La Princesse d'Axerik

Chapitre 27 : Les explications de Luke.

5707 mots, Catégorie: K+

Dernière mise à jour 10/11/2016 09:56

Jean Descole. Éminent scientifique. Archéologue passionné. Génie dans la fabrication de Machines incroyables. Maître dans l’art du déguisement. Assassin.

Personne ne savait comment fonctionnait la conscience de cet homme. Tantôt si mauvais qu’il peut tuer son propre frère. Tantôt si bon qu’il pourrait se sacrifier pour sauver un petit garçon qu’il connaît à peine.

Cet homme qui avait sacrifié son bonheur pour préserver celui de son frère, et qui était venu, plusieurs années plus tard, le tuer de ses propres mains !

Pour Luke, la question ne se posait même pas. Bon ou mauvais, il avait tué le professeur. Et cette simple action suffisait pour transformer n’importe qui en ennemi pour le jeune apprenti.

« Vous… ai-je raison ? » Demanda-t-il tout en tremblant. Pas de peur, mais de colère.

Jean Descole esquissa un petit sourire.

« Est-ce le moment pour moi de succomber et de tout avouer ?

-Est-ce que j’ai raison ? » Répéta Luke en criant presque.

Descole se contenta de continuer de sourire. Luke se sentait oppressé par cette sensation. Descole avait été attrappé, désigné comme coupable. Pourtant c’était lui qui souriait, et son accusateur qui était énervé et inquiet.

Ce n’était pas censé être le contraire ?

« Je sais que c’est vous, inutile de me le confirmer », dit-il simplement pour faire comprendre à Descole qu’il n’avait pas besoin de lui.

« Eh bien, vas-y, j’ai plus que hâte d’écouter tes explications », lui répondit Descole avec un air méprisant.

 

Derrière lui, Penelope, Flora et Emmy se tenaient debout. Penelope observait cet inconnu qui venait d’apparaître de nulle part. Elle ne le connaissait pas, ne comprenait pas en quoi il était mêlé à l’affaire, et surtout, ne trouvait pas de réponse aux premières questions qui commençaient à se poser dans sa tête…

Mais si c’est lui, Axerik, alors c’est lui qui m’a attaquée… alors…

« Lopy », l’appela doucement Flora. Elle se retourna vers elle.

« Lopy, as-tu peur ? »

Les yeux de Penelope s’écarquillèrent alors qu’ils fixaient Flora d’un air surpris.

« Pourquoi devrais-je avoir peur ? »

Flora tourna le regard vers Luke qui s’entretenait encore avec cet homme si étrange. Luke n’avait pas encore commencé ces explications, mais il n’allait surement pas tarder à le faire.

« Je ne sais pas », répondit Flora très doucement. « Mais je sens que tu as peur. 

-Ne dis pas de bêtises », la détrompa Lopy, toujours la regardant. « Je n’ai aucune raison d’avoir peur. Et même si j’en ai une, toi et Luke auriez la même : ce que nous avons vécu dans cette île ces derniers jours. »

Mais Flora secoua la tête.

« Non. Si tu avais juste peur comme moi ou Luke, je n’aurais rien remarqué. »

Elle ne dit plus rien. Et Penelope ne lui répondit pas. Peur. Avait-elle peur ? Non… bien sûr que non. Ce sentiment, ce n’était pas de la peur. C’était juste… peut-être que c’était bien de la peur.

Une brève image revint à son esprit. Celle d’une fille. Pas n’importe quelle fille. C’était elle-même. Elle tenait une arme à feu, la tendant droit devant elle. Et puis ensuite… ce qui s’est passé juste après…

 

« D’accord, je vais tout vous expliquer ! » Déclara Luke d’une voix si forte qu’elle la réveilla immédiatement de ses pensées.

« Oh, tiens donc ! » S’exclama Descole d’une voix ironique. « On dirait que je suis vraiment en danger. »

Ignorant sa dernière réplique, Luke révisa mentalement l’explication qu’il allait donner. Son séjour sur l’île lui avait appris qu’à force d’essayer de se défendre, on se fait encore plus attaquer. Autant attaquer aussi.

Il paraît que l’attaque est la meilleure défense. Et s’il essayait ?

« Voici l’indice le plus grand et le plus important de cette histoire », dit Luke alors qu’il montrait au coupable la feuille qu’il tenait entre ses mains.

