Doctor Who Alternative: Saison 8

Chapitre 19 : Égal [Partie 1]

6702 mots, Catégorie: K+

Dernière mise à jour 09/11/2016 18:29

La porte des toilettes s'ouvrit lentement. Derrière elle, on pouvait voir la grande salle de cinéma, et l'écran holographique qui montrait des images de combats épiques et mortels au beau milieu de l'espace. Le capitaine Jack Harkness n'appréciait pas vraiment le spectacle, et sa vessie semblait l'encourager dans sa démarche qui pouvait se résumer en un mot: partir. C'est ainsi qu'il remonta toute la salle et ses escaliers, frôlant des couples qui s'embrassaient, des cyborg qui se disputaient, ainsi qu'un Raxacoricofalapatorien qui gênait grandement toutes les personnes assises autour de lui. Finalement, il arriva au sommet de la salle, et entra dans la pièce des sanitaires. C'était une salle rectangulaire, dont la moitié était occupée par des cabines de toilettes de différentes tailles (il fallait s'adapter à toutes les espèces), à gauche du capitaine, alors que le mur de droite était rempli d'urinoirs et d'éviers. Une seule personne se trouvait ici: c'était un extraterrestre assez étrange, à la peau rouge, avec une grande crête sur la tête. Toute les caractéristiques d'un Blowfish. Et c'en était un. Il faisait ses petits besoins dans un des urinoirs, et n'eut qu'un léger regard pour l'humain qui arrivait. Harkness se plaça à coté de lui, et commença sa propre besogne.

 

« Vous non plus vous n'aimez pas le film? demanda l'alien tout en restant concentré sur sa propre action.

- Disons que la Bande-Annonce semblait meilleure.

- Forcément, elle est là pour vendre.

 

Le poisson se décida alors à regarder l'humain, et le détailla de la tête au pieds en quelques secondes. En réalité, son regard n'atteignit pas les pieds, et s'arrêta au niveau du bassin du Capitaine. Ses yeux ronds s'étaient totalement exorbités face au... "spectacle". Et lorsque l'agent de Torchwood s'en rendit compte, il lui tendit la main, pris son meilleur sourire, et lança:

 

- Capitaine Jack Harkness!

- Arrêtez de flirter, lança un homme derrière lui.

 

Même s'il n'avait jamais entendu cette voix, Jack ne connaissait que trop bien le message. Il se retourna, sans oublier de refermer son pantalon, et aperçut un homme: plutôt grand, habillé de blanc et de noir, surmonté de longs cheveux noirs décoiffés... Derrière lui se trouvait quelque chose d'étrange. Il y avait comme un rectangle qui se découpait dans la réalité, au milieu de nulle part, et qui semblait être la porte d'un petit univers gris illuminé d'une lumière bleue, au centre duquel trônait une console hexagonale.

 

- J'ai besoin de vous, Jack.

- Docteur?

- D'après vous, abruti! répondit l'homme en riant.

- Euh... je dérange? demanda le Blowfish.

- Oui! lâcha le Seigneur du Temps. Sortez d'ici immédiatement, nous devons être seuls.

- Les fangirls... soupira Harkness à l'alien. On se reverra plus tard!

 

Et après avoir lancé un clin d'œil dont il avait le secret, et une fois que le Blowfish eut quitté la pièce, il continua:

 

- Bon, pourquoi avez-vous besoin de moi? Si c'est juste pour la nuit, ça me pose pas de problème, tant que vous me ramenez dans le coin à l'heure, mais...

- Jack, ce n'est pas le moment. Nous avons un grave problème, peut-être même plus grave que je ne le pense moi-même.

- Vous vous fourrez toujours dans les pires situations, hein? Là-dessus vous n'avez pas changé. Parce que le reste...

- Comment ça le reste?

- Ben si ça c'est votre coiffure, et ça c'est la déco' du TARDIS... notait-il en pointant les cheveux et la porte de la cabine camouflée. Ben, c'était mieux avant, quoi. Où sont passé les colonnes de corail et la carrosserie de cabine bleue?

