mais chu sur la bonne voie. Enfin, j'espère.

- Docteur, c'est l'ordinateur du vaisseau, c'est ça? devina Osgood.

- Exactement. Et il semble que Mona ne soit pas n'importe qui, n'est-ce pas?

- Pour tout dire, sur bien des aspects, elle est aussi quelconque qu'un sac de chips, la canadienne. Mais psychiquement parlant, elle est parfaite. Son empreinte mentale était la meilleure que j'ai pu croiser, en tout cas.

- Vous aviez besoin d'un esprit compatible, facile à contrôler pour vous précisément.

- Exactement! Qu'il est fort le Doc! Le hasard est tombé sur cette petite étudiante canadienne, alors qu'elle se promenait dans l'Nelson Square.

- Sauf que vous n'avez pas pris son contrôle. Vous l'avez juste remplie en énergie, une énergie spéciale, extraterrestre.

- Il a compris cela, au moins... nota Kate.

- Vous avez crée un pont énergétique, en résonance avec l'énergie Artron du TARDIS. Il y avait de cette énergie au Nelson Square, et dans Mona. Vous avez crée un pont énergétique entre ces deux "lieux", même si l'un d'entre eux pouvait bouger. Si le TARDIS entre en contact avec l'une de ces deux entités d'énergie, il est immédiatement propulsé vers l'autre.

- Tout le Nelson Square est imbibé de cette énergie... expliqua l'ordinateur du vaisseau. Votre TARDIS n'avait même pas le temps de se matérialiser qu'il était propulsé vers Mona Boucher, quelque part dans l'espace-temps: pas trop près, mais pas trop loin.

- Mais ensuite, vous ne pouviez pas prévoir qu'elle allait toucher le TARDIS... Si?

- Ben sûr que si. Au moment où elle a touché ce beau vaisseau derrière moi, en plus de lui transférer de l'énergie, je lui ai fait perdre la mémoire, pour pas qu'elle se souvienne vraiment de ce qui s'était passé, et j'ai mis comme un "programme psychique" dans son esprit. Un instinct à retardement.

- Si elle venait à entendre et voir le TARDIS, l'envie irrépressible de le toucher la prendrait, c'est ça?

- Roh, irrépressible, comme on y va! Naturelle, plutôt. Et vous seriez forcément sorti avant, en théorie. De quoi ramener le TARDIS au Nelson Square, sans vous.

- Ensuite, il n'y avait qu'à le ramener, ce qui était facile avec tout UNIT sous vos ordres. Parce que vous aviez prévu de vous faire prendre, n'est-ce pas? Vous pouviez laisser le vaisseau en furtif. Mais il vous fallait des moyens pour organiser tout cela.

- Exactement. Une fois mon "pont" mis en place, il me fallait des moyens pour m'assurer de votre coopération et de celle de la fille. Donc j'ai désactivé la furtivité du vaisseau, et utilisé toutes mes capacités psychiques pour prendre le contrôle des gens qui arrivaient. Même Miss Stewart n'était pas assez résistante. Comme c'est triste.

- Mais si vous avez fait ça, pourquoi ne pas l'avoir fait à Mona? demanda Osgood. Ça aurait été plus simple.

- Parce que je ne fais pas que contrôler Mona. J'habite Mona, je vis Mona, je suis Mona. Ne vous inquiétez pas, je n'ai pas détruit son esprit. Mais je suis en elle. Les autres, je ne faisais que les contrôler à distance, depuis le vaisseau. Je ne pouvais pas "me déplacer" sans un esprit adéquat. La canadienne avait le meilleur.

- Et comment vous faîtes pour les contrôler encore, dans ce cas? interrogea la scientifique.

- Il y a un réseau télépathique entre nous tous, répondit Kate. La conscience du vaisseau est le maillon principal, à qui tout le monde est relié. Pas le vaisseau.

- Donc un changement d'hôte n'affecte pas ce contrôle que vous avez sur tous ces gens... murmura le Docteur. Au fait, pourquoi n'avoir pas contrôlé Osgood?

- Trop résistante psychiquement... grogna presque la québécoise.

 

L'admiratrice du Seigneur du Temps lâcha un incroyable sourire à ces mots, qui contamina rapidement son idole.

 

- Bon, laissez-moi deviner la suite... Vous prenez le contrôle de UNIT, et vous attendez sagement que le TARDIS revienne à Nelson Square. Mais comment s'assurer qu'il ne "rebondirait" pas, d'ailleurs?

