L'Ecrin des illusions

Chapitre 18 : Amères retrouvailles

5782 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 29/02/2024 23:28

Le lendemain matin, l'aube se levait à peine quand les élèves sortirent de l'école pour rejoindre le Poudlard Express. Accompagnés des professeurs Bibine, Chourave et de Hagrid ouvrant la marche, les élèves s'étaient regroupés devant le château. McGonagall circulait parmi eux pour leur rappeler que l'usage de la magie était prohibé hors de l'enceinte de Poudlard. Hazel plongea la main dans la poche de son manteau, agrandie par magie à l'aide de Sofia, et caressa la tête de Norbert roupillant bien au chaud. Elle n'avait pas osé prévenir son père de l'arrivée de ce petit invité, elle aviserait le moment venu. Une quinte de toux la tira de ses pensées. Un peu à l'écart des élèves, vêtu de son éternel manteau noir et les mains nues, Rogue toisait ce petit monde d'un œil indifférent. Depuis quelques jours, le redoutable maître des potions était pris d'un rhume virulent, ce qui le rendait d'une humeur encore plus massacrante qu'à l'accoutumée. Hazel resserra l'écharpe héritée de sa mère autour de son cou. Allait-il recevoir une paire de gants ou une écharpe de la part d'un proche pour Noël ? Sentant le regard de la jeune fille posé sur lui, Rogue se tourna vers elle, le sourcil pointé en un arc inquisiteur. Elle ne put résister à l'envie de lui offrir un petit signe de la main, accompagné de ce petit sourire qu'il détestait tant. Elle le vit rouler des yeux et grogner quelques mots inaudibles. Hagrid leur fit signe de le suivre et Hazel ne vit pas le discret petit salut esquissé en cachette par le sinistre professeur.


Arrivée aux calèches, tirées par des créatures qu'elle ne pouvait pas apercevoir, Hazel se faufila à côté de Sofia . Le véhicule se mit en marche et la discussion démarra sur les chapeaux de roue. La famille de Sofia ne fêtait pas Noël, mais elle profitait tout de même des vacances pour rendre visite à sa famille maternelle au Liban. Jonathan comptait bien passer ses journées au lit, à dévorer des montagnes de livres ! Charlie lui, se mit à évoquer sa famille : aux dernières nouvelles, ses parents venaient d'affronter une terrible épidémie de Dragoncelle au sein du Terrier et les jumeaux avaient encore fait bien des sottises ! Ils éclatèrent de rire en écoutant les dernières facéties de George et Fred impliquant un gnome et un voisin moldu irascible. Misty se confia sur sa grande sœur, l'exceptionnelle Milie, avec laquelle elle était en conflit permanent. Millie occupait un poste important au Département des sports magiques et allait sans doute profiter des fêtes pour annoncer ses fiançailles avec son ennuyeux fiancé, devenant ainsi, l'attraction du réveillon. Hazel comprit que Misty était étouffée par l'ombre de cette sœur aînée envahissante. Était-ce toujours comme cela, entre frères et sœurs ? Cette perpétuelle rivalité ? Peu à peu, la conversation dévia sur leurs fratries respectives : Sofia adorait sa sœur mais souffrait d'être sans cesse d'être comparée à elle, Charlie confia qu'il avait du mal à trouver sa place, surtout quand votre frère aîné était un Bill ! Jonathan avoua que depuis son arrivée à Poudlard, il avait perdu sa complicité avec son petit frère. Hazel se demandait bien quelle sœur, elle aurait pu faire ... Se désintéressant de la conversation, elle se tourna vers Seren demeuré silencieux. Ils échangèrent un regard entendu, celui des enfants uniques ne comprenant rien aux liens fraternels.


Norbert commença à s'agiter et sortit sa tête de la poche. Il aperçut Seren et, tout en poussant des petits cris joyeux, sortit de sa cachette et sauta sur les genoux du Serpentard. Le Niffleur exécuta une petite danse afin d'attirer l'attention du petit groupe avant de se mettre à jouer avec les bagues de Seren. Hazel et Seren se mirent à discuter avec passion de l'ouvrage de Dragonneau, dévoré la nuit dernière par la jeune sorcière.