- Mais fermez-là! »

 

Égal

Partie 1

 

Quelques semaines plus tôt

 

La cabine arriva comme par magie, clignotant et lançant son souffle mécanique à travers la rue presque déserte. Lorsque les trois voyageurs temporels en sortirent, ils furent d'abord frappés par la grande chaleur du lieu. En même temps, peut-être fallait-il préciser que leur dernier voyage les avait amenés au milieu d'une planète gelée...

 

« Où est-on? demanda Clara.

- Vous allez bien vite le savoir, coupa le Docteur. Suivez-moi, je crois que c'est par là.

 

Le groupe s'engagea dans la rue étroite, délimitée par des immeubles de quelques étages seulement, aux fenêtres sans vitres, et faits de matériaux assez simples. Rien de moderne, de futuriste, et même rien qui ne s'approchait des barres d'immeubles des années 1970 ou des maisons médiévales. Entre les pavés du sol, on pouvait voir des liquides plus ou moins visqueux et colorés glisser vers le coté opposé de la marche du groupe, la rue étant en pente légère. Des odeurs nauséabondes sortaient de ces fluides, qui coulaient aussi par des espèces de gouttières creusées dans le sol, sur les cotés de la voie.

 

- Ce sont les déchets des habitants des immeubles, expliqua le Docteur. Ils lâchent tout depuis la fenêtre, et ça atterrit dans ces caniveaux sur les cotés. Bien sûr, la vitesse de chute fait que ça éclabousse un peu sur le coté, mais bon, c'est pas bien méchant.

- Ces gens n'ont pas d'égouts? Mais on est à quelle époque, bon sang? s'insurgeait Clara.

- Au LXIème siècle... Mais nous sommes très éloignés de la Terre.

 

La marche continua, et le groupe tourna dans quelques rues, toutes plus grandes que les précédents, pour finalement arriver sur l'équivalent d'une avenue assez fréquentée, et déboucher sur une grande place marchande.

 

- Bienvenue sur Rémox! s'exclama le Docteur. Planète antique, certes, mais à la civilisation extrêmement avancée pour des antiques. Leur compréhension de l'astronomie, notamment, ainsi que de l'anatomie et d'autres sciences du genre est sans égale ou presque dans les civilisations équivalentes dans l'univers, et bien au-dessus de celle des Romains, Grecs et autres Égyptiens!

 

Le Docteur parlait avec passion. Mais ses compagnons étaient encore plus fascinés. La place, rectangulaire, située vraisemblablement au sommet d'une colline, était magnifique, remplie d'odeurs diverses et variées, de couleurs, d'œuvre d'art. L'endroit était encadré par de longues arcades qui courraient sous les immeubles, soutenus par des minces colonnes taillées à la perfection, qui représentaient toutes des animaux marins qui ressemblaient à des dauphins ou à des poissons. La place en elle même était faite de pavés tous difformes, mais qui se complétaient presque parfaitement, comme un énorme puzzle d'art moderne. Le lieu était rempli d'étals de bois, abrités du large soleil de Rémox par des textiles bleus, rouges, blancs, verts. Tous abritaient des hommes ou des femmes, qui vendaient l'incroyable aux passants: ici, on voyait des vaisselles en argent ou en verre, là on admirait des étoffes diaprées, ici encore on s'émerveillait face à la beauté de statuettes taillées dans le rubis ou le saphir. Les pièces d'or brillaient sous les rayons de l'étoile qui emplissait le ciel, au fur et à mesure des échanges qui se faisaient. Certains troquaient, d'autres payaient. Il y avait aussi des voleurs, mais l'œil vigilant des vendeurs était légendaire.

Le Docteur s'approcha d'un de ces hommes. C'était une personne de grande taille, aux cheveux grisonnants, qui vendait des choses assez diverses, mais qui tournaient surtout autour de l'art ou du jeu: des statuettes-pions, des dés à 7 faces, des sabliers de cristal, des espèces de parchemins particulièrement lisses et élégants, ainsi que des gravures, mosaïques et vaisselles décoratives.

 

- Bonjour, monsieur! s'exclama le vendeur. Vous cherchez quelque chose? Je possède de magnifiques dés en os de Loyoyvran, ainsi que des...

- En fait je chercherais plutôt un lieu ou dormir avec mes deux esclaves, ainsi qu'un guide pour visiter la ville.

- Comment ça vos deux... s'insurgea Clara.

- On se tait! coupa le Docteur.

