A Galaxy Railways Story : Reiko

Chapitre 25 : SSX - partie 2

6164 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 03/11/2023 21:06

Chap 25 : SSX partie 2


- Et si on réglait nos comptes ?


Une aura ténébreuse enveloppa le sniper.

Décidément, la famille de Reiko était bien pénible.

Si ce n'était pas son père ou son frère, c’était Warrius Zero. 

À croire qu’ils se passaient tous le mot pour lui pourrir la vie.


- Vous voulez régler quoi ? Je vous ai ramené votre précieux poussin, ça ne suffit pas pour vous prouver que je ne suis pas le roi des connards ?

- Non, en effet ça ne suffit pas.

- Si on en vient aux mains, pas besoin d’être devin pour savoir que ça ne lui plaira pas.


Harlock eut un rire sardonique.


- En quelque sorte. Je te propose qu’on tranche au bras de fer. Tu gagnes, je te donne la permission de la fréquenter. Tu échoues, tu lui fiches la paix. Vu ?

- Sauf votre respect, je me fous royalement de votre bénédiction.

- Peut-être bien que t’as peur de perdre ?

- Contre vous, vieil homme ? Aucune chance.

- Dans ce cas…, dit-il en lui désignant une chaise toute proche.


Bruce s’assit à contrecœur, peu enthousiaste à l’idée de rentrer dans le jeu du pirate.

“En plus je ferai ce que je veux quel que soit le résultat. C’est quoi cette idée débile ?”


- Tu vas voir si je suis un “vieil homme”..., grommela-t-il.

- Si je remporte la mise, je l’épouse et vous n’aurez rien à y redire. C’est clair ?

- Tu manques pas d’air, toi.

- Peut-être bien que vous avez peur de perdre, railla-t-il.

- Accordé. Pour peu qu’elle ne refuse pas ta demande.

- Ne faites pas l’erreur de me sous-estimer.


Militaire et hors-la-loi se mirent en position, suscitant l’intérêt de la foule qui s’agglutina autour d’eux.


- Prêt ?, questionna Harlock.

- C’est à vous de me dire.


Le duel commença avec férocité. Tels des arbres profondément enracinés dans le sol, les deux concurrents ne bougeaient pas d’un iota, testant la force de l’autre. 

Reiko, qui avait entre-temps récupéré ses gobelets au bar, se fraya un chemin au cœur de l’attroupement.


- Qu’est-ce que vous faites ? Otto-san !

- Ne te mêle pas de ça, déclara le concerné. C’est entre lui et moi.

- Ça, j'en doute. Il y a un enjeu derrière chacun de tes combats. Pour quelle raison vous affrontez-vous ?, gronda-t-elle, certaine de ne pas apprécier leurs arguments quels qu’ils soient.


L’absence de réponse fut suffisamment éloquente pour confirmer à Reiko qu’il y avait anguille sous roche.


- Vous êtes fatigants. Pire que des gamins.

- Pas si rouillé le vieux, n’est-ce pas ?

- Parlez pas trop vite.

- Aniki !, protesta Reiko en avisant Tadashi qui lorgnait la scène avec amusement. Tu sais ce qu’il se passe ?

- J’y suis pour rien cette fois.


Le poignet du soldat pliait sous la pression exercée par le pirate et il le redressa avec peine.


- Tu soutiens qui ?, l’interrogea Tadashi.


Harlock et Bruce se retournèrent simultanément alors qu’elle levait les yeux au ciel.


- Ce sont des imbéciles finis. Je vais pas soutenir la bêtise. Vous n’avez rien de mieux à faire, vous autres ?, s’écria-t-elle, exaspérée, à l’assemblée.

- Vas-y Bruce, défonce-le. C’est l’honneur de la Space Defence Force qui est en jeu. Prouve lui qu’on n’est pas des rigolos !

- Tu veux ma place, David ?

- Ah ! Déjà pressé d’abandonner “la gâchette facile” ?

- Même pas en rêve, vieux bandit.

- On prend les paris ? Cent cinquante éblus sur mon champion, suggéra l’ingénieur en ébouriffant les cheveux blonds de son ami.

- Je relance de quatre-vingt-dix sur notre Captain, intervint Yattaran.

- Je mise tout sur notre Otto-san national, approuva Tadashi.

- Trente-cinq sur blondinet !

- Soixante-quinze pour Harlock ! 


Chahutée par un public en liesse, Reiko prit ses distances en se renfrognant.

Louise et Manabu se tenaient eux aussi en retrait de la cohue générale.


