Doctor Who Alternative: Saison 8

Chapitre 7 : Le Bâtard du Temps [Partie 3]

6426 mots, Catégorie: K+

Dernière mise à jour 10/11/2016 06:10

Clara était sur un ordinateur. Au lieu de prendre la couverture d'universitaire en stage, elle avait plutôt décidé d'utiliser sa véritable identité, et son statut d'invitée du professeur Witnink, qui leur avait confié des messages prouvant qu'il permettait en effet au Docteur, à Jonas et à Clara d'accéder à des ordinateurs et à une grande partie du complexe. Elle se trouvait donc maintenant dans ce qui ressemblait encore plus pour elle à son environnement naturel: l'informatique.

Jonas lui avait expliqué l'histoire des vaisseaux amenant les particules. C'était un scientifique de Witnink, ou bien Witnink lui-même qui se chargeait de demander le transport, de donner les ordres à une entreprise ou à un entrepreneur indépendant...etc. Bref, il fallait donc maintenant qu'elle trouve de qui il s'agissait. Car le scientifique qui s'occupait du transport des particules connaissait forcément le lieu d'origine de celles-ci. Et donc, il devait être à l'origine de la construction du complexe qui récoltait ces molécules, ou du moins y avoir participé. Le scientifique qui s'occupait de ces transports avait aidé une dictature, qui l'avait aidé en retour, et Clara était bien curieuse de connaître son identité....

 

ΘΣ-ΘΣ-ΘΣ-ΘΣ-ΘΣ-ΘΣ

 

« Croyez-moi, Docteur! Votre décision va permettre à la Justice de faire des progrès incroyables!

- Ze vous crois, profezzeur, ze vous crois. Vous avez termigné?

 

Witnink retira la languette dans la bouche du Docteur. Il devait avoir recueilli bien assez de cellules pour faire ses observations, ce qui l'amènerait à modifier et compléter son algorithme.

 

- Voilà qui est fait, Docteur! Sachez que j'ai annulé toutes mes expériences du jour pour me consacrer totalement à celle-ci. Si les changements à effectuer ne sont pas trop nombreux, l'algorithme biologique de régénération sera prêt demain!

- Heureux de l'apprendre. Très heureux. »

 

Le Bâtard du Temps

Partie 3

[http://img11.hostingpics.net/pics/594283LeBtardduTemps3.jpg]

 

Les ordinateurs étaient biens protégés, mais Clara réussissait étonnamment bien à pénétrer dans les dossiers protégés. Il y avait pour elle un air de déjà-vu, comme si elle avait déjà vécu une situation similaire. Une trace de son passage dans la vie du Docteur, vraisemblablement.

Elle cherchait donc tout ce qui se rapprochait des particules temporelles, des particules de vortex...etc. Les mots-clés ne manquaient pas. Mais après une certain temps de recherche, les premiers résultats sérieux apparaissaient. Le seul problème, c'est que tout ne concordait pas. Il n'y avait que deux vaisseaux qui ramenaient des "particules temporelles", mais ils ne provenaient pas de la planète Onos. De plus, ils ne correspondaient pas au vaisseau que Clara avait découvert en cherchant dans les ordinateurs de la base. Donc les particules devaient être transportées avec autre chose. Et elles devaient être transportées clandestinement. Pour cela, rien ne valait un faible équipage... Comme les particules n'étaient pas enregistrées, l'escale pour aller les chercher ne l'était pas non plus. Donc les départs des voyages ne la renseigneraient pas plus. Clara allait donc devoir chercher vaisseau par vaisseau. Elle n'avait qu'un vague souvenir de l'allure de l'appareil, de moyen-tonnage se souvenait-elle... Tout était enregistré sur le tournevis du Docteur, qu'il avait gardé sur lui.