♠♠♠


À la nuit tombée, le train fit son entrée en gare après un long voyage. Les yeux lourds de sommeil, Hazel portant sa valise et sa cage, descendit sur le quai. Elle salua les parents de Sofia et Mr. Weasley venu chercher ses fils, avant de faire ses adieux à Misty et Seren qui partirent avec les parents de la Serpentarde. Accompagnée de Jonathan, elle franchit la barrière séparant la voie 9 3/4 des voies moldues. Jonathan retrouva ses parents et son petit frère et partit après un dernier « au revoir ».


Hazel s'installa sur un banc. La présence de Circé lui attirait bien des regards curieux. Elle caressait Norbert endormi et scrutait l'horloge avec nervosité.

- Hazel ?

Elle vit son père à quelques pas d'elle, poussant un chariot. Il l'abandonna et s'élança vers elle, sans tenir compte des voyageurs ébahis. Hazel se leva à son tour et se jeta dans ses bras. Le nez collé contre sa veste, elle le huma avec force, s'imprégnant de son odeur. Oubliées ces dernières semaines de tension, elle l'avait retrouvé et pouvait le serrer contre elle, plus rien n'avait d'importance ! Oliver l'étreignit avec force. Ils se détachèrent l'un de l'autre et Hazel fut choquée par l'apparence de l'homme se tenant face à elle : son escogriffe de père avait perdu beaucoup de poids et son visage s'était creusé, accentuant ses rides et ses cernes, des mèches grisâtres striaient ses boucles flamboyantes. Il avait beau porter un élégant costume, il paraissait bien terne et privé de toute joie. Était-elle la cause de cette déchéance ? Hazel sentit la culpabilité l'envahir et tout en se blottissant à nouveau contre lui, se jura de ne plus causer le moindre souci à ce père adoré.

- Je suis si heureux de te voir, mon petit noisetier, chuchota Oliver en caressant la joue de sa fille.

« Son petit noisetier », le surnom dont il l'affublait depuis qu'elle était en âge de babiller. Ce tendre surnom lui fit le même effet qu'une potion calmante. Elle enroula ses bras autour de sa taille et posa sa tête contre son ventre.

- Toi aussi, Pa'.


Norbert s'éveilla à cet instant. Attiré par la luxueuse montre ornant le poignet d'Oliver, il sortit son museau de la poche et tenta de dérober le bijou tentateur.

- Norbert, non ! fit Hazel en écartant les petites pattes chapardeuses de son père.

- Quelle curieuse créature ! s'étonna Oliver en caressant le crâne de l'animal poussant des cris indignés.

- C'est un Niffleur, je dois le garder pendant les vacances ... Tu n'es pas contre ?

- Je ne peux décemment pas te dire de laisser Norbert sur ce banc. J'espère qu'il ne causera pas d'ennuis ...

- Je ferai attention, promit Hazel en croisant les doigts de sa main droite derrière son dos.

La lecture de l'ouvrage de Dragonneau s'était avérée aussi instructive qu' inquiétante. Hazel espérait que le petit Niffleur sache réfréner ses instincts destructeurs et enclins au vol. Oliver chargea les affaires de sa fille sur le chariot et tous deux quittèrent King's Cross bondé en cette veille de congés de Noël.


Une fois parvenus sur le parking, elle eut un soupir soulagé en constatant que son père n'avait pas encore vendu la vieille Ford Anglia couleur pistache. Oliver ouvrit le coffre, y déposa les valises, tandis que sa fille s'installa avec plaisir sur le siège en cuir défoncé. Oliver prit place derrière le volant et pesta contre le radiateur poussiéreux trop lent à son goût. Il jeta un regard à sa fille.

- Dis-moi, tu ne peux pas me filer un petit coup de main ?

- Désolée Pa', pas de magie en dehors de Poudlard.