- Ils sont incorrigibles. Et je suis persuadée que c’est mon père adoptif qui est à l’origine de ce défi stupide.

- Il vaut mieux que tu les ignores, renchérit le jeune homme. On va profiter de la plage ?

- Tant qu’à faire !, abonda l’Officière radar. 

- Tu peux te baigner avec ton auto-mail ?

- Ouais mais c’est pas pour autant que je vais le faire.


Bruce, qui avait suivi du coin de l'œil la fuite de sa petite-amie et de ses équipiers, eut un rictus sardonique.


- Dommage, elle ne vous verra pas vous rétamer.

- Ne vends pas la peau de l’ours avant de l’avoir tué.


Harlock entérina ses dires en lançant ses dernières forces dans la bataille. Et, si Bruce sembla reprendre le dessus quelques instants, son bras ne tarda pas à être aplati par la poigne de son adversaire.

Des hurlements de joie retentirent parmi les rebelles tandis que David se liquéfiait sur place.

Le sniper se rembrunit et retira sa main comme s’il s’était brûlé.


- J’espère que tu tiendras parole.

- Vous pouvez vous la carrer au…

- Et si on faisait la revanche ?


Le Commandant Bulge fendit la foule, dans laquelle il dépassait chacun d’une bonne tête.


- Mon unité contre votre équipage. 


Grisé par sa victoire, le Capitaine de l’Arcadia acquiesça.


- Vendu. Votre défaite n’en sera que plus cuisante.


Yattaran s’avança, solennel.


- J’arbitre. Le dernier en course sera déclaré vainqueur.

- Je prends Boucle d’or, décida Tadashi.

- Ça, gamin, tu vas le regretter.

- D’accord. Je vais me mesurer à toi, le grand, intima le Lieutenant.

- Moi ?, demanda David.

- Non non ta copine, benêt. Si les deux gagnants appartiennent à la même équipe, la partie est remportée, sinon ils s'affronteront. Compris ?


C’est Tadashi qui, le premier, s’installa face à son concurrent.


- On n’a pas encore causé toi et moi.

- Quelle tristesse, se moqua Bruce.

- Tu n’es pas la personne qu’il faut pour Nee-san. Au moindre problème, tu vas la jeter et t’enfuir comme t’en as l’habitude.

- J’ai rien à te dire, persifla-t-il. J’ai pas à me justifier auprès d’un morveux comme toi. Occupe toi donc de tes affaires. 

- Je le ferai si tu me bats.


Le duel débuta et, si les deux hommes paraissaient de force équivalente de prime abord, il tourna rapidement en faveur de Bruce qui était remonté à bloc. Il écrasa la paume du disciple d’Harlock avec une joie non dissimulée.


- Tu fais moins le malin, hein ? Je suis sûre que même ta soeur aurait fait mieux que ça. 

- Je vais te casser la g…


David et Yattaran ceinturèrent Tadashi, avant qu’il ne se rue sur son beau-frère, et le traînèrent vers la sortie pendant qu’il l’invectivait copieusement. Bruce n’étant pas en reste, des noms d’oiseaux volèrent de part et d’autre de la pièce, que votre auteur dévouée ne citera pas pour éviter d’offenser de chastes oreilles.


- Puisque les prochains participants sont temporairement hors jeu, je vous propose d’en finir une bonne fois pour toute. Vous et moi. De Capitaine à Commandant.

- Fort bien, je vous en prie, accepta Harlock en l’invitant à s’asseoir.


Un silence respectueux envahit la salle commune alors que les adversaires du jour se positionnaient en se jaugeant mutuellement.

Malgré son assurance de façade, Harlock se sentait moins confiant. La carrure de Bulge n’était pas celle du petit-ami de sa fille ; ses bras faisaient facilement la taille de ses cuisses et il comprit que le combat n’était pas gagné d’avance.

Et, au vu de l’enjeu, l'échec n’était pas permis.


- Mettez-lui la misère, souffla Bruce énervé.

- Pour la SDF, ajouta David qui avait promptement refilé Tadashi aux bons soins du Lieutenant. 

- Oui, vous pouvez le faire !, se récria Yûki.

- J’essaierai de ne pas vous décevoir, soupira Schwanhelt Bulge. 


Harlock était quant à lui coaché par ses hommes qui l’encourageaient à grand renfort de claques dans le dos.


- Prêt ?

- Oui, certifia le Commandant avec un sourire énigmatique.