C’était la page du journal intime. Celle qui parlait des Aslantes.

« Lorsque les Aslantes se mêlent de l’histoire, ce n’est jamais bon signe », lut Luke à voix haute. « En voyant cette phrase pour la première fois, j’étais au bord de la dépression. J’ai vraiment cru que l’histoire allait se compliquer encore plus qu’elle ne l’était déjà. »

Il regarda la feuille et remercia intérieurement Emmy de la lui avoir donnée au bon moment.

« Sauf que non. Cette phrase est la clé de cette affaire. La dernière pièce qui manquait au puzzle. »

Les Aslantes. Luke croyait, tout comme Layton et Emmy que cette civilisation n’allait plus jamais croiser leur chemin après la destruction du sanctuaire et la disparition de Gaïa. Mais non.

« Les Aslantes sont une ancienne civilisation éteinte depuis très longtemps. Ils avaient une technologie très évoluée. Il y a presque deux ans, moi, le professeur, et Emmy ici présente avions vécu une aventure au bout de laquelle l’héritage de cette population a été enterré à jamais. Descole aussi, avait participé à cette aventure. »

Luke redirigea le regard vers ledit Descole.

« Mais bien sûr, vous n’étiez pas satisfait par le dénouement qu’a connu cette aventure, n’est-ce pas ? »

Descole ne dit rien, et Luke décida de s’expliquer.

« Vous avez consacré votre vie à l’étude de la civilisation aslante. D’accord, c’était surtout pour vous venger de Target, mais franchement, je ne pense pas que ç’a été facile pour vous d’abandonner du jour au lendemain ce peuple auquel vous avez consacré votre vie. Je me trompe ? »

Flora et Penelope qui ne connaissaient pas très bien l’histoire des Aslantes et de Descole, essayaient de comprendre avec les explications de Luke. La Princesse restait silencieuse. Et personne, personne, n’aurait pu traduire ses pensées en cet instant même.

« Je vais vous dire ce que vous avez fait ! » Déclara fièrement Luke. « Lorsque le professeur a refusé de garder l’héritage des Aslantes, vous n’avez pas apprécié sa décision, et vous avez continué à faire des recherches, et vous avez véritablement récupéré cet héritage ! »

Luke savait que si la surprise ne se dessinait pas clairement sur le visage des autres, c’était parce que la seule personne qui comprenait complètement, Emmy, savait déjà tout ce qu’il disait.

« Descole, vous possédez désormais l’énorme technologie du peuple aslante, n’est-ce pas ? »

Descole croisa les bras.

« Peut-être. »

Ignorant sa dernière réponse, Luke enchaîna.

« Mais il semblerait que le professeur l’a découvert. L’héritage des Aslantes entre les mains d’une personne aussi dangereuse que vous… j’imagine que le professeur devait vous arrêter. 

-Et c’est pour cela que j’ai décidé de le tuer ? »

Luke ravala sa salive.

« Oui. »

Gardant le silence pendant un moment, il avait espéré que Descole proteste, ou dise quelque chose. C’était simple, il en avait assez de parler. Il en avait assez de donner des explications alors qu’il savait que personne ne comprenait. Pourtant, il devait le faire. Pourquoi ? Pas pour venger la mort du professeur. Si c’était ça, son objectif, alors il aurait directement demandé à Emmy de l’aider à tuer cet homme. Oui, il savait qu’il n’y arriverait jamais, mais ça aurait au moins apaisé la colère qu’il essayait de réprimer en cet instant même.

Non. S’il continuait à expliquer, c’était pour une autre raison.

Il y avait une personne dans cette pièce qui avait besoin de ses explications. Une personne qui était prisonnière du pouvoir d’Axerik, et qui avait besoin d’être libérée.

Vous n’aurez plus à être la Princesse d’Axerik, Janice. Il allait combattre sa peur et sa colère pour lui ouvrir les yeux et la sauver.

« Eh bien, j’espère que ce n’est pas ça, tes explications », dit finalement Descole en relâchant les bras. « Je crois que Layton a oublié de t’apprendre la différence entre « explication » et « hypothèse ». Dommage. »

Luke serra les deux poings. Surtout, ne pas trahir sa colère.

« Bien sûr que non ! Laissez-moi terminer. »

Un simple sourire méprisant. Luke l’ignora et termina.