 

Enfin, après une bonne demi-heure (voire plus) de recherches infructueuses, elle trouva enfin ce qu'elle cherchait. Un vaisseau assez léger, mais pas trop, d'environ quatre-vingts mètres de long, qui pouvait être piloté par un équipage de quatre personnes. Officiellement, il transportait des plantes et des échantillons végétaux pour des expérience sur des mutations, menées par le professeur Kulvin Rotiart. Et c'était aussi le nom que Clara voyait affichée dans le champ "Coordinateur et commanditaire du transport" sur l'écran. Alors Rotiart était à l'origine de tout cela. Ce scientifique fatigué et mal rasé... C'était l'image qu'il avait laissée dans l'esprit de Clara.

Mais cela ne signifiait rien. Peut-être qu'en réalité, il aidait Witnink en faisant cela. Peut-être même qu'il n'était pas au courant de la cargaison clandestine, et qu'un autre scientifique s'en chargeait. La seule façon de le savoir, c'était d'en apprendre plus sur lui. Et pour Clara, seul un ordinateur pourrait l'aider aussi rapidement, et sans poser de questions.

 

ΘΣ-ΘΣ-ΘΣ-ΘΣ-ΘΣ-ΘΣ

 

Le bureau de Kulvin Rotiart était à l'image de l'homme: mal rangé, un peu vieillot, et surtout... Facile d'accès. La porte n'était même pas fermée, et lorsque Clara tenta de l'ouvrir, elle n'eut aucune difficulté à le faire. Le passage du vaisseau au-dessus des laboratoires avait du le pousser à partir en trombe de son bureau, sans même penser à fermer la porte.

La pièce était rectangulaire, et s'étendait sur une dizaine de mètres au-delà de la porte, pour une largeur d'à peine quatre mètres. Les murs étaient couverts de bibliothèques classiques remplies de livres de botanique, de physique, de chimie, de technologie, d'horticulture, d'hydrographie et de bien d'autres domaines dont Clara ne comprenait pas la moitié des noms.

Au fond de la pièce, il y avait le bureau en tant que tel. Un meuble en carbone, ou en plastique, c'était difficile à dire. Dessus trônait l'écran parfaitement plat d'un ordinateur (une plaque de verre), qui était incrusté sur la surface du meuble. Autour, on pouvait voir des tâches de différentes couleurs, qui semblaient venir de tasses bues trop vite et de casse-croutes avalés précipitamment. Le meuble comportait aussi des tiroirs, sur les cotés, mais ça n'intéressait pas trop Clara.

Elle repoussa la porte, pour ne pas être vue depuis le couloir, mais pour pouvoir entendre si quelqu'un venait à se rapprocher. Elle se dirigea derrière le bureau, s'assit sur le siège peu confortable qui devait agresser quotidiennement le dos de Rotiart chaque jour, et tapota sur l'écran de verre.

L'ordinateur se ralluma. Et Clara ne put s'empêcher de lâcher un "YES!" de bonheur en voyant que le scientifique avait oublié de l'éteindre. Il avait juste été mis en veille. Donc elle avait accès à tous les dossiers du professeur.

Ou presque.

 

« Mais pourquoi cet idiot fout des mots de passes partout! Il faut un temps fou pour les craquer! »

 

Elle cherchait les fichiers sur la Régénération, et il lui fallut dix bonnes minutes pour trouver le mot de passe. Heureusement qu'elle avait cette espèce de déjà-vu qui lui permettait de savoir à peu près quoi faire. Sauf que là, même si elle avait ouvert le dossier... Il n'y avait pas grand chose d'intéressant. Juste un tas d'images, de lignes mathématiques ou encore de vidéos d'expérience ou de schémas. Rien d'incroyable ou d'incriminant. C'était à croire qu'il n'avait rien à voir avec les particules.

Elle décida alors d'ouvrir les tiroirs du bureau, et elle y découvrit quelque chose qui lui était étrangement familier. C'était une grande feuille de papier, de plusieurs mètres de long, qui étaient enroulées aux extrémités, comme un parchemin. Elle était remplie de lignes complexes et mathématiques: certaines étaient barrées en rouge, et remplacées par d'autres au feutre. Parfois des calculs, des expressions, des équations ou des numéros avaient été ajoutés. La feuille semblait avoir été ouverte assez récemment, et certaines traces de feutre ne semblaient pas très anciennes...