Dès les premières secondes du bras de fer, le pirate fut en difficulté. Impitoyable, Schwanhelt Bulge accentua son avantage en faisant ployer le coude du père de Reiko. Malgré son impressionnante résistance, l’ennemi public numéro un de l’univers s’inclina face au Commandant du peloton Sirius de la Space Defence Force.


- Vous n’avez pas démérité, conclut Bulge.

- Hum, bougonna Harlock, mauvais perdant.


Il se dirigea vers le bar avant de se raviser.


- Tu n’as toujours pas ma permission, dit-il à l’intention de Bruce.

- Ben voyons, c’est qu’on vit mal la défaite sur l’Arcadia.


Satisfait, il chercha Reiko du regard sans pour autant discerner sa silhouette.

Il se rendit alors compte que la soirée était déjà bien entamée puisque le dîner s’apprêtait à être servi et que la nuit avait remplacé le jour.

Peu désireux de demeurer à l’intérieur, il s’éloigna en quête de l’unique personne avec laquelle il avait envie de passer du temps. 

Au bout de plusieurs minutes de marche, il la trouva assise sur la plage à l’écart du brouhaha ambiant.


- Salut chaton. T’as perdu Louise et Manabu ?


Le menton posé sur ses genoux, elle ne bougea pas.


- Ils sont partis manger. Vous avez enfin terminé vos idioties ?

- Ouais c’était nul.

- T’aurais pas dû le suivre dans ses lubies.


Bruce prit place à côté de la jeune femme.


- Ouais, t’as sans doute raison. 

- Si tu penses que j’ai pas compris que j’étais mêlée à ces âneries, tu te mets le doigt dans l'œil.

- Ils n’ont pas confiance en moi et honnêtement, c’est compliqué de leur en vouloir.


Reiko se rapprocha de son amant et nicha sa tête dans le creux de son épaule.


- C’est aussi pour ça que j’ai quitté l’Arcadia. Ils sont étouffants quand ils s’y mettent.

- Pourquoi t’as choisi la Space Defence Force ?

- Parce que je n’avais nulle part d’autre où aller. 

- Comme beaucoup d’entre nous.

- Je désirais une voie qui n’appartienne qu’à moi. Harlock a tracé un chemin qui lui convenait et qu’Aniki a également suivi. Moi, j’étais de trop.

- Je ne crois pas qu’ils voient ça de cette façon.

- Je sais mais j’avais besoin de m’assurer que je pouvais encore m’en sortir…

- Toute seule à l’extérieur ?


Elle dessina des arabesques dans le sable avec le bout de ses orteils.


- Oui, et un jour Maetel a évoqué un incident sur le Galaxy Express 999. Il y a quelques années, le train est tombé dans une faille temporelle et les passagers n’ont dû leur salut qu’au courage d’une unité de la SDF. Et elle était menée par…

- Bulge ?

- Non, Wataru Yuuki. Le père de Manabu.

- Le héros mythique de la SDF.

- Ouais et j’ai pas atterri chez vous par hasard. J’ai appris que Wawa avait magouillé avec le QG.

- Incroyable celui-là.

- Et le pire c’est qu’il a fait ça à la demande d’Harlock, le grand défenseur de la liberté.

- Sauf s’il s’agit de celle de son lapin.

- Tais-toi.


Ils écoutèrent le clapotis des vagues, pressés l’un contre l’autre.


- Quand j’ai trouvé la force au fond de moi, je suis montée dans le premier train en direction de Destiny. Finalement, comme Manabu, je rêvais d’emboîter le pas au légendaire Wataru Yuuki. C’était la décision la plus effrayante que j’ai eu à prendre.

- Et la plus culottée.

- En tous cas, je ne regrette pas car sinon je ne t’aurais jamais…

- Rencontré ?

- Hum.


L’artilleur effleura les pommettes de la pilote et déposa un baiser sur ses lèvres.

À cet instant, il était en paix, et l’inimitié des rebelles n’était plus qu'un lointain souvenir.

Il appuya son index sur la poitrine de Reiko, la basculant par surprise sur le lit sablonneux.


//Début passage HOT//


- Chaton, tu me rends fou.

- Quoi ?

- Je te préviens, je vais arracher le moindre bout de tissu et te faire l’amour.

- I… Ici ?

- Ouais, dit-il en dénudant son cou. J’ai envie de toi. Tu te sens assez en forme ?

- Mais mon corps… Il est.. Il ne te… Dégoûte pas ?, dit-elle en pointant son avant-bras.

- T’es bête. Évidemment que non, affirma-t-il en lui retirant son t-shirt et en embrassant sa clavicule.

- Et si… Et si quelqu’un arrivait ?