Oliver poussa un soupir déçu et donna un bon vieux coup de poing contre le tableau de bord. Le radiateur s'alluma d'un coup et la température à l'intérieur de l'habitacle devint plus acceptable. Il tourna la clef de contact, le moteur émit une toux avant de s'éteindre. La patience étant de mise avec la vieille Anglia, Oliver posa la tête contre le dossier de son siège et s'assoupit quelques minutes. Hazel le scruta avec attention : à la lueur crue des lampadaires, les traits alourdis de fatigue de son père lui sautaient davantage aux yeux ! Dans sa dernière lettre, il avait osé lui confier qu'il ne supportait plus les heures infernales imposées par son bureau de la City et qu'à la cadence infernale de la capitale, il préférait le calme de la petite banque de Haworth qu'il avait quittée à regret. Hazel s'inclina vers lui et posa sa tête contre son épaule. Cette année, elle n'aurait pas droit aux délicieux roulés à la cannelle préparés par la propriétaire du pub fréquenté par son père, elle ne pourrait pas aller voir un vieux film dans l'unique cinéma de la rue principale en compagnie de Morgan et son père et surtout, elle ne pourrait pas se rendre sur la tombe de sa mère afin d'y déposer la traditionnelle fleur de Noël.


Oliver tendit la main et effleura les quelques mèches folles s'échappant du bonnet de son enfant.

- On va essayer de profiter de ces fêtes, qu'en penses-tu ?

- Ça me va.

Le moteur poussa un rugissement. Oliver appuya sur la pédale d'accélération et la guimbarde démarra en exhalant un puissant nuage de fumée nauséabond. Hazel boucla sa ceinture et la voiture toussotant s'engagea dans le trafic de ce début de soirée. Oliver alluma la radio, laissant Hazel s'imprégner des dernières nouvelles du monde moldu : Visite de Mikhaïl Gorbatchev au Royaume-Uni, Margaret Thatcher a déclaré : 《 J'apprécie Mr.Gorbatchev, nous allons bien travailler ensemble.》 La famille royale vient de dévoiler une nouvelle photo officielle du prince Harry. Rappelons que le prince fêtera cette année, son premier Noël. Et maintenant, petit intermède musical avec une petite chanson de circonstance...


Last Christmas, I gave you my heart

But the very next day you gave it

away...


Hazel se mit à chantonner le dernier tube à la mode tout en dessinant des cercles sur la vitre gelée. Joue appuyée contre la fenêtre, elle à se mit à observer les véhicules roulant au pas. Combien elle se sentait étrangère à ce monde, après seulement quelques mois passés à Poudlard. Elle avait vécu tellement de choses dans le monde magique que le monde moldu lui semblait un autre univers, un brin terne. Oliver se mit à pianoter sur le volant et pour tromper sa nervosité, - il n'appréciait guère les embouteillages - , il se mit à fredonner de sa voix grave, un brin enrouée. Hazel se tourna vers lui et retrouvant leur complicité, père et fille se mirent à chanter à tue-tête :


This year, to save me from tears,

I'll give it to someone special ...


Au bout d'un long périple à travers les rues de Londres, ils arrivèrent enfin à destination. Oliver gara la Ford Anglia dans la rue dépourvue de passants et éteignit le moteur. Le froid envahit de nouveau l'habitacle et la bulle protectrice dans laquelle ils s'étaient tous les deux enfermés éclata, comme si un mur s'était de nouveau érigé entre eux.

- Hazel, commença Oliver.

La jeune fille se mit à caresser Norbert afin de se donner du courage et fit mine de s'intéresser à la rue pour masquer le sentiment de tristesse s'étant emparé d'elle. Il n'avait pas encore neigé en abondance sur Londres et mis à part quelques plaques verglacées et quelques pauvres flocons fondus et noirâtres, la capitale n'avait pas encore revêtu son manteau de fêtes. Hazel poussa un soupir et se tourna vers son père, un sourire factice accroché aux lèvres :

- Je sais : je ne dis rien pour Norbert, j'évite au maximum de parler de Poudlard et je me fais aussi discrète qu'une araignée. Ça va, j'ai bien appris ma leçon ?

Oliver se pencha vers elle et refit le nœud de son écharpe.

- Je voulais juste te dire que je suis heureux de t'avoir avec moi.