 

Elle rangea le parchemin dans le tiroir, sans le fermer, et revint sur l'ordinateur. Il y avait un endroit où elle l'avait vu, un dossier. La Régénération... L'algorithme. C'était l'un des principaux fichiers mathématique du dossier. Lorsqu'il s'ouvrit, elle empoigna le parchemin, et chercha le début de la feuille. Lorsqu'elle l'eut trouvée, elle le compara à celui sur l'ordinateur. Le texte original était le même. Sur plusieurs mètres de papiers. Puis, les premières ratures et modifications arrivaient. Et elles avaient été prises en compte sur le fichier.

 

« Alors comme ça, Rotiart a modifié l'algorithme... Sur papier puis sur informatique... »

 

Elle était toute fière de ce qu'elle venait de déduire. Sauf que quelques secondes plus tard, elle comprit que ça ne l'avançait pas beaucoup. Après tout, cela faisait sûrement partie de son travail. Il l'avait peut-être fait sur la demande de Witnink, pour du travail classique. Ou pour du travail clandestin, au contraire... Mais pourquoi demander à Rotiart et ne pas faire lui-même le boulot? La jeune fille se triturait l'esprit pour essayer de comprendre la situation.

 

Et puis, d'un seul coup, la solution lui apparut. Ou du moins la façon de l'obtenir. Parce qu'il y avait une preuve qu'elle pouvait trouver dans l'ordinateur du "coupable". Du responsable. De celui qui avait aidé le Dictateur de Qatros. Une preuve irréfutable. Et si elle était sur l'ordinateur de Rotiart, elle savait où la trouver.

Alors, elle tenta d'ouvrir le dossier correspondant. Verrouillé. Il lui fallut huit minutes pour craquer le code. Mais lorsqu'elle eut enfin réussit, de nombreux autres dossiers s'offraient à elle. Il y avait un grand nombre de fichier, apparemment. Aucun n'était verrouillé, heureusement. Maintenant, il fallait juste trouver le bon document. Ou trouver qu'il n'existait pas, si Rotiart n'était pas le responsable.

 

« Professeur? lança une voix féminine derrière la porte. »

 

Clara failli sursauter en entendant ça. Quelqu'un allait entrer dans la pièce. Elle avait été si absorbée par ses activités informatiques qu'elle en avait négligé la porte... Qui se situait en face d'elle, et qui allait s'ouvrir d'une seconde à l'autre. La jeune fille se précipita donc le plus discrètement possible sous le bureau. Le meuble était fait de telle façon qu'on ne pouvait être vu que depuis le siège de Rotiart lorsque l'on était caché en dessous. Le léger espace de cinq centimètres entre le sol et la limite la plus basse du meuble n'était pas assez large pour que l'on puisse apercevoir la jeune fille, surtout avec la lumière éteinte dans la pièce.

Mais la lumière s'alluma. Une jeune femme venait d'entrer, et s'avançait vers le bureau. Elle était bien surprise de voir l'ordinateur allumé, et le tiroir ouvert. Mais cela ne l'étonnait pas de la part de Kulvin Rotiart "l'homme qui semble dormir en marchant", comme on disait.

De son coté, Clara essayait de retenir sa respiration le plus possible et de souffler très, très discrètement. Sauf qu'elle failli lâcher un cri lorsqu'elle sentit quelque chose se poser sur son bras. Elle tourna lentement la tête vers la zone où on la touchait et ses yeux s'écarquillèrent en voyant le responsable de cette petite caresse... Un insecte poilu, à sept pattes... Du moins, six pattes et un gros, très gros, dard. Un insecte qui ressemblait un peu trop à son goût à une araignée mutante... Une mygale mutante même... Qui montait sur son bras. Il fallait absolument qu'elle ne crie pas. Et qu'elle se débarrasse de l'insecte. C'est pourquoi elle eut l'idée fort idiote de tourner son bras en direction de l'espace libre entre le sol et le bureau de quelques centimètres, et de pousser l'insecte d'une pichenette, ce qui eut pour effet de le rejeter dans la pièce, hors du dessous du bureau.