- Il n’aurait qu’à profiter du spectacle.


Reiko se raidit et il eut un petit rire.


- Je te charrie. Il fait sombre, personne ne nous verra. Détends-toi, dit-il en ôtant son pull. Je peux même t’y aider.


Il glissa deux doigts sous l’élastique de ses sous-vêtements et acheva ainsi de la déshabiller.

“Elle est trop mignonne quand elle est gênée.”


- T’es belle, je t’aime. Écarte les jambes. Tu vas apprécier.


Il descendit le long de sa poitrine, de son ventre et fit une pause au niveau de son aine.


- Tu ne crieras pas trop fort même si je sais que je suis bon.


Elle haleta alors que des fourmillements se répandaient dans son bas ventre à mesure que son amant jouait avec son intimité. Lorsque l’orgasme éclata, elle retint au mieux ses gémissements.


- Je te l’avais dit.

- Est-ce que moi… aussi ?

- On a tout le temps pour ça. Tu le feras que si t’en as envie.


Il s’insinua dans le fourreau de sa compagne et entreprit des mouvements sauvages de va-et-vient.


- Je te veux, lâcha-t-elle. Je te veux tellement.

- Il te suffit d’exiger, dit-il en la retournant habilement.


//FIN du passage HOT//


Leurs ébats se prolongèrent suffisamment longtemps pour qu’Harlock note leur absence.


- Je préfère même pas savoir où ils sont et ce qu’ils font, grogna-t-il en se versant une large rasade de Brandy.

- Les enfants qui grandissent ?


Le pirate sourit en reconnaissant la voix douce de Kanna.


- Ouais, on voudrait que ça ne se produise jamais.

- J’ai aussi souhaité que Manabu reste un petit garçon pour que je puisse le garder avec moi sur Tabito. Mais, malgré mes craintes, j’ai réalisé qu’il était égoïste de lui brûler les ailes.

- Et si c’est pour l’empêcher de commettre des erreurs ?

- Il faut les laisser se tromper. Ça les aide à progresser sur la voie qu’ils ont décidé d’emprunter.

- Même si la voie en question est un train sous-armé d’une Compagnie au cœur corrompu avec un grand blond arrogant aux yeux bleus ?

- Oui, dit-elle en riant, même si votre vision des choses me paraît un tant soit peu exagérée.

- Vous savez qu’il m’a même averti qu’il allait l’épouser que ça me plaise ou non ? Il a de l’audace, on ne peut pas lui enlever ça.

- Vous comptez les arrêter ?

- Bien sûr que non. Si je m’y opposais, Reiko le choisirait sans hésiter et je la perdrais définitivement. Et ça, je le refuse.


Il reposa brusquement son verre.


- Mais s’il faillit à ses engagements… Il n’existe aucun endroit dans cet univers où il pourrait m’échapper.

- Il en a conscience.

- Tant mieux.


Ils conversèrent pendant de longues minutes durant lesquelles Harlock détachait difficilement son attention de la restauratrice.


- Et votre mari, depuis combien de temps… ?

- Douze ans. Il me manque toujours autant mais je n’ai plus envie de le rejoindre.

- J’ai vécu ça aussi. La perte de mon unique amour.


Il empoigna une bouteille et emplit deux gobelets de liquide alcoolisé.


- Elle s’appelait Maya et je n’ai aimé qu’elle. C’était une terrienne. Comme mes ancêtres et comme Reiko.

- Je serais ravie de vous écouter parler d’elle.

- Il nous faudrait la nuit.

- Ce n’est pas un problème. Et si en échange vous me permettez de raconter certains de mes souvenirs de Wataru, je crois que cela rendrait service à chacun d’entre nous.

- Ça me semble être une offre honnête. À vous l’honneur.


***


- Tu veux vraiment y aller ?

- Oui.


Reiko pénétra dans la salle commune, pendue au bras de son petit-ami. Elle était résolue à mettre les points sur les “i” avec Harlock et Tadashi afin qu’aucun d’entre-eux ne s’immisce davantage dans sa vie privée.


- Tu préfères pas qu’on aille dans ta chambre ?

- T’es jamais fatigué ?, soupira-t-elle, amusée.

- Pas quand il s’agit de ça, chérie.


Lorsqu’elle repéra Harlock en grande discussion avec Kanna, elle se figea.


- T’as vu, lança Manabu en se rapprochant. Ils ont l’air de bien s’entendre.

- Oui, on dirait que ce n’est pas leur première rencontre.

- C’est ce que je me disais aussi.