Hazel lui sourit, avec un vrai sourire cette fois-ci, et déposa un baiser rapide sur la joue mal rasée. Elle ferait de son mieux pour que ces deux semaines de vacances se passent sous les meilleurs auspices. Elle éviterait à tout prix de s'attirer des ennuis et se montrerait cordiale avec sa belle-mère. Elle ne le ferait pas pour elle, mais pour son vieux père qui semblait accablé par bien des soucis. Elle rabattit son bonnet sur ses oreilles rougies par le froid et descendit de la Ford afin d'aider son père à descendre ses affaires. Circé poussa un hululement agacé quand Hazel déposa sa cage sur le trottoir glacial. La jeune sorcière ordonna à sa chouette de se taire : ce n'était pas le moment d'attirer la curiosité des voisins ! Circé lui décrocha un regard inamical et lui présenta son dos en signe de bouderie.


Hazel se saisit de la cage, ouvrit le portillon et monta les quelques marches du perron. Une fois devant la porte, elle eut quelques secondes d'hésitation avant de se servir du heurtoir. La porte s'ouvrit sur Mary Murderstone , vêtue d'une épaisse robe de chambre léopard ornée d'une fourrure noire. Le visage maquillé à la perfection, elle paraissait bien plus jeune et pimpante que son époux ! Les deux femmes se jaugèrent du regard et Hazel fut la première à esquisser un pas vers elle. Mary se recula, méfiante, et Hazel se hissa sur la pointe des pieds pour l'embrasser, mais ses lèvres ne rencontrèrent que le vide.

- Où étiez-vous donc passés ?! s'écria Mary tout en repoussant sa belle-fille d'une main.

Oliver déposa les affaires de Hazel sur le tapis du vestibule et referma la porte avant de répondre :

- Les embouteillages, tu sais comment c'est, se défendit-il sans grande conviction. Il y avait du monde à la gare.

- Le dîner est prêt depuis longtemps, déclara alors la marâtre en se dirigeant vers la salle à manger.

Elle parut se rappeler de la présence de sa belle-fille.

- Monte-moi tout ça dans ta chambre et fais en sorte d'être présentable. C'est un dîner de famille, pas un concert de The Cure !


Oliver aida sa fille à monter ses bagages dans sa chambre et s'éclipsa. Hazel offrit quelques graines à Circé et sortit le Niffleur de sa poche. La petite créature bailla, grignota un peu de nourriture donnée par Hagrid et se roula en boule sur l'oreiller de Hazel, les pattes enveloppant la Chose qui venait de retrouver sa place sur le lit londonien. La jeune fille s'assit sur son lit et se mit à fouiller dans sa valise, en sortant ses robes de sorcière, elle hésita quelques instants à s'en vêtir pour ce dîner tardif, mais renonça afin d' éviter le conflit. Elle s'habilla d'une robe un peu froissée, enfila ses pantoufles élimées et se rendit dans la salle de bain. Elle se coiffa à la va-vite et jeta un regard à son reflet, cherchant un joli sourire à offrir à Mary. Elle pouffa de rire en croyant entendre la voix de Rogue s'adresser à elle : « Ôtez-moi ce rictus désagréable, Evans, cela ne vous sied guère. ». Elle se décida pour l'expression la plus neutre possible : autant ne pas user de cette risette typiquement Black et pouvant être prise pour de la raillerie, afin de se présenter devant sa belle-mère. Elle se passa un peu d'eau sur la figure et sortit de la chambre, sans songer à verrouiller sa porte.


Coincée entre son père et sa belle-mère, chacun assis à une extrémité de la table, Hazel s'amusait à triturer ses brocolis tout en prêtant une oreille distraite au laïus de Mary. Celle-ci contait depuis une bonne vingtaine de minutes, sa longue et harassante journée de travail qui s'était achevée par un verre avec l'une de ses meilleures amies. Oliver tenta bien de placer un ou deux mots, mais Mary l'interrompait sans cesse pour le contredire ou l'abreuver de nouveaux détails. Après avoir raconté son petit passage au pub, Mary enchaîna sur le coup de fil passé à sa cousine qui avait une fille de l'âge de Hazel.

- Harmonie a fait sa rentrée à Sainte-Médée, déclara Mary entre deux bouchées de saumon. C'est une élève bri-llan-te.

En entendant le nom de l'école qui aurait dû la sienne, Hazel releva la tête et s'intéressa davantage à la conversation. Ravie d'avoir l'attention d'une nouvelle spectatrice, Mary esquissa un sourire, tapota ses lèvres de sa serviette avant de poursuivre :

- Une demoiselle aussi accomplie qu'intelligente. Elle a même réussi à s'attirer les bonnes grâces de Sharp, un professeur de mathématiques aux cheveux gras et extrêmement désagréable. Il a la fâcheuse manie de favoriser certains élèves !