Mais cela eut aussi pour effet d'affoler la scientifique qui était rentrée dans la salle. Elle poussa un cri de terreur qui fit sursauter Clara sous son meuble (ce qui eut donc pour effet de frapper sa tête sur le meuble). La scientifique cria ensuite sa rage envers l'insecte, et celui-ci fut victime d'un nombre difficilement calculable d'écrasements de pieds et de talons...

Après avoir terminé son œuvre, la femme repoussa le cadavre peu glorieux sous le bureau, ce qui fut suivi du cri d'une autre femme, plus jeune, qui sortit précipitamment de sa cachette en faisait tomber le siège de Rotiart et en se cognant la tête par terre... Le visage que faisait la scientifique en découvrant la "clandestine" était plus que béat...

 

« Qui... êtes... vous? tenta-t-elle d'articuler.

- Euh... Bureaupropres&Co, entreprise de déra... euh... on s'occupe de débarrasser vos bureaux des insectes nuisibles et...

 

Elle comprit rapidement que sa tentative stupide d'explication était un échec, vu le regard furieux qu'avait la scientifique...

 

- Au moins j'aurais essayé, soupira Clara. »

 

ΘΣ-ΘΣ-ΘΣ-ΘΣ-ΘΣ-ΘΣ

 

Le Docteur, Clara, Witnink, Rotiart ainsi que quelques autres scientifiques et gardes se trouvaient dans la pièce carrée où l'on voyait la "façade" du Régénérateur. Witnink s'occupait de réécrire l'algorithme avec l'aide du Docteur, et d'autres scientifiques, sur un ordinateur, lorsque la femme qui était entré dans le bureau de Rotiart était venue avec Clara, expliquant où elle l'avait trouvée. Mais celle-ci se défendait, et avait déjà commencé à accuser Rotiart.

 

« Je vous jure! C'est lui qui s'occupait des cargaisons de particules, Docteur!

- C'est vrai, ça? demanda le Seigneur du Temps au scientifique.

- Bien sûr que non! Je ne m'occupais pas de cela! Les particules temporelles n'ont rien à voir avec mes expériences.

- Pourtant elles ont à voir avec la Régénération.

- QUOI? s'exclama Witnink. Mais je ne les ai jamais utilisée dans ce genre d'expé...

- Peu importe.

- Mais il cachait les particules! insista Clara. Elles voyageaient avec des plantes. Le vaisseau faisait une escale clandestine et secrète sur Onos, et allait ensuite ici, sur Kolkrohn. Le vaisseau correspond à ce qu'on a trouvé dans la base, Docteur, et les fréquences de voyages, 3 fois par mois, coïncident!

- Mais voyons, jeune fille! s'exclama Rotiart. Puisque ces particules voyageaient illégalement, comme vous le dîtes, je ne savais pas qu'elles existaient!

- Mais alors pourquoi est-ce que vous réécriviez l'algorithme du professeur, hein?

- Vous réécriviez mon algorithme, Kulvin? s'étonna Witnink.

- Professeur, plusieurs idées m'étaient venues, ces derniers temps, sur certains calculs qui ne sont pas erronés, mais qui pourraient poser problème dans certaines situations. Je pense avoir fait mon travail de scientifique en tentant de découvrir des solutions.

- Mais vous avez bien fait, mon cher Kulvin, vous avez bien fait. De toute façon, je n'ai pas construit cet algorithme tout seul. »

 

Clara commençait à croire qu'elle s'était trompée, et le regard noir du Docteur ne la rassurait pas. L'image du Seigneur du Temps allait surement en prendre un coup auprès des scientifiques, vu ce qu'elle avait fait.