Le pirate sentit le poids des regards dans son dos. Il fit volte face et remarqua alors les deux catastrophes ambulantes du peloton Sirius qui le fixaient intensément. Il observa plus attentivement sa fille et comprit immédiatement qu’elle était remontée comme une pendule.


- Je vais avoir droit à des réprimandes, maugréa-t-il. Et je ne suis pas sûr d’apprécier l’air suffisant qu’affiche ce tireur d’élite de pacotille.


Kanna serra sa main gantée posée sur le comptoir.


- Ne vous inquiétez pas trop.

- Otto-san, faut qu’on discute.

- Oui, lapin, qu’est-ce qu’il y a ?


La mère de Manabu le salua et entraîna les équipiers de la SDF vers la table où les rebelles finissaient de dîner.


- Je ne suis pas dupe de ton petit numéro de tout à l’heure. Il ne m’a rien dit mais si, comme je le crois, mon couple était bien l’enjeu de ce pari ridicule, alors…

- Je ne vous séparerai pas, la coupa-t-il. Je voulais juste prendre la température de sa détermination.

- Et… ?, gronda-t-elle.

- Et rien du tout. J’espère juste qu’il ne te fera pas souffrir.

- Otto-san…

- Car si c’est le cas, je lui dévisserai la nuque.

- Otto-san !

- Je plaisante. À moitié.

- Pas du tout, même. Je sais ce que je fais. Il me rend heureuse, papa.

- Et s’il veut rester en vie, il a plutôt intérêt à continuer.

- Je pense qu’il en a réellement l’intention donc cesse de le tourmenter et c’est aussi valable pour Aniki. Et pour Wawa.

- Je ferai passer le message.

- Je t’aime Otto-san.

- Moi aussi, usagi.


Elle l’étreignit brièvement avant d’aller s’installer auprès de Bruce qui ne l’avait pas lâchée du regard un seul instant.


- Je peux toujours la boucler dans sa cabine loin de cette maudite Compagnie des chemins de fer intergalactiques, marmonna-t-il en faisant sauter le bouchon d’une flasque de Red Bourbon.


*** 


- Une réunion ?

- Oui.

- Mais qui…

- Bulge et Harlock. Ils ont convoqué tout le monde.

- Oh.


Reiko scruta Bruce qui avalait une gorgée de café, nonchalamment assis dans un fauteuil en cuir. Vêtu d’un peignoir blanc à peine fermé, il émergeait de sa courte nuit.


- Ils veulent nous parler… D’elle ?

- J’en sais rien, y’a des chances.

- J’ai pas envie… Pas envie d’y aller.


Le sniper leva les yeux de sa boisson.


- T’es pas obligée.


La jeune femme posa le front contre la fenêtre de sa chambre.


- Si, mon amour, par nulle autre que moi.


Une fois décents, ils gagnèrent la salle à manger qui avait été transformée en état major pour l’occasion. Bulge, Harlock et une poignée de pirates avaient déjà pris place autour de la table.


- T’as des cernes, lapin, nota le Capitaine, contrarié.

- J’ai… Mal dormi.


Le sourire équivoque sur le visage de l’artilleur fit grincer les dents du hors-la-loi, qui songea très sérieusement à faire exploser Big1 et à camoufler ça comme “un malencontreux accident”. Il fut cependant tiré de ses pensées maussades par l’arrivée des membres du peloton Sirius.


- Merci à tous d’être venus, commença Harlock tandis que Tadashi, Kei et Yattaran rejoignaient l’assemblée. Cette réunion a deux objectifs : le mise en commun des renseignements collectés individuellement et l’élaboration d’un plan d’attaque pour en finir avec Promethium.


Il marqua un silence avant de poursuivre.


- Bulge, quelle est la position de la Compagnie ? Va–t-elle prendre part à ce combat ?


Le Commandant croisa les bras, dubitatif.


- Tant que le Galaxy Railways n’est pas directement menacé, ils ne bougeront pas. Ils ne risqueront par un conflit ouvert contre les humanoïdes qui contrôlent la moitié de l’univers et qui constituent un pourcentage non négligeable de leurs passagers.

- Et pourtant, il l’est, dit Yattaran. C’est même leur cible numéro un.

- Layla Destiny Shura en a parfaitement conscience mais elle est tenue pieds et poings liés par la volonté des actionnaires. 

- S’ils veulent détruire la Compagnie… Pourquoi… Pourquoi nous ont-ils épargnés à chaque fois ?, intervint Reiko. Ils ont enlevé Manabu sans se donner la peine de nous tuer et la reine m’a confirmé qu’elle avait autorisé le décollage du chasseur de Louise. Ça n'a aucun sens.