Hazel se mit à sourire, amusée par cette description lui rappelant un certain maître des potions. Oliver surprit la mine réjouie de sa fille.

- Hazel ?

Elle étouffa un petit rire et se tournant vers son père, lui raconta quelques anecdotes sur un certain professeur vivant dans les cachots et ressemblant à une chauve-souris anémique. Oliver s'outra du comportement de l'enseignant et était prêt à écrire une lettre à Dumbledore pour le renseigner sur les pratiques douteuses du sinistre professeur.

- Et comment se nomme cet homme, Hazel ? s'enquit Oliver d'un ton menaçant, le ton d'un père ne supportant pas de savoir sa fille injustement punie.

- Severus Rogue, mais t'en fais pas, il est désagréable avec tout le monde et même avec certains Serpentard ! Pa' ?

Hazel coula un regard interrogateur à son père. Oliver Evans secoua la tête, comme pour chasser un souvenir. Il se servit un verre d'eau et but quelques gorgées avant de le reposer, l'air plongé en pleine réflexion.

- Severus Rogue ... murmura-t-il d'une voix absente. Quelques semaines après la mort de mon père, ma mère m'avait envoyé chez les parents de Lily et de Petunia pour que je puisse me changer les idées. Lily avait un ami, un curieux garçonnet maigrichon aux grands yeux noirs. Severus, c'était son prénom ... je l'ai toujours trouvé étrange.

- Je crois, répondit Hazel un brin hésitante, que Rogue et Lily se connaissaient bien. Il l'appréciait, à sa façon ...

- L'appréciait, chuchota Oliver perdu dans ses souvenirs, je crois que c'était beaucoup plus que cela, Hazel ...

Mary toussota pour signifier son ennui. Elle n'était plus le centre de l'attention et cela commençait à lui peser ! Elle fit cogner le bout de son couteau contre son verre. Les deux Evans reportèrent son attention sur elle.

- En quoi est-ce intéressant d'évoquer un vieux professeur de potions ? La fabrication de potions, que c'est ridicule ! fit-elle en levant les yeux au plafond.

- Rogue n'est pas si vieux, protesta Hazel se sentant quelque peu obligée de défendre le sinistre ancien Serpentard. Et il est très doué dans son domaine !

- Et ? déclara Mary d'un ton railleur. Tu comptes l'inviter ici et nous le présenter ? Voyons Oliver, revenons aux choses sérieuses.

- L'enseignement du professeur Rogue est ... se rebella Hazel.

- Est une vaste plaisanterie, tout comme les cours que tu suis dans cette école. Que va-t-il advenir de toi quand tu auras ton diplôme ? Tu animeras des goûters d'enfants grâce à tes tours de passe-passe ?

- Certainement pas, grogna Hazel.

Elle repoussa son assiette et se leva de table, sous les yeux furieux de sa belle-mère. Oliver tenta de ramener le calme, mais dut s'avouer très vite vaincu. Les deux femmes de sa vie se dévisageaient avec colère et rien ne semblait pouvoir réconcilier sa fille et son épouse. Hazel se tourna vers lui, quêtant une aide de sa part, mais il se contenta de secouer la tête, fatigué et dépité par cette toute première dispute.


Hazel voulut quitter la salle à manger pour regagner sa chambre, quand un bruit sourd se fit entendre à l'étage. Le lustre se mit à trembler et un peu de plâtre tomba dans le verre de Mary. Celle-ci se leva d'un bond, la main posée sur son cœur battant à la chamade.

- Que se passe-t-il encore ?!


Saisie d'un doute affreux, Hazel se rua dans l'escalier et monta les marches quatre à quatre. Arrivée devant sa chambre, elle constata que la porte était ouverte et que Norbert ne se trouvait plus sur son lit. Le cri terrifié de Mary confirma ses craintes. Elle courut jusqu'à la chambre parentale. Mary, soutenue par Oliver, observait en pleurant la scène de chaos s'offrant à sa vue désolée : Sa coiffeuse avait été renversée au sol et les tiroirs déversaient ses précieux bijoux sur la belle moquette blanche jonchée de débris et de taches de parfums ; son armoire avait été vidée et ses plus belles tenues, notamment les plus brillantes, avaient été déchirées.