« Pour tuer le professeur, vous ne pouviez pas simplement vous introduire chez lui ou dans son travail et mettre fin à ses jours. Vous avez décidé de mettre en plan toute une mise en scène pour réaliser votre objectif. Et vous avez trouvé l’idée idéale pour vous. Une île au milieu de nulle part, où la police n’est pas du tout active et où il n’y a pas de presse. Et mieux encore, il y a dans cette île une légende très populaire sur son fondateur. Vous avez décidé d’en profiter. »

Utiliser de vieilles légendes populaires ou oubliées pour réaliser ses propres fins, cela ressemblait tant à Descole.

«Prenant le nom de Clive qui était exilé sur les lieux, vous avez envoyé une lettre au professeur parlant du mystère d’Axerik, et ensuite, il ne vous restait plus qu’à trouver votre envoyée. »

Luke tourna lentement le regard vers la Princesse. Enfin, ils arrivaient à elle.

« Et là, une question se pose : pourquoi Janice ? C’est vrai qu’elle répond parfaitement aux descriptions données dans la légende, mais comme l’avait fait remarquer le professeur, ce sont des descriptions assez vagues, et plusieurs jeunes filles auraient pu y correspondre. Alors pourquoi avez-vous pris Janice ? Est-ce juste un hasard que vous ayez choisi une ancienne élève du professeur ayant vécu une aventure à laquelle vous êtes mêlé ? »

Luke secoua la tête, répondant à sa propre question.

« Bien sûr que non. »

Pour l’instant, seuls Luke et Descole parlaient. Encore, le deuxième ne disait pas grand-chose. Cependant, il écoutait avec un étrange intérêt les dires du jeune garçon.

« Choisir Janice lui donnait beaucoup plus de crédibilité », déclara instinctivement Penelope, même si elle n’avait pas vraiment envie de parler.

« Comment ça ? » Lui demanda Flora.

« C’est simple. Il fallait quelque chose pour convaincre tout le monde que cette fille est vraiment l’envoyée de quelqu’un qui possède des pouvoirs suprêmes. Clive avait parlé de miracles, mais nous n’avons jamais rien vu. Si ça se trouve, ces miracles n’étaient que des petits tours de passe-passe. « Axerik » a probablement utilisé une technologie assez moderne pour duper les habitants de l’île qui ne sont pas très touchés par l’avancée technologique. Ils l’ont cru. Mais il savait que nous n’allions pas être dupés aussi facilement. C’est pour ça que nous n’avons jamais vu ces miracles. »

Flora fronça les sourcils.

« Mais en quoi le choix de Janice lui donnerait de la crédibilité ? 

-Luke et le professeur connaissent Janice. S’il la voit obéir à quelqu’un et aller jusqu’à laisser le professeur mourir alors qu’elle connaissait son sort, alors Luke conclurait immédiatement qu’il y a vraiment une force suprême qui la contrôle. D’ailleurs, c’est après notre rencontre avec la Princesse que vous avez commencé à croire en l’existence d’Axerik. »

Et Penelope savait très bien que personne n’allait interpréter le « vous » comme il le fallait. Elle n’avait jamais cru en l’existence d’Axerik. Et pour cause…

« C’est vrai que si ç’avait été quelqu’un d’autre », dit Flora d’un air pensif. « Nous n’aurions jamais accepté de croire que le véritable assassin est un personnage mythique aux pouvoirs surnaturels. »

Luke leur donnait le dos. Il était bien content qu’elles commencent à comprendre.

« Ce n’est pas la seule raison, vous savez », dit-il en se retournant.

« Qu’y a-t-il d’autre ? » S’étonna Flora.

 « S’il a choisi Janice, c’est d’abord car il savait parfaitement comment la contrôler. »

Il jeta un regard vers la Princesse qui semblait sombrer dans la confusion.

« Ce qu’à dit Penelope nous amène à réfléchir. Ici, on n’a pas affaire à quelqu’un qui possède des pouvoirs ou quoi que ce soit. Et pourtant, il a pu forcer Janice à lui obéir. Comment est-ce qu’il a fait ? »

Face au silence qui suivit cette question, Luke dirigea le regard vers une certaine personne.

« Peut-être qu’il a simplement utilisé la « chose que le professeur a vue et que nous n’avons pas vue », n’est-ce pas, Virginia ? »

La demoiselle de compagnie s’écarta doucement de Fiona et le regarda avec une expression interrogatrice sur le visage.