- Le pont énergétique allait forcément être brisé, puisque l'énergie est absorbée. Il y en avait beaucoup au Nelson Square, ce qui a repoussé vot' cabine, mais dans ce petit corps, il n'y avait pas grand chose. Tout a été absorbé, donc une fois revenu ici, elle devait y rester.

- Bien sûr... Vous prenez donc le TARDIS, et vous savez que je ne connais personne au Canada. Donc vous êtes sûr que je vais contacter UNIT, et que je vais rester avec la première personne que j'ai rencontré là-bas, Mona. Le voyage en avion vous laisse du temps pour cacher mon vaisseau en lieu "sûr". Ensuite, nous arrivons, et vous nous séparez. Il vous faut Mona pour avoir un réceptacle. Et il vous faut moi pour, j'en suis presque sûr, ouvrir le TARDIS. Vous avez la clef, vous avez la destination, mon TARDIS, et vous avez le moyen d'aller de l'un à l'autre, en la personne de Mona. Tout ce que vous vouliez, c'est mon vaisseau. Mais je ne vois pas pourquoi...

 

Mona ne put s'empêcher de sourire en entendant les mots du Seigneur du Temps. Il avait bien compris son manège. Il lui manquait juste la raison qui l'avait poussée à faire tout cela.

 

- Attendez... commença Osgood derrière eux. Si elle... Enfin il... Cette chose, est restée dans le vaisseau et a laissé le vaisseau sur cette planète pendant plus d'un an, c'est qu'elle ne pouvait pas décoller. Enfin, "il", le vaisseau.

- Mais oui... murmura l'alien en se remémorant des souvenirs. Oui! Bien sûr! La dernière fois, Oswin a lancé son vaisseau à pleine vitesse, et il a du s'extraire du paradoxe de Trenzalore! Tout ça a du l'endommager d'une manière ou d'une autre.

- Bravo! s'exclama la canadienne en tapant cyniquement dans ses mains. Bravo, bravo, bravo! Z'avez tout compris. J'ai juste besoin du TARDIS, pour pouvoir voyager dans le temps.

- Mais pourquoi vous voulez voyager dans le temps? demanda la jeune scientifique. Vous n'êtes qu'un... un ordinateur.

- Non, c'est une conscience, qui peut habiter des organismes ou des systèmes hybrides, électro-organiques... devina le Docteur. Mais elle l'a elle-même dit, elle n'est pas aussi puissante que la Grande Intelligence. Elle est vivante, d'une certaine façon, pas seulement psychique, puisqu'elle a besoin d'un esprit "compatible". Elle reste un peu "matérielle", elle a besoin d'énergie pour survivre. De l'énergie venant du vortex. N'est-ce pas?

- C'est ben ça.

- Sa survie dépend de tout cela.

- Parfaitement. Alors vous allez me donner accès à votre TARDIS, Docteur.

- Sûrement pas.

- Alors vous voulez me laisser mourir ici? Agoniser longuement? Ce n'est pas bien digne de vous, ce comportement.

- Je n'ai jamais dit que vous deviez mourir. J'ai dit que vous ne toucherez pas à mon vaisseau. Si le vôtre est endommagé, je peux peut-être y remédier, non? Le réparer.

- Le réparer? Et pourquoi vous feriez ça?

- Parce que vous êtes une créature consciente, qui peut mourir, et qui finalement n'a pas de réelles mauvaises intentions.

- Elle a voulu nous tuer ! s'exclama Osgood.

- Ce n'est pas faux... Mais contrairement à la Grande Intelligence, elle n'a rien contre moi en particulier, n'est-ce pas? Ni contre ce monde. Tout ce que vous voulez, c'est survivre, je le comprends. Et je peux probablement vous aider.

 

Le petit sourire qui avait disparu sur le visage de la québécoise repris ses droits en entendant ces mots.

 

- J'espère que vous savez c'qu'vous faîtes...

- Pareil. Par contre, il y a une condition. Relâchez Mona.

- Pelletez pas trop dans les nuages, Doc'. Tant que chu pas sûre que le vaisseau marche, je reste icite. De toute façon, le transfert est pas terminé. Il est qu'à... pff... 60% environ.

- Seulement?

