La Princesse d'Axerik

Chapitre 6 : La légende d'Axerik

2515 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 08/11/2016 08:08

C'est ici que tout a à peu près commencé. Au même endroit où tout a pris fin six mois auparavant.

Au port de Londres.

L'endroit était particulièrement animé. De plus que les bateaux commerciaux et les marchands, les voyageurs étaient nombreux en cette fin de juillet. Pleins de gens qui s'en allaient en vacances, d'autres qui revenaient.

Sauf quatre personnes qui n'étaient ni des marchands ne des vacanciers.

Ils étaient assis, attendant leur embarquement dans le bateau qui allait bientôt quitter l'Angleterre. Luke, regardant la mer bleue qui s'étendait devant lui, repensait à ce fameux jour où il avait dû partir. Il avait fondu en larmes si subitement que même le professeur avait été surpris ; il avait essayé de le consoler en lui disant que ce n'était pas le comportement d'un gentleman, croyant que cet argument aurait suffi pour calmer le pauvre garçon.

Mais à ce moment, Luke ne voulait plus être un gentleman.

Repensant à ces souvenirs, il ne put s'empêcher de sourire. Aujourd'hui, il était dans le même endroit, mais pour un motif tout à fait différent.

Assise à côté de lui, Penelope tapotait nerveusement les doigts sur ses genoux. Soudain, elle leva la tête vers Layton.

« Maintenant que nous n'avons plus rien à faire à part attendre, je peux avoir des explications ? »

Lorsqu'elle était rentrée, Flora lui avait immédiatement annoncé qu'ils avaient un nouveau mystère à résoudre. Elle a demandé ce que cela signifiait, mais ils étaient trop pressés pour lui répondre. En réalité, ils l'attendaient simplement pour partir. Alors à peine eut-elle posé sa question qu'elle remarqua que les trois autres avaient leurs valises en mains, prêts à partir. Flora avait agrippé sa main et l'avait entraînée hors de l'appartement, suivie par le professeur et son apprenti. Bien sûr, elle avait demandé la raison d'une telle hâte, mais Luke s'était contenté de lui dire qu'ils n'avaient pas le temps de traîner et qu'elle saurait bientôt.

Idiot et vilain enfant ! Comme si lui parler tandis qu'ils étaient en voiture allait lui faire perdre du temps ! Le pire, c'était que Layton et Flora n'étaient pas moins cachottiers que lui. Ils semblaient trop occupés à ne rien faire (à part le professeur qui conduisait) pour lui raconter quoi que ce soit.

Mais là, ils n'avaient plus aucune excuse. Ils attendaient simplement leur embarquement, et Penelope refusait catégoriquement de monter dans un bateau sans savoir où il partait.

Layton a souri et a sorti une enveloppe de sa poche qu'il donna à la fille qu'il avait accueillie chez lui quelques jours plus tôt. Celle-ci ne posa pas de questions. Elle l'ouvrit, sortit la lettre et porta ses yeux sur le nom du destinateur.

Elle releva aussitôt la tête et regarda le professeur d'un air interrogateur.

« Clive Dove ?

-Oui. Tu le connais n'est-ce pas ? »

Penelope replongea le regard dans la lettre.

« Un peu. Je sais ce que tout le monde sait à son sujet. La ville souterraine, ce plan ridicule... »

Luke n'apprécia pas le ton avec lequel elle avait parlé. D'accord, Clive avait fait des erreurs, mais tout de même...

« Tu es bien placée pour le dire, rétorqua-t-il, toi qui as mis au point un plan des plus complexes pour le même objectif.

-Ce n'était pas le même objectif, répondit très calmement Penelope en levant à peine les yeux. J'ai fait tout ça pour sauver ma mère, alors que lui voulait simplement se venger. Je n'ai fait de mal à personne ; lui, si. »

Elle leva entièrement la tête et regarda le disciple du professeur avec un léger sourire.