- Écoutez, monsieur, vous avez deux esclaves, je pense que vous pouvez vous payer quelques nuits dans des auberges très réputées... sifflait le marchand.

- Vous ne pouvez pas nous héberger?

- Pardon? Non mais de quel droit me demandez-vous cela? L'hospitalité à Rémoxia est peut-être légendaire, mais elle ne s'offre pas au premier venu! De plus, vous avez l'argent pour...

- Et si je vous offrais quelque chose d'inédit?

- Pardon?

 

Le Docteur sortit alors un paquet de cartes terrien de sa veste, et le tendit au marchand. Celui-ci l'ouvrit, l'examina avec des yeux d'experts, et le posa sur son étal.

 

- Et bien... Je dois avouer que je n'ai jamais rien vu de tel. Un paquet de cartes organisé en quatre groupes, et non pas trois ou cinq, avec ces figures d'un style vraiment très particulier... D'où vient donc ce jeu?

- Oh, de loin. Comme nous. Nous qui ne connaissons pas la ville, et qui avons besoin d'un guide et d'un toit... murmurait innocemment le Docteur.

- Vous avez une haute estime pour vos esclaves, je trouve... Ils sont bizarrement habillés, surtout votre gigolo, là. Vous voulez qu'ils visitent avec vous?

- Oui, j'y tiens. Donc, si vous acceptez de nous héberger et de nous trouver un guide, le paquet est à vous.

- Dans ce cas, monsieur, l'affaire est conclue. Je connais des scribes et graveurs qui payeraient des sommes faramineuses pour un objet aussi exotique, pour le reproduire! Cependant, pourrais-je au moins savoir qui aura l'honneur d'être hébergé sous le toit du grand marchand Crucien?

- Le Docteur, et ses esclaves: Jonas, qui soi-dit-en-passant n'est pas un prostitué, et Clara. »

 

ΘΣ-ΘΣ-ΘΣ-ΘΣ-ΘΣ-ΘΣ

 

Le lendemain fut un jour des plus touristiques pour le Docteur et ses "esclaves", ce qui ne manquait pas de leur rappeler avec nostalgie leur tournée olympique. Jonas et Clara avaient été rhabillés de façon à correspondre un peu plus aux standards de l'époque. Jonas était habillé d'une simple tunique brune et d'un pantalon fait d'un tissu qui ne semblait pas très fiable, tandis que Clara se trouvait affublé d'une sorte de robe, brune aussi, un tout petit peu trop grande pour elle. Le Docteur, par son statut de riche privilégié, avait réussi à garder ses vêtements, qui de toute façon étaient assez passe-partout.

Les trois voyageurs temporels étaient guidés par Élémohn, un esclave d'une trentaine d'année, qui appartenait à Crucien, le marchand qui les hébergeait, et qui connaissait grandement la ville. C'était une personne svelte, presque maigrichonne, au visage un peu creusé, sans pour autant laisser paraître qu'il se nourrissait dans les restes de ses maîtres. Sa peau, tannée et bronzée par l'étoile de Rémox, semblait parfois un peu fripée sur les bords, mais il ne semblait pas trop vieillissant pour autant: ses cheveux noirs n'étaient pas en train de devenir gris.

La ville, Rémoxia, était la capitale d'un grand empire colonial et de nombreuses provinces, une civilisation qui, en quelques siècles avait conquis un territoire qui, au dire des plus grands scientifiques de cette nation, représentait presque le quart de la planète, et qui s'étendait sur les trois continents connus de ces scientifiques. On parlait de la Grande République Rémoxaine, qui allait des Mers Gelées du Nord au Grand Désert, et des Îles Presque Noyées aux Forêts Impénétrables, séparées par l'Océan Traversé, qui portait ce nom depuis que les expéditions rémoxaines avaient traversé les presque 2500 km qui séparaient la côte de leur continent d'origine et celle de leurs actuelles colonies.