- Et oui, mon p'tit. Faut utiliser des outils et appareils manipulés par plusieurs personnes pour démarrer le transfert dans quelqu'un. Au bout de 10%, le transfert continue sans les machines, mais ça demande un bon bout de temps. C'est pour ça qu'j'ai pas pu le faire directement. Et pis l'espérance de vie dans un corps n'est que de quelques heures: il me faut le TARDIS sous la main pour survivre.

- Je vois... Mettez le transfert en pause, dans ce cas.

- OK, OK... Bon, venez, on monte. Voyons-voir ce que vous pouvez faire. »

 

ΘΣ-ΘΣ-ΘΣ-ΘΣ-ΘΣ-ΘΣ

 

Le "poste de pilotage" du vaisseau était une salle circulaire de 5 mètres de diamètre, surmontée d'un dôme de verre. Les instruments et écrans étaient placés sur une "console" collée aux parois, qui faisait donc toute la circonférence du cockpit. Un fauteuil moyennement confortable, tourné vers l'extérieur, orbitait autour de l'axe central imaginaire de la pièce (marqué par une écoutille) et permettait d'accéder aux différents boutons, manettes et écrans.

Trois personnes occupaient la salle: Mona, qui observait le Docteur utiliser son tournevis à tout va, et une Kate armée d'un pistolet, sorte de garde du corps de la conscience du vaisseau.

 

« C'est surtout un problème au niveau du couplage dimensionnel... remarqua le Seigneur du Temps en enlevant une plaque métallique en-dessous des commandes, laissant apparaître de nombreux câbles et appareils. Et le système de compensation inertielle.

- Je l'sais, merci ben. Sauf que moi, je pouvais rien réparer.

- Certes... Mais je suis sûr que quelques coups de sonique bien placés suffiront à réparer tout ça. Le temps que vous trouviez des pièces de rechanges, et des gens pour les installer.

- J'espère ben. Mais où vous voulez qu'je trouve ces gens?

- Ganymède, au CIIème siècle, par exemple. Ils ont l'habitude des vaisseaux conscients.

 

L'alien tourna la molette à la base de la diode violette, et s'accroupit pour observer un peu mieux les entrailles de la console. Il pointa son appareil à l'intérieur et le petit son aigu de la vibration commença.

 

- Est-ce que ça va prendre du temps?

- De quelques secondes à quelques minutes... Je ne peux pas être plus précis.

- D'acc...cc...cc..ccord.

- De quoi?

 

Le Seigneur du Temps se retourna, gardant son tournevis en position, et vit que Mona se massait le front et serrait les dents.

 

- Vous allez bien?

- J'vous... Oh tab... Nan, nan tu...!

- Hé! Qu'est-ce qui se passe? s'exclama Kate.

- Il y a un problème mental!

 

En disant ces mots, le Docteur se releva et pointa la diode violette et vibrante vers un des écrans incrustés dans la console. Une jauge horizontale de chargement apparue, remplie à 70%, et clignotant en rouge.

 

- Ne touchez pas ça! s'écria la québécoise.

- Vous avez menti! Vous avez continué le transfert psychique!

- Le mettre en pause, ça... aaaah! ça aurait désactivé mes réseaux psychiques! Tout l'monde aurr.. aurait repris l'contrôle.

- Mais il y a un problème, là.

- Cette garce résiste! hurla Mona.

- Arrêtez tout, alors!

- Non, j'vais la calmer un peu, z'allez voir!

- NAN!

 

L'alien tourna à toute vitesse la molette à la base du cristal de son tournevis, et pointa l'appareil vers l'écran, tout en appuyant sur le bouton. La vibration se fit plus grave, et sur l'interface, la jauge commença à se vider.

 

- Nan! J'ai dit NAN! »

 

Mona lança un hurlement de rage, mais très vite la jauge fut vide, et l'étudiante se calma légèrement, clignant des yeux et se tapotant le visage comme pour vérifier qu'elle était bien là.

 

« Oh ciboire! Qu'est-ce que... NAN!

 

À coté d'elle, Kate avait levé son pistolet, visant le Docteur et s'apprêtant à tirer. La québécoise attrapa le bras de la scientifique et le poussa vers le bas. Un coup parti, passant par l'ouverture crée par le Docteur et atteignant donc les systèmes internes de la console. Une alarme sonna, et toute les lumières passèrent au rouge, tandis que de nombreux voyants clignotaient partout autour des occupants.

 

- Sortez! Sortez vite! ordonna l'alien.