« Et puis moi, ajouta-t-elle, quand même je voudrais me venger, je ne serais pas assez idiote pour punir des gens qui n'ont rien à voir avec l'histoire et laisser les principaux coupables.

-Tout le monde commet des erreurs ! Répliqua Luke, et lui, il n'a jamais eu la chance de sauver ses parents. »

Remarquant la dispute qui allait éclater entre Penelope qui ne savait pas trier ses mots et Luke qui gardait toujours la même sympathie pour Clive même après avoir appris qu'ils n'étaient pas la même personne, le professeur décida de réagir.

« Et si tu nous relisais la lettre, Penelope ? »

Elle acquiesça d'un hochement de tête et lut à voix haute.

« Cher professeur Layton,

Je me demande si vous vous souvenez encore de moi. Cela fait déjà six mois que vous avez réussi à m'empêcher de commettre une affreuse bêtise. Aujourd'hui encore, je pense avoir besoin de votre aide.

Après avoir été attrapé par la police, j'ai dû comparaître devant la justice. Mon crime étant trop important –je refuse de le nier- les jurés ont jugé une simple peine de prison insuffisante pour expier mes actes, et ont exigé une autre punition. C'est ainsi que j'ai été exilé sur une petite île au milieu de nulle part : L'île d'Axerik.

Je ne vous le cache pas, Axerik est un charmant endroit où je me suis très vite adapté. Les habitants d'ici adorent les légendes et les histoires fantastiques, des plus étranges aux plus surnaturelles. Parmi toutes, c'est sans doute la légende concernant la fondation de l'île qui est la plus répandue. Bien sûr, je n'y ai jamais vraiment cru, jusqu'à ce que des événements viennent troubler mon incrédulité.

Je sais que cela peut paraître étrange, mais à présent, je ne sais plus trop si je dois faire confiance à ce que je vois, ou à la logique. Et j'ai vraiment envie de savoir comment vous allez résoudre un tel mystère.

Je joins à cette lettre une copie de cette légende dont je vous ai parlé et que j'ai moi-même traduit. Vous comprendrez mieux lorsque vous l'aurez lu.

Je suis certain que vous allez résoudre ce problème.

Avec mon plus profond respect,

Clive Dove. »

Penelope regarda dans l'enveloppe. Il y avait en effet une autre feuille de papier. Elle regarda le professeur qui lui fit signe de la voir. Alors, tout en se saisissant de cette feuille, Penelope demanda :

« Et nous allons à cette île, c'est ça ?

-Axerik n'est qu'une petite île peu fréquentée et les bateaux qui s'y rendent sont assez rares. C'est pour cette raison que nous étions si pressés tout à l'heure. Si nous avions raté le bateau d'aujourd'hui, il nous aurait fallu des mois pour en trouver un autre. »

Penelope hocha la tête, comprenant mieux leur attitude. Elle tenait entre les mains la légende dont avait parlé Clive, et se demandait quel genre de mystères elle renfermait. À voix haute, elle entama sa lecture.

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La princesse d'Axerik entra dans une pièce sombre et remplie de poussière. Seul un faisceau de lumière provenant d'une minuscule fenêtre éclairait l'endroit. La pièce était remplie d'étagères ; c'était une bibliothèque.

Depuis longtemps, plus personne ne s'aventurait dans cet endroit sale et humide. Personne, à part elle.

Elle avança directement vers l'une des étagères. Et, d'un mouvement mécanique –tel un robot qu'on a programmé- s'empara d'un livre sans même le regarder et l'ouvrit sur la bonne page du premier coup.

En haut de la page étaient inscrites à la main, et d'une écriture décorée un peu plus qu'il ne fallait, des caractères d'une langue qu'elle ne comprenait pas. Pourtant, elle savait exactement ce qui était écrit.

« La légende d'Axerik », murmura-t-elle en fixant la page.

N'importe qui ayant vu l'état de la bibliothèque et celui du livre aurait pensé qu'il s'agissait d'une légende secrète que seuls les membres de la famille royale pouvaient connaître. Or, c'était absolument faux. S'il y a bien quelque chose que tout le monde connaît dans cette île, c'est bien cette légende.