« Virginia, la « chose » en question, c’est vous, n’est-ce pas ? »

Lâchant un « ah ! » elle porta sa main instinctivement à son cou.

« Mais nous avons vu Virginia », lui fit remarquer Flora. « Nous l’avons tous vue ! »

Et là, Luke sourit. Oui, ils l’avaient tous vue…

« Et c’est justement ça le problème. 

-Je ne comprends pas », balbutia Flora. « Nous sommes passés à côté de quelque chose ?

-Exactement. »

Luke redirigea le regard vers Virginia. Virginia, la demoiselle de compagnie de la Princesse. Personne ne savait que, depuis le début, cette fille était l’outil qu’Axerik utilisait pour contrôler Janice.

« Le problème », dit Luke à la fois à Virginia et aux autres. « C’est que nous n’avons vu en vous qu’une demoiselle de compagnie. Nous n’avons pas vu qui vous étiez vraiment. »

Voir et savoir sont deux choses différentes. Enfin, Luke comprenait pourquoi.

« Moi aussi, Virginia, je vous voyais ainsi. Mais je viens enfin de me rendre compte de qui vous étiez vraiment. Moi aussi, je vous ai vue comme le professeur, mais j’ai oublié. C’était il y a des années, j’étais encore un enfant, et je n’ai vu votre photo que pendant quelques secondes. Le professeur n’a pas oublié. »

Il reprit son souffle.

« L’histoire de Penelope avec Claire m’a ouvert les yeux sur une chose. Penelope connaît sa mère, pourtant elle ne l’a jamais vue en direct. Moi aussi, je vous connais, mais je ne vous ai jamais vue en direct. Et la seule fois où je vous ai vue… »

Il ferma les yeux, se remémorant ce souvenir. D’une voix très claire, il répéta les mots qui résonnaient en son esprit.

« Je dédie cet opéra à la mémoire de ma fille Mélina. »

Flora sursauta, et Virginia évita le regard confus de Fiona qui se posait sur elle.

« Nous avons vécu toute une aventure avec vous, mais personne ne savait à quoi vous ressembliez. Vous étiez dans le corps de Janice, après tout. Si bien qu’en vous voyant ici, je ne vous ai pas reconnue, pas comme j’ai reconnu Janice. J’ai vu en vous Virginia, la demoiselle de compagnie, et non pas Mélina Whistler.»

Virginia ne dit rien, mais Luke savait exactement par quoi enchaîner.

« Et maintenant, reprenons le journal du professeur. Le professeur se posait deux questions avant d’entrer voir la Princesse. Une de ces questions commençait par « pourquoi ». Quelle est cette question ?

-Avec l’article de journal parlant de la disparition de Janice, j’imagine qu’il s’attendait à la voir tenir le rôle de la Princesse », expliqua Penelope. « Alors il devait se demander pourquoi Janice obéit à Axerik. »

Luke hocha la tête.

« Pourtant, quand il a vu Fiona, cette question s’est évaporée et il lui a dit qu’il avait tout compris. Alors que s’est-il passé, entre-temps ? »

Flora se rappela de la scène dont elle avait été témoin. 

« Virginia est entrée dans la salle juste avant que le professeur ne dise qu’il a tout compris ! 

-Parfaitement », déclara Luke. « Mais contrairement à moi, le professeur reconnut immédiatement Mélina. Il savait déjà pour les Aslantes, pour Janice, il ne lui manquait plus que ce maillon pour tout comprendre. »

Le professeur était entré dans la chambre de Mélina, une fois, et il avait vu sa photo avec Janice. L’ayant vue deux fois, il se rappelait plus aisément d’elle.

Et à ce stade-là, Luke ne pensa pas trop à la seconde question que se posait le professeur. Il n’en avait pas besoin dans son explication, et avait donc choisi de passer dessus. Une erreur qu’il n’allait pas tarder à regretter…

En attendant, il y avait encore des explications à fournir.

« Mais Luke », dit soudain Flora. « Je croyais que Mélina était morte. 

-Mélina est morte », assura Luke. « Et cette jeune fille ici présente n’est pas Mélina, naturellement. »

Penelope le regarda d’un air perplexe.

« Qu’est-ce que tu racontes ?