 

Il ouvrit l'écoutille située au milieu de la pièce et se laissa tomber, sans même s'accrocher à l'échelle, jusqu'au sol quelques mètres plus bas. Mona le suivit, puis Kate, désarmée, fit de même.

 

- COUREZ! COUREZ! cria le Docteur à Osgood et aux autres occupants de l'entrepôt. Et fermez cette porte! »

 

Tout le monde se précipita vers la sortie, tandis que la porte blindée commençait à se fermer lentement. Mais même après l'avoir dépassée, les fuyards continuèrent à courir dans le corridor suivant le Docteur, tandis que derrière eux le vaisseau lançait un étrange bruit futuriste et clignotait dans l'existence, comme pour se dématérialiser. Mais il n'eut pas le temps de disparaître. Il y eut un léger flash blanchâtre, et l'engin explosa. Les flammes ravagèrent l'intérieur de la pièce, et le souffle réussit à passer par la légère ouverture que formait la porte en train de se fermer, et jeta à terre tout ceux qui se trouvaient dans le corridor.

 

Alors que tout le monde se relevait, Osgood se rapprocha du Docteur.

 

« Qu'est-ce qui s'est passé?

- J'ai du renvoyer la conscience du vaisseau dans son réceptacle d'origine... Sinon elle aurait détruit l'esprit de Mona. Et Kate a voulu me tuer pour venger cela, puisqu'elle était sous l'influence de cette "Petite Intelligence".

- Ben heureusement qu'j'étais là, pas vrai?

- Exactement! Merci, d'ailleurs.

- Qu'est-ce que vous avez fait? demanda la jeune scientifique à la canadienne.

- J'ai juste détourné son tir, rien d'ben incroyable.

- Mais ça a endommagé les systèmes du vaisseau. Je pense qu'il était en état critique, et pas encore réparé qui plus est. Il était probablement prêt à exploser dans les minutes qui suivaient. Et une explosion de cette chose aurait rayé la Grande Bretagne des cartes et propulsé l'Irlande jusqu'à Montréal.

- Dématérialisation d'urgence... devina Osgood. Et l'explosion a été contenue.

- Exactement. Bon, votre entrepôt va avoir besoin d'un bon petit nettoyage. Oh, et bonne nouvelle, le vaisseau ayant été détruit, la conscience l'est aussi. Donc UNIT est libéré de l'influence de la Petite Intelligence. N'est-ce pas Kate?

 

La chef scientifique de UNIT, encore au sol, essayait de se relever, tout en se massant la tête. Elle était confuse, et commençait à se souvenir de ce qui s'était passé.

 

- Qu'est-ce que... Oh... Docteur... C'est vous, non? Je... Oh bon sang! Je suis désolée! Vraiment, vraiment déso...

- Je n'en doute pas, Kate! coupa l'alien en pouffant. Mais reprenez vos esprits avant... »

 

ΘΣ-ΘΣ-ΘΣ-ΘΣ-ΘΣ-ΘΣ

 

Quelque enfants et jeunes adolescents jouaient au football dans le petit stade bleu au milieu du Nelson Square. Mais au milieu de tout ces joueurs, il y avait une joueuse. Une jeune canadienne de 20 ans.

 

Après l'explosion du vaisseau, Kate s'était excusée de toutes les façons possibles et imaginables, et avait commandé un check-up complet de tous les employés de UNIT présent au Royaume-Uni. Officiellement, il s'agissait d'un "exercice" pour s'assurer de la rapidité d'exécution d'un ordre à grande échelle dans l'organisation. Mona fut la première à y passer, et lorsqu'il fut certain qu'il n'y avait effectivement plus rien dans sa tête (autre qu'elle-même), on la congédia rapidement. La situation était assez bouleversée pour qu'on ait pas le cas d'une inconnue à traiter en plus. Elle avait passé la nuit (déjà bien entamée) dans un hôtel du quartier de Westminster, payé par UNIT, et s'était réveillée vers midi, à la fois fatiguée par son cerveau encore secoué et par le décalage horaire entre Londres et Montréal.

Un SMS sur son téléphone l'avait informée qu'on la renverrait au Canada le lendemain, soit le lundi de Pâques, en avion spécial, comme pour son arrivée. En attendant, elle avait quartier libre dans la ville, tant qu'elle ne parlait à personne de ce qui s'était passé, qu'elle ne quittait pas le centre et qu'elle rentrait bien à l'hôtel le soir. Et aucune nouvelle à propos du Docteur.

