Top Cuisinière

La troisième épreuve est une des plus attendues du public. Avec les autres candidates, nous avons 48 heures pour ouvrir un restaurant et y proposer un menu complet, aidées par les personnes que nous voulons. Giuliano est aux anges, c’est tout juste s’il ne jette pas de joie tous ses couteaux, ses fourchettes ET ses cuillères sur la porte. La stratégie sera très simple : il sera aux commandes de A à Z pour ce qui concerne la cuisine. Grâce à l’aide de mes parents, nous prenons possession d’un des plus beaux lieux de la ville : un restaurant sur pilotis offrant une vue plongeante, dont la reprise est justement en cours d’âpres négociations. Le lieu est poussiéreux et couvert de toiles d’araignées. Il me plaît immédiatement. Je déclare que je me charge de la décoration et j’ai aussitôt une armée de peintres à mon service, armés de dizaines de pots de peintures. Je veux de la couleur partout ! A la fin des trois jours, l’établissement est méconnaissable. Il brille de mille feux, décoré sur le thème du soleil. De grands tissus violets translucides ondoient depuis le plafond, des tapis chatoyants couvrent le sol et de magnifiques fresques ornent chaque mur. La poussière n’est plus qu’un souvenir, tandis que j’ai trouvé une nouvelle demeure aux araignées que j’ai dû chasser de leur logis. Depuis la terrasse, les toits de la ville étincellent comme des écailles de poisson. Pour sa part, Giuliano a mis toute la main – voire le bras – à la pâte, se donnant le défi de faire aussi bien que lors de mon banquet de mariage.  

Sur ce, Eugène et Maximus débarquent. Tous deux pensent qu’il y a un traître dans le concours et demandent à intégrer mon groupe de commis pour le démasquer. J’opine. Après tout, c’est une hypothèse intéressante, même si je ne sais pas qui pourrait m’en vouloir au point de saboter une tarte aux pommes…

Le soir S, si je semble donner les ordres dans la cuisine, Giuliano est le véritable chef. Comme je passe beaucoup de temps à parler avec lui (pour savoir ce que je dois dire aux commis), le jury salue mon « sens de l’écoute » et mon ouverture aux « conseils d’un humble cuisinier ». Tous s’extasient devant le sublime menu, lui aussi confectionné sur le thème du soleil : l’entrée en trompe-l’œil, avec un bricelet salé en forme d’astre, le plat principal qui ressemble à une fontaine d’or et d’argent, et le tour de passe-passe du dessert, dont surgit une gerbe d’étincelles dès que les juges y enfoncent leur cuillère.

Et croyez-le ou non, je remporte l’épreuve.