- Tu te fourvoies, l’avertit Kei.

- Co…Comment ça ?

- Ils souhaitent une exécution publique, expliqua Tadashi, que la chute de Big1 soit un spectacle morbide qui exposera à tous cette vérité : personne ne peut leur résister, pas même “Le Chien de Garde de la Galaxie”.

- C’est… Tordu, s’horrifia Louise, désabusée.

- C’est brillant, oui, la contredit Bruce.

- D’après eux, si Big1 tombe, cela portera un coup fatal au Chemin de Fer Intergalactique, résuma Bulge. 

- Rien que ça, siffla David.


Harlock tapota sur la table, visiblement préoccupé.


- Pourquoi ne se sont-ils pas servis de moi comme objet de rançon ? Ils auraient pu me kidnapper en même temps ou à la place de Manabu.

- J’ai ma théorie, s’avança Schwanhelt Bulge. Ton identité était protégée. J’ai consulté ton dossier et, même en supposant que les humanoïdes aient infiltré notre réseau, ils n’auraient rien trouvé sur toi puisqu’il était vide.

- Warrius ?, demanda le Capitaine de l’Arcadia.

- Probablement. 

- Il est plus malin qu’on ne le croit.


Manabu se mit debout, désireux de partager son point de vue.


- Ils m’ont interrogé. Ils voulaient en apprendre plus à propos de la guerre contre l’Empire d’Alfort et sur cet univers parallèle en général.

- Promethium et ses velléités conquérantes, cracha Yattaran. Notre monde ne lui suffit plus. Elle veut mécaniser d’autres peuples, d'autres civilisations.

- Ecoeurant, commenta Reiko.

- Manabu, reprit Harlock, peux-tu répéter ce que tu as raconté au Commandant Bulge ?


Le jeune homme déglutit de travers alors que son visage se liquéfiait.


- Lorsque j’étais prisonnier de la station j’ai… J’ai assisté à des choses. Des choses affreuses.

- C'est-à-dire ?

- Je sais ce que deviennent les humains kidnappés par les humanoïdes.


Il prit une profonde inspiration.


- Ils sont robotisés ? Et alors ?, s’impatienta Tadashi.

- Pas exactement. Leur esprit… Il est… Extrait de leur corps et transposé à l’intérieur de… De vis, de clous et de pièces métalliques en tout genre. Ces matériaux sont ensuite utilisés pour renforcer la base.

- Non… Non…, balbutia Reiko. C’est… Impossible.

- Leur système d’auto-régénération, devina David.

- Les vibrations de cet étrange métal découvert sur Heavy Melder… Celui là même qui compose les bombes, signifia Louise, elles sont d’origine…

- Humaine. Ce sont les échos des âmes de ces hommes et de ces femmes, explicita le Lieutenant.

- Mes amis d’enfance ont été métamorphosés en… Vis ? C’est… Une mauvaise blague ? Sayuri… Elle n’avait que six ans… Six ans…


Harlock remarqua qu’un tic nerveux agitait la commissure de ses lèvres et que ses prunelles s’étaient embrumées comme de coutume quand elle replongeait dans l’enfer qu’avait été sa vie sur Terre.

Il serra les poings sous l’effet de la colère.


- Poussin…

- On va vous laisser terminer, hein. Sauf si vous avez d’autres annonces du même acabit, trancha Bruce.


Comme personne ne lui répondit, il enlaça la taille de sa compagne et la dirigea vers la sortie pendant qu’elle hyperventilait sous le choc de ces informations.

Une fois la porte refermée derrière eux, les émotions de Reiko éclatèrent.


- Si elle est encore là bas… Piégée dans un mécanisme… Elle doit se sentir si seule… Si seule…

- Tu pouvais pas savoir.

- J’ai été incapable de la protéger. C’est moi… Qui devrait être à sa place !

- Reiko, t’avais huit ans. Huit ans.

- Je lui ai promis qu’on resterait toujours ensemble, s’écria-t-elle en agrippant la veste de Bruce.

- Chaton…


De lourds sanglots secouèrent les épaules de la pilote et il lui fallut plusieurs minutes pour retrouver un semblant de calme.

Lorsque sa crise d’angoisse s’acheva, elle riva ses yeux dans ceux du sniper.


- Je jure sur la tombe de ma mère que je n’aurai pas de repos tant que l’esprit maudit de Promethium ne sera pas annihilé. Une bonne fois pour toute.