Elle n'avait aucun endroit où aller, et le tourisme, bien qu'il lui aurait changé les idées, ne l'intéressait pas vraiment. Ni même le shopping: elle n'avait pas envie de convertir les quelques dollars canadiens qu'elle avait en livres sterling pour une seule journée d'achats. Non, elle ne voyait finalement qu'un seul endroit où se rendre, pour achever cette petite aventure. Là où tout avait commencé. Nelson Square.

 

Cela faisait donc près de trois heures qu'elle était dans le parc. D'abord elle s'était promenée, avait écouté la radio sur son portable (se remémorant des airs de grandes comédies musicales américaines avec Elaine Page sur la BBC Radio 2), puis elle avait discuté avec quelques riverains (selon lesquels plusieurs véhicules étaient venus dans le square pendant la nuit, des fourgons).

Puis elle avait vu les footballeurs, et leur avait proposé de se joindre à eux. Elle n'était pas une très bonne joueuse, mais elle avait l'avantage d'être plus forte et plus robuste que ses coéquipiers et adversaires. Son équipe menait déjà 15 à 9 à la fin de leur premier match.

Il était presque 16h30 quand ils commencèrent le deuxième, et les garçons insistèrent pour que la jeune femme arrête de jouer, trouvant qu'elle était "beaucoup trop forte". Elle se proposa pour arbitrer, ce qui ne posa aucun problème à quiconque. Et alors que le jeu avait repris depuis quelque minutes, le regard attentif de Mona sur les enfants fut troublé par un autre sens.

Un petit frémissement dans l'oreille, un bourdonnement, qui se transformait rapidement mais harmonieusement en une respiration métallique que la québécoise connaissait déjà.

Elle se retourna, lentement, et tandis que derrière elle un des garçons criait "Faute!Faute!", face à elle, entre les barrières bleues qui délimitait le petit stade et les barrières blanches qui entourait le Square, une cabine bleue clignotait dans l'existence. Le TARDIS se stabilisa en lançant un léger bruit sourd, et quelques secondes plus tard, les portes s'ouvrirent, et l'homme au pantalon et au gilet rouge en sortit, respirant l'air frais d'un après-midi d'avril.

 

« Docteur!

 

Mona courut jusqu'à l'alien, sautant au-dessus des barrières et s'arrêtant à quelque centimètres uniquement du grand Seigneur du Temps.

 

- Ah, Mona, j'étais sûr que je vous trouverais ici.

- Ben, chavais pas où aller...

- Vous faisiez quelque chose?

- Euh... Non, pas vraiment.

 

Elle se tourna vers le stade, et cria aux enfants:

 

- Continuez sans moé, kids!

- Vous allez bien depuis la dernière fois?

- Ben, c'était y a quoi... 15 heures? Chu un peu plus réveillée, et un peu moins lavée du cerveau, mais c'est tout.

- Oh... Moi ça fait presque deux semaines. Je suis allé en 2014, et je suis revenu, et le voyage était un peu plus long à cause d'une... Enfin bref, je ne vais pas vous ennuyer avec tout ça. Vous allez bien, c'est ce qui compte.

- Vous êtes allé en... 2014?

- Oui. Ce vaisseau voyage dans l'espace et dans le temps.

- Mais vous êtes aller faire quoi, exactement?

- Euh... Rien de bien incroyable. J'avais des petites choses à faire. Je devais... tourner une page, si vous voulez. Et oui, même moi j'ai de petits tracas, comme les humains.

 

En disant cela, le Docteur savait pertinemment qu'il mentait. Ce n'était pas un petit tracas. S'il était allé en 2014, c'était pour tourner une page qu'il avait commencé des années auparavant. Il avait du achever le dernier paragraphe de ses anciens voyages. Il était allé voir Dave Oswald et son épouse, ainsi que Paul Oane. C'était son devoir de les informer que Clara n'avait pas survécu à ses voyages. Il avait du créer une excuse, bien sûr, pour ne pas révéler la réalité, tout en respectant la mémoire de son ancienne compagne de voyage et en expliquant l'absence de corps. Le deuil de la famille serait difficile. Mais cela valait peut-être mieux que de les laisser dans le doute d'une disparition soudaine...

 

- Euh... Si vous l'dîtes... En fait, y disent qu'y a des gens qui sont v'nus icitte c'te nuit , en fourgon? C'était vos copains?