-Ton père adoptif pouvait fabriquer des robots très performants au point de ressembler à de parfaits humains, et il n’était qu’un ingénieur dans un petit village », lui expliqua Luke. « Alors penses-tu vraiment que quelqu’un possédant la technologie aslantes ait du mal à faire pareil ? »

Les yeux de Janice s’écarquillèrent face à cette déclaration.

« Que… qu’est-ce que ça veut dire ? »

Luke la regarda. Il savait que ce qu’il allait dire la blesserait, il savait qu’elle se sentirait très mal, mais c’était mieux que de la laisser sombrer dans l’ignorance à jamais.

« Janice, cet homme est venu vers vous et vous a dit qu’il avait des pouvoirs surnaturels et, pour vous le prouver, vous a rendu votre amie décédée à la vie. Ensuite, il l’a utilisée pour vous contrôler et vous obliger à jouer le rôle de la Princesse, vous menaçant de vous l’enlever à nouveau si vous refusez. Voulant la protéger vous avez accepté de vous soumettre à lui. Il a réussi à vous duper avec cette légende et vous avez vraiment cru que vous étiez l’envoyée d’Axerik. Vous saviez ce qu’il allait faire, et vous vous retrouviez dans un énorme dilemme. Laisser mourir le professeur, ou laisser mourir votre meilleure amie. Vous vous sentiez coupable et vous ne pouviez rien faire. »

Janice commençait à sentir ses larmes lui piquer les yeux. Elle voulait devenir sourde. Elle ne voulait pas entendre ce qu’il allait dire.

« Mais ce que vous ignoriez, c’est qu’en lui obéissant, en acceptant de jouer un rôle qui a conduit le professeur à la mort, en menaçant nos propres vies, en fait, vous ne protégiez rien d’autre qu’une simple copie, un robot. Mélina, la vraie, est morte il y a bien longtemps. »

Janice secoua la tête. Ses larmes s’envolant en l’air avec son mouvement.

« Non ! Non, ce n’est pas vrai ! Méli… Virginia est juste ma demoiselle de compagnie… Non ! Mélina n’est pas morte ! Je n’ai pas laissé le professeur mourir ! Je n’avais pas le choix ! »

Elle balbutiait n’importe quoi, se contredisant dans la même phrase. Luke la regarda tristement. Janice… elle avait souffert, énormément souffert… et même pour arrêter ses souffrances, il fallait la faire souffrir.

« Janice, vous avez été la Princesse d’Axerik, le centre de cette histoire. Vous avez fait un choix, et vous n’êtes pas fautive. Vous n’êtes qu’une victime parmi tant d’autres… »

Elle serra les poings et hurla d’une voix étouffée de sanglots.

« Ça m’est égal ! Oui, je suis une personne horrible, j’ai causé la mort du professeur, je vous ai fait souffrir, j’ai fait souffrir tout le monde, j’ai aidé quelqu’un de cruel pour ses plans cruels… »

Elle porta ses deux mains contre son cœur.

« Mais, pitié, ne me dites pas que cela n’a servi à rien. Mélina est en vie, regardez, elle est juste là ! »

Elle se retourna vers la jeune fille qui, jusque-là, avait été sa demoiselle de compagnie.

« Mélina, Mélina… dit leur que tu existes vraiment ! Dit leur que tu n’es pas un robot ! »

Mélina garda un regard calme, alors qu’elle posait ses deux mains sur les épaules de Janice.

« Princesse, avez-vous oublié ? Vous n’avez pas le droit de m’appeler comme ça. Même quand nous sommes seules, quelqu’un pourrait nous entendre. »

Janice secoua la tête. Elle se sentait si perdue. Elle voulait qu’à l’instant, elle se réveille dans sa chambre, découvrant que tout ceci n’est qu’un terrible cauchemar.

« Mais ils le savent désormais », dit-elle en essayant de sourire à son amie. « Alors vas-y, dis leur que tu es bel et bien Mélina. Dit leur… dis leur que je n’ai pas sacrifié la vie du professeur pour rien… s’il te plaît… »

Elle baissa la tête, laissant ses larmes s’écraser sur le sol de la salle.

« Dit leur… »

Mais Mélina se contenta de relever la Princesse.

« Vous allez mal, vous devriez vous reposer, Princesse. 

-Mélina…

-Princesse, je vous avais dit que vous deviez m’appeler Virginia.

-Mélina…

-Princesse… »

Janice regarda son amie, le regard tremblant. Elle était si froide, elle était si… irréelle.