 

ΘΣ-ΘΣ-ΘΣ-ΘΣ-ΘΣ-ΘΣ

 

La porte du bureau de Rotiart était entrouverte... Et Clara semblait avoir été conduite de force de cette pièce jusqu'à un endroit que Jonas ne connaissait pas. Car il avait croisé Clara, tirée par la main par une scientifique passablement en colère. Le jeune homme s'était caché là où il le pouvait, et s'était demandé s'il fallait les suivre ou au contraire tenter de trouver d'où ils venaient. Par prudence et par curiosité, il décida de choisir la deuxième option. Après tout, il savait que Clara enquêtait... Donc, elle avait sûrement été surprise lors de cette enquête. S'il pouvait tenter, d'une façon ou d'une autre, de la compléter, il le ferait.

 

Il était donc désormais sur l'ordinateur du scientifique, dans son bureau, et regardait tous les dossiers ouverts par Clara... Des mathématiques, des plantes... Difficile à interpréter. Mais avec le long "parchemin" raturé de Rotiart, il comprit qu'il avait travaillé sur l'algorithme, seul. Pour le modifier.

Mais en continuant son voyage dans les dossiers que la jeune fille avait ouverts, il découvrit un dossier qu'elle n'avait vraisemblablement pas explorée... Il s'agissait de celui qui était ouvert sur l'écran lorsqu'il était arrivé. Le dernier consulté, en déduisait logiquement le jeune homme. Composé de nombreux autres dossiers, qu'il pouvait ouvrir sans problème. Et rapidement, il comprit ce que Clara cherchait dans ce répertoire. La preuve ultime, celle que personne ne pouvait nier.

 

ΘΣ-ΘΣ-ΘΣ-ΘΣ-ΘΣ-ΘΣ

 

Clara se trouvait dans une position vraiment, mais alors vraiment, inconfortable. Elle avait piraté des ordinateurs, elle avait consulté les fichiers personnels d'un scientifique et avait pénétré sans autorisation dans le bureau de celui-ci. Un scientifique extrêmement important, qui plus est.

Face à elle, ni Witnink, ni Rotiart, ni même le Docteur, ne semblaient croire à ses accusations. Elle maudissait intérieurement la femme qui l'avait coupée alors qu'elle était sur le point de découvrir LA preuve.

D'ailleurs, elle était surprise que le Docteur ne l'aide pas. Il était étonnamment du coté de Witnink, et son regard envers Clara était plein de reproches.

Rotiart venait de remonter sur le niveau surélevé, se plaçant derrière des ordinateurs et recommençant à travailler dessus. Clara, elle, était en dessous, et se trouvait séparée du Docteur et de Witnink par la rampe en métal. Et même si celle-ci était aisément contournable, elle lui semblait être une véritable barrière d'incompréhension qui la séparait de son Docteur... Son Docteur? Plus vraiment d'ailleurs. Elle avait beau le connaître mieux que lors de leur arrivé sur Qatros, il n'était plus vraiment "son" Docteur. Elle avait été auprès de lui pendant des centaines d'années, pour l'aider, pour le sauver, et il la voyait rarement... Mais elle avait été là. Sauf que les évènements que le Docteur vivait en ce moment précis étaient imprévus. Ils ne se trouvaient pas dans la ligne temporelle du Docteur sur Trenzalore. Elle n'avait jamais protégé ce Docteur là dans sa vie. Même sur Qatros, elle ne l'avait pas sauvé. Elle commençait à se sentir presque inutile en pensant comme ça. Il fallait qu'elle revienne vers le présent.

 

« Mais vous êtes forcément le coupable! cria-t-elle à Rotiart, qui se trouvait au-dessus d'elle.

- Mais qu'est-ce que vous dîtes, bon sang? s'exclama-t-il en relevant la tête de son ordinateur pour fixer Clara. Vous m'accusez sans preuve, et de quoi? D'avoir commandité un transport illégal et clandestin de "particules temporelles"? Premièrement, il aurait été bien plus facile d'organiser un transport légal, et deuxièmement, même si j'étais coupable de ça, je ne vois pas où est le problème. Après tout...

- Moi, je le vois! coupa une voix à coté de lui.