- Probablement, oui. UNIT a du venir pour désengorger l'endroit de son énergie: le TARDIS n'en a pas repérée. Au fait, vous restez longtemps ici?

- Euh... Non, j'pars demain.

- Je vois...

- Est-ce que... Est-ce que j'peux voir dedans?

- Dans le TARDIS?

- Ben oui, où qu'vous voyez un aut' dedans?

- Oui, c'est vrai... Et bien, oui, bien entendu, rentrez-donc! Vous en avez bien le droit après tout ça.

 

En disant ces mots, l'alien se décala, et laissa la québécoise passer le seuil de la cabine et arriver entre les deux barrières dorées. Et il ne put réprimer un sourire lorsqu'il l'entendit s'exclamer:

 

- Esti qu'c'est bigger on the inside, vot' machin.

- Je vous avais dit de vous méfier des apparences... rappela le Seigneur du Temps en rentrant dans le vaisseau lui aussi.

- Ouais ben c'est vachement capoté, c'te TARDIS. Et ça veut dire quoi TARDIS d'ailleurs?

- Temps à Relativité Dimensionnelle Inter-Spatiale. Ou, puisque vous semblez un peu anglophone, Time And Relative Dimension In Space. Avancez un peu, n'ayez pas peur.

 

La jeune femme marcha vers la console, et observa les nombreuses commandes, ainsi que la longue colonne de verre qui remontait jusqu'au plafond.

 

- Je peux voir à l'étage?

- Bien sûr! Vous pouvez vous promener dans cette pièce comme bon vous semble. Mais n'allez pas dans les couloirs, je ne connais pas encore très bien l'endroit moi-même. Toute l'architecture a été refaîte.

- Et vous l'avez acheté combien ce TARDIS? demanda la canadienne en montant l'escalier à droite de la console.

- Oh, je ne l'ai pas acheté à proprement parler. Je l'ai... emprunté.

- Emprunté, hein?

 

L'alien, qui entrait des coordonnées dans l'interface, leva son visage vers le balcon situé quelques mètres plus haut, et sourit à Mona.

 

- D'accord... Je l'ai volé. Dans un musée en plus. Mais il m'aime bien!

- Et pourquoi il ressemble à une boite téléphonique? C'est un peu quétaine comme tête.

- Oh... C'était il y a des siècles et des siècles, j'ai atterri dans le Londres des années 1960. Et le TARDIS s'était camouflé en s'adaptant aux environs, donc en une cabine bleue de police. Sauf que le système caméléon, celui du camouflage, a été endommagé par je-n'ai-jamais-vraiment-su-quoi, et l'apparence extérieure a été bloquée.

- Et vous avez jamais voulu le réparer?

- Oh, si! Et il est réparé. Mais ce cher vaisseau était tellement attaché à cette apparence qu'il a décidé de le garder. Ce qui ne me gène pas, bien au contraire.

- OK... Non mais attendez... Les années 60, c'était pas y a des siècles!

- Des siècles pour moi. Je ne vous ai pas donné mon âge, si?

- Non... répondit Mona avec un peu de prudence, presque effrayée par l'âge de l'alien.

- J'ai plus de 2000 ans.

- Oh ciboire! Vous capotez, là!

- Pardon?

- Vous vous moquez de moi.

- Pas du tout. C'est si étonnant? J'ai l'air plus jeune, je sais. Tout comme ce vaisseau semble faire moins de deux mètres carrés et tout comme ce petit appareil là ne ressemble absolument pas à un tournevis.

- Vot' vie est ben fuckée, en tout cas.

- Attention à votre langage! prévint le Seigneur du Temps en la pointant avec son tournevis.

- C'est pas insultant, en québécois, "fucké".

- Si vous le dîtes...

- Au fait, vous avez des barniques, maintenant?

- Des quoi?

- Des lunettes.

 

En effet, l'alien portait une paire de lunettes noire, qui corrigeait sa myopie.

 

- Oh, oui. Un cadeau de Kate, pour se faire pardonner.

 

La jeune femme commença à marcher dans le balcon, faisant vite le tour et regardant les portes et les longs corridors qui se cachaient parfois derrière, lorsqu'elles étaient ouvertes.

 

- C'est grand comment, exactement, le TARDIS?

- Oh... C'est potentiellement infini. Disons que c'est immense.

- Vous avez des chambres?

- Bien sûr.

- Et des salles de bains?