- Que, que ... hoqueta Mary en portant la main à sa gorge secouée de sanglots. Que s'est-il passé ?

Hazel entra dans la chambre et découvrit Norbert, debout sur le grand lit aux draps réduits en lambeaux. Le petit Niffleur s'était construit un confortable nid avec les fourrures et autres foulards en soie de Mary. Allongé sur une étole en renard, il avait passé des bracelets autour de ses pattes et s'amusait à lancer et à rattraper la tiare que Mary portait lors de son mariage.

- Norbert... soupira la jeune fille impuissante.

Mary remarqua la petite créature et poussa un cri de terreur. Elle se jeta sur son mari et se mit à le secouer de toutes ses forces :

- Un rat, il y a un rat dans cette maison ! Oliver, tue-le !

Oliver resta muet, incapable d'esquisser le moindre mouvement ou de prononcer la moindre parole. Il ne tenta même pas d'esquiver les petits coups martelés par son épouse. Hazel souleva Norbert et le réprimanda. Le Niffleur se contenta de lui tirer la langue en tentant de se débattre pour regagner son nid douillet.

- Hazel, tu es complètement folle ! Relâche-moi cet animal, cria une Mary hystérique, tu vas attraper la peste !

Pour la rassurer, Hazel se rapprocha du jeune couple. Mary émit un gémissement terrifié et s'accrocha avec désespoir au bras de son époux.

- Ce n'est pas un rat, c'est un Niffleur, tenta d'expliquer Hazel.

Mary retrouva son calme. Ses yeux s'étirèrent et se mirent à briller d'une lueur menaçante. À cet instant, Hazel lui trouva une fâcheuse ressemblance avec un serpent particulièrement retors. Elle serra le Niffleur contre sa poitrine.

- Que fait cette chose dans ma maison ? s'enquit Mary d'un ton douceâtre, n'annonçant rien de bon.

- Un ami me l'a confié, avoua la jeune sorcière en étreignant l'animal récalcitrant. Norbert ne recommencera plus, je te le promets !

- Ça c'est sûr, répliqua Mary, car il va finir dans les égouts !

Elle tendit les mains vers sa belle-fille pour tenter de lui arracher le pauvre Norbert des mains.


Hazel tenta de résister, mais Mary fut la plus forte. Elle se saisit du Niffleur et le souleva par la peau du dos. Norbert cessa de s'agiter. Mary parut ravie de la peur qu'elle inspirait à la détestable créature. Elle la souleva au niveau de son visage pour mieux l'examiner, eut une grimace de dégoût ... qui se mua en un nouveau cri quand les pattes de Norbert s'emparèrent de sa parure. Doté d'une force considérable, il se mit à tirer sur le collier en or, bien décidé à l'acquérir ! Mary émit une petite série de couinements étouffés, suppliant son époux de venir à son secours. Aidé de Hazel, Oliver parvint à retirer le Niffleur du cou de son épouse et le redonna à Hazel. Suffocante, le cou marqué par de vilaines traces bleuâtres et rougeâtres, Mary dut s'asseoir sur son lit ravagé pour reprendre son souffle.


Hazel en profita pour déguerpir, emportant le Niffleur avec elle. Elle se réfugia dans sa chambre et ferma la porte à double-tour. Norbert essaya de s'échapper à nouveau, mais ne parvint pas à forcer la serrure. Hazel entendit des éclats de voix dans la chambre parentale et replia ses genoux sous son menton. Cette première soirée passée en famille était plus que catastrophique. Norbert se mit à pousser des cris furieux pour manifester son désir de quitter cette prison. N'obtenant aucune réaction de la part de Hazel, il se mit à bouder lui aussi et grimpa sur le lit afin d'occuper l'oreiller moelleux. Hazel tenta de capter le regard de sa chouette, mais Circé lui tournait toujours le dos, peu ravie à la perspective de passer la majeure partie de son temps en cage. Une catastrophe à tout point de vue, songea la jeune fille en mettant son pyjama avant de se glisser dans son lit. La dispute entre les deux époux dura un long moment, accompagnant l'insomnie de la jeune sorcière. Elle parvint néanmoins à trouver le sommeil.