Bruce garda le silence, sachant qu’il était vain d’essayer de la raisonner maintenant. Elle était trop bouleversée pour écouter qui que ce soit.

Impuissant face à sa douleur, il se contenta de l’attirer vers lui et de lui caresser les cheveux avec tendresse.

“Si c’était possible je te prendrais toute cette souffrance pour que tu puisses enfin respirer librement. Je le ferais sans aucune hésitation.”


***


- Comment va-t-elle ?

- Comme quelqu’un qui a appris que ses proches ont été transformés en vis par une reine diabolique.

- Donc, mal.

- Non, tu crois ?, railla Bruce.


Manabu, bientôt rejoint par Louise, observa Reiko qui s’était assise dans le sable et fixait l’horizon sans ciller.


- C’est quoi le plan ?, interrogea l’artilleur.

- Bulge va devoir s’assurer du soutien de la Compagnie. C’est essentiel.


Les membres du peloton Sirius firent volte-face de concert.

Le Capitaine de l’Arcadia se tenait dans l'encadrure de la porte de la grande salle, une ride soucieuse barrant ses tempes.


- Maetel va aussi s’atteler à cette tâche. Ils feront front commun. Sans cette puissance de feu supplémentaire, mon vaisseau ne pourra pas rivaliser.

- Avons-nous d’autres alliés ?, questionna Bruce.

- Emeraldas est en exil et je n’ai aucun moyen de la contacter. Quant à Warrius, il est muselé par le gouvernement terrien. Quelques vieilles connaissances pourraient se rallier à notre cause mais rien ne le garantit.

- Avec les preuves que nous leur apporterons concernant le métal à résonances électriques, le QG n’aura pas d’autres choix que de nous croire.

- Manabu, ta parole est notre seule preuve du lien entre ce matériau et les humanoïdes, rétorqua Louise. Ça ne suffira pas. 

- Elle a raison, abonda Harlock. Ils devront se montrer persuasifs. De mon côté, je vais continuer d’enquêter pour leur fournir les arguments dont ils ont besoin.

- La patience, c’est pas mon fort. Ni le sien, conclut Bruce en pointant Reiko du menton.


***


- C’est mignon, non ?

- Hum.

- T’as même pas regardé !

- Si, c’est très joli, déclara Reiko d’une voix morne. 

- T’as pas l’air convaincue. Le bleu mettrait davantage en valeur mes iris… 

- Oui, peut-être.

- Bon, va pour le bikini turquoise. Tiens, Koko, enfile ça. Hop hop hop.

- J’ai pas envie de me baigner.

- Au moins, tu bronzeras un peu, ça ne te fera pas de mal. Tu es encore plus blanche que Yûki, c’est peu dire. 

- Louise…

- Allez, dépêche-toi !


Bien que l’Officière radar soit animée des meilleures intentions du monde, Reiko était exaspérée par son comportement.

Comment pouvait-elle être si détendue après les terribles révélations de la veille ?

En ce qui la concernait, elle n’avait pas fermé l'œil de la nuit, ressassant encore et encore les dires de Manabu, prenant la mesure de leurs conséquences effroyables.

Ses cauchemars, qui s’étaient pourtant atténués ces derniers jours, étaient revenus en nombre et Bruce n’avait pas beaucoup dormi, fréquemment réveillé par des hurlements d’horreur.

Poussée par Louise, elle se déshabilla et revêtit un maillot de bain noir une pièce.


- C’est serré au niveau de la poitrine.

- Non, le terme exact c’est “ajusté”. Viens, il fait bon dehors, ça te fera du bien.

- Ouais…


Reiko plissa les yeux lorsque le soleil l’éblouit. Elle happa une serviette de bain et suivit son amie jusqu’à la plage sur laquelle pirates et soldats profitaient d’un repos mérité. 

Elle repéra Bruce et lui adressa un petit signe de la main.

Le sniper la contempla alors qu’elle progressait d’une démarche chancelante.

“Putain, c’est pas permis d’être aussi désirable.”


- Tu pourrais faire un effort pour mater discrètement.

- Ça, c’est pas possible, gamin.

- Ben voyons.

- Tu crois que j’ai pas vu la façon dont tu reluques la grande blonde ?


Mal à l’aise, Tadashi s’empourpra et bredouilla une phrase incohérente avant que sa sœur ne s'immisce entre eux.


- Aniki… J’espère que tu ne lui cherches pas des poux.

- Non, pas cette fois.


Elle haussa un sourcil perplexe mais se garda de tout commentaire.