- J'ai même une piscine. Dans la bibliothèque, d'ailleurs. J'ai aussi une très grande garde-robe, des observatoires, des gymnases, des saunas, des serres et bien d'autres choses encore. Mais bon, quand je voyage seul, tout cela me sert beaucoup moins.

 

Il ne put s'empêcher de sourire en disant ces mots. Il tendait la perche à l'étudiante, mais elle-même criait intérieurement pour qu'on la lui tende.

 

- Vous prenez des passagers, donc?

- C'est une demande?

- Et ben... Ouais.

- Alors vous êtes la bienvenue. Si vous répondez à une question. Pourquoi?

- Pourquoi quoi?

- Pourquoi vouloir venir?

 

La jeune femme soupira de dépit en entendant la question de l'alien, mais ne chercha pas à trop réfléchir. Elle voulait venir, c'était presque instinctif. Ce n'était pas dans son esprit qu'elle comprendrait pourquoi.

 

- Bah, j'vous ai sauvé la vie, vous m'avez débarrassée de c't'énergie... Enfin, j'm'en suis débarrassée toute seule, mais en touchant vot' TARDIS... Et pis, ça a l'air génial c'que vous pouvez faire avec. J'veux dire, c'est super d'aller sur d'autres planètes, à d'autres époques et tout ça... Non?

- Si, si, ça l'est. Mais vous avez des études, non? Des amis, une famille.

- Bah, les études, pour ce que j'en crisse. Pis vous pouvez toujours me ramener pour mardi, non? Parce que demain c'est Pâques, donc y a pas cours. Les amis, j'en ai pas tant qu'ça, et la famille... Bah, mes parents j'les vois que pendant les vacances, ils habitent trop loin.

- Et votre frère alors?

- Bah, j'l'aime bien, mais y m'en voudra pas si j'le laisse tranquille quelque temps, non? Regardez, j'viens avec vous, et au bout d'un moment vous m'ramenez mardi pour qu'j'aille au collège. Et le soir vous m'reprenez. Ça pourrait le faire, ça, non? Au moins j'pourrais continuer les études, et pis j'laisserai Louca et RP tranquille. Ils ont bien l'droit d'avoir le condo pour eux tout seuls, faut qu'ils aient une vraie vie de couple.

 

Le Seigneur du Temps lâcha un sourire, et releva son visage vers le balcon.

 

- Vos affaires sont à votre hôtel?

- C'est oui? s'exclama Mona.

- Bien sûr que c'est oui! répondit l'alien avec entrain. Donc, pour vos affaires?

- Bah, j'ai tout dans l'sac que j'ai pris, répondit l'étudiante en descendant à toute vitesse les marches de l'escalier. Attendez, je vais les chercher.

 

Elle courut à travers la pièce, sortit du vaisseau et attrapa un gros sac de sport qu'elle avait laissé près des cages du petit stade, dehors. Alors que les enfants lui demandait si elle revenait arbitrer, elle répondit avec un large sourire:

 

- Trouvez quelqu'un d'autres, kids, moi je vous dis tourlou!

 

Elle alla à toute vitesse vers la cabine bleue, tirant son sac, et le jeta par dessus la barrière dorée à sa droite, une fois rentrée.

 

- Chu prête!

- Parfait...

 

Le Seigneur du Temps activa deux interrupteurs sur le panneau en face de la sortie, et la double-porte de bois se referma et se verrouilla. Il alla alors devant l'interface pour taper de nouvelles coordonnées, et se retourna vers sa nouvelle compagne de voyage.

 

- J'oubliais, je ne me suis toujours pas présenté convenablement... Je suis le Docteur, Seigneur du Temps de la planète Gallifrey. J'ai plus de 2000 ans, et si vous restez ici votre vie va changer du tout au tout. Si vous voyagez avec moi, vous verrez des merveilles, vous viendrez en aide à bien des gens mais votre vie sera probablement mise en danger plus d'une fois. Vous êtes toujours sûre?

- Aucun problème!

- Dans ce cas, bienvenue à bord! s'exclama l'alien en se plaçant devant le "levier de vitesse" et en l'agrippant. Prête à partir?

- Où ça?

- Partout, et toujours.

- Prête!

- Alors allons-y! »

 

Le Docteur tira le levier de vitesse, et son vaisseau lâcha un puissant bruit sourd en décollant, puis la respiration métallique commença. Une nouvelle page commençait. Et elle devait être meilleure que la précédente.

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