Elle fut réveillée quelques heures plus tard par un coup de griffe assené par Norbert. Elle se redressa et observa la petite créature. Celle-ci lui fit signe qu'elle mourait de soif et qu'elle désirait boire. Hazel repoussa ses draps et emporta le Niffleur dans la salle de bains. Elle le posa sur le rebord du lavabo et ouvrit le robinet. Norbert secoua la tête et tapa sa patte droite contre la brosse à cheveux posée à côté de lui.

- Qu'est-ce que tu veux ? grogna Hazel d'une voix ensommeillée.

Norbert fit de grands gestes, montrant son museau avant de miner la forme d'un biberon. Elle comprit le message :

- Non, Norbert, je n'ai pas de lait à te proposer. Tu devras attendre demain matin et encore, je doute que Mary accepte de nous voir fouiner dans son frigo.


Norbert se mit à cracher, s'empara de la brosse à cheveux et la lança au visage de Hazel. Habituée aux fantaisies du Niffleur, Hazel intercepta le projectile et attrapa son petit hôte exigeant. Elle devait obtenir ce qu'il désirait afin d'avoir la paix. Seren et elle avaient appris à leurs dépens, que les caprices de Norbert devaient être satisfaits au plus vite. Elle déverrouilla la porte de sa chambre et voyant que la chambre parentale était plongée dans le noir, elle descendit l'escalier sur la pointe des pieds. Elle arriva sans encombres à la cuisine et put offrir une bouteille de lait au Niffleur. Il la but d'un trait et manifesta sa satiété par un petit rot jubilatoire. Hazel replaça la bouteille vide à sa place. Norbert accepta sans rechigner de regagner son giron et tous deux quittèrent la pièce, sans drame, ni bruit.


Hazel s'aperçut alors que le salon était allumé. Elle s'approcha et surprit les bribes d'une conversation à travers la porte entrebâillée. Curieuse, elle se colla contre l'interstice et vit son père debout, face à une Mary un brin éméchée, avachie dans un fauteuil. Elle tenait un verre d'alcool rempli à ras bord. La dispute entre les deux époux n'était pas encore terminée. Mary but une longue rasade de whisky.

- Hazel et moi, commença-t-elle d'un ton balbutiant, Hazel et moi, nous aurions pu avoir une relation mère-fille, si elle avait été normale.

Hazel vit son père décrocher un sombre regard à son épouse, celle-ci poursuivit, en portant sa main à son front :

- Je lui aurais proposé de dévaliser tous les rayons de Selfridges et Harrods pendant les vacances, je lui aurais offert un caniche nommé Bijou pour Noël et dans quelques années, elle m'aurait confié ses sentiments pour John - dont les parents posséderaient le plus grand cabinet d'avocats de Londres - et son petit faible pour Mr. Henri, son charmant professeur de français !

Hazel eut une grimace, peu enchantée par cette relation filiale dont rêvait sa belle-mère. Mary se redressa et termina son verre d'un geste empli de colère :

- Au lieu de cela, ta fille apprend des tours de magie, élève une chouette et une espèce de koala destructeur, a un camarade vivant dans un manoir hanté et ne cesse de nous rabâcher les oreilles avec un vieux débris fabriquant des potions !

- Si tu apprenais à la connaître, tu ne pourrais qu'apprécier Hazel. Je ne pouvais rêver de meilleure fille. Elle a tant de qualités !

Le cœur de la jeune sorcière se serra quand elle entendit les mots chevrotants prononcés par son père. Il l'aimait, elle en était certaine, mais elle doutait quand même que cet amour puisse résister aux exigences de son épouse. Norbert commença à s'agiter, Hazel le caressa pour le tranquilliser. Mary esquissa un rictus.

- Tout ça, c'est de ta faute, marmonna-t-elle en se servant un nouveau verre. Hazel me déteste car elle pense que j'ai pris la place de Marianne.

- Morgan, corrigea Oliver.

- De cette grue de Marianne et surtout, de sa très chère mère ! Mary leva son verre et le but cul sec. À la santé de Dahlia Black, la mère soi-disant parfaite !