Tout cela passionnait le Docteur, qui n'avait pas beaucoup entendu parler de cette planète. Clara était tout aussi émerveillée. Mais dans le cas de Jonas, c'était difficilement descriptible. Chaque seconde passée sur cette planète était pour lui un plaisir exquis. Par ses nouveaux vêtements, par son "statut" d'esclave que le Docteur avait imposé, prétextant que c'était la meilleure chose à faire pour se fondre dans l'endroit. Et Jonas se sentait vraiment vivre dans une sorte d'antiquité: les temples, les galeries, les places, les rues, les établissements sportifs et les bains publics, tout ça était incroyable pour lui. Sa planète, comme beaucoup d'autres, avait vécu une période "antique", mais l'arrivée de la Dictature, plusieurs siècles plus tard, avait vu la destruction de nombreuses archives et livres. Les rares exemplaires d'ouvrages possédant des informations crédibles et réelles sur cette époque n'avaient pu être recopiés et réédités qu'après la chute d'Honorius Prog, et Jonas n'avait pas vraiment eu le temps d'en consulter, vu son départ rapide. Ce qui se trouvait être une légende de son enfance, cette connaissance confuse qui ne se transmettait que par la parole, et qu'un petit village comme Krumwen, où était né le jeune homme, ne pouvait connaître, il la vivait. Et sa curiosité était sans fin, si bien qu'à la fin de la journée, Élémohn suppliait presque le Docteur pour qu'il oblige parfois son esclave à se taire.

 

ΘΣ-ΘΣ-ΘΣ-ΘΣ-ΘΣ-ΘΣ

 

La main, aux doigts ornés d'ongles parfaitement taillés, pianota sur un clavier, et se rapprocha ensuite de l'oreille de sa propriétaire, pour activer une petite oreillette. La femme attendit quelque secondes, puis une voix métallique se fit entendre, une voix qui semblait sans nul doute être celle d'un robot.

 

« Le vaisseau est en place. Les systèmes de transmat sont fonctionnels. L'unité est prête pour la Cérémonie.

- Parfait, répondit une autre voix robotique dans l'interphone, un peu plus grave.

- Il y a cependant un problème, Leader. Nos observations orbitales nous ont mené à une conclusion dangereuse pour la survie de la Divine Égalité.

- Quelle conclusion? Quelles observations avez-vous faîtes?

- Une cabine téléphonique bleue a été observée dans une rue de la Capitale Rémoxia. Les probabilités pour qu'il s'agisse du Docteur ont été estimées à 83,782%.

- L'empereur a laissé des instructions claires. Si le Docteur nous découvre, l'opération globale peut être compromise.

- Nous devons donc l'éliminer?

- Non. Les instructions prévoient une capture du Docteur. L'empereur voit en lui un avantage, s'il est bien utilisé. Cependant, ne faîtes rien: nous estimons que si la Cérémonie se passe comme prévu, il y a 84,12% de chances pour que le Docteur vous poursuive de lui-même. L'empereur compte bien entendu sur votre efficacité dans sa capture. Terminé.

 

La femme désactiva son oreillette, la posa à coté du clavier qui se trouvait face à elle, et dans l'obscurité de la pièce, elle ne put s'empêcher de murmurer:

 

- Intéressant. Docteur, je crois que nous allons nous retrouver, pour le meilleur et pour le pire. »

 

ΘΣ-ΘΣ-ΘΣ-ΘΣ-ΘΣ-ΘΣ

 

Le Temple de l'Égalité ressemblait au TARDIS... Tout d'abord, il était bleu. Partout ou presque, on trouvait le bleu: sur les larges colonnes de l'entrée, sur les plus fines qui soutenaient le plafond de l'intérieur, sur les murs, sur les sols, sur les voutes et les toits, et même les dorures, pensait le Docteur. Mais surtout, l'endroit donnait une étrange sensation de dimension relative, ou, pour les non-habitués au jargon, donnait l'effet "plus grand à l'intérieur".

En réalité, le Temple était parfaitement proportionné, et l'intérieur s'imbriquait parfaitement dans l'extérieur. Mais les architectes Remoxains étaient des professionnels, bien plus avancés que les romains et grecs, et l'intérieur, par un habile jeu de miroir invisibles au premier coup d'œil, de colonnes bien placées et de trompe-l'œil, semblait bien plus large et long que la structure ne l'était vraiment.

 

La présence de plusieurs centaines de personnes agenouillées dans ce qui semblait être la nef du bâtiment pouvait aussi y être pour quelque chose. Les riches marchands de la capitale s'étaient réunis pour, disait Crucien, la "Grande Cérémonie de l'Ascension", à laquelle l'hôte du Docteur participait.