 

La porte au centre du mur venait de s'ouvrir, et Jonas venait d'entrer sur la partie surélevée. Son visage était impassible, et on voyait qu'il se forçait un peu pour ne pas changer d'expression.

 

- Je vais vous raconter une histoire, messieurs les scientifiques.

 

Il prit sa respiration, et commença alors à parler, avec un air à peu près détaché.

 

- Ma planète a été dirigée par un dictateur, pendant quarante-sept ans. Ce dictateur a massacré certaines populations. Il a réduit en esclavage des centaines de prisonniers pour les faire travailler dans des mines, sur des planètes et des lunes un peu partout dans le système solaire de ma planète. Il avait même changé le nom de mon monde. Qatros était devenu "Progus", du nom du Dictateur Prog. Il a unifié la planète et les colonies du système par la force, le feu, et les bains de sang.

 

Le jeune homme s'arrêta dans ses explications. Il devait aménager des pauses pour que les gens suivent, même si tout le monde ne comprendrait pas la fin.

 

- Mais il n'a pas fait ça tout seul. Une dictature planétaire, interplanétaire même... Pendant quarante-sept ans... Il a eu de l'aide. L'aide d'un scientifique, qui devait avoir des moyens incroyables. Un scientifique qui avait besoin d'une ressource du système stellaire. Une étoile massive, qui permettait la récolte de particules temporelles. Il a pu faire construire une base sur Onos, la première planète du système, avec l'accord du Dictateur. Celui-ci s'engageait à la défendre, et en échange, le scientifique lui offrait des technologies, et des armes, pour s'assurer que la Dictature continuerait.

- Mais c'est horrible... murmura Witnink.

- Un jour, le Docteur est arrivé sur ma planète. Ce jour là, tout a changé. En moins d'une journée, la Dictature était tombée. Cet homme, professeur, que vous voyez ici, a sauvé ma planète, lui a apporté la liberté. Et le Dictateur le savait. Il savait à quel point cet homme était dangereux pour lui. Parce que le scientifique savait qui était cet homme.

 

Rotiart, Clara et quelques autres scientifiques tournèrent immédiatement les yeux sur Witnink, qui était l'homme qui en savait le plus sur le Seigneur du Temps.

 

- Et comme il contrôlait la planète, il remarqua rapidement la présence du Docteur, continua Jonas. Le Dictateur avait peur, il se sentait menacé. Pour la première fois. Et alors, qu'a-t-il fait, d'après vous? Il devait protéger les intérêts de son associé et ceux de son régime. Il devait avertir le scientifique. Et pour ça, il lui a envoyé un message.

 

Un sourire commença à apparaître sur le visage du Docteur, et sur celui de Clara, qui voyait que Jonas avait compris ce qu'elle recherchait. Mais celui qui se trouvait sur le visage de Rotiart disparaissait peu à peu.

 

- La personne qui possède ce message est le coupable. Le scientifique qui a aidé une dictature, celui qui a trahi tous les autres en faisant cela tout seul. Parce qu'il a tout fait tout seul. Le message est la preuve irréfutable. Il a été reçu et réceptionné, mais jamais renvoyé à quiconque. Aucun autre message du même genre n'a été envoyé ensuite. Le coupable n'a averti personne de ce qui se passait sur ma planète.

 

Rotiart commençait à se mordre la lèvre, alors que les trois voyageurs temporels souriaient comme jamais. Clara n'avait pas travaillé pour rien, les impressions du Docteur s'avéraient vraies, et Jonas jouait au détective qui révèle ses indices.

 

- Ce message est unique. Il ne peut pas avoir été envoyé par quelqu'un d'autre, dans un autre contexte. Il n'a qu'une seule signification. Et cette signification, c'est: "Le Docteur est sur Progus". Et devinez où j'ai trouvé ce message?

- Très... Très fort, le gamin... coupa Rotiart.

 

Wintink avait les yeux écarquillés de stupeur en entendant son assistant prononcer ces mots. Le visage de Rotiart était sans équivoque.