- Bon, viens par là, toi.


L’artilleur attrapa Reiko derrière les genoux et la bascula contre son torse. Surprise, elle laissa échapper un glapissement aigu.


- Qu’est-ce que tu fais ?, souffla-t-elle, un brin paniquée lorsqu’elle constata qu’il marchait vers la mer.

- On va prendre un bain.

- Arrête, protesta-t-elle en se débattant. Je n’aime pas ça !

- Ne t’en fais pas, je ne vais pas te balancer à la flotte. Tu resteras en sécurité dans mes bras. Mais c’est un premier pas pour surmonter tes craintes.

- Bruce…


Ils pénétrèrent dans l’eau chaude de l’oasis de l’espace.


- Si jamais t’es effrayée, rappelle-toi que t’es pas obligée de tout affronter seule. Je peux aussi te porter quand le poids de tes soucis est trop lourd.

- Tu me l’as déjà dit, dit-elle, émue.

- J’avais peur que tu l’oublies, mon coeur.


Reiko nicha son nez dans le cou de son amant tandis que les vagues lui léchaient le bout des orteils.


- Tu me lâches pas, hein ?

- Jamais.


***


Reiko boucla sa valise, un tant soit peu angoissée. Un mois s’était presque écoulé depuis sa capture sur la station râ-métalienne et, aujourd’hui, l’Arcadia avait reçu un message l’informant qu’elle était officiellement réintégrée avec une mise à l’épreuve de soixante jours.


- Je ne l’ai pas vu depuis une semaine… Depuis que Big1 a quitté SSX.

- Inutile de te demander de qui tu parles. 

- Aniki.


Tadashi s’affala sur le lit de sa sœur, de mauvaise humeur.


- Tu vas vraiment rempiler ?

- Oui.

- À cause de lui ?


Elle réfléchit un instant avant de répondre.


- Non. Parce que c’est la voie que j’ai choisie. Mais je mentirais si je ne disais pas qu’il me manque.

- Ce gars a un caractère de cochon et il te malmène. Pourquoi lui ? Y’avait pas un meilleur choix parmi tous les types en costume guindé de la SDF ?

- Tu te trompes. Il s’efforce juste de me tirer vers le haut. Tu préférerais qu’il me regarde me complaire dans le chagrin ? Ça ne me rendrait pas service.

- Je préférerais qu’il garde ses pattes loin de toi.

- Et moi que tu me laisses vivre !


Tadashi s’assombrit.


- Message reçu. Tu pourras pas dire qu’on t’a pas prévenue. S’il te largue, viens pas pleurer dans la cape d’Otto-san.

- Aniki !


La porte claqua et elle se retrouva seule.


*** 


L’Arcadia amorça sa descente dans l’atmosphère de Destiny. Depuis la passerelle, Reiko admirait la gare titanesque de Destiny.


- T’es prête, poussin ?

- Oui.

- Où est Tadashi ? Il n’a pas encore pris son quart.

- Je ne sais pas. Il n’a sûrement pas envie de me voir.

- Vous vous êtes disputés ?, s’alarma Harlock.

- Je l’ai mis en garde, c’est tout.

- Hum. Mon lapin montre les dents.


Alors que le vaisseau pirate se posait, père et fille gagnèrent les hangars desquels une rampe fut déployée pour qu’ils puissent mettre pied à terre.

Le soleil fit papillonner les paupières de la pilote et il lui fallut plusieurs secondes pour reconnaître la silhouette qui se tenait droite sur l’asphalte.


- Salut, chaton.


Après un moment de flottement, elle s’élança en avant et se jeta dans les bras de Bruce qui l'étreignit avec fougue.


- Bon retour parmi nous.

- Merci, balbutia-t-elle, émue. 


Le Capitaine fit la moue. Il y a quelques années, c’était vers lui que Reiko se précipitait de la sorte.


- Je te la confie, veille sur elle pour moi.

- Compris.


La passerelle se rétracta derrière le hors-la-loi avant que la jeune femme n’ait le temps de le rejoindre.


- Otto-san !

- Fais attention à toi, usagi.


Il disparut à l’intérieur de l’Arcadia et, aussitôt, les propulseurs se mirent en route.


- T’inquiète pas pour lui, la rassura-t-il. Il est comme un père qui emmène son enfant à l’école pour la première fois.

- Oui…

- Allons-y, ils nous attendent.


Reiko glissa son auto-mail dans la main de Bruce.

Ensemble, ils se dirigèrent vers le Quartier Général.

Vers leur avenir.

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