Le culte Rémoxain se basait sur l'égalité. Leur société, en elle-même, était loin d'être égalitaire, et la simple existence d'esclaves et de citoyens pouvait sembler en totale contradiction avec les croyances des habitants. Mais la réalité était plus complexe. Pour les Rémoxains, l'égalité était un droit divin, détenu par les Égaux, des créatures dîtes "faîtes de Plomb et répudiant l'Or". Les habitants ne croyaient pas en un dieu, ni en plusieurs. Ils croyaient juste en ces créatures plus mythologiques que divines, finalement. Là où dans certaines civilisations sur Terre, on croyait au paradis et à l'enfer, les Rémoxains croyaient eux à la Divine Égalité, accessible après la mort: un monde où personne ne dirige, où tout le monde vaut autant que tout le monde, la société la plus parfaite de l'univers.

 

« Cependant, les Égaux viennent parfois chercher eux-même des gens, murmurait Élémohn.

 

Les voyageurs temporels et leur guide se trouvaient derrière les colonnes qui délimitaient les zones de cérémonies des zones d'observations, dans le Temple, au beau milieu d'une foule venue pour assister à la Cérémonie, et qui admirait les centaines de marchands, habillés de façon très simple, qui psalmodiaient dans leur langue, le Rox, au milieu du bâtiment bleu.

 

- Je veux pas offenser les gens de cette planète, chuchotait Jonas au Docteur, mais comment des créatures mythologiques peuvent-elles exister et venir chercher des gens ici?

- D'un coté, ces créatures pourraient exister... remarqua Clara.

- Si quelqu'un les a déjà vus, alors il y a des chances pour que ces Égaux existent. Mais je ne crois pas qu'ils aient des pouvoirs mythologiques, expliqua le Docteur, toujours à voix basse.

-Alors qui sont-ils? souffla Jonas. Des aliens?

- Possible. Une civilisation supérieure, de niveau interplanétaire, peut facilement berner une planète comme Rémox, aussi intelligente soit la civilisation qui y habite.

- Mais pourquoi faire ça?

- Ah, ça c'est quelque chose qui ne demande qu'à être découvert.

- De quoi parlez-vous? demanda leur guide, qui n'avait pas compris les chuchottements.

- On se demandait juste comment la Cérémonie allait se passer, mentit le Seigneur du Temps.

- Oh, je n'ai pas assisté à beaucoup de ces cérémonies, mais je m'en souviens quand même. Vous voyez le mur, au fond de cette pièce? Derrière, il y a le sanctuaire du Temple. Les Égaux arrivent dans le Sanctuaire grâce à leurs pouvoirs, se rendent dans la salle principale, choisissent cinq élus, et les ramènent avec eux dans le Sanctuaire.

- Et après?

- Et bien, après, il y a l'Ascension, et les élus deviennent eux aussi des Égaux.

- Comment cela se passe-t-il?

- Personne ne le sait, voyons! Les élus ne sont jamais revenus, ils deviennent Égaux et vivent entre eux dans des mondes dont l'existence dépasse notre compréhension. Et puis ce sont des secrets extr...

 

Un son de cloche coupa l'esclave dans ses murmures. Un son qui ressemblait fortement à la cloche du cloître du TARDIS. Un homme en large toge blanche se leva et imposa le silence.

 

- La Cloche du Sanctuaire sonne sur Rémoxia! La Cérémonie va commencer! annonçait-il. Les Égaux arrivent!

 

Et comme pour illustrer ses propos, des bruits de pas se firent entendre. Des pas lourds, mais d'une régularité irréprochable, étouffés par l'épais mur qui séparait les deux parties du temple. Sur ce mur, la large dalle de marbre cyan qui servait de porte commença à se soulever lentement, par un habile jeu de poulies et de cordes camouflées. Et derrière le rectangle minéral, deux silhouettes se dessinaient dans la lumière qui s'échappait du sanctuaire. Deux épaisses jambes de métal, puis un torse d'argent, bombé, surmonté d'un visage métallique dont la bouche ne consistait qu'en une fente noire, tandis que les yeux n'étaient que deux trous circulaires et obscurs, et ce crane se trouvait être encadré par deux épaisses tiges de métals pliées en demi-rectangle, partant de ce qui pouvait s'apparenter à une zone située en-dessous d'oreilles absentes, et qui se rejoignaient au-dessus du front argenté de la créature.