 

- Kulvin... Non, Kulvin... Vous n'avez pas... Vous n'avez tout de même pas fait ça?

- GARDES! s'écria Rotiart.

 

Et alors, les quatre gardes armés présents dans la pièce se mirent à menacer les scientifiques de leurs armes. Les deux gardes présents derrière chaque porte ouvrirent celles-ci et se précipitèrent à l'intérieur pour immobiliser Jonas (sur le niveau surélevé), Clara, ainsi que le Docteur, qui n'eurent pas le temps de se débattre tant les hommes étaient entraînés. Witnink, quant à lui, n'essaya pas de se débattre. Il était tétanisé par la révélation à laquelle il venait d'assister.

Pendant ce temps, plusieurs scientifiques étaient sortis des tas blancs que formaient les "otages". Des alliés de Rotiart, qui connaissaient ses plans et qui y participaient.

Celui-ci s'était d'ailleurs remis du léger choc qu'il avait reçu. Cela faisait une cinquantaine d'années qu'il avait réussi à cacher ses véritables plans, et en quelques heures, ils avaient été découverts. Plus ou moins. Mais désormais, il fallait jouer le tout pour le tout. Il décida donc d'expliquer la situation, tout en pianotant sur les ordinateurs de la plateforme surélevée.

 

- Et oui, professeur. J'ai fait "ça". Parce que contrairement à vous, je suis un génie! Vous n'êtes pas un génie, vous! Vous avez beau être intelligent, vous êtes un idiot pur et sans aucune ambition. La régénération pour la Justice... cracha-t-il avec un air de dégout. Quel comportement naïf et candide...

- Mais vous... Vous partagiez ces convictions... Kulvin, vous...

- JE JOUAIS LE JEU! Croyez-vous réellement que les chefs de la Fédération, corrompus et intéressés seulement par leur petite personne, allaient accepter de financer vos recherches?

- Mais... Ils l'on fait, Kulvin! répondit Witnink. Et ils ne furent pas les seuls. De nombreux donateurs ont...

- POUR LA JUSTICE? s'écria Rotriart en pouffant de rire. Vous êtes pitoyable... Si le gouvernement vous a financé, si les riches donateurs ont été nombreux, ce n'est pas grâce à votre argumentation enfantine et innocente.

- C'est grâce à quoi alors? demanda Jonas.

- C'EST GRÂCE À MOI! hurla le scientifique. Si le gouvernement a donné les fonds, c'est parce que JE les avais convaincus. Si les riches de cette galaxie nous ont aidés, c'est parce que JE leur avait demandé!

- Mais pourquoi? murmurait Witnink. Pourquoi leur avoir demandé? Qu'est-ce que vous vouliez faire avec l'expérience? Qu'est-ce que vous leur avez dit?

- Vous n'avez aucune ambition, Witnink... Tout ce que vous voulez, c'est une régénération aléatoire pour les criminels de cet univers. Mais pourquoi chercher l'aléatoire quand l'algorithme peut permettre au Régénérateur de modifier de façon ordonnée l'ADN et la biologie d'une personne?

- Une régénération non-aléatoire... comprit le Docteur.

- Exactement. On est mourant? Le régénérateur nous retransforme en nous-même, mais en plus jeune. On a besoin de main d'œuvre. On prend des gens et on en fait des esclaves. Besoin d'une armée? Régénérons des gens en soldats qui ne posent pas de questions, qui sont musclés, endurants, résistants aux maladies et maîtres dans le maniement des armes.

- Mais c'est impossible d'être aussi précis, répliqua, tétanisé, Witnink. Et puis, où prendriez vous les gens?

- Tout est possible, quand on a le génie nécessaire. J'ai déjà réussi à transformer votre algorithme! J'avais l'ADN du Seigneur du Temps! Des alliés sur Progus avaient réussi à m'en fournir. Il avait laissé des traces sur une place publique, à ce que j'ai compris. J'avais même des restes d'énergie régénératrice! Il m'a fallu plusieurs années pour mettre au point des profils physiques et psychologiques précis, et plusieurs mois pour les adapter à l'algorithme, mais maintenant, je peux créer une armée d'esclaves ou de soldats!