Hazel vit les poings de son père se contracter sous l'effet d'une rage à peine contenue. Mary pointa un index tremblant vers son époux.

- Tu mens à ta fille depuis des années ! À cause de toi, elle vénère sa mère qui n'était rien qu'une gourgandine, une sale sorcière, un vrai démon !

- Tais-toi !

C'était la première fois que Hazel voyait son père s'énerver. Elle se recroquevilla, regrettant d'assister à cette scène entre deux époux se déchiquetant à belles dents, à coups de noms d'oiseaux et d'accusations jetées à la figure.

- Si Dahlia avait réussi son coup, Hazel ne serait pas là, reprit Mary en hurlant avec force, et nous aurions une vie tranquille, sans avoir à supporter ses bizarreries ! Mais non, il a fallu que cette idiote se fasse tuer par je-ne-sais quel hurluberlu et qu'elle te laisse cette enfant sur les bras. Cette fille qu'elle avait emportée avec elle, quand elle a disparu !


Sonnée, Hazel se laissa glisser au sol avec lenteur. Norbert porta la patte à son visage et lui tapota la joue pour tenter de la consoler. La jeune sorcière sentit sa respiration s'accélérer, elle ne comprenait pas à quoi, Mary faisait référence. Oliver parut lui aussi assommé par le coup porté par son épouse. Il se tut, le visage baissé et les épaules courbées en une posture défensive. Mary s'avança vers lui, triomphante :

- Il serait temps de cesser cette comédie et de tout lui avouer : Dahlia Black t'a abandonné et a tenté d'enlever votre fille. Cette gamine ravagée qui a assisté à l'assassinat de sa propre mère mais qui ne s'en souvient même pas ! Ce n'est pas d'une école de sorcellerie et encore moins d'un maître des potions dont Hazel aurait besoin, mais d'une thérapie !


Ne pouvant en supporter davantage, Hazel se releva et sans se soucier du bruit qu'elle ne manquerait pas de provoquer, courut loin du salon. Elle monta les escaliers en tremblant. Une fois dans sa chambre, elle s'y enferma et se jeta sur son lit. Norbert, assis sur l'oreiller, la contemplait avec perplexité. Hazel pleurait, comme jamais elle n'avait pleuré, le corps secoué de sanglots, ses bras repliés contre son ventre agité de spasmes. Elle en voulait aux deux adultes se livrant à un âpre combat non loin d'elle ; elle en voulait à son père pour ses mensonges, à Mary pour ses propos cruels. Elle ferma les yeux, ses pleurs redoublèrent d'intensité. Norbert sauta du lit et alla ouvrir la cage de Circé. La petite chouette, comprenant la douleur de sa maîtresse, se posa à ses côtés et déposa sa tête contre la joue ruisselante de larmes. Norbert se blottit contre son ventre. La jeune sorcière ferma les yeux, souhaitant à cet instant, se retrouver dans son dortoir, à Poudlard, loin des époux Evans. Elle voulait retrouver la salle commune des Gryffondor, bavarder avec ses amis et échanger les derniers ragots autour d'un bon feu de cheminée. Elle voulait se rendre chez Hagrid avec Seren pour s'occuper de son molosse et même manger des biscuits trop durs ! Elle sourit en se rappelant de tous les bons moments passés à Poudlard et passa une langue assoiffée sur ses lèvres. Elle aurait tant voulu avoir une potion calmante pour s'endormir et oublier cette soirée de cauchemar ! Elle ouvrit les yeux et tourna la tête vers la fenêtre. Ou alors, une potion lui permettant de se rappeler de ce passé dont elle ne parvenait pas à recoudre les lambeaux. Rogue devait probablement en connaître une ou deux, il lui suffirait de demander ... Elle aurait donné n'importe pour se retrouver à ce moment-là dans les cachots humides, suant au-dessus d'un chaudron, houspillée par le maître des potions pour son manque de minutie dans le dosage des ingrédients. Elle se recroquevilla sur elle-même et sa respiration se fit plus ténue. Elle ferma les yeux. Un souvenir fugace jaillit alors dans son esprit. Celui d'une main pâle effleurant sa joue pour en chasser des larmes. Une main dont la peau exhalait une apaisante odeur de noisette ...


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