Clara poussa un léger cri de surprise, qui se perdit dans ceux des observateurs de la cérémonie, toujours impressionnés par ces rares apparitions. Mais elle, elle savait de quoi il s'agissait, et elle était tétanisée en voyant ces êtres cyborgs marcher d'un pas assuré au milieu des fidèles agenouillés, avec ce bruit de vérin hydraulique, qui avait du inspirer la peur dans des milliers de mondes, alors qu'ici il était admiré et sûrement aimé.

 

- Des Cybermen, s'étouffa-t-elle. Docteur, ce sont des Cybermen!

- De quoi? hoqueta Jonas. C'est quoi des Cybermen?

- Taisez-vous, tous les deux! coupa le Seigneur du Temps, légèrement blême. Bon sang, si ce sont eux les Égaux, alors le sort des "élus" n'est pas bien compliqué à comprendre! Et Crucien est dans les choix possibles! Pourquoi, d'ailleurs, Élémohn?

- Voyons, Docteur, il faut se taire et...

- Tout le monde murmure, pauvre idiot! Alors expliquez-moi!

- Il y a quatre jours, le prêtre a annoncé que les Égaux offriraient l'Ascension, seulement à des marchands. Maître Crucien a fait le choix de participer à la cérémonie. La dernière fois que les Égaux ont souhaité être rejoints par des marchands, c'était il y a 14 mois, et maître Crucien était en voyage...

- Espérons qu'il ne soit pas choisi, alors... murmura le Docteur. Pour l'instant, on reste là, Clara, je ne veux pas que les Cybermen nous découvrent tout de suite. Dès que la cérémonie est terminée, on enquête et...

- Loués soient les égaux! murmura Élémohn. Mon maître va les rejoindre!

- QUOI?

 

En effet, Crucien s'était relevé, face à un des deux Cyberman, qui lui fit signe de se diriger vers le Sanctuaire. Le marchand se tourna vers ses hôtes, leur lançant un grand sourire, auquel son esclave répondit par un sourire encore plus grand, ce qui horrifiait grandement Clara et le Docteur.

 

- Docteur, qu'est-ce qui va se passer? Qui sont ces "Cybermen"? insistait Jonas.

- J'expliquerai plus tard. Mais pour l'instant, il est presque sûr que Crucien va subir une Cyberconversion, ou une Mise à Jour, au choix...

- Laissez-moi deviner... C'est pas la meilleure chose qui puisse lui arriver?

- Non.

- Alors on doit empêcher tout ça! cria le jeune homme. Qu'est-ce qu'on fait ici à discuter?

 

Le Docteur soupira en voyant un Jonas aussi déterminé, alors qu'il n'avait pas même conscience de l'ampleur de la situation. Mais il avait raison. Le Docteur poussa les quelques personnes qui se trouvaient devant lui, et sauta les deux marches qui séparaient la zone d'observation de la zone de cérémonie, suivi par ses deux compagnons, et par Élémohn, qui le faisait plus pour défendre son maître des voyageurs temporels que des Égaux.

Alors que ce beau monde courait au milieu des marchands encore agenouillés et déçus, les cinq élus finissaient d'entrer dans le Sanctuaire, suivis par le Cyberman encore présent dans la salle de cérémonie. Il fut averti par les cris des non-choisis, des observateurs et de l'esclave de Crucien, et se retourna pour voir le Docteur brandir son tournevis, suivi par Clara et Jonas, aux visages déterminés, eux-mêmes poursuivis par Élémohn, bien décidé à ne pas laisser ces étrangers empêcher l'ascension de son maître. L'homme de fer comprit rapidement que l'homme tenant un appareil sonique circulaire émettant une lumière verte était le Seigneur du Temps le plus honni des Cybermen, si tant est qu'ils puissent ressentir la haine. Il s'arrêta donc juste devant l'entrée du Sanctuaire, et tendit son bras en direction de la petite troupe.

 

- COUCHEZ-VOUS! cria le Docteur.