- Mais à partir de quoi? lança Clara. Vous ne pouvez pas créer à partir de rien. Il vous faut des gens! Qui ce sera, ces gens, hein?

- Oh, des criminels, des scientifiques comme ceux qui sont ici et qui ne m'ont pas aidé... Puis des citoyens, des prisonniers de guerre spécialement capturés pour cela.

- La Fédération ne construira jamais d'armée de cette manière! cria un scientifique.

- Qui a dit que c'était la Fédération qui allait en profiter? Je leur ait fait croire que grâce à moi, ils pourraient vivre éternellement. Mais je créerai ma propre armée. La Fédération tombera!

- Vous êtes complètement taré, soupira le Docteur.

- Taisez-vous! Vous ne saviez même pas que c'était moi le "coupable", comme vous dîtes! Vous êtes bien plus idiot qu'on ne le dit, Docteur.

- Je suis bien plus intelligent que vous... La preuve, je vais vous dire que...

- TAISEZ-VOUS! Je ne veux PAS vous entendre. Vous êtes un imbécile, comparé à moi!Le coup d'état sur Progus était un coup de chance, même s'il m'a forcé à accélérer mes plans. D'ailleurs, mes études sur les particules portaient leur fruit: celles que je faisais ramener de la base étaient 100 fois plus exploitables que celles ramenées "légalement", puisque je suis sûr que quelqu'un allait poser la question du "Pourquoi Progus?". Mais comme je le disais, vous m'avez forcé à accélérer mes plans en déclenchant cette révolution, et encore plus en découvrant qui je suis réellement.

 

Il termina de pianoter sur le clavier, et se dirigea vers une console occupée, au centre, par un grand levier, entouré de nombreux boutons et interrupteurs.

 

- J'ai modifié l'algorithme présent dans le Régénérateur... J'ai mis "celui qui transforme en esclave"... Très peu de libre arbitre, un corps taillé pour les travaux manuels, une réflexion grandement diminuée... Je pense que c'est le meilleur choix pour tenter la première régénération complète en laboratoire.

- QUOI? s'écrièrent ensemble le Docteur, Witnink, Clara et Jonas.

- Et bien entendu, il nous faut un cobaye. Un "volontaire"... Vous deux, dit-il en s'adressant à deux scientifiques qui l'aidaient. Vous allez m'attacher le pseudo-détective dans le Régénérateur.

- NON! s'écria Jonas. NOOON!

 

Il tentait de rester sur place, en poussant avec ses pieds, mais la force combinée du garde et des deux scientifiques était bien supérieure. La vitre qui permettait d'entrer dans la cavité du régénérateur était ouverte, et il fut plaqué au fond du module, pour que l'on puisse attacher bras et jambes sans qu'il ne se débatte trop. Il fallait que les boucles métalliques touchent la peau, pour permettre le transfert de l'énergie dans le corps... Ainsi, on lui avait retroussé les manches et les revers de son pantalon. Les boucles étaient faîtes pour serrer le plus possible, et s'adaptaient aux poignets, au bras et aux jambes du jeune homme. Devant lui, alors qu'il criait et qu'il suppliait les scientifiques, la vitre de protection se fermait. Mais il continuait de crier, et dans sa tête, il priait les vivantes étoiles...

 

- C'est le plus grand jour de la science, messieurs! s'exclamait Rotiart. En ce jour, en ce lieu, nous expérimentons la PREMIÈRE régénération d'un être humain. Retenez votre souffle, et admirez le spectacle. »

 

Et alors, sous les regards horrifiés et impuissants de Witnink, de Clara, du Docteur et d'une dizaine de scientifiques otages, le traître abaissa la manette située au centre de la console, et la régénération commença.

 

[http://img15.hostingpics.net/pics/529331LeBtardduTemps1fin.jpg]

Laisser un commentaire ?