« C’est normal qu’elle réponde ainsi », lui expliqua Descole. « C’est ainsi que je l’ai programmée. »

Ses mots furent le coup de grâce pour Janice. Ses genoux craquèrent et elle tomba. Le robot s’accroupit pour l’aider à se relever, mais Janice l’ignora. Elle regardait le sol d’un air vide.

J’ai causé la mort du professeur… pour rien… J’ai fait tout ça… pour rien…

Et elle ne put penser à rien d’autre. Ce sentiment de culpabilité qui la consumait depuis le début… et qui, désormais, venait d’être un milliard de fois plus douloureux. Autrefois, elle se consolait en disant qu’au moins, elle sauvait quelqu’un. Là, elle n’avait plus rien. Elle avait tout perdu.

Pourquoi avait-elle fait ça ? Pourquoi avait-elle été si facilement dupée ? Pourquoi ne voulait-elle pas accepter la mort de son amie ? Pourquoi avait-elle accepté d’aider un homme aussi cruel ? Pourquoi ? Pourquoi ? Pourquoi ?

« Pourquoi ? »

Et elle se laissa complètement abattre.

 

Les autres la regardèrent en silence. Janice. Fiona. La Princesse d’Axerik. À la fois coupable et victime.

« Nous avons tous souffert à cause de cette île », murmura Luke. « Mais personne n’a souffert autant que la Princesse d’Axerik elle-même. »

Et alors, il leva le regard vers Descole qui restait debout à sa place. Ils avaient tous souffert, et c’était sa faute.

« Tout ça à cause de vous ! Vous avez manipulé Janice, kidnappé Clive, et tué le professeur. Puis vous avez réussi à nous faire croire que ce dernier est mort parce qu’il a tout découvert, et ce pour qu’on ait peur et qu’on ne cherche pas à comprendre. Ainsi, on ne risquait pas de découvrir votre secret ! Vous avez utilisé la légende comme couverture pour faire toutes les cruautés que vous désiriez ! »

L’homme masqué ne dit rien. Il regarda longuement le disciple de Layton avant de commencer à rire. Un rire machiavélique et cruel. Le rire que le plus sadique des assassins peut avoir.

« Alors, la prestation est finie ?

-Je crois avoir tout expliqué », répondit prudemment Luke.

Descole se mit à rire à nouveau.

« Très bien. Je t’ai laissé parler. Désormais, c’est mon tour. »

Luke plissa les yeux. Que voulait-il dire par là ?

« Ne t’es-tu donc pas demandé pourquoi je t’ai laissé librement m’attaquer durant tout ce temps ? Alors que j’aurais pu t’arrêter à n’importe quel moment ? »

Luke resta silencieux. Il ne s’était pas posé la question.

« Luke Triton, tu n’es qu’un amateur.

-Pourquoi ? »

Descole arrêta de rire, mais un sourire effrayant restait accroché sur son visage. À cet instant, Luke comprit que la partie n’était pas terminée.

C’était bête, de croire que tout se passerait sans embûche. C’est de Descole qu’il s’agit. Ce n’est pas un enfant comme Luke qui allait le vaincre aussi facilement.

Et à nouveau, il ressentait la peur faire surface. Il avait raison, Emmy l’avait confirmé, alors qu’allait lui sortir Descole pour sa défense ?

Regardant Janice agenouillée par terre, les larmes aux yeux, et Descole avec cette expression de parfaite anticipation, Luke regretta, mais un peu tard, de ne pas être simplement retourné à Londres sans rien révéler.

Mais il ne pouvait plus reculer désormais.

De loin, Penelope l’observait avec un tremblement dans les yeux qu’elle ne put cacher. Lopy, as-tu peur ? Oui, elle avait peur désormais. Elle avait peur, très peur. Elle voulait que tout s’arrête là.

Mais dans cette histoire, ce n’était pas elle qui décidait, ni Luke. C’était cet homme masqué qui était debout devant eux. Qui les avait contrôlés depuis le début, et qui les contrôlait encore.

 

Voilà, nous arrivons enfin à la partie tant attendue.

Je t’ai écouté jusqu’à la fin. Et tu as exactement fait l’erreur à laquelle je m’attendais. Maintenant, il ne me reste plus qu’une simple chose à faire. Te montrer ta stupidité.

J’ai tout prévu, et c’est en train d’arriver.

 

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