 

Un rayon rouge sortit d'un canon très bien camouflé dans l'épais bras du Cyborg, frôla le dos des voyageurs temporels, et la tunique d'Élémohn qui n'avait pas écouté le Seigneur du Temps, pour finir dans une colonne qui se fissura sous le choc.

Le Cyberman rabattit son bras contre son tronc, et rentra dans le Sancturaire, tandis que la dalle marbrée dans le mur redescendait assez rapidement pour condamner la pièce.

 

- Courez! Il faut rentrer là-dedans! s'exclama le Docteur.

 

Le Seigneur du Temps sauta au-dessus de quelques hommes et femmes agenouillés, suivi de près par ses compagnons et par l'esclave, et rentra à toute vitesse dans le Sanctuaire en se baissant grandement, tout comme Clara et Jonas. Élémohn, lui, fit une roulade en urgence pour pouvoir passer dans l'espace de plus en plus mince qui séparait le sol de la dalle, qui acheva sa descente quelques secondes plus tard.

 

Le Sanctuaire était vide, si on exceptait la décoration: trois statues métalliques de Cybermen, quatre fois plus grandes que les originaux, chacune collée au milieu d'un des trois murs en contact avec l'extérieur. Et au milieu, une sorte de cercle fait d'un tube argenté de quelques centimètres de diamètre, qui formait une boucle, collé au sol bleu.

 

- Ils se sont téléportés! devina Jonas.

- Bien vu! admit le Seigneur du Temps en se dirigeant vers le cercle, tournevis à la main. Il s'agit, sans erreur possible, d'un système de Transmat. Et avec un peu de chance, on peut le réactiver. Et on dirait qu'il s'agit d'un Transmat évolué, celui-là.

- Ce qui veux dire?

- Ce qui veux dire, Clara, que l'on a pas besoin d'un autre Transmat à l'endroit où l'on souhaite se rendre. Il peut nous téléporter à peu près où on veut, dans un rayon raisonnable, bien sûr.

 

En disant cela, le Seigneur du Temps analysait le rebord du cercle avec son tournevis, puis regarda celui-ci, consultant les informations qu'il réussissait à lui donner... Ensuite, il activa quelques fonctionnalités sur son appareil, et l'activa sur plusieurs parties du tube, qui commença à vibrer légèrement, faisant presque écho aux bourdonnements du tournevis.

 

- Bon, il va falloir les retrouver, et je pense qu'ils sont quelque part en orbite, mais la mémoire du Transmat est trop bien protégée. Il va me falloir une aide du TARDIS pour localiser le vaisseau et trouver où se téléporter exactement. Jonas, passez-moi votre clef, que je le contacte, expliqua le Docteur en tendant sa main vers le jeune homme.

- Ma quoi?

- Votre clef. Celle du TARDIS.

- Mais j'en ai pas... Pourquoi je devrais en avoir une?

- Comment ça, vous n'en avez pas? Je ne vous en ai pas donné?

- Non...

 

Le Seigneur du Temps se releva lentement, lançant un regard curieux vers le vide, murmurant qu'en effet, il n'avait pas donné de clef au jeune homme. Cet instant ne dura que quelques secondes, mais semblait bien plus long aux yeux de Clara et du Docteur, et le silence qui s'était installé dans la pièce ne fut brisé que par une remarque d'Élémohn, légèrement en colère:

 

- Mais qu'est-ce qui s'est passé??

- Ils ont disparu, les Cybermen et leurs victimes. Téléportés, expliqua Clara.

- Ce sont les pouvoirs des Égaux, ils peuvent apparaître et disparaître à leur guise! Et vous lez avez provoqué, Docteur, ils ont voulu nous briser comme ils ont brisé la colonne et...

- Taisez-vous! Vous n'allez pas me dire que vous croyez à ces mythes, vous qui vivez dans une civilisation aussi avancée, et qui êtes vous-même assez intelligent, à ce que j'ai pu comprendre?

- Bien sûr que si, j'y crois, comme tout le monde ici! Pourquoi devrions-nous en douter, Docteur? Vous les avez vu de vos propres yeux! Les Égaux existent, ils peuvent disparaître et réapparaître à volonté, et sont capables de détruire la pierre, et bien plus encore! Vous l'avez vu!