Le reste de la page était écrit dans la même langue. Mais la princesse n'avait pas besoin de lire, elle connaissait déjà par cœur cette légende. Pourtant, elle ne détacha pas le regard des caractères gravés sur la page tandis qu'elle récitait ce qui était écrit en anglais.

« Il y a très longtemps, environ cinq mille ans, un savant possédant des pouvoirs surnaturels est arrivé aux terres d'une île isolée. Amateur de solitude et de paix, il s'y est installé. Et après de longues années de recherches, il a pu percer le mystère de la pierre philosophale, cette substance mythique qui aurait non seulement le pouvoir de prolonger la vie, mais aussi de transformer les plus vils métaux en or.

Mais Axerik (tel était son nom) n'avait jamais cherché la richesse, c'est pour cette raison qu'il n'a utilisé cette pierre que pour prolonger sa vie afin de continuer ses recherches dans cette île où il s'était réfugié... »

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« ...dans cette île où il s'était réfugié... »

Penelope était arrivée à cette partie lorsqu'elle fut interrompue par une voix leur annonçant que les voyageurs à destination de l'île d'Axerik étaient priés de monter à bord du bateau. Elle dut alors arrêter de lire et se lever avec les autres.

Luke, Layton et Flora avaient déjà lu le document, et pourtant ils étaient impatients de réécouter la suite. Il fallait avouer que cette histoire semblait tomber droit d'un conte de fées.

Plus tard, lorsqu'ils furent installés dans le navire qui n'avait toujours pas quitté le port, Penelope reprit cette feuille et termina sa lecture.

« Mais tout ne c'est pas arrêté ici. Un jour, l'île fut découverte par des aventuriers et peu à peu, des gens vinrent y habitait. Ces gens ont été très surpris par les pouvoirs d'Axerik et très vite, il devint le chef de ces lieux. Le savant a alors compris qu'il ne pourrait pas vivre en paix comme il l'avait souhaité. C'est pour cette raison qu'il a arrêté d'utiliser cette pierre pour prolonger sa vie ; il l'a cachée quelque part dans l'île et s'est lui-même éclipsé. On ne l'a plus jamais revu.

Les habitants qui avaient une très grande admiration pour lui décidèrent alors de donner son nom à leur île. Ils ont fini par comprendre qu'Axerik était mort et qu'il ne reviendrait jamais.

Cependant, un jour, on a découvert dans une vieille grotte des livres que ce savant avait écrits avant sa mort. Il disait dans ces derniers qu'il avait caché sa plus grande découverte, la pierre philosophale, quelque part dans l'île. Qu'un jour, celle-ci allait réapparaître sous une forme très spéciale. Et que celui qui réussirait à percer son mystère pourrait l'obtenir.

Un jour, une jeune fille va se présenter. Elle aura une voix harmonieuse avec le son des vagues et des cheveux flamboyants de la même couleur que la pierre philosophale. Cette fille sera la porteuse du pouvoir d'Axerik, et il suffira de répondre à une seule question qu'elle posera pour obtenir ce pouvoir. »

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La princesse d'Axerik ferma le livre et regarda longtemps sa couverture. Ses genoux craquèrent et elle tomba par terre.

« Comment me suis-je retrouvée ici ? », murmura-t-elle d'une voix à peine audible.

Puis ses larmes l'emportèrent et l'image du bateau avançant vers les terres de son île lui revint à l'esprit. Elle était la seule à savoir, et ce n'était guère un privilège.

Elle se rappela de ce qu'on lui avait dit, ou plutôt de ce qu'on lui avait ordonné. Elle se rappela de toutes ses choses insensées qu'on lui avait apprises, et auxquelles elle avait bêtement refusé de croire. Elle se rappela de son rôle dans cette histoire, un rôle qu'elle n'avait pas le droit de modifier.

Et elle ne put penser à autre chose. Il avait tout prévu. Et c'était en train d'arriver.

 

 

 

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