- Il marque un point, Docteur... remarqua Jonas.

- Mais nous savons, enfin, pas vous Jonas, que ce ne sont pas des Égaux ou des créatures mythologiques! Ce sont des Cybermen, des cyborgs qui ne ressentent plus aucune émotion! Et ils ne veulent aucun bien à votre maître. Donc, nous allons aller le sauver des griffes de ces bonshommes, découvrir pourquoi ils exploitent votre planète de cette façon, et ensuite...

- Ensuite? interrogea Jonas.

- On avisera. Comme toujours. Bon, je vais utiliser ma propre clef...

 

Le Docteur sortit sa clef d'une poche interne de sa veste noire, et pointa son tournevis vers l'objet. Quelques secondes plus tard, la clef s'illumina. Le Seigneur du Temps était grandement concentré sur ce qu'il faisait. Après un moment qui semblait bien trop long, il repris son tournevis, le régla de façon à interagir avec le Transmat, et enfin, le pointa vers le tube métallique, en l'activant.

 

- Bien, tout le monde dans le cercle du Transmat. Même vous, Élémohn, sauf si vous souhaitez que l'on vous retrouve dans le Sanctuaire sacré de l'Égalité, ou quelque soit son nom...

- J'imagine que je n'ai pas le choix... grogna le Rémoxain. Et puis, je dois toujours vous accompagner, en théorie, non?

- Et oui, allez, venez! s'impatientait Clara. »

 

Une fois que l'esclave eut sauté à l'intérieur du cercle, le Docteur tendit son tournevis vers le bas, et l'activa, ce qui eut pour effet d'activer le système. Le tube vibra, et quelques secondes plus tard, les quatre personnes qui se trouvaient dans le sanctuaire disparurent.

 

ΘΣ-ΘΣ-ΘΣ-ΘΣ-ΘΣ-ΘΣ

 

« Vous! ordonna le Cyberman.

- Moi? s'étonna Crucien.

 

Les 5 élus étaient eux aussi rentré dans le cercle, et avaient disparu pour réapparaître dans un étrange lieu fait de métal gris et argenté, mais moins brillant que celui qui recouvrait les Cybermen. On les avait fait passer dans plusieurs couloirs, pour finalement les arrêter dans une pièce rectangulaire et sombre qui ouvrait d'un coté sur un corridor, et de l'autre sur une pièce mystérieuse fermée par une porte rouge, où allait se dérouler l'Ascension, selon les cyborgs.

 

- Oui. Vous allez subir l'Ascension en premier.

- Oh, c'est un immense honneur pour moi! Je dois entrer par cette porte, c'est ça? demanda le marchand en pointant la porte rouge.

- Oui, expliqua un deuxième Cyberman, alors que la porte métallique coulissait vers la droite. Entrez, et ne parlez pas. Il est possible que vous ressentiez de la douleur. Rappelez-vous qu'une fois l'Ascension achevée, les Égaux ne connaissent plus la douleur.

 

Le riche marchand s'avança lentement vers l'espace laissé par la porte, et entra. Il se trouvait désormais dans une petite pièce, éclairée par une lumière rouge venant d'il ne savait trop où. La porte se referma derrière lui, mais ça ne l'inquiéta pas le moins du monde. Devant lui se trouvait une plaque de métal particulièrement épaisse, d'où sortaient des boucles qui semblaient être placées de façon à accueillir un humain.

 

- Placez-vous sur la plaque de façon à être immobilisé! ordonna une voix robotique.

 

Crucien s'exécuta, et les boucles de métal se refermèrent sur ses jambes et ses bras.

 

- Maintenant l'Ascension va commencer. Processus de Cyberconversion enclenché! »

 

Et alors, un visage de Cyberman se baissa pour observer le marchand, accrochée à un mat métallique et amovible. Et d'autres bras sortirent du plafond, portant des seringues, des scies circulaires et d'autres engins plus ou moins tranchants. Des engins qui commençaient à tourner autour du Rémoxain, et à s'activer. Et à se rapprocher. Et quelques secondes plus tard, un cri de douleur indescriptible déchira l'air, au moment où les premières scies atteignirent la peau de l'élu...

 

[http://img4.hostingpics.net/pics/320808Episode6P1Fin.jpg]

Laisser un commentaire ?